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Table des matières
Modalité d'organisation d'un débat
Suppression de la profession d'avoué
Palais de justice de Strasbourg
Indemnisation des sinistrés de la sécheresse de 2003
Formation professionnelle tout au long de la vie
Amélioration du système des brevets européens
Imposition des emprises militaires dans le Cher
Sanction des dépassements de vitesse
Desserte de la plate-forme de Roissy
Règlement européen OSP et lignes ferroviaires
Plate-forme hospitalière de Melun
Réorganisation du réseau des Creps
Rénovation de la cité Edmond Michelet
Communication audiovisuelle (Urgence - Suite)
Discussion des articles (Suite)
SÉANCE
du mardi 13 janvier 2009
50e séance de la session ordinaire 2008-2009
présidence de M. Roger Romani,vice-président
Secrétaires : M. François Fortassin, M. Marc Massion.
La séance est ouverte à 10 heures.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Modalité d'organisation d'un débat
M. le président. - Hier, le Gouvernement a inscrit une déclaration de politique générale sur le Proche-Orient à l'ordre du jour prioritaire du mercredi 14 janvier, à 21 h 30. Pour le débat suivant la déclaration, sur proposition du président du Sénat et en accord avec les groupes politiques, nous pourrions attribuer un temps de parole de deux heures aux orateurs des groupes et de quinze minutes au président de la commission des affaires étrangères. Les inscriptions de parole devraient être faites avant demain, 11 heures.
Il n'y a pas d'opposition ? Il en est ainsi décidé.
Questions orales
M. le président. - L'ordre du jour appelle les réponses du Gouvernement à des questions orales.
Bruit des avions militaires
M. Claude Domeizel. - Durant tout le mois de novembre, les Alpes de Haute-Provence ont subi le survol quotidien d'avions Rafale et Mirage 2000. Les nuisances sonores ainsi créées sont considérables et insupportables. La réglementation autorise-t-elle ces survols intempestifs à très basse altitude ? Est-il normal que le parc naturel régional du Lubéron ne soit pas protégé ? Les parcs nationaux ne peuvent pas, eux, être survolés, même à l'occasion de grandes manifestations comme le Tour de France...
M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants. - Vous appelez mon attention sur les préoccupations exprimées par les habitants du territoire des Alpes de Haute-Provence qui subiraient d'importantes nuisances sonores occasionnées par des manoeuvres d'aéronefs de type Rafale et Mirage 2000. C'est une préoccupation que nous pouvons comprendre ; vivant moi-même près d'une base aérienne, je sais de quoi il retourne.
Je voudrais vous assurer que les équipages de l'armée de l'air effectuent leur activité aérienne sur l'ensemble du territoire national dans le respect des règles de vol prescrites par la réglementation en vigueur. Ainsi, le territoire peut être survolé, hors agglomérations et zones réglementées, à une hauteur minimale de 150 mètres. Le parc naturel régional du Lubéron n'est protégé par aucun statut particulier y interdisant le survol en basse altitude. Du 20 octobre au 7 novembre 2008 s'est déroulé dans votre département l'exercice Casex P8 qui a rassemblé un grand nombre d'aéronefs de combat français et étrangers, avec simulations de passe de tir au profit d'un stage de formation des contrôleurs air avancés. Les missions effectuées en moyenne et basse altitudes ont nécessité la mise en oeuvre de trois zones réglementées temporaires dans la région de Manosque. Les appareils ont évolué à grande vitesse entre le sol et 6 000 mètres.
L'armée de l'air est appelée à réaliser certaines de ses missions opérationnelles dans des zones montagneuses, en particulier pour s'entraîner aux opérations aériennes en Afghanistan. Consciente de la gêne sonore et des risques que peuvent occasionner ces passages d'avions, elle planifie l'entraînement des équipages en tenant compte de la meilleure répartition possible au-dessus du territoire, afin que l'effet de dilution atténue la gêne. Ces entraînements, limités au strict nécessaire, sont toujours effectués dans un souci d'assurer le meilleur niveau de sécurité et de réalisme tout en limitant, autant que faire se peut, les désagréments subis par les populations.
M. Claude Domeizel. - Si je comprends bien, nous sommes appelés à subir d'autres survols comparables, avec les nuisances importantes qu'ils causent... Il faudrait changer de lieu le plus souvent possible.
M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État. - On le fera.
Écoles de l'ONAC
M. Jean-Pierre Demerliat. - Créées en 1916 dans le but de réinsérer professionnellement les mutilés de la Grande guerre, les écoles de reconversion professionnelle de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre se sont ouvertes à d'autres catégories de personnes : les mutilés du travail en 1924, les travailleurs handicapés en 1962, les agriculteurs en reconversion en 1965, les enfants de harkis en 1989 et les militaires en reconversion en 1997. Les neuf écoles réparties sur le territoire national accueillent aujourd'hui près de 2 000 stagiaires. Si les ressortissants du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre y ont encore leur place, l'essentiel de leur effectif est désormais constitué de handicapés.
L'école Féret du Longbois, à Limoges, est le seul établissement de ce type dans le grand centre ouest. L'intérêt de sa localisation n'est plus à démontrer : 60 % des stagiaires sont issus du Limousin et des départements limitrophes. Au fil des ans, ces écoles ont su développer un véritable savoir-faire pour l'accompagnement de la personne en reconversion. Elles proposent une cinquantaine de formations dans divers secteurs d'activité. Leurs résultats sont exemplaires, avec un taux de réussite aux examens supérieur à 85 % et un taux d'insertion professionnelle de 70 %.
Aujourd'hui, le personnel de ces établissements est inquiet. Dans le cadre de l'élaboration du deuxième contrat d'objectifs et de moyens de l'Onac, vous avez en effet engagé, monsieur le ministre, une réflexion sur la modernisation de la gestion de ces écoles. Parmi les solutions à l'étude figure la possibilité de les confier à une filiale de l'Onac. Vous avez évoqué devant notre assemblée, le 28 novembre, lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2009, la possibilité d'un regroupement de ces écoles dans une ou plusieurs fondations. Si tel devait être le cas, cela reviendrait à une privatisation avec toutes ses conséquences sur l'offre de formation et sur le statut du personnel.
Je souhaite donc savoir où en est la réflexion sur la modernisation de la gestion des écoles de reconversion professionnelle et vers quelle solution s'oriente le Gouvernement.
M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants. - La volonté du Gouvernement est évidemment de conforter ces écoles dans leur mission. Elles doivent toutefois évoluer en élargissant leur domaine d'intervention à d'autres publics plus éloignés de l'emploi. Pour obtenir les moyens nécessaires à cette évolution, l'Onac va s'engager dans la négociation d'un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens avec la direction générale des affaires sociales. Les modalités de gestion de ces écoles doivent évoluer pour qu'elles puissent bénéficier pleinement des souplesses de gestion offertes par leur caractère d'établissement médico-social sans pour autant rompre le lien avec le monde combattant et ses valeurs. Différentes hypothèses, dont le recours à une fondation, sont à l'étude et doivent déboucher sur une solution définitive pour le 31 décembre 2011. Cette évolution aura pour cadre le deuxième contrat d'objectifs et de moyens qui sera présenté le 27 janvier prochain au conseil d'administration de l'Onac.
Nous avons donc le temps devant nous pour mener à bien la réflexion. Ce dossier me tient à coeur, je le regarde de près. Je ferai bientôt une tournée de ces écoles pour me rendre compte de visu de la situation et des perspectives d'évolution. Loin de moi l'idée de jeter le bébé avec l'eau du bain !
Ces écoles ont un excellent potentiel. Cela n'interdit pas de les faire évoluer, mais il n'y a pas matière à s'inquiéter.
M. Jean-Pierre Demerliat. - Vos propos me rassurent : les implantations géographiques ne semblent pas menacées. Les élèves sont des adultes, ils ont conjoint et enfants ; les personnels, les vacataires surtout, n'ont pas une mobilité aisée. Il faut donc éviter les déménagements d'établissements. Mais vous pouvez en créer d'autres.
Suppression de la profession d'avoué
M. Jean-Pierre Godefroy. - La Chancellerie a annoncé la suppression de la profession d'avoué au 1er janvier 2010. Cette décision a surpris tout le monde. Il y aura un préjudice à la fois économique et humain, pour les professionnels comme pour les justiciables. Le bon fonctionnement de la justice en sera altéré. Il y a aussi les 3 000 salariés, répartis sur l'ensemble du territoire...
Les avoués, officiers ministériels, représentent les parties devant les cours d'appel. Ils ont l'exclusivité des conclusions devant cette juridiction. Ils sont ainsi des spécialistes du droit judiciaire privé -l'activité des avocats est marginale devant les cours d'appel en matières civile et commerciale. Les avoués exercent donc des compétences particulières et leur reconversion en avocats ne sera ni automatique ni simple. Ceux qui ont été avocats avant de devenir avoués savent qu'ils exercent une tout autre profession, centrée sur la technique spécifique du procès en appel.
Les collaborateurs seront placés dans une situation très délicate ; ce sont à 90 % des femmes qui risquent de se trouver sans travail ni ressources. Les avoués n'ont pas de clientèle propre ; les dossiers leur sont adressés par les avocats pour le compte de leurs clients
Une étude préalable a-t-elle permis d'évaluer l'impact de cette décision ? Une concertation a-t-elle enfin été engagée avec les professionnels ? Des mesures sont-elles envisagées afin d'atténuer l'impact économique et social ? Un processus d'indemnisation a-t-il été prévu ?
Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice. - La réforme est envisagée depuis 1971. La fonction d'avoué a été supprimée dans les TGI, mais subsiste dans les cours d'appel. La suppression était annoncée de façon récurrente, le Président de la République l'a confirmée, nous la mettons en oeuvre, au nom de l'efficacité et de la bonne compréhension de la justice. Un avocat et un avoué, le justiciable s'y perdait un peu... et cela lui coûtait cher !
La réforme unifie les professions d'avoué et d'avocat. L'achat d'une charge d'avoué ne sera pas compatible avec la directive services qui s'appliquera au 1er janvier prochain : les mutations sont inéluctables. Mais grâce à elles, l'appel sera moins onéreux, la place de l'avocat sera renforcée. Les conclusions de la commission Guinchard sur la déjudiciarisation de certains contentieux préconisent l'interlocuteur unique en appel comme en première instance. Les avoués deviendront automatiquement avocats, ils seront indemnisés pour la perte de leur charge. Leurs collaborateurs bénéficieront d'une aide personnalisée et d'un accompagnement dans leur reconversion professionnelle, afin qu'ils trouvent leur place dans cette nouvelle organisation. Je les ai rencontrés dès le début de notre réflexion. Quant au Parlement, il sera bien sûr saisi. Mais nous achevons actuellement la première phase, celle de consultation et d'écoute.
J'ai demandé aux avoués un rapport, qu'ils m'ont remis le 20 octobre dernier. Il servira de base à l'indemnisation, il me permet aussi de bien cerner les préoccupations des professionnels et d'évaluer l'impact des mesures. J'ai chargé un haut magistrat, M. Mazard, avocat général à la Cour de cassation, de rencontrer sur tout le territoire les représentants des avoués : ces entretiens se déroulent dans un bon climat. La réforme est inévitable, prévue de longue date et elle est dans l'intérêt des justiciables.
M. Jean-Pierre Godefroy. - Prêtez la plus grande attention aux collaborateurs, qui se trouveront en situation très difficile : on n'évitera pas les licenciements... Si l'on veut indemniser l'ensemble des préjudices, il en coûterait quelque 900 millions.
Suicides en prison
Mme Anne-Marie Payet. - Les suicides en prison ont été nombreux dans la période récente. Quatre détenus ont mis fin à leurs jours dans les prisons du nord-est de la France durant le seul mois d'octobre. Au total, 115 suicides sont à déplorer en 2008 et déjà quatre depuis le 1er janvier 2009. En 2008, leur nombre a augmenté de 20 % par rapport à 2007 et parmi les 42 pays membres du Conseil de l'Europe, la France affiche le taux le plus élevé. Cela tient entre autre à la surpopulation carcérale et aux rythmes de travail inadaptés pour le personnel pénitentiaire. Il est urgent d'améliorer la prévention et le repérage : au moins 25 % des détenus présentent des troubles mentaux.
L'Académie nationale de médecine réunie le 21 octobre dernier sur le thème de la santé en prison a dénoncé l'insuffisante prise en charge psychiatrique et les défauts d'organisation. Il n'existe pas toujours de service hospitalier médico-psychologique régional et il n'y a de toute façon pas d'hospitalisation psychiatrique dans ces services. Dès lors l'Académie recommande de créer un tutorat animé par des bénévoles pour préparer la sortie et le suivi après la prison, d'améliorer la formation des experts psychologiques et psychiatriques, de créer un statut de « médecin pénitentiaire ». Quelles suites le Gouvernement réservera-t-il à ces propositions ?
Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice. - Il n'y a pas plus de suicides que dans le passé, mais on est aujourd'hui plus vigilant, plus sensible à ce grave problème. Un suicide en prison, c'est toujours un drame pour le gouvernement en place et singulièrement le garde des sceaux. Notre volonté de réduire le nombre des suicides de détenus est sans faille. Le projet de loi pénitentiaire qui vous sera soumis en février comprendra des mesures en ce sens. Le programme national de prévention du suicide en milieu carcéral met l'accent sur l'amélioration du repérage, l'accueil des personnes écrouées, l'aménagement des cellules, l'accompagnement du personnel, des codétenus et de la famille lorsqu'un drame a eu lieu. Sur 23 000 surveillants, 12 500 ont déjà suivi une formation à la prévention du suicide. Le ministère de la santé a mis en place des stages pluridisciplinaires.
La loi de 1994 a supprimé les services médicaux pénitentiaires, transférés au secteur public hospitalier. En matière de soins psychiatriques, 26 établissements pénitentiaires ont accès à des services médico-psychologiques régionaux qui peuvent recevoir des détenus en hospitalisation. Les autres établissements pénitentiaires bénéficient de l'intervention des secteurs de psychiatrie -175 unités de consultations et de soins ambulatoires.
Le dispositif de prise en charge des pathologies et troubles mentaux a été amélioré, même s'il reste insuffisant. Le nombre de suicides rapporté à la population carcérale a baissé. Mais les progrès, réels, restent fragiles. On a compté 115 suicides en 2008, contre 96 en 2007, 93 en 2006 et 122 en 2005. Le dispositif de prévention à l'égard des mineurs a été renforcé et une procédure de détection spécifique mise en place depuis le 1er novembre dernier ; des pédopsychiatres référents ont été désignés. En outre un film de formation à destination des personnels a été réalisé. J'ai enfin confié le 3 novembre 2008 au docteur Albrand la présidence d'une commission chargée de faire le bilan de la lutte contre le suicide en milieu carcéral et de me faire des propositions concrètes ; ses conclusions devraient être connues prochainement.
Mme Anne-Marie Payet. - Je me félicite de votre détermination. Il est urgent de mettre en application les recommandations de l'Académie de médecine. N'oublions pas que la France a été condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme pour traitement inhumain et dégradant après le placement à l'isolement d'un détenu souffrant de troubles mentaux puis son suicide.
Palais de justice de Strasbourg
M. Roland Ries. - Je souhaite attirer votre attention sur l'avenir du Palais de justice de Strasbourg, classé monument historique en 1992, qui fait débat depuis plus de dix ans. En 1997, un audit a conclu à la nécessité de le réhabiliter. Un programme élaboré en 2001 par l'architecte Dubois proposait une réhabilitation avec extension sur site, abandonné en 2008 au profit de l'étude de la création d'une cité judiciaire, sans toutefois que soit écarté le projet de réhabilitation avec extension sur un site annexe proche, l'ancien commissariat de la Nuée Bleue ou le parking Kroely.
L'Agence pour l'immobilier de la justice (Apij) a présenté un document de travail lors d'une réunion convoquée à mon initiative le 11 décembre dernier. Plusieurs scénarios ont été avancés, retenant divers critères d'ordre urbanistique, de localisation dans le tissu urbain, de desserte ou d'accès à l'hôtel de police et à la prison de l'Elsau. L'aspect pécuniaire semble cependant déterminant. Le coût de la réhabilitation du palais de justice avec extension sur un site annexe proche est estimé entre 70 et 80 millions d'euros, contre 48 pour le déménagement sur un site vierge, cette dernière solution étant visiblement privilégiée par l'Apij. Je souligne que le coût de la reconversion du palais de justice actuel n'a pas été pris en compte.
Je vous demande, madame la ministre, de me faire connaître les orientations et arbitrages budgétaires retenus. Une réponse précise de la Chancellerie permettrait d'arriver à un consensus au plan local et d'envisager un aboutissement rapide du dossier. Que compte faire en outre le Gouvernement pour valoriser le patrimoine historique dont l'État est propriétaire, notamment l'actuel palais de justice ?
Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice. - L'immobilier de la justice, qui a pris beaucoup de retard, a bénéficié dans le budget 2009 d'un effort sans précédent : 210 millions d'euros seront consacrés à la réhabilitation et à la construction de TGI. Évidemment, les contraintes budgétaires imposent des arbitrages et je me préoccupe au premier chef des tribunaux les plus dégradés et des conditions de travail des personnels.
S'agissant du palais de justice de Strasbourg, quatre possibilités se sont dégagées de la réunion du 11 décembre : la réhabilitation avec extension sur le parking Kroely, qui coûterait 87 millions d'euros ; la réhabilitation avec extension sur l'ancien commissariat de la Nuée Bleue, pour 70 millions ; la construction neuve, pour 49 millions ; enfin le déménagement sur le site Kroely pour 64 millions. Si on veut offrir à la justice des conditions décentes de travail dans un délai performant, le critère de la maîtrise des coûts reste déterminant, même si d'autres doivent être pris en compte, la qualité de la construction, sa localisation dans le tissu urbain, ses possibilités d'adaptation, la liaison avec l'hôtel de police et la prison. Je conviens que le coût de la reconversion du palais actuel n'a pas été considéré, qui dépend fortement de l'usage futur du bâtiment.
La réunion du 11 décembre a permis de recueillir les avis des acteurs locaux dans l'objectif de parvenir à un consensus. J'ai demandé à mon cabinet d'en organiser une nouvelle prochainement. J'espère que les décisions à venir conviendront à tout le monde.
M. Roland Ries. - Je vous remercie de votre réponse. Le statu quo n'est plus tenable, il faut qu'une décision soit prise rapidement. Dans l'hypothèse où serait retenue la création d'une cité judiciaire, j'attends de la prochaine réunion des précisions sur la valorisation de l'actuel palais de justice. J'ajoute que le barreau de Strasbourg souhaite que la cité, si cité il doit y avoir, reste au coeur de la ville ; le maire que je suis partage cette préoccupation.
Indemnisation des sinistrés de la sécheresse de 2003
Mme Marie-France Beaufils. - Mme la ministre me dira sans doute pourquoi la réponse à ma question est passée du ministère de l'intérieur à celui de l'économie... Cinq longues années se sont écoulées depuis 2003, plus longues encore pour les sinistrés victimes des glissements de terrain d'alors. Les habitations en zones argileuses ont été affectées et des milliers de familles vivent toujours dans des maisons lézardées. Alors que les dégâts ont été estimés à 1,5 milliard d'euros, la procédure exceptionnelle d'indemnisation n'a permis de dégager à ce jour que 218,5 millions ; autant dire que le compte n'y est pas.
Les habitants ne comprennent pas plus le silence que les promesses. Ici même, le 5 décembre 2007, Mme Alliot-Marie déclarait : « Par ailleurs, je viens d'obtenir l'accord de Bercy pour répondre au problème posé. Ainsi, dans un délai assez court, sera résolu un problème qui se posait depuis longtemps. » Rien n'a été fait depuis, sinon le rapport Boutin, demeuré semble-t-il confidentiel, puisque je n'en ai pas plus été destinataire que nombre de mes collègues. Pas un euro de plus n'a été obtenu pour les sinistrés.
Dans le cadre des projets de loi de finances pour 2008 et 2009 des amendements ont été déposés pour augmenter l'indemnisation des sinistrés. Nous les avons soutenus. Le 27 novembre dernier, M. Bussereau s'engageait à relayer notre demande auprès de Mme la ministre de l'intérieur ; le 18 décembre, M. le rapporteur général Marini reconnaissait que des demandes d'indemnisation tout à fait substantielles demeuraient en suspens. Madame la ministre, pouvez-vous apporter une note d'espoir à tous les sinistrés non indemnisés à ce jour ?
Nous avons débattu ici le 16 juin 2005 d'une proposition de loi tendant à améliorer la transparence et l'équité du régime des catastrophes naturelles.
Ce texte pourrait être encore perfectionné pour permettre une meilleure prise en charge des sinistrés. Nous n'en avons pas de nouvelles... Il convient pourtant de renforcer la prévention et d'inciter tous les départements concernés à élaborer des plans de prévention des risques naturels « tassements différentiels », afin d'éviter les constructions sur des terrains argileux sujets à retrait-gonflement.
Je suis inquiète de l'indemnisation des victimes de mouvements de terrain. Le dernier rapport des inspections générales propose de renvoyer les conditions de prise en charge au marché. Une autre préconisation serait de reprendre la procédure exceptionnelle mise en place en 2006 pour n'indemniser que les sinistres les plus lourds. Quand l'Assemblée nationale débattra-t-elle de la proposition de loi que nous avions adoptée en 2005 et quelles perspectives le Gouvernement envisage-t--il ?
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur. - Le territoire métropolitain a connu en 2003 une sécheresse exceptionnelle. Dans un premier temps, le Gouvernement a adapté les critères de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, et après cet assouplissement 4 300 communes en ont bénéficié. Au titre de la solidarité nationale, le Gouvernement a ensuite mis en oeuvre une procédure exceptionnelle d'indemnisation dotée de 118 millions en loi de finances initiale pour 2006 et de 218,5 millions en loi de finances rectificative. Au total, 80 % des communes ayant demandé la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle ont bénéficié d'une indemnisation. Compte tenu des moyens déployés, le Gouvernement n'envisage pas de dispositif additionnel.
Le rapport relatif à la sécheresse 2003 établi en application de l'article 68 de la loi du 5 mars 2007 a été transmis le 25 janvier 2008 aux Assemblées.
Le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles a fait l'objet de travaux interministériels sur la base des consultations menées en 2006 et du rapport des inspections. Les propositions qui pourraient être soumises au Parlement courant 2009 auront une portée plus large que la proposition de loi. L'objectif serait d'améliorer la transparence de la procédure et d'encourager la prévention tout en maintenant la solidarité nationale.
Mme Marie-France Beaufils. - J'espère que le rapport qui a été transmis pourra nous être communiqué car pour l'instant, je reste sur ma faim. J'observe que des sinistrés ne sont toujours pas indemnisés et que des contentieux restent en suspens -M. Biwer, qui était à l'origine de la proposition de loi, pourrait le confirmer. On ne peut donc pas dire que le sujet est clos.
J'ai entendu que le Gouvernement ferait des propositions, qui iraient au-delà du texte que nous avons débattu ici. Je suis très sensible à la nécessité de le faire sans attendre, afin que des gens ne continuent pas à construire sur des terrains argileux et se retrouvent ensuite dans des situations difficiles. Il y a urgence à améliorer la prévention.
Formation professionnelle tout au long de la vie
M. Claude Biwer. - J'ai été à l'origine de la proposition de loi qui vient d'être évoquée et qui avait été adoptée à l'unanimité. Nous attendons que l'Assemblée nationale la discute et que les choses évoluent.
Se fondant sur une étude portant sur une centaine d'organismes publics et privés, la Cour des comptes a dans un rapport présenté le 1er octobre dernier, mis en évidence l'inefficacité du système de formation professionnelle tout au long de la vie et l'urgence de sa réforme. La formation initiale ne garantit pas une bonne insertion sur le marché du travail et la formation continue bénéficie d'abord à ceux qui sont déjà insérés. Si les financements sont abondants, 34 milliards, ils sont insuffisamment mutualisés et les circuits sont peu contrôlables. Le rapport de notre collège Carle avait déjà dénoncé les dysfonctionnements du système, sa complexité, son cloisonnement et ses corporatismes ; il mettait l'accent sur le fait qu'il profitait aux grandes entreprises et aux salariés les plus qualifiés.
Des propositions ont été faites, pour adapter l'offre, clarifier la collecte, assurer une meilleure répartition, et le Sénat a souhaité que les organisations patronales et syndicales ne puissent plus émarger aux fonds de formation.
Syndicats et patronat ont négocié et, fait nouveau, le Medef a reconnu qu'il fallait simplifier des dispositifs devenus illisibles. La négociation a abouti le 7 janvier à la création d'un fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels doté de 900 millions, mais ce progrès ne paraît pas à la hauteur des besoins. Le Président de la République avait en effet souhaité que les 5,7 milliards de la formation professionnelle bénéficient d'abord à ceux qui en ont le plus besoin. Je regrette aussi que l'on ne se soit pas attaqué à la multiplication des organismes de formation. Je souhaite donc que les choses progressent. Qu'en pense le Gouvernement ?
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur. - Différents rapports ont rappelé la nécessité de réformer la formation professionnelle. Comme l'a souhaité le Président de la République, le Gouvernement a engagé une vaste réforme avec l'ambition, plus nécessaire que jamais en tant de crise, de servir l'emploi et la compétitivité. Depuis un an, tous les acteurs ont été associés à la réforme : le Gouvernement a souhaité la concertation la plus large et a fait confiance au dialogue social pour que se dégagent des solutions innovantes. Nous poursuivions cinq objectifs : mieux orienter les fonds vers les demandeurs d'emploi et les salariés peu qualifiés, par exemple grâce à un fonds spécifique, souple d'utilisation et suffisamment doté ; développer la formation dans les PME et les TPE ; mieux insérer les jeunes sur le marché du travail ; mieux informer, orienter et accompagner les salariés et demandeurs d'emploi et non leur faire subir la complexité -la création de Pôle emploi va dans le même sens ; mettre la transparence et l'évaluation au coeur du système.
Le Gouvernement salue les partenaires sociaux dont les négociations, après seulement quatre mois, ont abouti mardi dernier. Outre un accord sur le chômage partiel et un projet de convention pour le reclassement personnel, le projet d'accord sur la formation professionnelle vise à former chaque année 500 000 salariés supplémentaires parmi les moins qualifiés et 200 000 chômeurs de plus qu'aujourd'hui. Ces objectifs, qui seront appuyés par un fonds de sécurisation des parcours professionnels, vont dans le bon sens.
Le Gouvernement va examiner de près ce projet et verra, après que les partenaires se seront prononcés, d'ici à la fin du mois, sur la signature de ce projet, quelles dispositions législatives sont nécessaires à sa mise en oeuvre.
M. Claude Biwer. - Je vous remercie de ces précisions et insiste sur la nécessité d'accompagner les salariés en amont. On n'obtient trop souvent l'information que lorsque l'on est déjà face au mur. Il serait préférable de savoir avant même que ne surgissent les difficultés, que l'on peut être aidé.
Amélioration du système des brevets européens
M. Richard Yung. - Je souhaiterais, madame la ministre, connaître les évolutions récentes et les perspectives sur les deux dossiers du brevet communautaire et du système juridictionnel des brevets.
Le brevet communautaire, qui permet de disposer d'un seul titre européen au lieu d'une multiplicité de brevets nationaux, constitue un réel progrès, attendu depuis plus de 30 ans. Il était paradoxal que nous ayons été capables de créer un marché unique, une monnaie unique, une banque centrale unique, et que la résistance persistât sur cette question du brevet.
Des progrès importants ont été accomplis sous la présidence slovène -sur les questions de langues et de traduction, sur la répartition des taxes annuelles, qui représentent une masse importante de liquidités, sur le système du tribunal, puisqu'il est acquis que les tribunaux nationaux peuvent traiter de la question.
Pour ce qui est du système juridictionnel, nous restons cependant au milieu du gué. Dans le système actuel, chaque pays doit connaître de la validité du brevet et de la question de la contrefaçon, si bien qu'un même brevet peut aller devant le tribunal de Messine, d'Helsinki, de Corte, au risque de voir se créer des jurisprudences contradictoires sources d'insécurité juridique et de multiplier les coûts pour les entreprises, qui réclament une unification. La France avait alors beaucoup insisté pour que la CJCE tienne lieu de Cour de cassation du système, mais l'Allemagne s'y oppose au motif que cette cour ne disposerait pas des compétences techniques nécessaires.
Il semble que sous la présidence française, aucun progrès n'ait été fait, comme si cette question n'était pas parmi ses priorités. Quelles sont les perspectives du Gouvernement pour faire avancer, peut-être dans six mois grâce à la future présidence suédoise, ces deux dossiers ?
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur. - Les droits de la propriété intellectuelle et leur protection représentent, dans un monde globalisé, un avantage compétitif clé pour les entreprises et fondamental pour la valorisation de la recherche, de l'innovation, de la création. L'ensemble des dossiers qui lui sont liés font l'objet d'un engagement fort du ministère des finances et de l'ensemble des ministres concernés -MM. Chatel, Novelli et moi-même.
Vous m'interrogez sur la question spécifique du brevet communautaire et du tribunal juridictionnel. Je puis vous dire que les choses ont avancé sous la présidence française, mais vous savez comme moi que plus on se rapproche du but, plus le consensus est délicat à obtenir.
Concernant le brevet communautaire, les discussions très riches ont porté principalement sur le régime linguistique applicable et sur la répartition des taxes annuelles de maintien en vigueur des brevets. Les travaux ont permis de dégager un large accord sur la nécessité de voir le brevet communautaire disponible à un coût abordable, pour un niveau de qualité élevé, assurant une sécurité juridique maximale pour les déposants. Un consensus s'est également dégagé quant à l'objectif de viabilité financière de l'Office européen des brevets, qui n'est cependant pas sans incidence sur le coût final du brevet...
Les débats ont été alimentés par les résultats préliminaires d'une étude de la Commission européenne sur les aspects économiques du brevet communautaire, qui apportent un éclairage précieux pour la suite des travaux.
Enfin, sur le système de règlement des litiges, la France a soumis à ses partenaires des documents révisés comprenant un projet d'accord pour la création d'un tribunal des brevets de l'Union européenne ainsi qu'un projet de statuts. Les débats sur ces deux textes ont permis d'apporter des améliorations et d'affiner leur articulation.
L'architecture générale du système juridictionnel des brevets est désormais stabilisée, avec des divisions décentralisées dans les États membres pour la première instance et une instance d'appel centralisée. Cependant plusieurs questions, notamment celle du régime linguistique et sur le rôle de la Cour de justice des communautés européenne, doivent encore faire l'objet d'un examen approfondi afin de parvenir à un consensus.
Ainsi les progrès enregistrés par la présidence française permettent de transmettre à la présidence tchèque les éléments nécessaires à la recherche d'un accord que nous souhaitons le plus rapide possible.
J'ajoute qu'en matière de lutte anti-contrefaçon, la présidence française a permis de doter l'Union européenne d'un plan d'action intégré pour la période 2009-2011. Une résolution du Conseil a été adoptée permettant de mieux protéger les droits de propriété intellectuelle des entreprises européennes. Il s'agit d'un engagement fort des États membres pour lutter de manière coordonnée contre la contrefaçon grâce à la mise en place d'un réseau efficace de coopération entre les services administratifs concernés des États membres, à la création d'un observatoire européen de la contrefaçon et du piratage, au développement d'actions de sensibilisation et de communication auprès des consommateurs, en particulier les plus jeunes, dans l'ensemble des pays de l'Union.
Ces rappels vous confirment l'intérêt que la France attache à ces sujets.
M. Richard Yung. - Sans entrer dans la polémique, j'observe que tout ce que vous avez rappelé a été obtenu sous présidence slovène.
On nous dit que depuis, l'Espagne fait des difficultés sur la question de la langue, que l'Allemagne fait semblant d'être favorable au dispositif qu'elle récuse.... Ce n'est là rien d'autre que le lot commun des négociations internationales. Tous les éléments sont sur la table pour permettre de trancher politiquement. Je demande que le Gouvernement s'engage plus résolument.
Imposition des emprises militaires dans le Cher
M. Rémy Pointereau. - Depuis plus de 15 ans, des démarches sont entreprises pour que le ministère de la défense soit assujetti aux impôts locaux, notamment la taxe foncière sur les propriétés non bâties, pour les emprises militaires qu'il utilise et qui sont productives de revenus. En effet les communes concernées sont fiscalement pénalisées, alors qu'elles doivent subir des contraintes d'urbanisme et des sujétions liées à la circulation des biens et des personnes
C'est le cas dans le Cher où est implanté un vaste polygone d'essai. Certes, l'impôt foncier est acquitté pour les parcelles louées aux agriculteurs, mais pour d'autres même si le ministère y exerce des activités productives de recettes, il n'est pas assujetti, en vertu de l'article 1994 du code général des impôts, qui dispose que sont exonérées de la taxe sur les propriétés non bâties les propriétés publiques affectées à un service public d'utilité générale non productive de revenus. Or, il y a bien recettes, même si celles-ci sont indirectes, puisque l'ETBS de Bourges permet de faire des essais et de perfectionner des munitions vendues ensuite à des États du monde entier, pour un bénéfice évalué à 2 à 3 millions.
Ce n'est pas beaucoup, mais c'est important pour les communes concernées.
Quelles sont les intentions du ministre du budget en la matière ? Des instructions seront-elles données afin que les articles 1382 et 1394 du code général des impôts soient appliqués plus strictement ou pour que les communes soient indemnisées à la même hauteur ?
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur. - Je vous prie d'excuser l'absence d'Éric Woerth, ministre du budget.
Les bâtiments et terrains de l'État sont exonérés de taxe foncière lorsqu'ils sont affectés à un service public et ne produisent pas de revenus. Cette exonération s'applique au service public de la défense nationale : les polygones sont présumés en remplir les conditions, qui sont néanmoins interprétées strictement afin de préserver les ressources des collectivités territoriales. Ainsi, les terrains militaires faisant l'objet d'une amodiation autorisant le pacage des animaux ou la récolte des herbes sont considérés comme productifs de revenus.
L'assujettissement ou non d'une propriété bâtie ou non bâtie résulte de l'analyse par les services locaux, sous le contrôle du juge de l'impôt, de la situation de fait. Le prédécesseur d'Éric Woerth avait déjà appelé l'attention de Mme Alliot-Marie, alors ministre de la défense, sur la nécessité d'une étroite collaboration entre les services fiscaux et les responsables locaux du ministère de la défense. M. Woerth demandera à ses services de s'assurer du bien-fondé des exonérations de taxes foncières pour les terrains militaires et vous tiendra, monsieur le sénateur, personnellement informé des résultats de cette consultation.
M. Rémy Pointereau. - Je vous remercie pour ces informations, qui ne répondent cependant que partiellement à mon attente. Il est inquiétant d'observer que l'Office national des forêts (ONF) emboîte le pas au ministère de la défense en cherchant à faire l'impasse sur les forêts domaniales, ce qui représenterait des dizaines de millions d'euros de diminution de recettes pour les communes. C'est inacceptable. L'État doit remplir ses obligations et montrer l'exemple.
Sanction des dépassements de vitesse
Mme Anne-Marie Escoffier. - La réglementation des excès de vitesse me paraît peu adaptée à ceux qui exercent une activité professionnelle nécessitant l'utilisation d'un véhicule. Le combat mené par les pouvoirs publics contre ceux qui mettent en danger la vie de nos compatriotes est tout à fait légitime et je ne conteste pas les sanctions prenant la forme d'amendes. En revanche, les retraits de points pour de légers dépassements peuvent, au fil des procès-verbaux, devenir dramatiques pour un salarié, un chef d'entreprise, un médecin n'ayant d'autre moyen de transport que l'automobile.
Je suggère donc de remplacer les retraits de points, qui aboutissent inévitablement à la suppression du permis de conduire, par un acte citoyen, un travail d'intérêt général qui servirait tout autant de leçon aux contrevenants. Par exemple, un don obligatoire de sang -en l'absence de contre-indication médicale- aiderait à augmenter le nombre de donneurs, actuellement insuffisant pour satisfaire la demande des hôpitaux. On peut aussi imaginer, madame la secrétaire d'État à l'écologie, une participation à l'entretien des rivières ou des forêts...
Certes, les travaux d'intérêt général ne constituent, à ce jour, que des peines complémentaires et il faudrait probablement modifier la législation si le Gouvernement retenait ma suggestion. Mais cette question mérite d'être posée avant de faire l'objet d'un débat dans le cadre d'une discussion législative. Madame le ministre, j'écouterai votre réponse avec le plus grand intérêt à l'heure où le Gouvernement entend lutter contre la crise en favorisant le marché automobile.
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie. - Veuillez excuser l'absence de Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports, qui participe ce matin à un comité interministériel de sécurité routière consacré à la réforme du permis de conduire.
L'essentiel des progrès accomplis pour la sécurité routière résulte du meilleur respect des limitations de vitesse grâce au contrôle-sanction et au permis à points. La réduction de la vitesse moyenne a contribué à hauteur de 75 % à la baisse du nombre de tués sur la route depuis 2002, mais le dépassement des limitations reste encore trop fréquent. L'Observatoire interministériel de la sécurité routière a estimé que si tous les conducteurs les avaient respectées, plus de 900 vies auraient pu être sauvées en 2007.
La suppression du retrait d'un point pour les petits excès de vitesse affecterait beaucoup l'efficacité du dispositif ainsi que la lisibilité du contrôle-sanction, au risque d'une augmentation de la vitesse moyenne. Un tel message irait à l'encontre de la politique de réduction de l'insécurité routière car les drames de la route ne découlent pas seulement des grandes infractions. La plupart des accidents résultent d'une petite complaisance avec la règle, telle une vitesse légèrement supérieure. Si l'infraction ne provoque pas toujours un accident, elle est en cause dans neuf accidents sur dix. Seuls 0,12 % des conducteurs ont leur permis invalidé à la suite de retraits successifs d'un ou deux points. Dans plus de 50 % des cas, le conducteur a eu un retrait d'au moins six points lors d'un seul contrôle.
Tout conducteur doit apprendre à gérer son capital de points. Il peut désormais récupérer un point au terme d'un an sans infraction et, s'il atteint ou franchit le seuil des six points, suivre un stage de sensibilisation à la sécurité routière lui permettant de recouvrer quatre points tous les deux ans. Il peut consulter son solde sur le service internet du ministère de l'intérieur, à la rubrique « Télépoints ». Si son permis n'a pas été invalidé, il bénéficie à nouveau de l'intégralité de ses points en l'absence d'infractions pendant trois ans.
Mme Anne-Marie Escoffier. - Je vous remercie pour ces informations statistiques, dont je n'avais pas connaissance. Toutefois, j'ai été confrontée à des situations difficiles de personnes ayant perdu leur emploi suite à des retraits de permis. Ne serait-il pas possible, dans certains cas, d'instaurer des peines de substitution pour tenir compte de situations particulières ?
Hausse des prix du bois
M. Francis Grignon. - Ma question est si simple que la réponse s'y trouve peut-être...
Une aide à la cuve a été créée par la loi de finances pour les ménages les plus modestes, qui doivent présenter leurs factures de fioul pour en bénéficier. Dans certaines régions, dont l'Alsace, beaucoup de foyers se chauffent au bois, pour lequel il est souvent difficile de se procurer un justificatif d'achat. Pourrait-on prévoir une aide à la cuve adaptée à ce cas ?
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie. - L'aide à la cuve a été instaurée pour aider les personnes les plus démunies à faire face à l'envolée du prix du fioul. Son économie n'étant pas liée à celle des produits pétroliers, le bois n'a pas été intégré dans ce dispositif. Toutefois, il bénéficie d'autres aides, dont une aide à l'investissement dans un appareil de chauffage au bois dispensée par un crédit d'impôt « développement durable », qui a été attribué pour plus de 400 000 appareils en 2007. Le projet de loi de finances pour 2009 proroge le système jusqu'en 2012 et l'étend aux bailleurs, et aux locataires et occupants à titre gratuit. L'installation d'un système de chauffage au bois fait par ailleurs partie des travaux éligibles à l'éco-prêt à taux zéro destiné à financer des travaux d'économies d'énergie.
Il est vrai que des dispositifs sociaux existent pour les autres énergies, le tarif de première nécessité pour l'électricité, le tarif social du gaz et la prime à la cuve pour le fioul. Ces sources d'énergie représentent l'immense majorité -85 %- des modes de chauffage en France. Mais votre question est légitime. On peut envisager de créer une aide destinée à l'ensemble des ménages modestes, quel que soit le combustible qu'ils utilisent.
M. Borloo et moi-même avons saisi nos services de cette question. Aucune décision n'a été arrêtée pour le moment. Plusieurs solutions sont à l'examen, dont nous tentons d'évaluer l'efficacité et le coût : l'extension des aides existantes à d'autres combustibles, ou l'harmonisation des dispositifs. Vous serez naturellement informé de l'avancée de nos travaux.
M. Francis Grignon. - Dans l'Est de la France dont je suis l'élu, les ménages qui se chauffent au bois sont souvent équipés depuis longtemps : il n'est donc pas question pour eux d'investir. Les plus modestes n'en auraient d'ailleurs pas les moyens.
Il importe de résoudre ce problème, car le bois est un mode de chauffage très efficace, qui chauffe trois fois : quand on le coupe, quand on le fend, et quand on le brûle ! (Rires)
Desserte de la plate-forme de Roissy
M. Michel Billout. - Je souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire sur les difficultés de vie quotidienne des 125 000 salariés de la plate-forme aéroportuaire de Roissy et de ses alentours, et sur la nécessité de mettre en place un plan d'urgence de transports en commun pour permettre l'accès aux différentes entreprises du pôle de Roissy.
Près de 90 % des salariés du pôle viennent travailler en voiture, ce qui s'explique par le fait que 75 % d'entre eux travaillent en horaires décalés, la nuit et le week-end. Certains sont même contraints de dormir dans leur voiture pour être à l'heure au travail, les axes routiers étant saturés en début de journée. Seul le développement de transports en commun rapides et abordables permettra d'améliorer la situation et de promouvoir un développement durable, respectueux de l'environnement. Depuis 35 ans, on n'a conçu l'aménagement de la ville de Roissy et de ses zones d'activité qu'en fonction du transport aérien, et l'on n'a pas suffisamment pris en compte les besoins des salariés des 750 entreprises qui y sont implantées. Les déclarations d'intention se multiplient, à l'occasion du Grenelle de l'environnement et des projets d'aménagement de la région Ile-de-France.
Certes, grâce à la décentralisation de la gestion du Syndicat des transports d'Ile-de-France (Stif) depuis deux ans et demi, d'importants projets ont pu être engagés : Tangentielle nord, RER B nord plus, schéma directeur du RER D. Il est indispensable qu'ils soient menés à bien au plus vite, comme le soulignait la commission Dermagne. Il faut accroître l'offre de transports en prenant en compte les horaires décalés, créer des gares supplémentaires, des couloirs de bus en site propre, un maillage régional et interrégional avec de nouvelles connexions contournant Paris. C'est d'autant plus nécessaire que le trafic aérien est appelé à se développer, et qu'en l'absence de troisième aéroport, celui de Roissy va continuer à se saturer. La création, projetée par Aéroports de Paris, d'un très grand centre commercial va encore augmenter les déplacements de population.
La question essentielle est celle du financement. L'État, qui est à l'origine de l'aménagement de ce secteur et des retards pris, et qui est le principal actionnaire d'Aéroports de Paris, ainsi que les entreprises bénéficiaires des richesses créées par l'afflux de salariés, doivent en prendre toute leur part.
Ce plan d'urgence est attendu par les salariés comme par les habitants des villes riveraines de l'aéroport. Rappelons que ce secteur a été identifié par le Gouvernement comme un pôle prioritaire de développement au cours des prochaines années. Quelles décisions concrètes le Gouvernement compte-t-il prendre ?
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie. - Je vous prie d'excuser l'absence de M. Bussereau, retenu au comité interministériel de sécurité routière. Je suis moi-même très sensible au problème que vous soulevez, puisque je suis l'élue d'un département proche de Roissy et qui connaît des difficultés analogues.
La définition de l'offre de service de transports collectifs en Ile-de-France est de la compétence du Stif. C'est donc à cet établissement public local, présidé par la région Ile-de-France et au sein duquel sont représentés la Ville de Paris et les départements d'Ile-de-France, qu'il revient de définir les dessertes de l'aéroport de Roissy Charles-de-Gaulle. Le Stif finance par exemple le service « Allo bus » qui permet aux salariés travaillant en heures décalées et résidant dans des communes proches de l'aéroport de bénéficier d'un service de transport collectif à la demande sept jours sur sept et vingt-quatre heures sur vingt-quatre.
L'État entend toutefois participer au développement des infrastructures de transports collectifs desservant cet aéroport qui représente un atout majeur pour la région capitale et le pays tout entier. C'est ainsi qu'à l'horizon 2012 ou 2015, « CDG Express » pourrait assurer entre la capitale et l'aéroport une liaison directe destinée aux usagers des transports aériens. Il est envisagé, dans le cadre du contrat de concession pour ce projet, de créer des abonnements ou des tarifs adaptés à la situation des personnels travaillant sur la plate-forme aéroportuaire.
L'État souhaite mener une politique volontariste, en collaboration avec la région et le Stif, comme en témoignent le plan de mobilisation pour les transports en Ile-de-France et les travaux menés pour créer de nouvelles liaisons. Le Gouvernement devrait proposer à la région dans les semaines qui viennent un schéma global.
S'agissant des déplacements des salariés qui travaillent à l'aéroport ou dans ses environs, un programme de modernisation du RER B, le projet « RER B nord plus », est prévu dans le cadre du contrat de projets 2007-2013. Cette opération, d'un coût de 260 millions d'euros, est financée par l'État à hauteur de 65 millions.
En outre, de nouvelles infrastructures permettront aux usagers et aux salariés de rejoindre plus facilement la ligne B du RER et donc d'accéder dans de meilleures conditions à l'aéroport. Plusieurs opérations vont être accélérées dans le cadre du plan « Espoir Banlieues » : la liaison dite du « barreau de Gonesse » entre la ligne D et la ligne B ; la Tangentielle nord qui reliera Sartrouville à Noisy-le-Sec en passant par la gare du Bourget sur la ligne du RER B ; le prolongement du tram-train Aulnay-sous-Bois - Bondy vers Clichy et Montfermeil. Ces nouvelles liaisons permettront aux salariés qui habitent dans l'Est de la région de rejoindre plus facilement l'aéroport et sa zone d'activité. L'État, la région et le Stif se sont également engagés à améliorer rapidement la qualité de service des bus desservant les quartiers sensibles.
M. Michel Billout. - Merci de votre réponse. Nous entendrons avec attention la présentation du plan que vous annoncez. J'insiste sur la nécessité d'une politique volontariste de la part de l'État, notamment en ce qui concerne le financement. Les retards se sont accumulés, en particulier lorsque le Stif était présidé par l'État. La commission Dermagne mise en place par M. Sarkozy recommandait elle-même d'aller beaucoup plus vite et plus loin. Il est vraiment urgent d'agir.
Règlement européen OSP et lignes ferroviaires
M. Hubert Haenel. - Ma question peut se résumer ainsi : dans quels délais et dans quelles conditions le règlement relatif à l'obligation de service public (OSP) s'appliquera-t-il en France ? Quand les conseils régionaux pourront-ils ou devront-ils mettre en concurrence l'opérateur historique sur tout ou partie des lignes dont ils ont la charge ?
Au cours d'une mission que j'ai menée sur l'état des lieux et l'avenir de la régionalisation ferroviaire, j'ai pu constater les divergences d'interprétation entre le ministère, la Commission européenne, certains conseils régionaux, la SNCF et les autres opérateurs de transport. Voici les principales questions que l'on peut soulever au sujet de ce règlement, qui prévoit une période de transition de dix ans à compter de son entrée en vigueur fin 2009.
L'application du règlement OSP débouchera-t-elle sur l'obligation pour l'autorité organisatrice de soumettre à la concurrence l'attribution des contrats de service public de transports ferroviaires régionaux et de longue distance ? Si tel n'est pas le cas et si les autorités organisatrices conservent la liberté de choisir l'opérateur et les modalités d'attribution du service public ferroviaire -par attribution directe ou appel d'offre- n'y aurait-il pas une incompatibilité entre ce texte communautaire et l'article 18 de la loi d'orientation des transports intérieurs (LOTI) du 30 décembre 1982 ? Serait-il alors nécessaire de modifier la LOTI avant la fin de la période de transition ?
Enfin, pouvez-vous confirmer que la date de 2014, prévue à l'article 8 du règlement, correspond à celle de l'élaboration du rapport de la Commission européenne sur l'état d'avancement de la réforme des contrats de service public et qu'elle n'a donc aucune conséquence sur le droit applicable ? Autrement dit, pouvez-vous nous assurer que les autorités organisatrices ne seront pas obligées, à compter de cette date, de recourir à la procédure de mise en concurrence ?
J'attends de votre réponse qu'elle fixe une fois pour toutes la doctrine gouvernementale en la matière.
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie. - Je vous prie une nouvelle fois d'excuser M. Bussereau.
Le règlement OSP du 3 décembre 2007 prévoit, après son entrée en vigueur le 3 décembre 2009, une période transitoire de dix ans afin que les autorités organisatrices et les opérateurs puissent se préparer progressivement à l'application aux marchés de transports urbains du modèle de concurrence régulée que connaît la province depuis de nombreuses années.
L'organisation des services ferroviaires ne sera pas substantiellement impactée par ce règlement. De fait, son objet est « d'instaurer un cadre légal en matière d'octroi de compensation et/ou de droits exclusifs pour les contrats de service public » aux termes de son considérant 25, et non d'anticiper une ouverture à la concurrence qui nécessiterait une modification de la directive 911440. Raison pour laquelle le règlement OSP prévoit, au sixième alinéa de son article 5, une exception à la règle générale d'appel d'offres pour l'attribution des contrats de chemin de fer, à l'exception notamment du métro et du tramway.
Le règlement OSP ne remet pas en question le monopole légal conféré à la SNCF par l'article 18 de la loi d'orientation des transports intérieurs, non plus que les dispositions de l'ordonnance du 7 janvier 1959 concernant l'Ile-de-France. En d'autres termes, les autorités organisatrices des services régionaux de voyageurs ne peuvent s'en prévaloir pour confier des projets à d'autres opérateurs que la SNCF.
Enfin, le règlement OSP prévoit que les États membres fourniront à la Commission, au plus tard le 3 juin 2015, un rapport sur l'avancement de la réforme. Cette disposition permettra de vérifier que les États membres prennent les mesures nécessaires pour appliquer progressivement, durant la période transitoire, les modalités d'attribution des contrats de service public prévues par le règlement et, le cas échéant, de formuler de nouvelles mesures. Il ne s'agit nullement d'obliger les autorités organisatrices de transport ferroviaire régional à soumettre les contrats TER à appel d'offres.
M. Hubert Haenel. - Cette réponse lèvera de nombreux doutes, apaisera de nombreuses inquiétudes et fera obstacle aux tentatives de ceux qui souhaiteraient, par amendement au projet de loi sur les autorités de régulation des transports ferroviaires dont nous débattrons bientôt, soumettre plus rapidement le marché ferroviaire à la concurrence. Madame la ministre, votre réponse, très attendue, sera analysée et décortiquée. Je me réjouis que la doctrine soit enfin fixée pour l'État, la Commission, la SNCF et les nouveaux entrants.
Plate-forme hospitalière de Melun
M. Yannick Bodin. - L'hôpital de Melun et la clinique des Fontaines ont pour projet commun, projet validé par l'agence régionale de l'hospitalisation, de réaliser une plate-forme hospitalière de 650 lits en 2012 à Melun. Hélas, cette opération, dont le calendrier n'est plus communiqué de manière précise par le ministère de la santé, serait lancée avec deux ans de retard. Qui plus est, l'agence régionale de l'hospitalisation a réduit son budget. Pourtant, Melun-Val-de-Seine vient de céder le terrain prévu tandis que le conseil général et le conseil régional participent au financement des études de réalisation. Enfin, le nouveau projet hospitalier à Fontainebleau nous laisse perplexes sans compter que le chantier de l'hôpital de Lagny-sur-Marne -projet d'ailleurs utile- vient de démarrer.
L'hôpital de Melun, en raison de l'obsolescence de ses locaux, est hors d'état de soigner les 250 000 habitants des agglomérations de Sénart et de Melun. Par conséquent, madame la ministre de la santé, je vous demande d'inscrire ce projet sur la liste de 2009 du « Plan hôpital 2012 ». Les populations de Melun et de Sénart ne comprendraient pas que cette opération, travaillée avec vos services depuis 2004, n'aboutisse pas dans les meilleurs délais.
M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports. - L'agence régionale de l'hospitalisation a validé, fin juillet 2008, le projet de création d'une plate-forme unique par l'hôpital de Melun et la clinique des Fontaines dont une première version, déposée en 2007, avait été repoussée en raison d'une insuffisante complémentarité des moyens. Parallèlement, elle reçu une demande d'aide « Hôpital 2012 » pour la reconstruction de deux cliniques dans une commune mitoyenne de Melun, La Rochelle. Les trois cliniques et l'hôpital de Melun doivent réfléchir sur les complémentarités entre ces deux projets que Mme la ministre de la santé considère prioritaires.
Le projet de plate-forme unique à Melun sera validé durant le deuxième semestre 2009. Le centre hospitalier et la clinique des Fontaines sont vivement invités, avant le lancement de cette opération, à fournir un plan de financement afin d'estimer au mieux le montant de l'aide à apporter.
Quant au nouveau projet hospitalier de Fontainebleau et le chantier de l'hôpital de Lagny-sur-Marne, ces opérations, conformes aux orientations du projet médical du sud de la Seine-et-Marne, n'entrent pas en concurrence avec le projet de Melun. Le but est d'améliorer la permanence des soins hospitaliers dans toute cette partie du département.
M. Yannick Bodin. - Merci. Mais, sans compter que je n'ai jamais évoqué de mise en concurrence, je m'étonne que l'agence régionale de l'hospitalisation remette en cause des décisions antérieures, négociées depuis dix ans, qui portent sur des partenariats publics-privés concernant pas moins de 250 000 habitants. Cette réponse, qui n'apporte aucune assurance de réalisation, alimentera le mécontentement de la population et des élus !
Réorganisation du réseau des Creps
M. Michel Teston. - Dans le cadre de la RGPP, la commission de modernisation des politiques publiques a souhaité que le réseau des centres d'éducation populaire et de sport (Creps) soit « resserré » et « une évaluation conduite pour identifier les établissements dont la contribution à la mise en oeuvre des politiques publiques est essentielle ». Le flou entourant ce projet a provoqué l'inquiétude des personnels. Monsieur le ministre, votre lettre du 4 juillet 2008 aux directeurs des Creps ainsi que vos récentes interventions n'ont pas éclairci la situation. Quelle est la méthode adoptée pour réorganiser le réseau ? Comment déterminer la contribution de chaque établissement aux politiques publiques ? Seule l'architecture du réseau semble arrêtée, sa tête de pont serait le campus olympique et sportif français. Dans ce cadre, que deviendront les missions d'éducation populaire et de formation des éducateurs assurées par les Creps ?
A ces inquiétudes s'ajoutent celles des collectivités territoriales. Dans l'entretien que vous avez accordé au Monde le 6 octobre, vous indiquiez que certains Creps ne pourraient plus être conservés « dans le giron du ministère » et que l'on pourrait en « faire autre chose dans le cadre des collectivités territoriales ». Une nouvelle fois, l'État se déchargerait de ses compétences sur les collectivités territoriales. Mais avec quel transfert de moyens ?
Monsieur le ministre, comment le réseau des Creps va-t-il être réorganisé ? Quel est l'avenir de ces établissements, et notamment celui du Creps Rhône-Alpes qui se compose de l'établissement isérois de Voiron et de l'établissement ardéchois de Vallon-Pont-d'Arc, pôle ressource national des sports de nature ?
M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports. - Suite aux préconisations du comité de modernisation des politiques publiques dans le cadre de la RGPP, nous avons institué durant l'été 2008 une commission qui regroupe les divers acteurs du monde du sport, de la jeunesse et de l'éducation populaire. D'après ses conclusions, les Creps assurent partiellement leurs deux principales missions : leur rôle est souvent marginal dans le dispositif du sport de haut niveau -je pense à l'accueil de pôles « France » ou « Espoirs »- et leur activité limitée en matière de formation aux métiers du sport.
En concertation avec le mouvement sportif, mon ministère a engagé une réflexion d'ensemble sur le sport français, en particulier le sport professionnel et le sport de haut niveau. Si le bilan des Jeux olympiques et paralympiques de Pékin a montré certaines de nos forces, il a également mis en évidence plusieurs faiblesses. Notre rang parmi les grandes nations du sport régresse. Le bilan dans certaines disciplines n'a pas correspondu à nos attentes, non plus que celui de nos athlètes féminines. La Grande-Bretagne nous a dépassés.
Nous avons décidé d'agir et de proposer une réforme de fond de notre dispositif de soutien au sport de haut niveau et à ses structures. Nous voulons le tirer vers le haut, le mettre vraiment en situation concurrentielle au plan international, en faire des structures d'excellence destinées à nos meilleurs athlètes sur le plan national et international. Cette réforme concerne au premier chef les établissements du ministère, dont nous voulons faire de véritables campus sportifs, modernes, bien équipés, en pointe dans tous les domaines qui font la réussite de nos athlètes. C'est ce que nous avons commencé à faire à l'Insep qui disposera bientôt d'installations totalement rénovées. Ses missions, et son organisation seront entièrement revues en 2009. Cet établissement doit devenir une référence sur le plan international.
Nous avons le même objectif pour nos Creps, dont j'ai annoncé en décembre dernier la réorganisation selon les principes suivants : quatorze Creps ont vocation à devenir des campus sportifs modernes qui vont faire gagner nos athlètes ; quatre Creps vont faire l'objet d'une évaluation approfondie en concertation avec les élus et le mouvement sportif pour impliquer davantage les collectivités territoriales ; enfin, six Creps feront l'objet d'une profonde restructuration en 2009.
Concernant ces derniers, les solutions permettant le maintien d'une activité seront privilégiées en concertation avec les principaux acteurs locaux. Un suivi personnalisé de chaque agent des Creps a été mis en place aux niveaux régional et national.
Contrairement à ce que vous avancez, l'objectif de cette réorganisation est, plus que jamais, de faire fonctionner nos établissements en réseau, tant pour le sport de haut niveau que pour la formation. Cette dimension nationale du réseau a malheureusement été perdue de vue ces dernières années.
M. Michel Teston. - Force est de constater que vous ne m'avez pas répondu sur les Creps de Rhône-Alpes, à Voiron et Vallon-Pont-d'Arc. J'en tire la conclusion que vous n'avez pas tranché. L'incertitude subsiste. Votre réponse n'est pas rassurante non plus pour l'éducation populaire et pour la formation des éducateurs. Dans une précédente réponse, vous aviez plus ou moins laissé entendre que l'État se désengagerait pour laisser la place à d'autres intervenants. Lesquels ? Les collectivités territoriales ? Avec quels moyens ? Le privé ? Comprenez que je ne sois pas pleinement satisfait -c'est le moins qu'on puisse dire.
École de police de Vannes
Mme Odette Herviaux. - Le 7 janvier, la direction générale de la police nationale présentait aux syndicats les propositions qu'elle s'apprête à remettre au ministre de l'intérieur dans le cadre de la révision du schéma directeur de la formation de la police nationale. La Bretagne paie un lourd tribut à cette révision avec des fermetures prévues à Nantes et Saint-Brieuc, et peut-être Saint-Malo, dès cette année. La question reste ouverte quant à l'avenir de l'école de police de Vannes.
Créée voici 30 ans, celle-ci et son personnel contribuent avec compétence et dévouement à la qualité de la formation dispensée aux futurs policiers. La qualité de son enseignement est prouvée par les très bons résultats obtenus par les élèves policiers aux différents classements nationaux. En 2008, elle s'est ainsi distinguée avec un taux de réussite au concours de gardien de la paix de près de 75 %. Structure de référence au niveau national, elle participe activement à un aménagement durable du territoire, dimension à laquelle, à la différence du ministre, nous sommes très attachés. Outre que 80 % de ses élèves sont bretons, cette école fait partie intégrante du paysage urbain et social de la préfecture du Morbihan. Son implantation dans un quartier classé en zone urbaine sensible et au coeur d'une agglomération dynamique constitue un atout majeur pour la formation des futurs policiers.
Ces acquis plaident pour faire de cette école un lieu de formation de référence, notamment en y regroupant formation initiale et formation continue. Malheureusement, de nombreuses incertitudes pèsent sur sa pérennité après 2009. Dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, votre Gouvernement prévoit une très forte diminution, de l'ordre de 5 000 sur trois ans, du nombre de policiers, alors que dans le même temps, nous est annoncé le soutien à la création de 100 000 emplois dans la sécurité privée... La direction de la formation de la police nationale doit réduire au niveau national son effectif de 450 équivalents temps pleins. Or les huit fermetures de centres de formation envisagées au niveau national ne représentent que 150 équivalents temps pleins, soit le tiers de l'objectif. Vous serez donc amenés à choisir de nouvelles cibles au cours de cette année. L'école de Vannes se retrouve alors en première ligne. Le seul recrutement de cadets de la République ne saurait constituer une garantie solide pour son avenir.
Si, alors qu'aucun indicateur de gestion ne le justifie, l'école devait malgré tout fermer, quand le feriez-vous ? Dans le cas contraire, quelle proportion du personnel sera maintenue ?
M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports. - La révision générale des politiques publiques vise à offrir le service public de la meilleure qualité possible à un coût maîtrisé. C'est une démarche ambitieuse et d'intérêt général. Le ministère de l'intérieur ne saurait y rester extérieur. (Sourires) Le potentiel opérationnel des forces de police et de gendarmerie est la priorité. Aucune des mesures adoptées ne doit y porter atteinte. Dans cet esprit, la ministre de l'intérieur a obtenu que la règle du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite ne s'applique pas dans le domaine de la sécurité : le ratio restera limité à 36 %, en cohérence avec la suppression ou la réorganisation de certaines missions. D'importants efforts de rationalisation et de modernisation permettent d'améliorer l'offre de sécurité en maîtrisant les dépenses ; il en va ainsi du rapprochement entre la police et la gendarmerie.
Pour le réseau de formation de la police nationale, la réflexion en cours envisage des regroupements sur des sites plus vastes, plus fonctionnels, mieux équipés. Si l'objectif est fixé, la répartition géographique précise n'est pas encore déterminée. Des réflexions sont en cours. Aucune décision n'a été prise d'une fermeture éventuelle de l'école de police de Vannes. Celle-ci ne sera pas de toute façon concernée par les mesures mises en oeuvre cette année.
Mme Odette Herviaux. - L'incertitude qui demeure donc contribue à dégrader le climat de confiance et de sérénité nécessaires à l'accomplissement des missions de service public aussi essentielles que la formation des policiers. Vannes et la Bretagne ont déjà payé un lourd tribut dans le cadre de la réorganisation, souvent unilatérale, des services publics.
Je compte sur votre intercession, monsieur le ministre : vous savez que Vannes a été pionnière pour l'introduction du rugby en Bretagne !
Avenir de l'AFP
M. Ivan Renar. - Comment ne pas s'inquiéter de l'avenir de l'Agence France-Presse, la seule agence d'information mondiale non anglo-saxonne ? Son statut unique est menacé : le Gouvernement demande à son président directeur général récemment réélu d'ouvrir son capital. Cela remettrait en cause son statut actuel. Visiblement, les pouvoirs publics sont pressés d'aboutir.
Le statut en vigueur depuis 1957 dispose que l'agence ne peut passer sous le contrôle d'aucun groupe économique, politique ou idéologique. Après la Libération, la France a souhaité se doter d'une agence pour s'assurer d'une indépendance des sources d'information dans le monde. Il s'agissait de donner aux médias français un réseau international, pour informer le monde autrement. Alors que l'information est plus que jamais stratégique, l'AFP est un des plus remarquables fleurons planétaires au service du droit de savoir des citoyens. Faut-il rappeler que l'information n'est pas une marchandise ?
Cette décision d'ouvrir le capital, si elle était maintenue, constituerait une atteinte grave au rôle du législateur puisque le statut a été voté en 1957 par le Parlement français. Les pères fondateurs de ce texte avaient eu la sagesse de ne pas doter l'agence d'actionnaires afin d'échapper aux lois « sans conscience ni miséricorde » du marché. Ce statut particulier a permis un demi-siècle de succès et d'indépendance rédactionnelle ; l'agence est présente en continu pour informer en textes, photos, vidéos, et en six langues, des centaines de journaux, télévisions, radios, sites internet, institutions, dirigeants, décideurs. L'AFP démontre en permanence son efficacité et sa pertinence. La productivité de son personnel a progressé de 65 % ces quinze dernières années. C'est par une dépêche de l'AFP que le chef de l'État a appris la libération d'Ingrid Betancourt !
Pourquoi vouloir changer une affaire qui marche et aller vers une privatisation qui ne dit pas son nom ? Alors que la contribution de l'État n'a pas été revalorisée en 2008, le contrat d'objectifs et de moyens vient enfin d'être signé. Il prévoit une évolution régulière des abonnements de l'État et 20 millions d'investissements. C'est une bonne chose, qui permettra la nécessaire modernisation numérique. Mais son statut, loin d'être un obstacle, constitue un atout pour le développement de l'agence. Pourquoi déstabiliser ce qui a été construit année après année dans ce domaine stratégique ? Car I'information est un bien public Il est important, aussi, de répondre aux légitimes inquiétudes des 2 000 salariés.
M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports. - L'Agence France-Presse est dotée d'un statut particulier défini par la loi du 10 janvier 1957, aux termes de laquelle l'agence est un « organisme autonome doté de la personnalité civile et dont le fonctionnement est assuré suivant les règles commerciales ». Si la loi du 10 janvier 1957 prévoit que l'Agence est soumise aux règles du droit commercial, elle ne la qualifie pas pour autant de société de droit privé et l'Agence n'a ni actionnaire, ni capital. Elle est donc tributaire de ses ressources commerciales et notamment de ses deux principaux clients, l'État et les médias.
Le modèle économique actuel de l'Agence et les spécificités de son statut ne lui permettent pas de mobiliser les ressources nécessaires à son développement. Pour continuer à collecter l'information pour l'ensemble des médias via un réseau international de bureaux et de correspondants, et financer les investissements de plus en plus lourds dans les nouvelles technologies numériques, l'AFP doit pouvoir lever facilement les fonds nécessaires à son développement. II s'agit de l'aider à faire face aux mutations du marché, d'accompagner ses clients dans cette mutation, et de conforter sa place au plus haut niveau international.
L'État a donc souhaité que M. Louette, président de l'AFP, lui fasse des propositions en vue d'une modernisation du statut et de la gouvernance de l'Agence. Ces propositions, qui seront remises à la fin du premier trimestre 2009, devront impérativement respecter deux principes. En premier lieu, le modèle économique de l'AFP devra évoluer en vue de son adossement à un actionnariat public ou parapublic stable et pérenne, seul à même de garantir le financement régulier de son développement.
L'indépendance de la rédaction sera protégée, elle est le gage de la crédibilité de l'Agence, donc de sa valeur.
Un contrat d'objectifs et de moyens a été signé le 18 décembre. L'État s'engage à une augmentation régulière de ses abonnements entre 2009 et 2013, de 1,8 % par an, avec une révision annuelle selon l'inflation constatée. De plus, l'État contribuera par une aide spécifique au projet 4, le nouvel outil de production et de distribution multimédia, indispensable pour fidéliser les clients et développer les nouvelles offres. A la dotation de 4 millions d'euros par an sur cinq ans s'ajoutent 10 millions d'autofinancement.
M. Ivan Renar. - Votre réponse est trop prudente. L'exercice 2009 sera difficile, en raison de la récession économique. Il faut préserver les missions d'intérêt général, conforter l'AFP comme troisième agence mondiale et l'aider à préserver son rayonnement international dans un environnement de concurrence acharnée. L'AFP ne doit pas être privatisée. Je rappelle aussi que le pluralisme donne sens à la démocratie. Les statuts de l'agence sont stricts en matière de déontologie. Nous avons besoin d'informations fiables et l'information est un droit constitutionnel. J'espère donc que la sagesse l'emportera et que le Gouvernement renoncera à ouvrir le capital et modifier les statuts.
Rénovation de la cité Edmond Michelet
M. Roger Madec. - Ma question porte sur le financement par l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru) des travaux entrepris à la résidence Edmond Michelet, dans le XIXe arrondissement de Paris.
Présentée comme une priorité fondamentale, la politique en faveur des quartiers sensibles est en fait sacrifiée. Le plan Borloo de 2003 affirmait l'urgence d'une rénovation urbaine et créait l'Anru ; mais aujourd'hui votre Gouvernement fait supporter le financement des opérations par le 1 % logement ! De nombreux projets sont bloqués et les trois quarts des crédits de l'agence ont été consommés pour financer la moitié des objectifs fixés d'ici 2013.
La confusion est totale. Les habitants des quartiers concernés et les élus sont dans l'expectative. Oui ou non la rénovation urbaine est-elle une priorité du Gouvernement ? Oui ou non honorera-t-il ses promesses et engagera-t-il les crédits correspondants ?
La cité Michelet comprend 1 800 logements sociaux et elle est située en zone urbaine sensible (ZUS). L'Anru s'est engagée à participer au financement du projet de renouvellement à hauteur de 23 millions d'euros. Elle a, par un courrier du ministre du logement adressé au maire de Paris en février 2005, donné son accord pour un démarrage anticipé des travaux de requalification dès 2007. Les travaux ont été lancés et sont achevés dans six des seize bâtiments. La ville et la région se sont mobilisées pour rénover les espaces extérieurs, les gymnases, écoles, jardin, crèche, PMI... Et ce, en respectant à la fois le plan climat et le Grenelle de l'environnement. Une nouvelle résidence Michelet s'apprêtait à émerger et nous aurions tous, ville, région et Gouvernement, pu en partager la fierté. Hélas, c'est aujourd'hui la honte qui s'installe. Les travaux se sont brutalement interrompus. Tours rénovées et bâtiments délabrés se font face. Le programme est enlisé ; car contrairement aux engagements pris, I'Anru n'a toujours pas versé sa participation et n'a pas encore programmé le financement des travaux à venir.
Pas moins de 5 000 personnes sont concernées, dans un secteur où le chômage s'élève à 20 % et où 26 % des familles ont de bas revenus. Notre engagement commun visait à améliorer leur cadre de vie...
Mettons fin à ce gâchis ! Ce dossier est prioritaire pour la ville de Paris et pour l'Office public de l'habitat parisien. Tous les élus, toutes orientations politiques confondus, sont d'accord ! L'affaire doit aboutir, dans le cadre du partenariat décidé ensemble dès 2002. II n'est pas concevable que la requalification ne soit pas menée à bien. Quelles dispositions le Gouvernement entend-il prendre afin d'honorer les engagements de l'État ?
Un dernier mot, madame la ministre : merci d'être venue en personne répondre à ma question !
Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville. - Merci pour votre question, vive, qui me permettra d'apporter une réponse claire !
L'Anru a effectivement été sollicitée et les travaux de la cité Edmond Michelet sont éligibles à ses financements. Une convention territoriale a bien été signée avec la région ; mais il est inexact de dire que l'Anru a pris l'engagement de financer les travaux. Je démens formellement que l'agence ait accepté de participer à hauteur de 23 millions d'euros. Si tel était le cas, cette discussion n'aurait pas lieu d'être puisque tous les engagements pris par l'Anru seront respectés.
Le directeur général de l'agence a reçu la directrice de l'urbanisme de la ville. Mon directeur de cabinet et le directeur adjoint en charge du pôle « Ville et exclusion » ont reçu la directrice adjointe de cabinet du maire de Paris le 25 novembre. Mais la revue technique d'octobre avait dû être annulée par le préfet car les éléments nécessaires à la préparation de la réunion ne lui avaient pas été transmis par la ville...
Le premier projet sur la cité Michelet avait fait en 2005 l'objet de remarques par l'Anru. Les compléments d'information apportés fin 2007 ont précisé la dimension du projet en termes de mixité sociale et d'accompagnement des populations. Mais la demande de financements a considérablement augmenté entre temps, notamment pour répondre aux exigences du plan climat de la ville de Paris. Il n'était pas possible pour l'Agence de prendre en compte ce surcoût.
Pour ne pas bloquer les opérations dans l'attente des résultats de la négociation, le préfet vous a autorisé à engager les travaux sans obérer pour autant la possibilité de conclure un conventionnement.
L'Anru s'est engagée sur l'ensemble des territoires éligibles à Paris dans la limite d'une enveloppe de 86,7 millions d'euros. Cela comprend d'une part les enveloppes maximales de subventions prévues dans les conventions signées, soit 74,6 millions d'euros pour la Goutte d'Or et Pouchet-Montmartre-Clignancourt ; d'autre part 2,9 millions réservés par le comité d'engagement pour le projet de Bédier ; et enfin l'enveloppe déconcentrée de 9,12 millions pour des opérations isolées, mise à disposition de la ville en février 2006. C'est de cette enveloppe que relève la cité Michelet.
Je souhaite parvenir à une conclusion rapide. Une réunion de travail est organisée le 19 janvier 2009... pourvu que les éléments nécessaires soient envoyés à temps !
Enfin, il n'est pas exclu que la ville de Paris puisse se glisser dans le dispositif du plan de relance annoncé par le Premier ministre le 15 décembre 2008, sous réserve que les travaux soient lancés en 2009.
Je suis une femme d'engagement, ceux de l'Anru seront tous honorés. Ne donnons pas des informations partielles qui pourraient laisser planer une ambiguïté...
M. Roger Madec. - Je vous sais de bonne foi ! Mais si votre prédécesseur a autorisé le démarrage des travaux, c'est bien parce que l'Anru participait aussi à leur financement... Ne tournons pas autour du pot : la question porte sur votre volonté de participer ou non à cette opération de rénovation isolée. Je suis pour ma part hostile à la concentration des logements sociaux : si on avait conçu les choses autrement dans les années soixante, nous n'aurions pas aujourd'hui à disserter sur le problème.
Je ne doute pas que la réunion du 19, à laquelle je suis convié, aboutira à des résultats satisfaisants !
La séance est suspendue à midi et demi.
présidence de M. Gérard Larcher
La séance reprend à 16 heures.
Dépôt d'un rapport
M. le président. - M. le Premier ministre a transmis au Sénat, en application de l'article 67 de la loi du 9 décembre 2004 de simplification du droit, le rapport sur la mise en application de la loi du 26 mai 2008 relative aux emplois réservés et portant dispositions diverses relatives à la défense.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
Communication audiovisuelle (Urgence - Suite)
Discussion des articles (Suite)
M. Michel Thiollière, rapporteur de la commission des affaires culturelles. - Pour la clarté de l'organisation de nos travaux, la commission demande la réserve des articles 13 bis, 14 bis et 14 ter relatifs à l'outre-mer jusqu'à la séance du jeudi 15 janvier à 15 heures afin de permettre la présence de M. Jégo, secrétaire d'État à l'outre-mer.
Par ailleurs, concernant la discussion de l'article 20, la commission demande que les amendements de suppression n°s244 et 374 soient examinés séparément, de même que les amendements n°s149 et 272 qui réécrivent le I de cet article.
Acceptée par le Gouvernement, la réserve est de droit.
M. David Assouline. - La commission ne s'est pas exprimée sur cette demande. Nos conditions de travail sont invraisemblables ! Vu que l'essentiel de la loi est déjà en application, on pourrait au moins nous laisser causer ! Or la commission multiplie les réunions, en même temps que la séance publique, pour étudier les amendements à venir ! Nous nous sommes séparés à midi sans même avoir été informés de cette demande de réserve qui vise, j'imagine, à trouver un accord en amont avec le Gouvernement... Nous n'avons plus qu'à accepter, sans même savoir ce dont il s'agit !
Hier, la séance s'est terminée sur un cri de révolte de M. Ralite, dénonçant les conditions du débat. La majorité attend en silence que les choses se passent, tandis que l'opposition en est réduite à un jeu de ping-pong avec le Gouvernement, qui ne prend même pas la peine d'étayer ses arguments... Je demande que le Sénat, humilié par le Gouvernement, réagisse en produisant le débat sur le fond qu'attend l'opinion ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Michel Thiollière, rapporteur. - Le président Legendre a informé la commission de ces deux points ce matin.
M. le président. - Je rappelle également que la commission a souhaité que les articles 8 et 9, qui sont très importants, ne viennent pas en discussion hier au soir mais aujourd'hui, afin que tous ceux qui le souhaitent puissent s'exprimer.
S'il n'y a pas d'opposition concernant l'article 20, il en est ainsi décidé.
Article 8
L'article 47-4 de la même loi est ainsi rédigé :
« Art. 47-4. - Les présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France sont nommés par décret pour cinq ans après avis conforme du Conseil supérieur de l'audiovisuel et après avis des commissions parlementaires compétentes conformément à la loi organique n° du relative à la nomination des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France. »
M. Jack Ralite. - « Pendant que l'opposition parle, la majorité reste l'arme au pied et attend », écrit Le Figaro. (M. GuyFischer s'exclame) « On doit passer des dizaines d'heures dans l'hémicycle et surtout se taire », témoigne Jean-Luc Warsmann, député UMP des Ardennes.
M. Jean-Claude Gaudin. - Il n'est pas au Sénat !
M. Jack Ralite. - « Les députés de la majorité doivent rester plus nombreux en séance que leurs collègues de l'opposition pour éviter d'être défaits lors d'un vote surprise. Mais prendre la parole, c'est alimenter la polémique. Il faut donc se taire », poursuit-il. D'où ma colère hier soir : ce silence interdit tout vrai débat, et défie toute pratique démocratique !
Nous voici avec cet article 8 au coeur du cyclone. Disposition ô combien symbolique, tant elle écorne notre démocratie. Où voit-on en Europe, et en Amérique du Nord, un chef de l'exécutif s'arroger le pouvoir de nommer par décret les présidents de l'audiovisuel public ? En Allemagne, au Royaume-Uni, même dans l'Italie de Berlusconi, point de trace de cette horreur démocratique !
Disposition symbolique aussi, tant elle pèsera lourd sur les épaules des futurs promus. L'indépendance n'est pas qu'un concept, c'est une réalité que le Parlement a le devoir de garantir. On tente, à la marge, de rendre présentable, digestible, une disposition qui devrait nous faire tous nous soulever contre le fait du prince ! Or une partie de cet hémicycle se terre dans un silence qui en dit long sur le malaise ambiant. Allons-nous accepter pareille mesure, sans même utiliser ce pouvoir de la parole à nous confié par le suffrage universel ? Si tel est le cas, alors, avec la réforme à venir du débat parlementaire, le silence n'a pas fini de régner entre les murs de cette assemblée. (Applaudissements à gauche)
M. David Assouline. - La réforme constitutionnelle de l'été dernier prétendait renforcer les droits du Parlement, mais l'opposition de gauche avait dénoncé ce faux nez, l'objectif réel étant pour Nicolas Sarkozy de s'exprimer devant le Congrès, et d'asseoir la présidentialisation du régime.
Il y a un an, Nicolas Sarkozy annonce que la publicité, ce n'est pas bien, pour la qualité des programmes, de la création artistique, du service public... après avoir dit, lors de sa campagne, qu'il fallait augmenter la part de la publicité pour réduire le déficit ! Comment la gauche peut-elle s'opposer à une mesure qu'elle a toujours défendue, entend-on aujourd'hui. Après avoir fait travailler la commission Copé sur le contenu des programmes, les missions, le média global, voici qu'on rajoute, à la dernière minute, la nomination -et la révocation- par le Président de la République des présidents de France Télévisions, Radio France et de l'audiovisuel extérieur !
Et que dire de la méthode de ce débat ? L'audiovisuel public a dû appliquer la loi avant même que la discussion ne commence au Sénat. De même, la commission Copé avait exclu la nomination des présidents des chaînes publiques par le Président de la République, procédure non conforme à l'article 34 de la Constitution, dans lequel, sur proposition socialiste, le Sénat a intégré le pluralisme et l'indépendance des médias.
Ce que vous nous proposez est pire que le retour à feue l'ORTF : alors que les autres démocraties sont en avance sur la France, vous voulez qu'elle prenne volontairement un retard accru. Ce recul s'inscrit dans la politique du Gouvernement et de sa majorité, voulue par leur chef unique, qui multiplie les coups de butoir contre le champ des libertés, arraché à l'Ancien Régime, renforcé au XIXe siècle puis amélioré tout au long du XXe. Combien de temps la France restera-t-elle encore la Nation des droits de l'homme aux yeux du monde si les journalistes ne peuvent plus y éclairer l'opinion publique ?
Je lance un nouvel appel solennel sur cette question, qui pourrait unir la gauche et la droite, même si elle peut diviser les démocrates et ceux qui le sont moins, les républicains et ceux qui le sont moins. La politique économique et sociale oppose naturellement la droite et la gauche, mais il s'agit ici de liberté et de principes républicains.
Pourtant, aucune voix de droite ne s'est élevée au Sénat pour s'opposer à cette nomination par le Président de la République, pourtant difficilement acceptée par de nombreuses consciences républicaines. Dans la presse, nous avons lu qu'on allait voir ce qu'on allait voir, grâce aux centristes, indispensables pour obtenir une majorité au Sénat : (murmures au centre) ils allaient s'élever contre l'inadmissible. Mais rien ne vient !
Dans cette histoire, nous n'adoptons pas une posture partisane, car nous défendons des valeurs communes. Il est donc temps que certains expriment ce qu'ils pensent au fond d'eux-mêmes. L'existence à ce propos d'un débat, que l'on a voulu étouffer, serait à l'honneur du Sénat ! (Applaudissements à gauche)
M. le président. - Amendement n°130, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.
Supprimer cet article.
M. Jack Ralite. - Discuter cet article revient à examiner un de ces petits putschs qui forment un grand coup de force : cette réforme forcée de l'audiovisuel public, menée tambour battant.
Cet article devrait indigner chaque parlementaire, quelle que soit son appartenance politique. Hors l'étatisme affairiste du Président, rien ne justifie l'insulte à la démocratie et au peuple français constituée par cette dépendance politique de l'audiovisuel public envers le pouvoir exécutif, s'ajoutant à sa dépendance économique et éditoriale, qui est organisée par le reste du texte.
S'il est définitivement voté, les présidents de France Télévisions, de Radio France et de l'audiovisuel extérieur seront redevables au Président de la République de leur nomination, comme la noblesse était jadis redevable au monarque des charges et honneurs distribués. Plutôt que de dérive bonapartiste, nous y voyons la transformation de la démocratie en « démocrature », en régime arbitraire tapi derrière la démocratie avant de quitter son fourré. L'encadrement proposé n'est qu'un vulgaire camouflage.
Le CSA formulerait un avis ? La position du Gouvernement est significative de son argumentation politique, fondée sur la duplicité, la manipulation et le sophisme : cette nouvelle procédure de nomination serait justifiée par le dysfonctionnement d'un CSA devenu simple courroie de transmission du pouvoir, et ce même CSA non réformé nous protégerait ! Tantôt, le CSA ne sert à rien ; tantôt, il forme une barrière démocratique. C'est selon le bon vouloir et l'utilité de certains...
En outre, les commissions parlementaires devraient intervenir, mais il faudrait une majorité des trois cinquièmes pour s'opposer au Président de la République ! On n'a jamais vu pareille majorité pendant toute la Ve République. Jamais !
Cet article est un gigantesque pas en arrière, l'un des plus graves en la matière dans ce pays depuis des décennies. Il est foncièrement inacceptable, nous ne cesserons de le répéter jusqu'à ce que la majorité revienne à la raison.
Il appartient au législatif de protéger l'espace public, notamment les organes d'information publique, contre les appétits de l'exécutif, en l'occurrence du Président de la République. Nous sommes, comme disait Char, à l'heure exacte de la conscience : jouons notre rôle en supprimant cet article !
M. le président. - Amendement identique n°260, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et MM. Desessard et Muller.
Mme Marie-Christine Blandin. - L'audiovisuel doit se construire dans l'équilibre entre la liberté et la diversité des moyens consacrés à l'audiovisuel public et les règles s'imposant à l'audiovisuel privé. Mais vous prêtez une oreille attentive au privé, tout en imposant un cadre contraignant au public. L'article 8 impose une régression inédite parmi des démocraties.
M. Assouline a fustigé à juste titre le silence de la majorité sur ce sujet. J'ajoute que, page 215 du rapport écrit, on peut lire que l'atelier consacré aux procédures de nomination « auquel participaient nos collègues Jacques Valade, alors président de la commission des affaires culturelles, et Louis de Broissia, alors rapporteur de la commission pour l'audiovisuel, avait souhaité, en effet, que la nomination du président de France Télévisions fût confiée au conseil d'administration de la société, dont la composition aurait été significativement rénovée. ». Aujourd'hui, les réverbères se sont éteints.
Mme Albanel dit que la nomination par le CSA était une hypocrisie. Dans vos collectivités, que faites-vous face à une déviance antidémocratique ? Vous la supprimez. Pourtant, en voyant que le CSA est réduit au rôle de courroie de transmission, vous proposez qu'une consécration législative en fasse la voix de son maître. Le Président de la République n'en peut plus de chercher des outils pour faire mine de gouverner la France.
Est-ce « symbolique » ? Il est vrai que le domaine symbolique fait partie de la politique. Y toucher revient à prendre une lourde responsabilité. Le pouvoir audiovisuel n'a pas suffisamment été traité jusqu'ici au même rang que le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif et l'autorité judiciaire dans leur nécessaire séparation. Vous en déduisez qu'il faut supprimer toute indépendance !
De façon générale, vous vous emparez des dispositions les plus libérales inscrites dans les textes européens. En l'espèce, la gomme a dû fonctionner pour la directive qui impose aux États membres de garantir l'indépendance de l'audiovisuel public... (Applaudissements à gauche)
M. le président. - Amendement identique n°332, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
M. David Assouline. - Nous abordons la disposition la plus grave du texte, car elle touche à l'épanouissement d'une société démocratique.
Ce texte organise la dépendance économique de l'audiovisuel public envers l'État, sur le seul fondement d'une décision arbitraire prise par le Président de la République, ce à quoi la commission Copé s'était plus ou moins pliée. Mais il impose aussi la subordination des dirigeants de la radio et de la télévision publique envers le chef de l'État. La commission Copé avait écarté cette disposition, pour préserver la spécificité de France Télévisions, spécificité « que le Conseil constitutionnel a eu l'occasion de réaffirmer. »
Le Président Sarkozy a voulu cette disposition, au mépris de l'indépendance des médias, pourtant indispensable à la démocratie. Pierre Rosenvallon s'est récemment exprimé sur les atteintes que porte le Gouvernement aux libertés civiles et politiques. Il a déclaré : « La liberté de la presse n'est pas simplement une liberté individuelle. Elle est une composante structurante de la vie démocratique, une liberté publique, un bien collectif et un rouage démocratique ». En institutionnalisant la subordination de leurs présidents, le Président de la République ignore que ces sociétés ne sont pas des entreprises publiques comme les autres, ainsi qu'en avait convenu la commission Copé. « Dans le débat actuel, poursuit Pierre Rosanvallon, il faut bien distinguer les conditions de gestion d'un bien public conflictuel, dont une présomption de gestion partisane détruit le caractère public, et celles d'une entreprise publique déterminée par des catégories gestionnaires ». Un pouvoir élu est toujours fondé à prendre une décision politique, il a été élu pour cela et prendre parti est de l'essence de sa mission. Mais il y a des domaines où il faut s'abstenir de cette logique, sauf à rompre avec la notion de service public.
Voilà bien pourquoi les termes de ce débat ne peuvent pas être manichéens. Allons plus loin et considérons que nommer président d'une télévision n'est pas la même chose que nommer le président d'une entreprise ferroviaire...
M. Jean-Claude Gaudin. - Ou un cardinal...
M. le président. - Amendement n°131 rectifié, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.
Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'article 47-4 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 :
« Art. 47-4. - Les présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France sont nommés à la majorité qualifiée des trois cinquièmes de leur conseil d'administration.
« La liste des personnes éligibles est proposée par une commission dite « pour le pluralisme et les médias », instituée à compter du 1er juin 2009. Cette commission parlementaire est mixte : elle regroupe, dans le strict respect du pluralisme, onze élus représentatifs de toutes les sensibilités des deux assemblées.
« Elle a notamment pour objet la proposition de candidature aux présidences des trois sociétés nationales de programmes et une mission de vigilance démocratique quant au respect du pluralisme dans les médias. »
M. Jack Ralite. - Si nous devons défendre cet amendement, c'est malheureusement parce que cet article liberticide n'a pas été supprimé. Triste jour pour notre démocratie, ainsi blessée au coeur. Faut-il le rappeler ? Il n'y a pas une démocratie, pas une ! où l'on puisse même imaginer, fût-ce un seul instant, que le chef de l'exécutif nomme par décret les patrons de l'audiovisuel public. Nous avons dit le pourquoi de cette précaution, qui garantit l'indépendance du service public de l'audiovisuel, mais la majorité de notre Assemblée ne semble pas l'entendre. L'indépendance du service public de l'audiovisuel constitue une exigence démocratique et constitutionnelle. Dans sa décision du 27 juillet 2000, le Conseil constitutionnel a rappelé qu'assurer l'indépendance d'une société nationale de programme revient à concourir à la mise en oeuvre de la liberté de communication proclamée par l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. L'objectif est que les téléspectateurs soient à même d'exercer leur libre choix sans que les intérêts privés ni les pouvoirs publics y substituent leurs propres décisions, ni qu'on puisse en faire les objets d'un marché.
La haute juridiction avait déjà insisté sur les garanties d'indépendance que doit offrir la procédure de nomination des présidents de ces sociétés. Sa décision du 26 juillet 1989 indique que, s'il est à tout moment loisible au législateur de modifier ou d'abroger des textes antérieurs, c'est à la condition que cela n'aboutisse pas à priver de garanties légales des exigences constitutionnelles. C'est exactement le contraire de l'article 8 dans sa facture actuelle. S'il fallait le voter maintenant, il faudrait d'abord lui donner un contenu démocratique conforme aux textes constitutionnels. C'est l'objet de notre amendement qui réintroduit de la démocratie là où elle est mise en cause de façon virulente et inédite. Nous considérons en effet que la véritable hypocrisie est de prétendre encadrer une nomination que l'on confie au seul Président de la République. Nous sommes d'accord pour une nomination par un tiers, mais puisque l'on sait les dysfonctionnements du CSA et que sa réforme n'est pas pour demain, qu'au moins le Parlement soit la voix des téléspectateurs, car la télévision et la radio publiques sont leur affaire : payant la redevance, ils en sont les véritables actionnaires. En rendant les présidents responsables devant leur conseil d'administration et non devant le Président de la République, notre amendement servirait l'indépendance et le pluralisme interne, deux objectifs qui doivent définir notre ligne directrice.
M. le président. - Amendement n°336, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Rédiger ainsi le texte proposé par cet article pour l'article 47-4 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 :
« Art. 47-4. - Les présidents des sociétés France Télévisions, Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France sont nommés par le Conseil supérieur de l'audiovisuel pour cinq ans. »
M. David Assouline. - Je ne saurais mieux présenter cet amendement de repli qu'en revenant à l'architecture du projet. Le plus sûr eût été que le président fût élu en son sein par le conseil d'administration parmi les personnalités qualifiées. Pour en arriver à cela, il eût fallu que la composition de ce conseil garantisse son indépendance et qu'y siègent des parlementaires de la majorité et de l'opposition, des représentants du personnel et des personnalités qualifiées nommées par une autorité indépendante. Or la totalité des membres actuels du CSA ont été nommés par la majorité ! Si l'on veut une nomination incontestable, le CSA doit être rénové. Nous avons fait des propositions en ce sens, car il n'y a pas d'autre solution que la nomination de la moitié de ses membres par la majorité, et l'autre moitié par l'opposition. Je regrette que le Sénat ait rejeté notre proposition de rénovation du CSA, même s'il s'en est fallu de très peu : notre amendement à l'article 7 a failli passer à une voix près, celle d'un sénateur qui n'avait pas voté à main levée mais qui a participé au vote par assis et levé.
Le mandat de trois membres du CSA touche prochainement à son terme. Au lieu de dénoncer l'hypocrisie de la procédure, réformons les conditions de nomination. On y viendra parce que c'est dans la logique de cette instance : à quoi sert une autorité indépendante si elle n'est pas incontestable ? Franchissons un premier pas grâce à cet amendement.
M. le président. - Amendement n°333, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Au début du texte proposé par cet article pour l'article 47-4 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, remplacer les mots :
les Présidents des sociétés France Télévisions et
par les mots :
les Présidents de la société
M. Jean-Jacques Mirassou. - Cet amendement se situe dans la même logique que celui que vient de défendre M. Assouline et que les amendements n°s334 et 335. Il faut avoir la lucidité de mesurer le formidable retour en arrière que constituerait le fait de remettre en cause avec l'article 8 un équilibre certes fragile, mais qui garantissait une relative indépendance.
Il est de notre devoir de proposer ces amendements pour tenter de réveiller la conscience du Sénat, et particulier la vôtre, monsieur le Président, qui avez dit vouloir une République moderne.
Nous voulons tous une république moderne, garantissant la démocratie. L'indépendance du chef de la télévision publique en est l'indispensable corollaire, qui justifierait en effet une prise de conscience de cette assemblée, dans une ambition partagée.
M. le président. - Amendement n°334, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Au début du texte proposé par cet article pour l'article 47-4 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, remplacer les mots :
Les Présidents des sociétés France Télévisions et Radio France
par les mots :
Les Présidents de la société France Télévisions
M. Jean-Jacques Mirassou. - Je l'ai défendu.
M. le président. - Amendement n°335, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Dans le texte proposé par cet article pour l'article 47-4 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, avant les mots :
sont nommés
supprimer les mots :
et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France
M. Jean-Jacques Mirassou. - Il est soutenu.
M. le président. - Amendement n°261, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et MM. Desessard et Muller.
Après le mot :
nommés
rédiger comme suit la fin du texte proposé par cet article pour l'article 47-4 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 :
par leur conseil d'administration à la majorité.
Mme Marie-Christine Blandin. - En prévoyant de réserver au conseil d'administration la nomination du président, à la majorité, nous vous appelons à un sursaut démocratique.
Il ne s'agit là que de reprendre les choix de la commission des affaires culturelles, que la citation faite des propos de MM. Valade et de Broissia a permis de rappeler, choix sans clivage en un temps où y siégeaient déjà le président Legendre et notre rapporteur. Mais l'autorité sarkozienne, appelée à tout régir, est passée par là et a fait oublier le souci de la rénovation et de l'innovation. Tout se passe comme si les parlementaires ne tenaient pas leur mandat et leur autorité du peuple et n'étaient que des personnalités révocables par une autorité supérieure, selon la même logique que celle qui préside à cet article 9. « Nommé par leur conseil d'administration à la majorité » : ces quelques mots suffiraient à relever la Haute assemblée de l'humiliation d'un débat qu'on lui fait entamer le 7 janvier sur une loi dont les principales dispositions ont été mises en oeuvre le 5 janvier ! (Applaudissements à gauche)
M. le président. - Amendement n°338, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Dans le texte proposé par cet article pour l'article 47-4 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, après les mots :
Conseil supérieur de l'audiovisuel et après avis
insérer le mot :
conforme
M. Marc Daunis. - N'en déplaise aux fidèles porte-voix du Président de la République, cet amendement au dispositif de l'article 8 serait le plus sûr moyen de sortir de l'hypocrisie qui préside à la nomination des présidents de France Télévisions et de Radio France. Sans remettre en cause la nomination politique des membres du CSA, dont on sait qu'ils iront chercher leurs ordres auprès du Président de la République avant de trancher, nous prévoyons tout simplement que l'avis rendu par les commissions des affaires culturelles devra être conforme. C'est la seule voie, certes étroite, qui éviterait une atteinte profonde aux libertés dans notre pays. Montrons à nos concitoyens la liberté et le courage dont savent faire preuve les parlementaires face à la toute-puissance du Président de la République. Nous renforcerions par là de facto le pouvoir législatif en un temps où la pratique du pouvoir, confortée par la révision constitutionnelle de juillet dernier, fait du Président de la République le chef de l'État, le chef du Gouvernement, le chef de la majorité parlementaire, dans une confusion préoccupante des pouvoirs. Il est temps que les parlementaires posent des bornes à la volonté qu'a le titulaire de la magistrature suprême de s'approprier le régime en détruisant l'indépendance de l'audiovisuel public et en bridant la liberté des journalistes soucieux de délivrer une information critique.
M. le président. - Amendement n°337, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après les mots :
commissions parlementaires compétentes
rédiger comme suit la fin du texte proposé par cet article pour l'article 47-4 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 :
chargées des affaires culturelles. Il ne peut être procédé à la nomination lorsque l'addition des votes positifs dans chaque commission représente moins de trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions.
M. Jean-Luc Fichet. - Il est indispensable que le pouvoir de nomination du Président de la République soit réellement encadré. L'un des plus illustres penseurs des Lumières, Montesquieu, écrivait, dans L'Esprit des lois : « c'est une expérience éternelle, que tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser ; il va jusqu'à ce qu'il trouve des limites. »
La protection de l'indépendance de notre radio et de notre télévision publiques, de la liberté des journalistes y travaillant et du pluralisme qui doit régir leurs programmes, exigent que nous prenions la responsabilité de mettre un frein à l'exercice, par le chef de l'État, du pouvoir de nomination que lui donneraient les dispositions de l'article 8.
Ce serait là marquer notre profonde désapprobation quant au virage que prend aujourd'hui notre République sous la direction de celui qui s'en veut le conducteur et pour lequel la démocratie semble se réduire à la légitimation par les urnes des gouvernants selon le principe : « Puisque j'ai été élu, toutes mes décisions sont légitimes et je ne fais que prendre mes responsabilités. Puisque j'ai la majorité, j'ai tous les droits ! ». Car tel est le sophisme par lequel le chef de l'État justifie ses choix les plus contestables, depuis la restriction des libertés civiles et politiques jusqu'au détricotage de notre protection sociale et de notre droit du travail.
Il impose par là une nouvelle vision de la démocratie et de la responsabilité politique, en totale rupture avec notre longue tradition parlementaire de défense des droits de l'homme, mais cependant selon une pratique très ancienne, puisqu'elle s'inscrit parfaitement dans la doctrine bonapartiste et plébiscitaire qui sacralise la relation directe entre le peuple et son chef, tout en dévalorisant, d'un même mouvement, les corps intermédiaires, la société civile et l'État de droit.
Pierre Rosanvallon, après avoir dressé un tableau similaire, constate que « triomphe simultanément en Russie la théorie de la démocratie souveraine sur laquelle s'appuie le pouvoir pour justifier son droit à restreindre les droits de l'opposition ». De la création d'un ministère de l'identité nationale aux tests ADN, du fait du prince dans la nomination des dirigeants de l'audiovisuel public à la suppression des juges d'instruction en passant par la restriction du droit d'amendement des parlementaires, le président Sarkozy s'inscrit parfaitement dans cette logique « poutinienne ». C'est pour freiner cette tendance mortifère pour notre République que nous appelons solennellement nos collègues de la majorité à nous rejoindre sur cet amendement. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. le président. - Amendement n°443, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles.
Compléter le texte proposé par cet article pour l'article 47-4 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour l'application des dispositions du présent article, la commission parlementaire compétente dans chaque assemblée est celle chargée des affaires culturelles. »
M. Michel Thiollière, rapporteur. - Nous tirons les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel en date du 8 janvier 2009, qui a déclassé les dispositions d'une loi organique portant application de l'article 13 de la Constitution dans la mesure où celles-ci désignaient la commission permanente compétente au sein de chaque assemblée pour la mise en oeuvre de la procédure prévue au dernier alinéa de l'article 13, au motif que cette précision relève de la loi ordinaire.
Nous prévoyons ainsi, dans la loi ordinaire, que la commission compétente est celle chargée des affaires culturelles.
La commission est défavorable aux amendements de suppression n°s130, 260 et 332. On ne peut dire, sauf à méconnaître ce qui est prévu dans ce texte, que le processus de nomination est un oukase présidentiel. Il n'est pas inutile d'en rappeler le déroulement. Le Président de la République soumet une proposition au CSA, qui peut être refusée. (Exclamations ironiques à gauche) Le dispositif est en outre sécurisé par le nombre de voix requises. Il s'agit bien d'un processus de codécision entre le Président et le CSA. (M. David Assouline le conteste) Au Président de la République de proposer un nom, au CSA de l'approuver ou de le refuser. Une fois franchi le barrage du CSA, vient une troisième étape, qui voit la proposition examinée par les commissions des affaires culturelles des deux assemblées, qui peuvent la rejeter conjointement à la majorité des trois cinquièmes. On peut certes regretter que les commissions ne disposent que d'un simple droit de veto requérant de surcroît une si forte majorité, qui produit ce paradoxe que le CSA se voit reconnaître des pouvoirs plus étendus que les commissions parlementaires, mais dès lors que l'on entre dans le champ de l'article 13, on ne peut aller plus loin. Grâce au vote d'un amendement de notre commission, l'audition du candidat pressenti constituera cependant l'épreuve publique du choix du Président, du CSA et des commissions.
La procédure ne se limitera pas à une simple formalité mais donnera au grand public des informations sur le projet du candidat, qui devra justifier à trois reprises, devant le CSA et les commissions des affaires culturelles de chaque assemblée, de ses capacités à diriger l'audiovisuel public.
Avis défavorable également à l'amendement n°131 rectifié, dont je salue cependant l'inventivité institutionnelle. (Sourires) Le projet de loi encadre suffisamment le mode de nomination des présidents. En outre, la procédure proposée par l'amendement n'est pas conforme à la Constitution car elle ne prévoit pas l'intervention du CSA, qui doit au moins détenir un pouvoir de codécision. Cette institution est une autorité administrative indépendante qui garantit la liberté de communication. Au contraire, cette commission pour le pluralisme et les médias serait politique, ce qui n'assurerait pas la nomination d'un président indépendant. Nous n'avons pu, pour la même raison, retenir la proposition de la commission Copé, qui ne donnait au CSA qu'un simple pouvoir de proposition.
Avis défavorable à l'amendement n°336, qui revient au système actuel. Ce projet de loi permet de lever les doutes qui pèsent actuellement sur la nomination des présidents de France Télévisions et de Radio France par le CSA. Puisque chacun s'interroge sur l'influence de l'Élysée dans cette décision, il est préférable que le Président de la République assume et explicite ses choix au vu et au su de tous. L'examen à trois reprises du projet du candidat qu'il propose permettra de s'assurer que sa décision est judicieuse, pertinente et argumentée. Cette transparence constituera un progrès pour la vie démocratique, car il n'y a rien de pire que l'opacité.
Avis défavorable aux amendements nos333, 334 et 335, qui suppriment des dispositions du projet de loi.
Avis défavorable à l'amendement n°261, qui prévoit la nomination des présidents par les conseils d'administration en omettant l'intervention du CSA.
L'amendement n°338 accorde aux commissions un droit de véto dans la procédure de nomination. Nous avons eu un long débat à ce sujet en commission. Nous n'y sommes pas opposés sur le fond, car cela renforcerait notamment le rôle du Sénat, mais cette disposition serait contraire à l'article 13, qui définit le pouvoir de nomination du Président de la République. Nous ne pouvons qu'y être défavorables, ainsi qu'à l'amendement n°337, pour les mêmes raisons.
Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication. - Comme Gérard Longuet nous l'a rappelé hier, le paysage audiovisuel français se caractérise désormais par une offre d'images pléthoriques et des pratiques évoluant très rapidement. Nous sommes loin de l'époque de l'ORTF, où les spectateurs, passifs, n'avaient le choix qu'entre deux ou trois chaînes. Nous vivons à l'ère du zapping, démultiplié par l'accès à internet.
Le Gouvernement choisit d'assumer ses responsabilités au nom de l'État actionnaire, garant des ressources de l'audiovisuel public, dont il fixe les missions dans des cahiers des charges. Dans cette logique, il doit en nommer les dirigeants. Nous assortissons ce pouvoir de verrous car cette nomination, comme nous l'a indiqué M. Thiollière, n'est pas une nomination comme les autres. Tout d'abord, le choix des personnalités pressenties sera largement commenté et analysé. Les candidatures seront examinées par le CSA, qui doit les approuver par un vote à bulletin secret, puis par les commissions parlementaires compétentes lors d'auditions publiques. Et cette nomination n'aura lieu que le moment venu puisque les présidents actuels doivent achever leur mandat.
N'oublions pas que les bons présidents de l'audiovisuel ne sont pas nécessairement des journalistes ou des personnalités des médias : beaucoup de chaînes sont très bien dirigées par des présidents venus du monde de la banque ou de l'industrie. Ainsi, un homme aussi compétent que le regretté Jean Drucker n'aurait certainement pas été candidat dans les conditions actuelles de nomination, qui comportent le risque de brûler ses vaisseaux. Ce projet de loi permettra une évolution adaptée au paysage audiovisuel moderne, et qui n'a pas été jugée contraire à nos institutions par le Conseil d'État.
Je partage l'analyse du rapporteur et suis donc défavorable aux amendements de suppression de l'article ainsi qu'à ceux qui le modifient, parfois pour revenir au système actuel. Sagesse sur l'amendement n°443.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Nous vous entendons souvent dire que le monde et le paysage audiovisuel ont changé. Certes, mais cela justifie-t-il que l'on remplace un mode de nomination pas très démocratique par une procédure qui l'est encore moins ? Telle est la conception gouvernementale de la modernité...
Selon le rapporteur, le Parlement a son mot à dire, car les commissions des affaires culturelles peuvent s'opposer à cette nomination avec plus des trois cinquièmes des voix de ses membres. Et ne nous dites pas que nous avons voté cette disposition constitutionnelle pour nous empêcher de critiquer le projet de loi...
Nous nous demandons souvent à quoi sert le Parlement : les lois se succèdent, mais la majorité refuse le débat et, pour améliorer la vie parlementaire, prévoit d'en limiter la durée. Plutôt que d'user de subterfuge, je vous propose de passer à l'acte. Oui, le Parlement peut servir à quelque chose, c'est pourquoi nous demandons un scrutin public pour supprimer un article antidémocratique.
Et on nous dit : pourquoi ne pas nommer un patron de la chimie ou de l'industrie, assurément bon gestionnaire ? Si c'est le cas, pourquoi le CSA ou les parlementaires n'en ont-ils pas eu l'idée ?
Le Parlement doit servir à défendre les libertés publiques, au premier rang desquelles se trouve l'indépendance de la presse et des médias. Montrez-le en votant notre amendement, qui permet de rouvrir le débat sur la meilleure façon de nommer le président de France Télévisions.
Nous avons fait des propositions ; vous les avez balayées d'un revers de main, prétendant détenir la clé de la modernité. Montrez que vous savez défendre les libertés publiques et l'indépendance des médias ! (Applaudissements à gauche)
M. Bernard Frimat. - Madame la ministre, votre attitude me réjouit parce qu'elle suscite enfin un débat : dans un moment de grâce, vous avez consenti à vous exprimer.
Vous vantez la cohérence et la logique d'un projet de loi que vous dites paré de toutes les verrues, je veux dire les vertus de la modernité. (Rires et sarcasmes à droite) Décidemment, les lapsus sont toujours révélateurs... Vous fondez votre argumentation sur l'idée selon laquelle le CSA serait une sorte de repaire d'hypocrites aux ordres du Président de la République. M. Sarkozy, en Zorro libérateur, serait venu affranchir l'audiovisuel public et répondre aux souhaits des professionnels.
Vous dites ensuite que la procédure comporte des verrous -pas des verrues... Permettez-moi de dire que ces verrous n'auraient pas reçu le label « Norme française » ! Ce sont des verrous de papier ! Vous prétendez que la nomination des présidents des sociétés nationales de programme par le Président de la République permettra d'engager un débat public. Mais ce débat a déjà lieu lors des nominations par le CSA !
Ce dernier devra émettre un avis conforme sur les nominations. Mais reprenons votre argumentation : vous commencez par dire que le CSA est quasiment aux ordres du Président de la République, puis vous prétendez nous apporter une garantie extraordinaire en laissant à cette institution le soin de se prononcer sur les nominations. Je salue la cohérence de ce raisonnement !
Le deuxième verrou consiste, dites-vous, dans le pouvoir de veto des commissions parlementaires. Je reconnais que ce débat est derrière nous, mais nous avons expliqué notre refus de voter cette mesure lors de la révision constitutionnelle. Un veto prononcé par les trois cinquièmes des membres des commissions, c'est un verrou factice ! Comment imaginer, étant donné les larges majorités dans les deux chambres, que l'on ne puisse trouver 40 % des membres des commissions pour approuver une nomination ?
La procédure proposée est archaïque et non moderne : elle nous ramène au doux temps de la télévision et de la radio d'État. (Mme Christiane Demontès applaudit)
M. David Assouline. - Il faut tenter de répondre aux arguments du Gouvernement, qui se pare des vertus de la cohérence.
Si l'on veut être moderne, il faut tenter d'imaginer concrètement l'application de cette mesure. Lorsque viendra le temps de remplacer M. de Carolis, le Président de la République qui, paraît-il, a déjà deux noms en tête, proposera un candidat. Un débat public aura lieu. Mais il a déjà amplement lieu aujourd'hui, lorsque ceux que vous appelez les « hypocrites » désignent le président de France Télévisions, de Radio France ou de RFI.
Ensuite, le CSA devra se prononcer. Mais une partie de votre argumentation ne tient pas ! Il n'est pas question de nommer un dirigeant qui serait hostile au Président de la République : cela ne s'est jamais vu.
Voix à droite. - Si, une fois !
M. David Assouline. - Ce que vous proposez, c'est de laisser seulement au CSA la liberté de s'opposer à l'unique candidature qui lui sera soumise, et d'affronter publiquement le Président de la République et l'État actionnaire ! A n'en pas douter, il utilisera ce droit très fréquemment !
Vous parlez ensuite de verrous parlementaires. Mais si l'on envisage les choses concrètement au lieu d'en rester au papier des lois, il est parfaitement invraisemblable en l'état actuel des choses que 60 % des membres des commissions s'opposent au choix du Président de la République. Vous faites le raisonnement suivant : en cas d'alternance, étant donné le mode de scrutin au Sénat, la majorité actuelle pourra utiliser ce verrou... En nous préparant ces difficultés vous êtes gagnant-gagnant. Nous avons l'air de débattre de grands principes, mais en réalité c'est un calcul de ce genre qui sous-tend votre position !
La codécision dont parle M. le rapporteur est un leurre. Mme la ministre en a elle-même fait l'aveu : elle a dit tout à l'heure que Jean Drucker aurait été candidat s'il eût été sûr que la procédure aboutirait. Cela revient à admettre que, selon la nouvelle procédure, les candidatures aboutiront à coup sûr, et que les prétendus verrous n'existent pas !
Mme Catherine Dumas. - Pas du tout !
M. Dominique Braye. - Vous n'avez rien compris !
M. David Assouline. - Criez si vous voulez, mais on dispose de l'enregistrement et des comptes-rendus des séances, et l'on pourra aisément vérifier. Mme la ministre a dit qu'un candidat qui peut échouer n'est pas un bon candidat (nouvelles protestations à droite), qu'il ne faut pas laisser les gens « brûler leurs vaisseaux ». Malgré toutes ses belles paroles, c'est reconnaître que la proposition du Président sera sûre d'aboutir. Les masques sont tombés !
M. Gérard Longuet. - Je vous invite à ne pas voter ces amendements de suppression. Les sénateurs de l'opposition parlent d'un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître (sourires) : le temps de la télévision d'État, monopolistique, en noir et blanc. Nous vivons aujourd'hui dans un monde très différent.
M. David Assouline. - Un monde autocratique !
M. Gérard Longuet. - Les changements vont s'accélérer avec la diversification de l'offre d'images, la modification des relations entre éditeurs, distributeurs et chaînes. Dans un univers extrêmement compétitif, vous proposez de maintenir un système archaïque.
Peut-être cette réforme n'était-elle pas la première à mener lors de la rentrée parlementaire, mais le Gouvernement nous a soumis un projet de loi, et nous devons l'examiner en prenant en considération non le passé, mais l'avenir, et même l'avenir immédiat. Celui-ci sera marqué par une très forte concurrence entre les chaînes, et le service public, auquel nous tenons tous, devra y tailler sa route sous l'impulsion d'un président doué de l'autorité nécessaire.
Il ne s'agit pas d'un papabile, qui devrait rassembler et ne mécontenter personne, mais d'un chef d'entreprise, qui devra jouir de la confiance de l'État, de l'autorité intellectuelle et morale indispensable pour accomplir ses missions difficiles !
La concurrence dans le domaine des systèmes d'information est très agressive : des firmes informatiques comme Google, des fabricants de téléviseurs comme LG ou Sony mettent actuellement au point un système de captation des téléspectateurs à partir de la page d'offres qui s'affichera désormais lorsque l'on allumera son poste. Le service public a besoin d'être très dynamique pour répondre à ces défis.
M. David Assouline. - Nous ne disons pas le contraire ! Mais le dynamisme passe-t-il par la mainmise de M. Sarkozy ?
M. Gérard Longuet. - La deuxième raison qui plaide en faveur de cette mesure qu'à titre personnel je n'ai pas voulue, c'est le quinquennat. Le Président de la République est désormais clairement le chef de l'exécutif et doit prendre ses responsabilités. C'est lui qui a la charge de faire vivre le service public, il est donc normal qu'il puisse nommer le président de la télévision publique. Il le fera d'ailleurs sous le contrôle du CSA et du Parlement.
Vous dites que ces contrôles sont insuffisants : vous soupçonnez le CSA, que vous avez-vous-mêmes peut-être manipulé lorsque vous étiez au pouvoir (protestations à gauche), de n'être pas assez objectif. Vous avez tort : le CSA a accompli avec conscience et rigueur les missions qui étaient les siennes, à savoir essentiellement de veiller au pluralisme. Quant au Sénat, il évolue : j'ai moi-même siégé un jour dans l'opposition. Acceptez la diversité de la société française, telle qu'elle se reflète dans la composition du Sénat et demain dans celle du CSA, puisque M. le président du Sénat y exercera un pouvoir de nomination. Ne faites pas injure au CSA ni aux commissions parlementaires dont le rôle est d'éviter les excès.
Le projet de loi assurera au président du service public une autorité qui est la clé de son avenir dans l'environnement concurrentiel impitoyable que nous connaissons. (Applaudissements sur les bancs UMP)
M. Michel Mercier. - Je ne voterai pas les amendements de suppression, pour des raisons proches de celles de M. Longuet.
Si l'on est, comme nous le sommes, pour une télévision publique, celle-ci doit être forte, avec une gouvernance clairement établie, un président qui ait des pouvoirs affirmés, des recettes propres, sans quoi elle serait une sous-télévision ou une télévision d'État.
La question de la nomination du président se pose depuis toujours. Nous n'avons pas l'intention d'ironiser sur le CSA ; c'est une institution utile qu'il faut conforter. On la compare au Conseil constitutionnel ; regardons le chemin parcouru par celui-ci depuis 1958 : sa dernière décision montre son indépendance. Notre rôle de parlementaires est de conforter l'autorité du CSA. Le problème est moins la façon dont les membres d'une telle institution sont désignés que celle dont ils exercent leur mandat non renouvelable. Personne ne peut douter du Conseil constitutionnel ; je souhaite que personne ne doute du CSA.
Où est l'hypocrisie ? A une exception près, les gens qui ont été nommés là ne sont pas hostiles au pouvoir en place... Le Président de la République a clairement dit sa préférence : le CSA doit se prononcer à la majorité -il faut que cinq au moins de ses membres acquiescent.
On nous dit que nous, parlementaires serions muets, et de nous assimiler à des pantins qui ne servent à rien. Il n'est pas rare que les paroles de M. Assouline dépassent sa pensée ; ce n'est pas grave, cela fait partie du débat. Ce qui importe est qu'il nous appartient, à nous parlementaires, de créer notre jurisprudence. Même émis à 50,01 %, un avis négatif n'en reste pas moins un avis négatif. Le Parlement a donc un vrai pouvoir, il suffit qu'il s'en serve. Des verrous existent, leur solidité dépend des seuls parlementaires.
Le mode d'élection du Sénat est plus favorable à la gauche que celui de l'Assemblée nationale, pour laquelle il faut d'abord gagner la présidentielle, ce qui paraît moins à votre portée que de remporter les élections régionales et locales. Vous avez donc des espoirs ici avant d'en avoir au Palais-Bourbon ; si vous faites alors votre travail de parlementaires, vous pourrez verrouiller les choses.
Dans l'immédiat, nous ne voterons pas les amendements de suppression. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Jean-Pierre Plancade. - Vu que le débat politique vient d'avoir lieu sur ces amendements, je retire ma demande de scrutin public sur l'article.
M. David Assouline. - Je le fais à votre place !
M. Jean-Pierre Plancade. - On nous parle de modernité, mais on peut aussi être moderne et faire d'autres choix que ceux du Gouvernement. Il suffit de voir les exemples britannique ou allemand. Personne ici n'a de leçons à donner à personne : nous avons tous conscience de l'enjeu des nouvelles technologies. Mais la majorité du RDSE pense que le choix qui nous est proposé n'est ni moderne ni démocratique.
A la demande du groupe CRC, les amendements identiques n°s130, 260 et 332 sont mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 335 |
Nombre de suffrages exprimés | 333 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 167 |
Pour l'adoption | 156 |
Contre | 177 |
Le Sénat n'a pas adopté.
M. David Assouline. - C'est très juste !
M. Claude Domeizel. - Il faudrait une majorité des trois cinquièmes !
présidence de Mme Monique Papon,vice-présidente
M. David Assouline. - Je n'ai jamais dit que les rangs de la majorité n'étaient composés que de muets, j'ai même dit exactement l'inverse : que plus d'une fois j'ai vu certains d'entre vous se lever et parler en conscience. J'ai seulement regretté que cela s'entende si peu dans l'hémicycle même. Quand MM. Longuet et Mercier s'expriment, le débat se met à voler beaucoup plus haut et le travail parlementaire est revalorisé.
A force d'habiller de « modernité » les plus archaïques régressions, vous allez tuer l'appétit de modernité ! Nous sommes pour la modernisation. Nous avons même eu l'audace de dire clairement que nous étions pour l'entreprise unique, car il faut que le service public ne se contente pas de défendre frileusement son périmètre : il serait tellement affaibli face à la concurrence qu'il faudrait se résoudre à la privatisation ou à la faillite.
Si l'on souhaite un service public fort, on est favorable à la modernisation et au média global. Mais avec quel mode de gestion ? Dirigera-t-on avec plus d'autorité parce que l'on a été nommé par le Président de la République ? Certes pas ! Les Français apprécient les engagements partisans clairs de leurs dirigeants politiques, mais la crédibilité d'un président de groupe audiovisuel, en revanche, ne viendra pas de ce qu'il aura été nommé par l'exécutif. Le respect naîtra de l'indépendance, au contraire, et des qualités professionnelles. Vous affaiblissez l'autorité du prochain président de France Télévisions, qui sera considéré comme le copain du chef de l'État, placé là par le bon vouloir de ce dernier.
M. Mercier fait l'éloge du CSA. Mais ce n'est pas nous qui invoquons une hypocrisie de ses décisions pour changer le mode de désignation des présidents de l'audiovisuel public ! Et par notre amendement de repli, nous ne montrons pas du doigt telle ou telle individualité au sein du conseil, nous affirmons la nécessité de revoir le mode de désignation des membres. La modernité nous l'imposera.
L'amendement n°131 n'est pas adopté, non plus que les amendements n°s336, 333, 334, 335, 261, 338 et 337.
L'amendement n°443 est adopté.
Mme Catherine Tasca. - Nous n'espérions guère faire changer d'avis le Gouvernement sur l'article 8, car le Président de la République a dit : « je veux nommer les présidents des chaînes publiques », or sa volonté fait désormais loi dans ce pays, comme s'il avait dans l'élection présidentielle reçu un chèque en blanc, un permis de réformer sans négocier, pas même avec le Parlement. Mais nous, parlementaires, avons le devoir d'inscrire les réformes dans l'histoire, dans les évolutions de la société. L'article 8 est une réponse inacceptable et anachronique à la difficile question de l'indépendance du service public audiovisuel et de ses relations avec le pouvoir politique.
Nous n'avons pas la mémoire courte. Nous savons bien qu'en 1982, si l'État s'est dessaisi de ces nominations au profit de la Haute autorité créée alors, c'est que des mutations se produisaient, de grands groupes privés émergeaient en Europe, nos compatriotes regardaient de plus en plus la télévision, etc. Et le président François Mitterrand a eu la conviction que la démocratie n'avait rien à gagner à une gestion directe de ce secteur par le pouvoir. En 25 ans, une évolution chaotique mais persévérante a conduit à une régulation indépendante de l'audiovisuel : la Haute autorité est devenue Commission nationale de la communication et des libertés, qui a laissé place au CSA.
Pourquoi un tel retournement ? La prétendue hypocrisie du système est un pur alibi, puisque vous ne réformez pas le CSA. La nécessité de libérer les programmes de la pression du marché est un objectif louable mais un argument peu crédible, invoqué par ceux qui préfèrent les partenariats public-privé et le mécénat à une vraie politique culturelle et qui font constamment l'éloge de l'entreprise privée.
Aucune démocratie ne s'est engagée dans la voie que vous choisissez. Le poids croissant des médias audiovisuels dans l'information de nos concitoyens devrait nous rendre plus sensibles encore à l'exigence d'indépendance et de pluralisme. Les futurs dirigeants du secteur public devraient pouvoir puiser dans leur mode de désignation la légitimité, le courage et la force de leur libre détermination. Au lieu de cela, ils seront des obligés, donc des assujettis. Vous commettez une erreur historique. (Applaudissements à gauche)
Mme Marie-Christine Blandin. - Lorsque l'on nous soumet des conventions internationales, elles ont été discutées avec d'autres pays, nous ne pouvons rien modifier : cela est frustrant, mais compréhensible. Lorsque nos amendements se heurtent nuitamment à l'article 40, sans que le président de la commission des affaires culturelles en soit seulement informé, cela est choquant, car nous avons l'impression qu'il s'agit plutôt d'éviter une discussion embarrassante qu'une dépense supplémentaire. Mais lorsque le rapporteur refuse nos amendements au motif qu'il « ne reste plus au législateur qu'à appliquer » les choix faits ailleurs, c'est le glas que l'on sonne pour nos débats, notre autonomie, notre capacité d'arbitrage.
M. Longuet nous renvoie au noir et blanc : revenons-y un instant, pour nous souvenir de cette remarque de Pierre Sabbag, réprimandé par le pouvoir après avoir commenté une cérémonie de couronnement avec une certaine liberté de ton : « ça y est, c'est fini, ils nous ont trouvés ». A l'époque, en effet, les pressions du politique touchaient la presse, la radio, mais la télévision disposait encore d'espaces de liberté. Il y eut une reprise en main. Mais il y eut ensuite des évolutions démocratiques. Aujourd'hui, l'article 8 nous replonge dans le passé. C'est pourquoi nous voterons contre.
M. Yannick Bodin. - Dans le classement des nations, comment distingue-t-on les pays à régime démocratique des pays à régime autoritaire ? Les premiers se caractérisent par une expression régulière et libre du suffrage universel, par le multipartisme, par la liberté d'expression des citoyens, ainsi que par l'indépendance des médias à l'égard du pouvoir exécutif.
Dans un régime autoritaire, les médias sont toujours entre les mains du pouvoir : c'est la première captation ! Je regrette de devoir faire ce type de comparaisons. La France, bien sûr, est une grande démocratie. Mais je crains que l'on soit en train d'abandonner l'un de ces principes...
Le mutisme de nos collègues de la majorité traduit leur embarras. (Protestations sur les bancs UMP). Nous vous entendrons pourtant avec plaisir ! Quant à M. Longuet, il a souligné que ce projet de loi n'avait été demandé par personne, et qu'il n'y avait pas urgence à en débattre : c'est dire l'enthousiasme avec lequel il soutient le Gouvernement !
M. Gérard Longuet. - Je n'ai pas de double langage.
M. Yannick Bodin. - Je comprends votre embarras, avec l'humiliation que l'exécutif inflige à sa majorité ! (Exclamations outrées à droite) Si vous voulez faire acte de démocratie, ayez aujourd'hui le courage de voter contre cet article. Sinon, demain, la France aura perdu une partie d'elle-même. (Applaudissements à gauche ; protestations à droite)
M. Robert del Picchia. - Que de dramatisation ! Il faut suivre l'évolution, si nous ne voulons pas être dépassés : un jour, on aura une télévision à la carte et le service public n'existera pratiquement plus !
Quand elle était ministre, Mme Tasca, que j'estime beaucoup, avouait à Libération avoir « peut-être manqué de courage » : « Admettant avoir commis une erreur d'appréciation, le ministre de la communication s'interroge : plutôt que le CSA, l'État n'aurait-il pas dû choisir les dirigeants d'Antenne 2 et de France 3 ? ».
Mme Catherine Tasca. - Cette citation a beaucoup servi Mme Albanel et M. Lefebvre. J'ai déjà répondu !
M. Robert del Picchia. - Je comprends que vous ayez évolué... En tous cas, nous ne manquerons pas de courage pour voter cet article ! (Applaudissements à droite)
M. Jack Ralite. - Le monde a changé, c'est vrai. Le 25 juin, le Président de la République a déclaré souhaiter que les groupes audiovisuels privés soient puissants. Cette loi ne fait rien d'autre, puisqu'elle affaiblit le service public !
Mme Catherine Tasca. - Bien sûr.
M. Jack Ralite. - Le Président de la République veut « des patrons » pour « l'entreprise France ». Ce n'est pas un changement objectif mais idéologique, et nous y sommes absolument opposés.
Nous suivons Balandier quand il déclare : « Nous sommes dans l'obligation de civiliser les nouveaux nouveaux mondes issus de l'oeuvre civilisatrice. » Le Président de la République fait le contraire. Il accuse le CSA d'être hypocrite mais l'appelle à son secours ! Les hommes et les femmes ne sont pas des produits, comme le sel ou le fer, ce sont des êtres ! On ne peut les gérer comme une entreprise ! La concurrence est totalement faussée, monsieur Longuet : on crée les conditions pour que l'État soit battu !
La grande exposition « Picasso et les Maîtres », une merveille, gagne de l'argent. Les directeurs du musée Picasso, d'Orsay et du Louvre, des hommes incontestés, viennent de passer du côté de la bataille d'entreprise. Ils revendiquent 75 % de ces bénéfices -et la ministre a bien du mal à s'en sortir !
Le rapport Rigaud défend l'inaliénabilité des oeuvres, avec des arguments. Or, dans une note, l'État commence à dire qu'il va quand même faire quelque chose... C'est une gangrène quand on soumet la gestion des biens communs au règne de l'argent. Il faut que M. Loyrette gère son Louvre : les manifestations avec Boulez, c'était du bonheur, artistique et humain ! Or le voilà obligé de compter comme un chef d'entreprise ! On voit comment s'insinue l'esprit d'entreprise... Mais, enfin, l'État n'est pas une entreprise ! La création n'est pas une entreprise ! On s'y casse le nez !
Oui, il faut du courage. Le Président de la République vous a qualifiée de « Mère Courage », madame la ministre. Qu'il lise donc la pièce ! (Sourires) Vous qui avez écrit une pièce à partir de La Célestine, l'inspiratrice du personnage, vous savez que Mère Courage pense se sortir des situations les plus terribles, sans rien payer. Elle a trois enfants : un brave, un probe, un généreux. Tous trois meurent à cause des pratiques de leur mère. Ministre de la culture, vous êtes tutrice de nombreux enfants, dont la télévision et la radio publiques. Espérons qu'aucun ne connaîtra le sort des enfants de Mère Courage... Vous dites qu'il y a assez d'argent, mais tout le monde sait que c'est faux !
Mme la présidente. - Veuillez conclure.
M. Jack Ralite. - N'acceptons pas que la culture comme le civil devienne une entreprise. Nom d'un chien, ce sont les grands patrons et leurs promesses qui ont mis le monde dans le pétrin ! Et c'est ce modèle que vous voulez appliquer à la culture ? Royauté, Empire, République, toujours la culture a échappé au règne de l'argent ! Sarkozy a choisi son camp, moi le mien : il dit oui à ce projet de loi, moi je dis non ! (Applaudissements enthousiastes à gauche)
M. Jean-Pierre Sueur. - Était-il besoin d'inscrire dans l'article 34 de la Constitution le principe d'indépendance des médias pour se retrouver aujourd'hui avec ce texte ? Vous dénoncez l'hypocrisie de la situation actuelle. De deux choses l'une : ou le CSA ne sert à rien, et il faut l'abolir, ou il faut une institution indépendante, ce qui suppose de changer le mode de nomination de ses membres, comme nous l'avons maintes fois proposé. S'il y a hypocrisie, il ne faut pas en tirer parti pour la généraliser, pour en revenir au pouvoir régalien pur et simple ! Peut-être est-ce hors de portée d'avoir une institution indépendante, des procédures indépendantes, objectives et impartiales pour nommer les présidents des chaînes publiques.
On peut même penser que c'est impossible, mais, dans le cas contraire, pourquoi persister à nous présenter une nomination régalienne ? Avec ce qui se passe en Allemagne, en Grande-Bretagne et partout en Europe, vous aurez beaucoup de mal à défendre la subordination de l'audiovisuel public au bon vouloir d'un seul. Ce serait une singulière régression et, surtout, une singulière contradiction avec ce que l'on pourrait espérer !
Tout semble émaner du Président de la République, il décide et vous appliquez. Cette conception de la société est incompatible avec l'indépendance des médias et de l'information !
A la demande du groupe socialiste, l'article 8 est mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 335 |
Nombre de suffrages exprimés | 332 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 167 |
Pour l'adoption | 175 |
Contre | 157 |
Le Sénat a adopté.
Mme Catherine Tasca. - Ça se resserre !
Article 9
Le premier alinéa de l'article 47-5 de la même loi est ainsi rédigé :
« Le mandat des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France peut leur être retiré par décret motivé, après avis conforme, également motivé, du Conseil supérieur de l'audiovisuel et avis des commissions parlementaires compétentes dans les mêmes conditions que celles prévues par la loi organique n° du précitée. »
M. Guy Fischer. - Opposés à la nomination des présidents de l'audiovisuel public par le Président de la République, nous le sommes au moins autant au pouvoir qu'aurait le chef de l'État de révoquer ceux qu'il aurait nommés.
Certes, le parallélisme des formes fait partie de nos traditions juridiques, mais en matière de presse et d'information, la capacité de nomination -ô combien politique !- ne devrait pas se doubler d'un pouvoir de révocation, car celui-ci s'apparente à une sanction que subirait un responsable dont l'allégeance serait jugée insuffisante.
Là encore, les prétendues garanties présentées ne sont que de pâles alibis.
Le Président, qui a fait campagne sur le thème de la rupture, aurait dû l'appliquer à cette contre-réforme de l'audiovisuel ! En matière de nomination et de révocation, on nous promettait la fin de la République des copains et des nominations partisanes. Mais nous avons vu l'inverse, avec la commission sur la réforme de la Constitution présidée par M. Balladur, avec la commission sur le préambule de la Constitution de 1946 présidée par Mme Veil, celle relative à la réforme des collectivités territoriales étant derechef présidée par M. Balladur ! M. Jouyet, ancien ministre du Président, est aujourd'hui à la tête de l'Autorité des marchés financiers. Il faudrait encore ajouter la nomination de M. Frédéric Pechenard, un ami d'enfance de M. Sarkozy, comme directeur général de la police nationale. De même, M. Michel Gaudin, un de ses proches au ministère de l'intérieur, est devenu préfet de police. Et je ne parle pas de ce que l'on nous prépare avec les juges de l'instruction !
Nous sommes très loin de l'époque où Nicolas Sarkozy affirmait que, dans une démocratie irréprochable, les nominations se décident non en fonction des connivences et des amitiés, mais en fonction des compétences. Je regrette qu'il ne s'applique pas ces propos, qu'il a tenus lors de son investiture.
Nous attendons encore la rupture ! (Applaudissements sur les bancs CRC-SPG)
M. David Assouline. - Nous ne voulons pas que le Président de la République puisse révoquer les présidents de l'audiovisuel public.
On nous objectera que cette prérogative est le strict parallèle de la nomination confiée au chef de l'État. Nous n'insisterons pas sur l'hypocrisie d'une procédure qui fait intervenir l'onction du CSA, tenu en main par le Président de la République, de même que celle de la majorité dont il est le chef autoproclamé...
Ce qui est en cause, c'est la régression démocratique constituée par le pouvoir de nomination et de révocation conféré au Président de la République.
Les parlementaires de l'opposition ne sont pas les seuls à se mobiliser contre le bon plaisir du chef de l'État, car de très nombreux journalistes et la majorité de nos concitoyens désapprouvent publiquement cette nouvelle attribution. Une enquête d'opinion, effectuée en décembre par l'institut CSA pour Aujourd'hui en France, montre que les trois quarts des Français la désapprouvent.
Le débat parlementaire sur la publicité se passe largement au-dessus de la tête des Français, mais pas celui qui porte sur l'indépendance de l'audiovisuel public. Leur jugement est nourri par les inquiétantes atteintes aux libertés commises au cours des vingt premiers mois de la présidence Sarkozy.
Essayons d'éclairer nos collègues de la majorité sur la philosophie de leur chef incontesté dans la volonté de brider le pluralisme de l'information et l'indépendance des médias. Quelqu'un a dit : « Les journalistes n'expriment que des intérêts particuliers ; ils ne représentent que leurs lecteurs, alors que je représente l'intérêt général ». L'auteur de ces propos n'était pas l'actuel locataire de l'Élysée, mais Napoléon III. Malheureusement pour notre démocratie, certaines paroles sont trop semblables pour que, une fois n'est pas coutume, comparaison ne soit pas raison. Tel est le penchant de notre Président, dont la légitimité démocratique est par ailleurs incontestable.
Mais dans une démocratie, l'exercice du pouvoir majoritaire subit des contraintes indispensables à l'État de droit. L'indépendance de l'audiovisuel public en fait partie, donc les procédures de nomination et de révocation de ses dirigeants.
Ne pas attribuer au Président de la République le pouvoir de révocation relativiserait son pouvoir de nomination.
Mme la présidente. - Amendement n°132, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.
Supprimer cet article.
M. Ivan Renar. - L'article 9 poursuit un édifice quasi autoritaire : après la nomination, la révocation ! Pourtant notre doit entoure celle-ci de plus de garanties, ainsi pour les magistrats. Ne soumettons pas les présidents des sociétés de l'audiovisuel public au bon vouloir du Président de la République et à l'arbitraire d'une révocation ; ne privons pas le conseil d'administration de ces sociétés d'une prérogative importante : avec l'article 9, son président ne serait pas responsable devant lui. Que peut-on attendre d'un CSA non réformé et pourquoi l'avis des commissions n'est-il pas requis en amont ? La seule garantie consiste à choisir un système plus démocratique. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRC-SPG)
Mme la présidente. - Amendement identique n°262, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et MM. Desessard et Muller.
Mme Marie-Christine Blandin. - Il y a plus grave que la nomination : la menace de la révocation. Il n'y a pas parallélisme des effets et des dégâts collatéraux ; il n'y a pas équivalence de dépendance. Voici comment notre République protège sa démocratie : le président du Conseil constitutionnel est nommé par le Président de la République, mais inamovible ; les magistrats du siège sont nommés par le Président de la République, mais inamovibles. L'indépendance des présidents des sociétés de l'audiovisuel public est l'une des conditions de l'exerce effectif des libertés garanties par la Constitution.
Le rapporteur évoquait la méfiance qui entourerait les liens entre le Président de la République pour conclure, performance argumentative !, que le Président de la République serait d'autant plus vigilant.
Dans un premier temps, on a une présidence aux ordres ; dans un deuxième temps, l'audiovisuel public est pris dans l'étau de ses dépenses obligatoires et de moyens insuffisants face à une concurrence déloyale et privilégiée, d'où une baisse des effectifs, un climat social détestable : le Président de la République feint alors de s'étonner des déficits qu'il a provoqués et use de son pouvoir de révocation. Belle invention : d'abord le courtisan zélé puis le fusible qui saute après que les vilaines besognes ont été faites. Révocation inédite et antidémocratique, risque de politique verticale et de dépendance, risque, trop facile, du fusible : trois bonnes raisons de supprimer l'article. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme la présidente. - Amendement identique n°339, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
M. Jean-Pierre Sueur. - Cet amendement est d'une évidence totale. Le Président tout puissant pourrait nommer par décret et révoquer, comme les monarques en avaient autrefois le pouvoir. Cela heurte le sens démocratique, le pluralisme et la liberté d'opinion, qui nous tiennent à coeur. Le Président révoque et le président de France Télévisions se dit tous les jours : « il faut que j'accomplisse mon travail, que je veille au pluralisme et que je fasse preuve d'ouverture mais, attention !, pas d'actes inconsidérés qui me porteraient tort... » La révocation est là qui parle toute seule, même si elle ne dit rien. Comment la ministre de la culture a-t-elle pu accepter de parler de révocation ? Certains de nos collègues de l'UMP n'ont pas été convaincus. Il n'est pas digne du Sénat d'accepter cette révocation. (Applaudissements à gauche)
Mme la présidente. - Amendement n°133, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.
Rédiger comme suit le second alinéa de cet article :
« Le mandat des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France peut, en cas de manquement grave à leur fonction, leur être retiré par un vote à la majorité qualifiée de leur conseil d'administration. Ce vote peut intervenir à l'initiative du Conseil d'administration des entreprises en question, ou sur proposition motivée de la commission parlementaire pour le pluralisme et les médias instituée à l'article 47-4. »
M. Ivan Renar. - J'ai cru que M. Sueur allait parler de révocation... de l'édit de Nantes. (Sourires)
Le scandaleux dispositif de nomination-révocation constitue une aberration démocratique. Il est douloureux, pour les élus attachés à la culture et au pluralisme, de voir ainsi instrumentaliser ces valeurs au bénéfice d'intérêts particuliers. Votre abracadabrantesque architecture ne se justifie en rien, qui n'a rien à voir avec l'objectif affiché de qualité du service public. Elle est aussi contreproductive que dangereuse.
Il faut délier les présidents de l'audiovisuel public et l'exécutif, d'où notre proposition d'un véritable système de codécision entre deux entités indépendantes et légitimes : alors, et alors seulement, la révocation ne ressemblera plus à une lettre de cachet. Seul le conseil d'administration des sociétés audiovisuelles devrait pouvoir révoquer leurs présidents, Nous proposons que la révocation n'intervienne qu'en cas de faute grave et qu'elle soit validée par un vote à la majorité qualifiée sur proposition des membres du conseil d'administration ou de la commission mixte parlementaire pour le pluralisme des médias, cette instance de vigilance extérieure au conseil d'administration dont nous avions suggéré la création à l'article précédent. A défaut, confier cette prérogative aux commissions des affaires culturelles éviterait une monstruosité démocratique. Soyons à la hauteur de la situation et protégeons les libertés publiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRC-SPG)
Mme la présidente. - Amendement n°20, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles.
Rédiger comme suit le second alinéa cet article :
« Le mandat des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France peut leur être retiré par décret motivé après avis conforme, également motivé, du Conseil supérieur de l'audiovisuel et avis public des commissions parlementaires chargées des affaires culturelles. Il ne peut être procédé à ce retrait lorsque l'addition des votes positifs dans chaque commission représente moins de trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions. »
M. Michel Thiollière, rapporteur. - La véritable indépendance tient plus au mode de révocation qu'à celui de nomination. Notre droit le montre : les magistrats du siège sont nommés sur avis du Conseil supérieur de la magistrature mais sont inamovibles ; les membres des autorités administratives indépendantes sont nommés par des autorités politiques, mais elles sont irrévocables. Et c'est logique car nul n'est réellement dépendant de celui qui ne peut le révoquer : il ne pourra y avoir révocation, et nous y tenions, si le Sénat ou l'opposition la refusent.
L'article 13 de la Constitution ne vise que la nomination.
En revanche, l'article 34, depuis la réforme constitutionnelle, donne compétence au législateur pour garantir l'indépendance des médias. A nous de nous en saisir. Le dispositif proposé par le Gouvernement propose des garanties inférieures au droit en vigueur, recul qui pourrait bien être censuré par le Conseil constitutionnel. C'est pourquoi nous proposons que la révocation du président exige un vote positif. Le débat sur l'indépendance du Parlement est ouvert. Pas plus que les journalistes nous ne sommes des moutons de Panurge. Nous avons prévu pour eux des dispositions propres à garantir leur indépendance et leur droit d'expression. Donnons-nous, avec cet amendement, la possibilité d'exprimer ce que nous souhaitons. (Applaudissements sur les bancs UMP)
Mme la présidente. - Sous-amendement n°225 rectifié à l'amendement n°20 de Mme Morin-Desailly , au nom de la commission des affaires culturelles, présenté par M. Mercier et les membres du groupe UC.
Dans le second alinéa de l'amendement n°20, après les mots :
Conseil supérieur de l'audiovisuel
insérer les mots :
, émis à la majorité des membres le composant,
M. Michel Mercier. - Légiférer sur la question du retrait du mandat est nécessaire. La suppression de l'article 9 serait une grave erreur, qui produirait un effet contraire au but recherché, puisque c'est alors l'article 47-5, qui dispose, sans autre forme de procès, que le CSA met fin aux fonctions du président de France Télévisions, qui s'appliquerait.
M. David Assouline. - Et alors ?
M. Michel Mercier. - Et alors, monsieur Assouline, à force de faire passer des renoncements pour des progrès... Je rejoins donc pleinement Mme Blandin qui considère que dans le statut du président, la révocation est plus importante encore que la nomination. La commission nous propose un décret rendu sur avis motivé du CSA. Ceci entraîne, en droit, où les mots ont un sens lié à une longue tradition d'interprétation -Actus intelligendi sunt potius ut valeant quam ut pereant- que le Conseil d'État aura à se prononcer sur l'adéquation au contrôle du Conseil d'État, sauf erreur manifeste d'appréciation. Le CSA doit cependant pouvoir décider, ainsi que je le propose, à la majorité de ses membres, soit au moins cinq sur neuf. Le dispositif, ainsi sous-amendé, présente des garanties essentielles pour les libertés publiques et constituerait une avancée fondamentale sur le droit en vigueur.
Mme la présidente. - Amendement n°340, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Dans le second alinéa de cet article, remplacer les mots :
des sociétés France Télévisions et
par les mots :
de la société
M. Claude Bérit Débat. - L'épée de Damoclès suspendue par cet article sur le président de France Télévisions remet non seulement en cause le principe d'indépendance du service public de l'audiovisuel mais interdira toute autonomie de gestion. Adoptez au moins cet amendement de repli montrant l'attachement du Sénat à la télévision publique.
Mme la présidente. - Amendement n°341, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Dans le second alinéa de cet article, remplacer les mots :
des sociétés France Télévisions et Radio France
par les mots :
de la société Radio France
Mme Maryvonne Blondin. - Radio France participe autant que France Télévisions au service public de l'audiovisuel, chargé de garantir la diversité des programmes et le pluralisme de l'information. Son dirigeant ne doit pas être soumis à la tutelle de l'Élysée.
Mme la présidente. - Amendement n°342, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Dans le second alinéa de cet article, supprimer les mots :
et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France
M. Claude Domeizel. - Le même raisonnement que précédemment s'applique à la société chargée de l'audiovisuel extérieur, et plus encore peut-être, car elle participe non seulement au service public de l'audiovisuel mais aussi à l'action internationale de notre pays. TV5 Monde joue un rôle essentiel en faveur de la francophonie sur les ondes. Des millions de francophones à travers le monde ont accès, grâce à elle, aux programmes des chaînes françaises, québécoises, suisses et wallonnes. RFI concourt au pluralisme de l'information et à la diversité des programmes internationaux. France 24 permet à l'audiovisuel français d'entrer dans le club très fermé des chaînes d'information en continu. Ces sociétés doivent être plus encore que les autres préservées du bon vouloir du chef de l'État.
Mme la présidente. - Amendement n°263, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et MM. Desessard et Muller.
Après le mot :
retiré
rédiger comme suit la fin du second alinéa de cet article :
pour manquement grave par la majorité de leurs conseils d'administration.
Mme Marie-Christine Blandin. - La révocation doit être motivée, mais nous sommes plus courageux encore que M. Mercier car nous proposons qu'elle ne puisse être proposée que pour manquement grave et après arbitrage initial du conseil d'administration. La révocation ici prévue laisse toute place à l'arbitraire. Tout peut y donner prétexte, à commencer par la situation financière calamiteuse dans laquelle France Télévisions se trouvera dans deux ans si nous poursuivons le chemin de restriction des ressources et de cadeau au secteur privé sur lequel ce projet nous engage.
Mme la présidente. - Amendement n°343, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Dans le second alinéa de cet article, après les mots :
Conseil supérieur de l'audiovisuel et avis
insérer le mot :
conforme
M. Claude Bérit Débat. - Le pouvoir de révocation doit être sérieusement encadré, tant pour France Télévisions que pour Radio France. En laissant un pouvoir exorbitant au Président de la République, nous lui laissons toute latitude pour faire main basse sur l'audiovisuel public. Nous débattions hier du pluralisme sur France Télévisions. Il sera d'autant mieux garanti que les pouvoirs du Président de la République seront précisément encadrés. On ne peut lui laisser faire la pluie et le beau temps à la télévision : nous ne pouvons transiger là-dessus. Des garde-fous sont nécessaires. La procédure de nomination constitue déjà une anomalie démocratique et je ne désespère pas de voir le Conseil constitutionnel en rejeter le dispositif.
Nous proposons donc que les commissions compétentes disposent d'un droit de veto sur la décision de révocation.
Le Président de la République serait lié car il ne pourrait révoquer un dirigeant sans avis conforme des commissions. Le Gouvernement signalerait ainsi clairement au citoyen que cette réforme n'est pas qu'un strict retour au temps de l'ORTF... Les atteintes au pluralisme, à l'indépendance, les menaces qui pèsent sur la survie même de l'audiovisuel public seraient atténuées. La visibilité et la légitimité du Parlement seraient en outre renforcées, ce qui ne serait pas superflu après l'attitude méprisante qui lui a récemment été opposée par l'application partielle d'une loi avant que le Sénat n'en débatte.
M. Michel Thiollière, rapporteur. - Je comprends l'inquiétude exprimée par mes collègues avec les amendements de suppression nos132, 262 et 339, mais la position de la commission est de renforcer les garanties plutôt que de supprimer ces dispositions. Avis défavorable, ainsi qu'à l'amendement n°133 : l'amendement de la commission est plus protecteur.
Avis très favorable au sous-amendement n°225, qui conforte l'amendement de la commission en donnant un rôle accru au CSA en cas de retrait de mandat.
Avis défavorable aux amendements nos340, 341 et 342, qui vident l'article de son contenu, ainsi qu'à l'amendement n°263 : le dispositif proposé par la commission englobe cette proposition et est plus protecteur.
L'amendement n°343 est assez proche de celui de la commission, que nous lui préférons cependant. Avis défavorable.
Mme Christine Albanel, ministre. - On ne peut parler ici de révocation, car ce terme ne s'applique qu'aux hauts fonctionnaires et aux militaires de haut rang, agents de l'État. Pour les présidents de l'audiovisuel public, il s'agit d'un retrait de mandat similaire aux dispositions s'appliquant à la nomination. Le président Mercier a rappelé que les dispositions de retrait étaient jusqu'ici extrêmement succinctes. L'article 9 explicite la procédure et l'assortit de garanties.
Le retrait doit se faire par décret motivé, ce qui permet de le déférer au Conseil d'État ; il est soumis à l'avis conforme, également motivé, du CSA et des commissions compétentes, dont les débats seront publics. En outre, ce type d'interruption de mandat n'a jamais eu lieu par le passé et demeure extrêmement improbable dans l'avenir.
Je souscris à l'argumentation de M. Thiollière pour justifier le rejet des amendements supprimant ou modifiant l'article. Je comprends le souhait de la commission de prévoir des garanties supplémentaires pour cette procédure, mais crains que l'amendement n°20 ne soit inconstitutionnel aux termes de l'article 13 -je l'ai déjà indiqué à l'Assemblée nationale lors du vote de cet article-, d'autant plus que l'on rompt ainsi avec le parallélisme des formes entre le retrait et la nomination. Avis défavorable, en conséquence, mais avis favorable au sous-amendement n°225 rectifié qui prévoit que le CSA se prononce à la majorité des membres le composant.
M. David Assouline. - En commission comme au cours de ce débat, nous cherchons à améliorer les procédures prévues, et certains amendements socialistes portant sur des questions importantes ont été adoptés. Si nous sommes opposés sur le fond à cet article, comme nous le sommes à la nouvelle procédure de nomination prévue, l'amendement de la commission est bienvenu pour mieux l'encadrer. La majorité positive des trois cinquièmes des membres de la commission est plus difficile à obtenir que la majorité négative.
Il serait souhaitable d'adopter la même procédure pour la nomination.
M. Jean-Pierre Sueur. - Évidemment !
M. David Assouline. - On nous oppose le risque d'inconstitutionnalité, mais nous pourrions le faire en attendant l'avis du Conseil constitutionnel puisque l'amendement de la commission ose cette démarche. C'est tout l'honneur du Sénat d'essayer d'obtenir le plus de garanties possibles.
Si nous soutenons l'amendement de la commission, j'ai souvent pensé, au cours de ce débat, que la volonté présidentielle était davantage motivée par des objectifs à court terme plutôt que par le désir d'améliorer des dispositifs démocratiques. Or il peut être important d'encadrer strictement les possibilités de révocation : dans deux ans, le Président aura toute liberté pour nommer de nouveaux dirigeants mais leur révocation sera devenue impossible sans un large consensus et, en cas d'alternance, nous ne pourrions pas en changer... Fais-je un procès d'intention au Président de la république ? Quoi qu'il en soit, nous voulons apporter toutes les améliorations possibles et renforcer les garanties d'indépendance, indépendamment de notre intérêt partisan. Nous agissons par principe. (M. Michel Mercier s'étonne) Oui, monsieur Mercier, nous avons des principes...
M. Michel Mercier. - Ce ne sont pas les mêmes que les nôtres ! (Sourires)
M. David Assouline. - Nous sommes favorables aux amendements de suppression, mais nous voterons celui de la commission. D'autant plus que la ministre s'y oppose !
M. Claude Domeizel. - Il m'arrive d'être parfois assez taquin, madame la ministre. (Sourires)
Peut-être allons-nous voter à l'unanimité ces amendements de suppression : nous, pour les raisons que nous avons dites, et vous, pour celles que je vais vous exposer. (Marques de surprise amusée à droite) Si cet article est supprimé, nous revenons à l'article 47-5 de la loi du 30 septembre 1986, selon lequel « les mandats des présidents des conseils d'administration des sociétés mentionnées aux articles 47-1 à 43-3 peuvent leur être retirés dans les mêmes formes que celles dans lesquelles ils leur ont été confiés ». Cela permettrait de satisfaire l'amendement de la commission.
M. Michel Mercier. - Mais non !
M. Jean-Pierre Plancade. - Je me réjouis que la commission ait maintenu son amendement, et que notre excellent collègue Assouline ait changé d'avis depuis hier.
M. David Assouline. - Ne parlez pas à ma place !
M. Jean-Pierre Plancade. - Je m'en garde bien... Le groupe RDSE votera bien sûr l'amendement de la commission.
M. Michel Mercier. - Nous ne voterons pas les amendements de suppression, qui conduiraient au rétablissement de l'actuel article 47-5, alors que la commission propose très judicieusement de renverser la proportion : la révocation devra être approuvée par les trois cinquièmes des membres des commissions. Ce dispositif renforce les garanties apportées aux présidents des trois sociétés.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur de la commission des affaires culturelles. - En effet !
M. Yvon Collin. - Très bien !
M. Jean-Jacques Mirassou. - Ce débat est surréaliste, ou plutôt hyperréaliste. Nous sommes confrontés à un effet domino : tout à l'heure nous avons passé plusieurs heures à débattre d'une procédure de nomination que vous présentiez comme rationnelle, quasi scientifique, assurant l'infaillibilité du choix. Puis nous avons passé presque autant de temps à discuter de la révocation de ces dirigeants infailliblement choisis ! C'est le retour à la case départ. Le problème posé par l'article 9 n'existerait pas si vous n'aviez pas voté l'article 8.
A la demande du groupe CRC-SPG, les amendements n°s132, 262 et 339 sont mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 332 |
Nombre de suffrages exprimés | 331 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 166 |
Pour l'adoption | 140 |
Contre | 191 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n°133 n'est pas adopté.
Le sous-amendement n°225 rectifié est adopté, les groupes socialiste et CRC-SPG s'abstenant.
M. David Assouline. - Je vais tâcher d'être clair, pour que M. Plancade ne puisse interpréter mes propos à contresens. (M. Jean-Pierre Plancade s'en défend)
En toute logique, nous souhaitions la suppression de l'article 9 relatif à la révocation des dirigeants des sociétés nationales de programme, puisque nous étions défavorables à l'article relatif à leur nomination. Mais ce débat est clos. Nous sommes à présent sur une position de repli, et tentons de préserver ce qui peut l'être, de soutenir les mesures qui s'éloignent le moins de nos principes et de nos valeurs. L'avis défavorable du Gouvernement à l'amendement de la commission est un aveu : l'exécutif aimerait avoir les mains libres pour révoquer comme pour nommer ces dirigeants. La commission propose d'encadrer un peu mieux la procédure de révocation : nous y sommes favorables, faute de mieux.
Monsieur Mercier, puisque vous soutenez cet amendement...
M. Michel Mercier. - Je l'ai dit.
M. David Assouline. - ...il aurait fallu nous entendre au sujet de la procédure de nomination. Si vous jugez que la révocation doit être approuvée par une majorité des trois cinquièmes, le parallélisme des formes aurait dû vous inciter à juger de même pour la nomination.
M. Michel Mercier. - Le parallélisme des formes ne s'impose pas en la matière.
M. David Assouline. - Nous soutenons cet amendement, animés par la même logique que sur l'article précédent. Mais vous, vous ne faisiez pas preuve tout à l'heure de la même vigilance. Vous disiez : « Il est parfaitement normal que le Président puisse nommer qui il veut. Une gouvernance moderne, c'est un vrai chef, nommé par un vrai président. Circulez, il n'y a rien à voir, et apprêtez-vous à retrouver l'écran en noir et blanc de votre enfance ! »
Espérons seulement que l'amendement de la commission survivra à la CMP et à l'examen du Conseil constitutionnel ! Espérons que les sénateurs ne se laisseront pas marcher sur les pieds en CMP !
M. Michel Mercier. - Nos collègues socialistes nous ont reproché de ne pas parler hier, qu'ils ne nous empêchent pas de parler aujourd'hui. Contrairement à vous, je ne donne de leçons à personne.
Ce texte sera certainement soumis au Conseil constitutionnel, et nous devons lui donner des arguments pour le valider. L'avis de Mme la ministre se fonde, me semble-t-il, sur des raisons juridiques qui étaient valables avant la dernière révision constitutionnelle. Le parallélisme des formes, ici, ne s'impose pas : le constituant a décidé de fixer les conditions de nomination aux emplois les plus importants, mais il n'a rien dit des conditions de révocation. (Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur, marque son approbation) Voyons donc à présent comment nous pouvons garantir le pouvoir de contrôle du Parlement en ce qui concerne les révocations.
Que le Parlement ait son mot à dire au sujet de ces révocations résulte certes des compétences générales énoncées par l'article 34 de la Constitution.
Ce qui vous gêne, c'est l'avis des commissions, et surtout l'autorisation qu'elles peuvent donner ou non. L'article 34 dans sa nouvelle rédaction rappelle que le Parlement est le gardien du pluralisme et de l'indépendance des médias.
M. David Assouline. - Grâce à vous ?
M. Michel Mercier. - Pas grâce à vous, en tout cas ! Oui, j'ai pris ma part de la révision de la Constitution, et je veux qu'on s'en serve. Ou bien cet article 34 ne veut rien dire, ou bien il veut dire quelque chose. Cette disposition fait partie à nos yeux des droits nouveaux du Parlement.
M. Jean-Jacques Mirassou. - S'il n'est pas consulté...
M. Michel Mercier. - Je ne vous ai pas coupé. Apprenez les bonnes manières ! (Applaudissements sur les bancs UMP)
M. Ivan Renar. - Ce n'était qu'une ponctuation !
M. Michel Mercier. - Nous devons montrer que nous avons conscience que ces droits nouveaux existent et que nous avons l'intention de nous en servir. L'amendement de la commission n'est pas contraire à la Constitution et nous pouvons le voter. Il représente un grand progrès.
M. Jean-Pierre Sueur. - La dialectique de madame la ministre est subtile mais non convaincante : en dépit des arguties, chacun comprend qu'il s'agit en fait de la même chose.
Ce membre de phrase de l'article 34 a été défendu par M. Assouline, rendez-lui en acte ! Je ne vois pas en quoi il serait constitutionnel que le Président de la République, personnalité éminemment politique, désigne par décret le président de la télévision, dont l'indépendance est désormais garantie par la Constitution ! C'est un recul manifeste. La jurisprudence du Conseil constitutionnel est claire.
M. Mercier se donne beaucoup de mal pour tenter d'accréditer l'idée qu'il n'y aurait pas de parallélisme des formes ; je le renvoie, là encore, à la jurisprudence du Conseil constitutionnel : il s'en dégage qu'il y a un rapport entre l'acte de nommer et celui de retirer un mandat, nonobstant le fait que, lorsque cette jurisprudence a été élaborée, la Constitution n'évoquait pas encore cette question.
Enfin, une évidence s'impose : je vais voter l'amendement de la commission, dans l'esprit qu'a exposé M. Assouline, mais, dès lors que l'on dit ainsi qu'une majorité peut décider le retrait d'un mandat, il devient impossible de comprendre que le même argument ne vaille pas quand il est question de nomination. Si vous aviez voté pour une majorité des trois cinquièmes, cela aurait signifié que la nomination du président de la société aurait résulté d'un consensus avec au moins une partie de l'opposition. On aurait alors fait un pas vers la « République moderne » que Pierre Mendès-France appelait de ses voeux.
M. Serge Lagauche. - Si j'entends bien M. Mercier, je dois comprendre qu'un accord est conclu dans la majorité pour avancer dans ce sens et que la commission mixte paritaire n'infligera pas un camouflet au Sénat. C'est un point important, sur lequel M. Mercier et la majorité s'engagent.
L'amendement n°20 est adopté.
Les autres amendements deviennent sans objet.
L'article 9 modifié est adopté.
La séance est suspendue à 19 h 40.
présidence de M. Roger Romani,vice-président
La séance reprend à 21 h 45.
Article 10
À l'article 47-6 de la même loi, les mots : «, ni aux conventions conclues entre la société France Télévisions et les sociétés France 2, France 3, France 5 et Réseau France outre-mer, ainsi que les sociétés visées au dernier alinéa du I de l'article 44 » sont supprimés.
M. le président. - Amendement n°134, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.
Supprimer cet article.
Mme Isabelle Pasquet. - Ce projet de loi, en supprimant toute référence aux différentes sociétés de programmes, autorise ainsi le démantèlement de France Télévisions. Le cahier des charges qui est prévu ne garantit en rien le maintien du périmètre actuel du service public, ce qui ouvre la voie à la privatisation ou à la disparition de certaines chaînes publiques, ce qui irait à l'encontre de la convention de l'Unesco sur la promotion de la diversité culturelle et de son expression.
En effaçant de la loi le nom des chaînes publiques, le Gouvernement pourra demain les privatiser. La casse du service public audiovisuel sera d'autant plus facile que les parlementaires n'auront plus de droit de regard, puisque l'existence de la télévision publique n'aura plus valeur législative. L'exécutif pourra donc exercer une tutelle économique, éditoriale et politique sans les contre-pouvoirs qu'exige tout régime démocratique.
Du fait de l'asphyxie économique à laquelle vous condamnez le service public, vous pourrez justifier la diminution du nombre de ses chaînes, alors qu'il est un des plus performants en Europe. (M. Ivan Renar applaudit)
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. - Avis défavorable, car ce projet de loi ne démantèle en rien France Télévisions.
Mme Christine Albanel, ministre. - Même avis défavorable : cet article de coordination ne peut être supprimé.
M. David Assouline. - Nous ne voterons pas cet amendement, du fait de la position de principe que nous avons prise : nous sommes partisans de l'entreprise unique et du média global, sans démantèlement, bien sûr, des services existants. L'entreprise unique est nécessaire, comme nous l'ont rappelé les personnels de France Télévisions. La commission Copé y était d'ailleurs également favorable, pour que le service public puisse se moderniser et entrer dans l'ère numérique. Soucieux d'aller de l'avant, nous appelons de nos voeux la réforme. Ce n'est pas l'entreprise unique qui risque d'entrainer le démantèlement, mais la vision qu'a le Gouvernement de ce dossier.
L'amendement n°134 n'est pas adopté.
L'article 10 est adopté.
Article 11
Le II de l'article 26 de la même loi est ainsi modifié :
1° Aux premier et cinquième alinéas, après les mots : « à l'article 44 », sont insérés les mots : « ou à leurs filiales répondant à des obligations de service public » ;
2° La seconde phrase du premier alinéa est supprimée.
Mme Marie-Christine Blandin. - Cet article garantit à RFI, ravalée au rang de filiale, un juste accès aux fréquences. La ressource radioélectrique est un bien commun, même si elle est moins bien identifiée que l'eau ou l'air et il est normal que les sociétés publiques aient un droit d'usage de cette ressource, comme le précise la loi de 1986, tandis que les opérateurs privés doivent postuler pour pouvoir l'utiliser.
Cet article précise à juste titre que le droit d'usage des sociétés publiques s'étend désormais aux filiales. Mais l'article 3 traitait aussi des filiales et notre amendement qui proposait qu'elles respectent les missions de service public a été repoussé. Notre rapporteur nous a dit qu'une filiale de diversification avait par nature des objectifs commerciaux et la ministre a ajouté qu'il fallait faire la distinction entre les sociétés et les filiales, puisque seules les premières étaient financées sur deniers publics, en contrepartie d'exécution de missions de service public.
Au nom du principe de précaution, il convient donc de rappeler que cet article traite des filiales de service public. Sinon, demain, ces sociétés risqueraient d'être transformées en filiales privées.
M. David Assouline. - Hier, M. Longuet nous a expliqué que les ondes n'appartenaient à personne, notamment pas à l'État, qu'elles étaient res nullius, alors que nous considérons, pour notre part, qu'il s'agit d'un bien public. En libéral convaincu, il a estimé que, si l'État avait dû réguler les ondes lors de la privatisation de TF1, c'était parce que l'ère numérique n'existait pas encore. Aujourd'hui, comme il n'y aurait plus pénurie, mais abondance, cette conception lui semble caduque. Ce n'est pas du tout notre façon de voir les choses, car cela revient à prétendre que ce qui n'appartient à personne appartient au privé, ce qui serait source de dérives comme le démantèlement du service public.
L'article 11 est adopté.
Article 12
Le I de l'article 34-2 de la même loi est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa, les mots : « les services spécifiquement destinés au public métropolitain édités par la société mentionnée au 4° du » sont remplacés par les mots : « le service de télévision diffusé par voie hertzienne terrestre en mode numérique ayant pour objet de concourir à la connaissance de l'outre-mer spécifiquement destiné au public métropolitain édité par la société mentionnée au » ;
1° bis Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'il propose une offre en mode numérique haute définition, il met également gratuitement à la disposition des abonnés à cette offre les services de ces sociétés diffusés par voie hertzienne terrestre en mode numérique haute définition. » ;
2° Au deuxième alinéa, les mots : « Réseau France outre-mer » sont remplacés par les mots : « mentionnée au I de l'article 44 ».
M. le président. - Amendement n°21, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles.
Dans le second alinéa du 1° bis de cet article, remplacer les mots :
en mode numérique haute définition
par les mots :
comprenant des services de télévision distribués en haute définition
L'amendement rédactionnel n°21, accepté par le Gouvernement, est adopté.
M. le président. - Amendement n°135, présenté par M. Ralite et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
Supprimer le 2° de cet article.
M. Ivan Renar. - Comme à l'article premier, nous demandons la suppression de cet article qui ne fait en effet aucune référence aux chaînes du service public visées à l'article 34-2 de la loi de 1986.
La disparition dans la loi de toute référence à RFO fait craindre aux personnels celle de leur chaîne. L'exposé des motifs ne contient que deux phrases lapidaires : « RFO demeure le réseau des télévisions et radios d'outre-mer, France Ô est la chaîne de l'outre-mer et de la diversité en métropole. » Mais l'ambiguïté subsiste, dès lors que l'article 12 précise que France Ô est « un service de télévision (...) ayant pour objet de concourir à la connaissance de l'outre-mer spécifiquement dédié au public métropolitain (...) ». Qu'en est-il de la notion de diversité ? Pas un mot sur les deux autres services de télévision édités par RFO que sont Tempo et Télé pays.
A ces cafouillages s'est ajouté l'amendement du Gouvernement adopté à l'Assemblée nationale supprimant la publicité sur RFO, ce que ne prévoyait pas le texte initial. Que va devenir RFO ? Que prévoira son contrat d'objectifs et de moyens ?
RFO, comme France 3, dispose de cellules de production, de forces créatrices en mesure de garantir la diversité des productions au sein de France Télévisions, principe qui figure dans la loi. Que vaut-il si les moyens font défaut ? D'autant que vous avez refusé d'inscrire à l'article premier l'obligation de production et de fabrication pour France Télévisions !
Le texte n'apporte aucune garantie sur la pérennité d'activités qui donnent aux publics ultramarins et métropolitains l'occasion de se retrouver dans des productions qui ont du sens pour eux.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. - Les programmes destinés à l'outre-mer ne sont pas compromis ; je renvoie mes collègues à l'article 13 et au point 5 de l'article 2 du cahier des charges de RFO. La commission Copé avait d'ailleurs beaucoup travaillé pour renforcer l'identité des chaînes.
Mme Christine Albanel, ministre. - Avis défavorable pour les mêmes raisons. Le texte ne menace en rien RFO.
L'amendement n°135 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°344, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Le second alinéa du II du même article est ainsi rédigé :
« Les coûts de diffusion et de transport depuis le site d'édition et la numérisation éventuelle sont à la charge du distributeur. »
M. David Assouline. - Cet amendement devrait recueillir un large assentiment. La situation des chaînes locales est aujourd'hui très difficile. Jusqu'à récemment, il leur suffisait de diffuser en analogique pour toucher l'essentiel de leur public. Mais les modes de diffusion sont désormais fragmentés : il leur faudrait, pour le même résultat, être présentes sur plusieurs supports différents -analogique, TNT, internet, câble, numérique individuel-, ce qui alourdit leurs coûts. Les opérateurs nationaux du câble ou de l'ADSL, peu intéressés par la logique territoriale, prennent rarement en compte spontanément la diversité des situations locales.
La précédente loi sur l'audiovisuel avait tenté d'y remédier en leur imposant la reprise des chaînes d'initiative publique locale. Celles-ci sont nombreuses aujourd'hui qui ont le soutien de collectivités territoriales et travaillent en numérique ; mais tous les distributeurs n'utilisent pas les mêmes formats, ce qui multiplient les coûts de transport. Nous souhaitons préciser dans la loi que les coûts de transport, mais aussi de numérisation sont à leur charge. Les distributeurs ont des moyens que les chaînes locales n'ont pas.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. - La précision est d'autant plus opportune que la numérisation va devenir la règle ; sans elle, les obligations de reprise pourraient être vidées de leur sens et l'équilibre de ces chaînes auxquelles les élus portent une grande attention pourrait s'en trouver compromis.
Mme Christine Albanel, ministre. - Avis défavorable. Les coûts de transport et de diffusion sont déjà à la charge des distributeurs ; il ne serait ni juste ni praticable de leur imposer les frais de numérisation. Comment et selon quels critères les chaînes locales calculeront-elles la quote-part de chacun des distributeurs présents sur leur territoire ? On peut craindre la multiplication des contentieux.
Mme Marie-Christine Blandin. - Lors de la discussion générale, nous avons insisté sur le nécessaire équilibre du paysage audiovisuel ; j'avais moi-même déploré qu'aucun travail n'ait été réalisé sur les télévisions associatives, dont le dynamisme et l'originalité dans la création répondent à des attentes citoyennes. Cet amendement est la seule occasion que nous ayons de leur adresser un signal, et la prise en charge des frais de numérisation par les distributeurs est parfaitement à leur portée. La répartition peut se faire, comme en d'autres circonstances, sur une base forfaitaire. C'est techniquement possible. Les montants en cause ne sont pas très élevés, mais ce serait un signal fort.
M. David Assouline. - Il est exact que les frais de transport sont déjà à la charge des distributeurs, mais le dispositif est diversement interprété : faut-il les calculer depuis la tête de réseau -ce qu'ils affirment- ou depuis le lieu d'édition de la chaîne ? Le législateur n'a rien dit à ce propos et il a aujourd'hui la possibilité de trancher.
Nous avons ou nous aurons tous des partenariats avec des télévisions locales, pour lesquelles la numérisation représente un coût important et même du gaspillage -les distributeurs, eux, peuvent le réduire grâce à leur organisation en réseau. Nous voulons témoigner notre soutien aux chaînes locales, sans charger la barque des autres. La cause est bonne.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. - Plusieurs collègues appartenant à différents groupes, dont le président du Luart, et qui ne sont pas membres de la commission des affaires culturelles, ont manifesté auprès de nous leur souci de faire vivre les radios et télévisions locales.
L'amendement n°344 est adopté.
L'article 12, modifié, est adopté.
Article 12 bis
L'article 34-4 de la même loi est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les distributeurs de services dont l'offre de programmes comprend l'ensemble des services nationaux de télévision en clair diffusés par voie hertzienne terrestre en mode numérique assurent au moins une reprise de ces services en respectant l'ordre de la numérotation logique définie par le Conseil supérieur de l'audiovisuel. »
M. le président. - Amendement n°22, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles.
Après les mots :
en mode numérique
rédiger comme suit la fin du second alinéa de cet article :
, s'ils ne respectent pas la numérotation logique définie par le Conseil supérieur de l'audiovisuel pour la télévision numérique terrestre, doivent assurer au moins une reprise de ces services en respectant l'ordre de cette numérotation. Dans ce cas, la numérotation doit commencer à partir d'un nombre entier suivant immédiatement un multiple de cent. »
M. Michel Thiollière, rapporteur. - Nous entendons simplifier la vie des téléspectateurs, qui ont aujourd'hui à leur disposition des dizaines, voire des centaines de chaînes et ont parfois du mal à retrouver facilement les programmes de la TNT.
M. le président. - Amendement n°180, présenté par M. Pozzo di Borgo.
Dans le second alinéa de cet article, supprimer les mots :
au moins
M. Yves Pozzo di Borgo. - Cet alinéa dans sa rédaction actuelle laisse entendre que les distributeurs de bouquets pourraient s'acquitter de leur obligation de reprise en regroupant les chaînes de la TNT dans un ensemble isolé et éloigné dans les plans de services, tandis que les chaînes historiques continueraient de bénéficier des premiers numéros. Or, l'article 12 bis vise à ce que toutes les chaînes de la TNT soient regroupées dans le respect de leur numérotation logique. Si les distributeurs ont placé les chaînes historiques au début des plans de services, les chaînes de la TNT doivent être agrégées à ce même bloc. Cet amendement lève toute ambiguïté à ce sujet, sans interdire une double exposition pour les chaînes thématiques.
M. le président. - Amendement identique n°432, présenté par Mme Dumas.
Mme Catherine Dumas. - Cette solution préserve l'égalité de traitement entre les acteurs ainsi que la liberté éditoriale des distributeurs. Elle respecte à la fois la délibération du CSA du 24 juillet 2007 et la jurisprudence du Conseil de la concurrence, qui disposent que la numérotation doit être équitable, transparente, homogène et non discriminatoire. Elle ne représente aucun surcoût pour les distributeurs, mais leur impose simplement, s'ils retiennent cette option, de proposer l'ensemble de l'offre gratuite.
M. Michel Thiollière, rapporteur. - Ces amendements vont dans notre sens. Je vous propose de les transformer en sous-amendements à l'amendement de la commission.
Mme Catherine Dumas. - D'accord.
M. Yves Pozzo di Borgo. - Je me rallie.
M. le président. - Ce sont donc les sous-amendements identiques n°s180 rectifié et 432 rectifié.
Mme Christine Albanel, ministre. - Je ne suis pas favorable à l'amendement n°22, qui me semble aller trop loin dans l'encadrement de la numérotation et ne pas respecter la liberté du commerce et de l'industrie. Ce n'est pas une garantie pour les éditeurs de programmes, puisque rien n'empêche de positionner les chaînes de la TNT à la fin des plans de services, dans les 900. La solution initiale me paraît plus équilibrée. En revanche, j'étais favorable aux amendements n°s180 et 432. Ne pourrait-on rectifier l'amendement de la commission en supprimant la dernière phrase, ainsi que les mots « au moins » dans la première ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. - Je préfère conserver l'amendement de la commission, sous-amendé. Il faut que le téléspectateur puisse retrouver facilement les dix-huit chaînes de la TNT, selon la numérotation du CSA.
M. David Assouline. - Une fois n'est pas coutume, les amendements n°s180 et 432 nous convenaient. Les chaînes de la TNT doivent être dans une suite logique. L'amendement de la commission garantit que les chaînes sont ensemble et en début de centaine, mais, pour ma part, ayant rarement le temps de regarder la télévision, j'arrive rarement jusqu'à la centième chaîne ! Reste que l'amendement de la commission est préférable à ce que propose le Gouvernement : nous le voterons, ainsi que les sous-amendements.
Le sous-amendement n°180 rectifié, identique au sous-amendement n°432 rectifié, est adopté, le groupe CRC s'abstenant.
L'amendement n°22, sous-amendé, est adopté, le groupe CRC s'abstenant.
M. le président. - Amendement n°419, présenté par M. Maurey et les membres du groupe Union centriste.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l'offre de programmes des distributeurs de services est structurée au moins partiellement dans le respect de la numérotation logique définie par le Conseil supérieur de l'audiovisuel, alors l'ensemble des services nationaux de télévision en clair diffusés par voie hertzienne terrestre en mode numérique doivent être repris dans le respect de la numérotation logique définie par le Conseil supérieur de l'audiovisuel. »
M. Hervé Maurey. - Cet amendement a le même objet que les précédents.
M. Michel Mercier. - Il est tombé !
M. Hervé Maurey. - Nous craignons une ghettoïsation des chaînes de la TNT. Le principe d'égalité impose une identité de traitement entre les dix-huit chaînes gratuites.
M. Michel Thiollière, rapporteur. - Nous voulons éviter que les téléspectateurs se perdent dans la numérotation. Votre amendement est satisfait par celui de la commission, qui vient d'être voté.
Mme Christine Albanel, ministre. - Défavorable. On ne peut imposer la reprise à l'identique de la numérotation des chaînes de la TNT.
Mme Marie-Christine Blandin. - Cet amendement me paraît plus pertinent que celui que nous venons de voter, mais n'est-il pas tombé ?
M. Michel Mercier. - Mais oui ! (On le confirme sur les bancs de la commission et du Gouvernement)
M. le président. - En effet.
L'amendement n°419 est sans objet.
L'article 12 bis, modifié, est adopté.
Article 13
À l'article 34-5 de la même loi, les mots : « régionaux de la société nationale de programme mentionnée au 2° du » sont remplacés par les mots : « régionaux, à l'exception de ceux spécifiquement destinés à l'outre-mer, de la société nationale de programme mentionnée au ».
M. le président. - Amendement n°136, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.
Dans cet article, supprimer les mots :
, à l'exception de ceux spécifiquement destinés à l'outre-mer,
M. Jean-François Voguet. - Entreprise unique oblige, la référence à France 3 disparaît de l'article 34-5 de la loi de 1986, où ces programmes sont simplement qualifiés de « régionaux ». Et le Gouvernement n'a pas voulu imposer la reprise des programmes de RFO aux distributeurs du satellite, du câble et de l'ADSL, ce qui empêche les Français originaires d'outre-mer d'accéder aux programmes régionaux de leur collectivité d'origine.
Pourquoi exclure RFO, en l'absence de la moindre raison technique ? De nombreux programmes de Télé Pays ou de Tempo sont diffusés depuis Paris. C'est le cas notamment de Télé Mayotte, de Télé Réunion, de Télé Nouméa, de Télé Wallis et cela devrait bientôt être le cas de Télé Guadeloupe, de Télé Martinique et de Télé Saint-Pierre.
Les opérateurs peuvent donc diffuser ces chaînes, mais ils répugnent à leur consentir de la place sur leurs satellites. Traditionnellement, cette mission était assignée à France Ô, l'ex-RFO Sat. Il est vrai, d'autre part, que les Télés Pays diffusent à 80 % des programmes issus de France 2 et France 3...
D'où ma question sur le devenir de ces Télés Pays avec l'arrivée de la TNT outre-mer : seront-elles supprimées ou transformées ? France Ô sera-t-elle la chaîne de la diversité et de la connaissance de l'outre-mer ?
M. le président. - Amendement identique n°345, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
M. David Assouline. - RFO est exclue de la clause must deliver -pour employer le jargon bruxellois- alors que les services régionaux de France 3 peuvent s'en prévaloir. Cette clause, qui impose la reprise d'une chaîne, à sa demande, « dans des conditions non discriminatoires », est opposable aux distributeurs n'utilisant pas les fréquences assignées par le CSA.
En pratique, cette obligation prolonge la clause dite must carry, qui impose la reprise des chaînes publiques.
La directive « Paquet » dispose que les États membres doivent introduire une clause must carry « lorsqu'un nombre significatif d'utilisateurs finaux » utilise les réseaux distribuant les chaînes bénéficiant de cette clause « comme leurs moyens principaux pour recevoir des émissions de radio ou de télévision ». En France, les chaînes du service public en bénéficient, conformément à l'article 34-2 de la loi de 1986.
Néanmoins, ce même article limite son application à RFO aux « services spécifiquement destinés au public métropolitain ». Pourquoi les antennes de RFO ne bénéficient-elles pas d'une clause dont profitent toutes les antennes de France 3 ? Rien ne justifie cette discrimination.
Réunie ce matin, la commission a estimé que RFO devait être considérée comme France 3 régions pour ce qui est de la publicité. Le sujet dont nous débattons maintenant relève de la même philosophie. La commission pourrait donc adopter à ce propos une position cohérente avec celle de ce matin.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. - Dès lors que France Ô bénéficie de cette clause, il est inutile d'ajouter tous les programmes de RFO. Avis défavorable.
Mme Christine Albanel, ministre. - Même avis, pour la même raison.
Les amendements identiques n°s136 et 345 ne sont pas adoptés.
L'article 13 est adopté.
M. le président. - Je rappelle au Sénat que l'article 13 bis a été réservé jusqu'au jeudi 15 janvier à 15 heures.
Article 14
L'article 98-1 de la même loi est ainsi modifié :
1° Au deuxième alinéa, les mots : « édité par la société mentionnée au 4° du » sont remplacés par les mots : « ayant pour objet de concourir à la connaissance de l'outre-mer édité par la société mentionnée au » ;
1° bis À la dernière phrase du troisième alinéa, après le mot : « numérotation », sont insérés les mots : « et le même standard de diffusion », et les mots : « que celle utilisée » sont remplacés par les mots : « que ceux utilisés » ;
1° ter Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les éditeurs de services mentionnés au premier alinéa ne peuvent s'opposer à la reprise, par un distributeur de services par voie satellitaire ou un opérateur de réseau satellitaire et à ses frais, de leurs programmes diffusés par voie hertzienne terrestre en mode numérique au sein d'une offre de programmes répondant aux conditions prévues au précédent alinéa. » ;
2° Le quatrième alinéa est ainsi rédigé :
« Une de ces offres permet d'assurer sur tout le territoire métropolitain la réception simultanée de l'ensemble des programmes régionaux, à l'exception de ceux spécifiquement destinés à l'outre-mer, de la société nationale de programme mentionnée au I de l'article 44, moyennant compensation de l'État, spécifiquement prévue dans le contrat d'objectifs et de moyens, à cette même société. »
M. le président. - Amendement n°24, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles.
Dans le second alinéa du 1° ter de cet article, après les mots :
à la reprise, par
insérer les mots :
au moins
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. - Les chaînes gratuites de la TNT sont diffusées par voie satellitaire à environ 1,5 million de foyers qui ne peuvent accéder à la TNT par voie hertzienne. Il est inutile d'imposer une nouvelle offre satellitaire.
M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. - Les députés ont souhaité que les Français disposent de deux offres satellitaires. Actuellement, nos concitoyens qui n'ont pas accès à la diffusion hertzienne terrestre peuvent recevoir les dix-huit chaînes gratuites de la TNT grâce au satellite Canalsat. Mais les habitants des zones d'ombre de la diffusion terrestre qui ne peuvent recevoir de programmes analogiques au moyen d'antennes « râteau », doivent installer des paraboles payantes pour recevoir -gratuitement- les six chaînes analogiques diffusées par le satellite Astra d'Eutelsat. Quelque 1,5 million de foyers sont dans ce cas.
Si l'amendement présenté par la commission des affaires culturelles est adopté, ces foyers devront dépenser une centaine d'euros pour réorienter leurs paraboles vers Canalsat, cette somme étant prise en charge par l'État pour nos compatriotes les plus démunis. Ainsi, outre qu'il tend à introduire un monopole, l'amendement présenté par la commission des affaires culturelles augmente les dépenses publiques et impose une charge supplémentaire à un certain nombre de foyers, pour réorienter les paraboles.
J'estime que les députés ont raison de vouloir laisser le choix. Tel est l'éclairage que je voulais vous fournir avant le vote, même si la rédaction définitive de l'article pourra être fixée en CMP.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. - Quel serait le coût pour les finances publiques ?
Mme Christine Albanel, ministre. - Je comprends l'argument de M. Retailleau, mais cela ne modifie pas ma position
Un fonds a été créé pour prendre en charge la dépense imposée aux ménages nécessiteux.
M. Hervé Maurey. - Le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques a raison : deux offres valent mieux qu'une, surtout lorsque celle-ci ne couvre pas l'ensemble du territoire, privé ainsi de la TNT.
Pourquoi faire dépenser 100 euros -qui pourraient d'ailleurs aller jusqu'à 150- au foyer concerné, à l'État ou aux collectivités territoriales ? Pourquoi revenir sur les dispositions votées par l'Assemblée nationale ?
M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis. - L'État doit payer pour les ménages nécessiteux, mais pourquoi constituer un monopole sur fonds publics ?
Sur ce point, le texte des députés semble aller dans le bon sens.
M. David Assouline. - M. Retailleau semble espérer que la rédaction des députés l'emportera en CMP. Pour ma part, je préfère que celle-ci retienne la position du Sénat.
Votre argumentation, comme souvent, est implacable. Où est l'intérêt stratégique pour la France ? Avec un seul satellite, on risque la panne. Il est bien préférable d'en avoir deux.
Demain, nous aurons peut-être un débat tonitruant sur l'augmentation de quelques euros de la redevance. On entendra dire que nous sommes en période de crise, que les ménages sont déjà pressurés... Et le ministre nous dit aujourd'hui qu'il n'y a pas de problème et que l'État paiera pour que soit assuré un monopole satellitaire ! Nous aimerions connaître les dessous d'une décision si paradoxale !
Pour un million et demi de foyers, il faudra payer le repointage. De deux choses l'une, ou c'est l'État qui prend ce coût à sa charge, ou ce sont les foyers eux-mêmes, et l'on sait que ce ne sont pas les plus favorisés, car ceux qui sont en zone blanche sont en général victimes de toutes les fractures. On nous dit qu'ils ne peuvent pas payer 2 euros supplémentaires pour la redevance, mais ils pourraient payer 100 euros de repointage ?
Je crois, franchement, qu'il serait préférable de s'en tenir à la version de l'Assemblée nationale, en votant contre cet amendement.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. - Une précision sur le repointage. Un tiers des utilisateurs de l'AV3 est déjà sur Eutelsat ; un tiers bénéficie d'une double réception et n'aura donc pas à repointer...
M. Pierre Hérisson. - Comme élu de la montagne, je suis particulièrement sensible à cette problématique et suivrai M. Retailleau.
M. Éric Doligé. - Un million et demi de foyers, à 100 euros par foyer, cela fait 150 millions. C'est une somme considérable qui appelle quelques précisions. L'un de nos collègues a fait observer qu'il ne faudrait pas faire appel aux collectivités locales.
M. David Assouline. - Soyez assuré que c'est ce qui se passera.
M. Éric Doligé. - On a connu le même problème avec le haut débit satellitaire. Le coût, de 300 à 350 euros par foyer, a été supporté par les collectivités. Nous parlons beaucoup des principes, soyons plus précis sur les sommes.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. - J'y viens. Un tiers des utilisateurs de l'AV3 ne reçoit que les chaînes analogiques, soit 500 millions de foyers, dont une grande partie devront en tout état de cause repointer pour le passage au numérique, ceci pour un coût inférieur à 100 euros, une seule fois.
M. David Assouline. - Vous parlez du coût du repointage. Mais ces un million et demi de foyers devront être informés, en amont, de la marche à suivre s'ils ne veulent pas être privés de télévision. Le coût de telles campagnes est énorme. Pour le passage au tout numérique, la Grande-Bretagne s'est investie deux années durant pour informer tous les foyers concernés, dans les quartiers et les villages les plus reculés. Peut-on avoir quelque éclairage sur ce qui a été prévu chez nous ?
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. - Il existe un fonds d'aide du GIP télénumérique, qu'une partie de la redevance doit alimenter.
M. Serge Lagauche. - Si nous sommes souvent d'accord, au sein de la commission des affaires culturelles, sur les principes, je constate qu'il s'agit ici d'un problème technique : nous devrions suivre les conseils de M. Retailleau. Je ne suis pas certain, au reste, que dans ce dossier, des questions de concurrence n'entrent pas en ligne de compte...
L'amendement n°24 n'est pas adopté.
L'article 14 est adopté.
Articles additionnels
M. le président. - Amendement n°25 rectifié bis, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles.
Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 9 de la même loi est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le Conseil supérieur de l'audiovisuel est consulté sur les projets de loi modifiant la présente loi et sur les projets d'actes règlementaires pris pour son application et participe à leur mise en oeuvre. Cette disposition n'est pas applicable aux décrets portant nomination des membres du Conseil supérieur de l'audiovisuel, aux décrets nommant les représentants de l'État aux conseils d'administration des sociétés et organismes du secteur public de la communication audiovisuelle ainsi qu'aux décrets portant approbation des statuts des sociétés nationales de programme. »
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. - Il s'agit de reconnaître en droit au CSA une compétence dont il dispose déjà largement de fait, puisqu'il est en effet systématiquement consulté par le Gouvernement sur les projets de loi concernant le secteur qu'il régule, de même qu'il l'est, le plus souvent, sur le fondement de dispositions expresses de la loi de 1986, sur les projets de décrets relatifs à la communication audiovisuelle. Ce pouvoir pourrait donc lui être reconnu formellement, de la même manière qu'il l'est pour d'autres autorités administratives indépendantes, comme l'Arcep.
Cette démarche s'inscrit dans notre volonté de renforcer le pouvoir de régulation du CSA sur l'ensemble de l'audiovisuel français. Votre commission estime en effet que dans un contexte de mutation rapide des technologies, la régulation devait être revue et modernisée. C'est ainsi qu'elle a proposé plusieurs amendements visant à donner au CSA un droit de regard sur le financement de l'audiovisuel public, des pouvoirs d'enquête renforcés et le droit de prononcer des astreintes en cas de décision dans une procédure de règlement des différends.
Nous entendons ainsi confirmer le régulateur dans son rôle et ses fonctions et lancer un avertissement aux acteurs de l'audiovisuel français, en soulignant l'importance qu'attache le législateur à la bonne application au quotidien de la loi du 30 septembre 1986.
Mme Christine Albanel, ministre. - Favorable.
M. Ivan Renar. - S'il est normal que le CSA soit sollicité en amont des projets de loi et décrets, prévoir sa participation à leur mise en oeuvre nous paraît en revanche aller trop loin, lui conférant un véritable pouvoir de cogestion. Nous ne serions favorables à votre amendement que si vous acceptiez de supprimer le membre de phrase suivant « et participe à leur mise en oeuvre ».
L'amendement n°25 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°26, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles.
Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 46 de la même loi est ainsi rédigé :
« Art. 46. - Dans les conditions fixées par son cahier des charges, la société nationale de programme France Télévisions crée en son sein un Conseil consultatif des programmes composé de téléspectateurs, chargé d'émettre des avis et des recommandations sur les programmes.
« Chaque année, le président de la société nationale de programmes France Télévisions rend compte de l'activité et des travaux de ce conseil à l'occasion de la présentation du rapport sur l'exécution du contrat d'objectifs et de moyens de la société devant les commissions chargées des affaires culturelles et des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat. »
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. - Cet amendement s'inscrit dans une saga déjà riche de deux épisodes. En 2000, le législateur prenait l'initiative de créer un Conseil consultatif des programmes placé après de France Télévisions, qui devait être composé de téléspectateurs tirés au sort parmi les contribuables acquittant la redevance, selon une procédure définie par décret en Conseil d'État. Ce décret ne fut jamais pris, tant il était complexe d'organiser cette sorte de loterie nationale de la redevance.
Quatre ans après, le tirage au sort était supprimé et le législateur prévoyait que la composition du Conseil serait définie par décret. Nouvel échec : le pouvoir règlementaire n'est jamais parvenu à définir une composition représentative et la disposition est demeurée lettre morte.
Votre commission vous propose de modifier une nouvelle fois l'article 46 de la loi de 1986 en prévoyant la création d'un Conseil consultatif des programmes qui associera les téléspectateurs à la définition de la politique éditoriale de France Télévisions. Il serait utile de connaître leur vision du service public sans se limiter à des sondages et des enquêtes qualitatives, afin de savoir notamment quelle émission, à leurs yeux, en relève ou pas, et à quelle heure il est bon de la programmer. Les dirigeants de France Télévisions devront expliquer leurs choix devant des téléspectateurs en chair et en os : le service public ne répond véritablement à sa mission que lorsque les usagers se l'approprient. Ce Conseil n'aurait aucun pouvoir décisionnel.
Cet article permet de sortir des questions juridiques insolubles qu'a posées le renvoi au décret. Il fixe une obligation de résultat à France Télévisions, qui devra créer cette instance et rendre compte chaque année de son fonctionnement devant les commissions des affaires culturelles et des finances. La constitution de ce Conseil ne devrait pas soulever de difficultés pratiques : il suffit de lancer un appel aux volontaires sur le site internet de France Télévisions. La question de la représentativité ne se pose pas ici car il ne s'agit que d'instaurer un dialogue et non de mettre en place une sorte de Parlement des téléspectateurs.
Nous vous demandons de réaffirmer une intention qui a déjà été deux fois la vôtre, cette fois sans prévoir de mesures réglementaires d'application.
Mme Christine Albanel, ministre. - Avis favorable. Cet amendement est adapté à l'objectif recherché en ce qu'il renvoie au cahier des charges de France Télévisions les modalités de création de ce Conseil, dont les activités seront présentées chaque année par le président devant les commissions parlementaires. Pour le service public, désormais débarrassé des contraintes liées à la publicité en soirée, le suivi de la qualité des programmes demeure une exigence prioritaire.
M. David Assouline. - Nous soutenons cet amendement : pour la première fois au cours de ce débat, on pense à reconnaître aux téléspectateurs le droit à la parole, droit qui a été contesté lorsque nous l'avons proposé. Il est souhaitable que, comme cela se fait déjà en Allemagne, le public soit représenté autrement que par des associations aux effectifs limités.
M. Ivan Renar. - Une disposition similaire a été votée dans la loi de 2000, mais n'a jamais été appliquée faute de modalités satisfaisantes. Comment garantir la représentativité des téléspectateurs, qui n'ont pas d'organisations de caractère syndical ? Des lobbies, des groupuscules d'extrême-gauche ou des sectes, par exemple, risquent de noyauter ce Conseil. (Protestations sur les bancs socialistes) Je suis sérieux ! Les sectes ont bien réussi à s'emparer du système de formation d'EDF.
Il serait plus clair et plus enrichissant de prévoir que France Télévisions constitue en son sein un conseil consultatif des programmes composé de personnalités indépendantes du monde de la culture, des sciences, du travail, nommées, en raison de leurs compétences, par son conseil d'administration.
L'amendement de la commission est séduisant, mais totalement inapplicable, voire dangereux.
Mme Marie-Christine Blandin. - Il est toujours difficile de fabriquer des instances démocratiques nouvelles en l'absence de techniques de représentativité telles qu'élaborées autrefois par les syndicats. La question s'est posée à l'occasion du Grenelle de l'environnement au sujet de la représentativité des associations, mais nous y sommes parvenus tant bien que mal. La proposition de M. Renar est tout à fait pertinente : le décret peut en faire son profit. Les Verts soutiennent résolument la proposition de la commission.
M. Serge Lagauche. - Je suis étonné que certains de mes collègues estiment que la création de ce Conseil posera des problèmes, notamment pour la rédaction du décret, qui justifient de ne pas la voter. Faisons confiance à Mme la ministre pour mobiliser ses services pour l'élaboration du décret : nous critiquerons ensuite, si nécessaire, la composition du Conseil.
L'amendement n°26 est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°27 rectifié, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles.
Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 9 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
"Le Conseil supérieur de l'audiovisuel transmet chaque année aux commissions chargées des affaires culturelles et des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat un rapport relatif au financement du secteur public de l'audiovisuel. Ce rapport est déposé avant la discussion du projet de loi de finances initiale. Le Conseil supérieur de l'audiovisuel y estime le niveau des ressources nécessaires pour la mise en oeuvre des missions de service public confiées aux sociétés mentionnées à l'article 44 de la présente loi. Il y formule toute recommandation sur le niveau et les modalités du financement de ces sociétés et sur l'emploi qu'elles font des ressources qui leur sont attribuées."
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. - Votre commission s'est beaucoup intéressée à l'exemple allemand de financement de l'audiovisuel public : une commission indépendante rédige un rapport très fourni qui analyse les besoins et les projets des entreprises, ainsi que leur gestion, et propose un montant de ressources et un niveau de redevance.
Cet amendement transpose ce modèle en prévoyant que le CSA remettra au Parlement chaque année, avant l'examen du projet de loi de finances, un rapport estimant les ressources nécessaires pour la mise en oeuvre des missions de France Télévisions, Radio France, de l'AEF et d'Arte. Il contiendra des recommandations sur le niveau et les modalités de leur financement ainsi que sur l'emploi qu'elles font de leurs ressources.
Nous disposerons ainsi chaque année d'un document de référence dont, tout au long de l'examen de ce texte, nous avons constaté combien il pouvait parfois manquer : il aurait permis de trancher bien des débats.
Mme Christine Albanel, ministre. - Cet amendement est déjà satisfait par l'article 18 de la loi du 30 septembre 1986, selon lequel le CSA doit rendre compte chaque année dans son rapport public du respect de leurs obligations par les sociétés de l'audiovisuel public. Sagesse.
M. Ivan Renar. - Pourquoi donner un nouveau pouvoir au CSA alors que la gestion de l'entreprise relève de la responsabilité du président et de son conseil d'administration ? Allons-nous recevoir deux rapports sur le même sujet, l'un rédigé par France Télévisions, l'autre par le CSA ?
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. - Oui, le rapport du CSA sera différent et nous donnera un éclairage détaillé très utile pour la décision.
L'amendement n°27 rectifié est adopté, le groupe communiste s'abstenant, et devient un article additionnel.
M. le président. - Je vous rappelle que l'examen des articles 14 bis et 14 ter concernant l'outre-mer a été réservé jusqu'à la séance du jeudi 15 janvier à 15 heures.
Article 14 quater
L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes peut, pour ce qui concerne la diffusion des services audiovisuels sur le réseau hertzien terrestre en mode analogique ou numérique, soumettre l'utilisateur d'un site d'émission à des obligations particulières en fonction notamment de la rareté des sites d'émission sur une zone donnée. Elle peut, en particulier, imposer le regroupement de plusieurs utilisateurs sur une même infrastructure. L'opérateur gestionnaire de l'infrastructure assure alors, dans des conditions raisonnables, équitables et non discriminatoires, l'accès à son site d'émission.
M. le président. - Amendement n°29, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles.
Supprimer cet article.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. - Cet article prévoit de confier à l'Arcep une compétence dont le CSA dispose d'ores et déjà. II ressort des débats de l'Assemblée nationale que les députés ne semblaient pas avoir conscience de créer un conflit potentiel entre deux autorités administratives. Nous proposons donc de supprimer cet article.
Ce type d'« accident législatif » montre que la répartition des compétences entre le CSA et l'Arcep n'est pas claire. La ligne de frontière entre les contenus et les contenants se brouille tous les jours un peu plus. Il faudra bien, un jour ou l'autre, penser à réunir ces deux autorités, ce que paraît prévoir le plan « Numérique 2012 ». Pour autant, nous ne pouvons initier un tel processus, qui suppose une réflexion approfondie, au détour d'un projet de loi. Nous jugeons donc cet article prématuré.
M. le président. - Amendement identique n°92, présenté par Mme Payet.
Mme Anne-Marie Payet. - Il est défendu.
M. le président. - Amendement identique n°187, présenté par M. Retailleau, au nom de la commission des affaires économiques.
M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis. - Nous sommes du même avis que la commission des affaires culturelles. Les députés ont apporté une mauvaise réponse à un vrai problème, qui est la position ultradominante de Télédiffusion de France (TDF) sur le marché de la diffusion. L'article 14 quater exacerbe le conflit entre les deux autorités de régulation, l'Arcep et le CSA. Or l'Arcep détient déjà, en vertu du code de la poste et des communications électroniques, certains pouvoirs que l'on aimerait d'ailleurs conférer aussi au CSA. L'Arcep a déjà utilisé ces pouvoirs en lançant en 2006 une procédure qui, il est vrai, ne s'est pas révélée parfaitement efficace. Elle a engagé à la fin de l'année dernière une consultation publique qui vient de s'achever, et qui devrait enfin permettre d'améliorer la régulation et de renforcer la concurrence dans ce secteur.
M. le président. - Amendement identique n°350, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Mme Maryvonne Blondin. - Il serait dangereux de conférer à l'Arcep un droit de regard sur les sites d'émission, afin d'obliger TDF à s'ouvrir à la concurrence. L'objectif est sans doute de faire baisser les tarifs pratiqués par TDF pour le transport des chaînes et des services. Mais il ne convient pas de donner à l'Arcep de nouvelles compétences en matière de diffusion de services, qui lui permettraient de s'immiscer dans le domaine de la régulation des contenus. D'ailleurs, cette question est déjà réglée, puisque l'article 25 de la loi du 30 septembre 1986 octroie au CSA une compétence similaire à celle que l'on propose aujourd'hui de confier à l'Arcep.
Rappelons que le Conseil de la concurrence a déjà mis en demeure TDF d'ouvrir ses sites à la concurrence à plusieurs reprises. II n'y a donc aucune raison d'octroyer à l'Arcep une compétence aujourd'hui exercée par le CSA, pour lui faire jouer le rôle du Conseil de la concurrence.
Mme Christine Albanel, ministre. - Avis favorable à ces amendements de suppression. J'ajoute à vos arguments que l'article n'est pas conforme à la réglementation européenne, qui prévoit que l'obligation faite aux opérateurs d'ouvrir leurs sites d'émission à la concurrence n'intervient qu'après une procédure associant l'autorité de régulation nationale et la Commission européenne.
Les amendements n°s 29, 92, 187 et 350 sont adoptés et l'article 14 quater est supprimé.
Article additionnel
M. le président. - Amendement n°202, présenté par M. Pozzo di Borgo.
Après l'article 14 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l'article 41 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, la somme des populations recensées dans les zones desservies par ces réseaux peut excéder 150 millions d'habitants, sans toutefois pouvoir dépasser le seuil de 180 millions d'habitants, après avis favorable du Conseil supérieur de l'audiovisuel et de l'Autorité de concurrence. »
M. Yves Pozzo di Borgo. - La loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication a mis en place un dispositif anti-concentration destiné à assurer le pluralisme des opérateurs. En ce qui concerne les services de radio diffusés par voie hertzienne terrestre analogique, le premier alinéa de l'article 41 stipule qu'une même personne physique ou morale ne peut disposer en droit ou en fait de plusieurs réseaux que dans la mesure où la somme des populations recensées dans les zones desservies n'excède pas 150 millions d'habitants.
Ce seuil a été défini par la loi du 1er février 1994, modifiant la loi du 30 septembre 1986. Il apparaît aujourd'hui doublement obsolète.
D'une part, il a été fixé en fonction du recensement de 1990. A cette date, la France comptait environ 58 millions d'habitants ; le seuil représentait donc environ trois fois la population française. Selon une estimation rendue publique par l'Insee aujourd'hui même, il y a actuellement 64 millions d'habitants dans notre pays. Le seuil doit donc être relevé pour tenir compte de l'évolution démographique.
D'autre part, il faut prendre en considération les gains de fréquence qui résultent de la planification effectuée par le Conseil supérieur de l'audiovisuel. Entre janvier 2006 et juillet 2008, le CSA a lancé treize appels à candidatures. Plus de 1 000 fréquences supplémentaires ont été dégagées, soit un gain de 21,2 % ; elles ont bénéficié à l'ensemble des radios et augmenté la couverture par les groupes de la population française.
Il est donc opportun de relever le seuil anti-concentration de 150 à 180 millions d'habitants. Toutefois, afin d'assurer la préservation des équilibres concurrentiels, je propose que toute augmentation de la couverture des réseaux nationaux pouvant engendrer un franchissement du seuil de 150 millions d'habitants soit soumise à l'avis favorable du CSA et de l'Autorité de concurrence, éventuellement subordonné à des engagements de la part des parties concernées.
Il s'agit d'un amendement d'appel, et je connais la position de la commission. Il faut reconnaître que la diversité des radios est une exigence démocratique, et que les réseaux indépendants demandent qu'aucune révision des seuils n'intervienne sans une large concertation. Mais je crois nécessaire de lancer aujourd'hui ce débat.
M. le président. - Amendement identique n°421, présenté par MM. P. Dominati, Bécot et Houel.
M. Philippe Dominati. - Il s'agit de notre part d'un amendement ferme et définitif, et non d'un amendement d'appel. Nous souhaitions même porter ce seuil à 200 millions d'habitants, et seul le pragmatisme nous a poussés à déposer un amendement identique à celui de M. Pozzo di Borgo.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. - Le seuil de concentration pour les services de radio analogique a sans doute été sous-estimé, faute de recensement récent au moment de son adoption. Les amendements prévoient des dérogations, tout en les encadrant strictement puisqu'elles seraient soumises au double avis favorable du CSA et de l'Autorité de la concurrence. Mais votre commission constate que la radio analogique, seule concernée, est sur la voie du déclin. Est-il judicieux de modifier ce seuil aujourd'hui ? Nous n'en sommes pas sûrs, et c'est pourquoi nous aimerions connaître l'avis du Gouvernement.
Mme Christine Albanel, ministre. - Une réforme de la réglementation anti-concentration aurait certainement un impact sur le paysage radiophonique, son pluralisme, l'existence de radios indépendantes. Il faut donc y réfléchir à deux fois. Une telle réforme nécessiterait une large concertation avec les acteurs concernés, et ce n'est pas l'objet de ce projet de loi. Avis défavorable.
M. David Assouline. - Il n'est pas concevable de mettre à bas au détour d'un amendement la législation anti-concentration, quels que soient vos arguments. Cette question mérite un large débat. Envisageons très concrètement les conséquences de l'adoption d'une telle mesure : dès demain, les grands groupes absorberont les plus petits ; en ce moment NRJ, par exemple, regarde du côté de BFM... Mme la ministre a raison : ces amendements modifieraient le paysage radiophonique au détriment des radios indépendantes.
M. Yves Pozzo di Borgo. - Je souhaitais engager la discussion, mais si la commission s'engage à examiner cette question, j'accepte de retirer mon amendement.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. - Nous nous y engageons.
L'amendement n°202 est retiré.
M. Philippe Dominati. - Serait-il possible d'avoir des précisions, un calendrier ?
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. - La commission s'engage à travailler à cette réforme dans les mois qui viennent : cela risque d'être difficile au mois de février, mais nous nous y attellerons très bientôt.
M. Philippe Dominati. - Avant le mois de septembre ?
Mme Christine Albanel, ministre. - Tout le monde reconnaît que vous soulevez un vrai problème. Peut-être le Sénat pourrait-il élaborer une proposition de loi à ce sujet ?
L'amendement n°421 est retiré.
Article 15
L'article 48 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée est ainsi modifié :
1° A À la première phrase du premier alinéa, après les mots : « culturelle et sociale, », sont insérés les mots : « à la lutte contre les discriminations par le biais d'une programmation reflétant la diversité de la société française, » ;
1° La dernière phrase du premier alinéa est ainsi rédigée :
« Lorsqu'une de ces sociétés édite plusieurs services de communication audiovisuelle, le cahier des charges précise les caractéristiques de chacun d'eux et la répartition des responsabilités au sein de la société en matière de programmation et de commande et production des émissions de telle sorte que le respect du pluralisme des courants de pensée et d'opinion et la diversité de l'offre de programmes fournie soient assurés. » ;
1° bis Après le deuxième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Tout nouveau cahier des charges est transmis aux commissions chargées des affaires culturelles de l'Assemblée nationale et du Sénat. Les commissions peuvent formuler un avis sur ce cahier des charges dans un délai de six semaines.
« Le rapport annuel sur l'exécution du cahier des charges est transmis chaque année par le Conseil supérieur de l'audiovisuel aux commissions chargées des affaires culturelles de l'Assemblée nationale et du Sénat. » ;
2° Le cinquième alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Ces sociétés peuvent faire parrainer leurs émissions dans les conditions déterminées par ces cahiers des charges à l'exception des émissions d'information, des journaux télévisés et des débats politiques ou d'actualité.
« Les cahiers des charges précisent les conditions dans lesquelles les sociétés et services mentionnés à l'article 44 assurent la promotion de leurs programmes. »
M. le président. - Amendement n°352, présenté par M. Antoinette et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après le 1°A de cet article, insérer deux alinéas ainsi rédigés :
... ° Après la première phrase du premier alinéa, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Ce cahier des charges précise les indicateurs de résultats à atteindre en matière d'évolution de la représentativité de la diversité de la société française, tant dans les programmes que dans la création et dans la politique de ressources humaines de France Télévision. »
M. Claude Bérit-Débat. - Le présent projet de loi accorde une place importante à la représentation de la diversité de la société française dans la communication audiovisuelle publique, comme en témoignent l'article premier, l'article 15, ainsi que l'amendement n°293 rectifié à l'article premier A du groupe socialiste qui a été adopté. Ces dispositions nous importent tout particulièrement au vu de la situation actuelle. Les chaînes privées ont de l'avance sur les chaînes publiques. Il est essentiel que ces mesures ne soient pas de pures déclarations d'intention, mais qu'elles se traduisent par des engagements assortis d'indicateurs de résultats dans le contrat d'objectifs et de moyens de France Télévisions.
M. Michel Thiollière, rapporteur. - Défavorable : cette précision aurait plutôt sa place dans le contrat d'objectifs et de moyens.
Mme Christine Albanel, ministre. - J'ajoute que la mise en oeuvre de cette disposition requerrait l'existence de statistiques faisant apparaître l'origine ethnique.
L'amendement n°352 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°290, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et MM. Desessard et Muller.
Dans le second alinéa du 1° de cet article, après le mot :
programmation
insérer les mots :
, de fabrication interne
Mme Marie-Christine Blandin. - S'agissant de la production comme du reste, je ne pense pas que le travail en miettes soit épanouissant. Une réussite de l'audiovisuel public est d'avoir rassemblé sous un même toit des métiers différents qui, en interagissant, se sont mutuellement qualifiés. Le Gouvernement nous dit que la mission de fabrication restera possible à l'intérieur mais il y a une revendication forte sur la création, dont l'inscription en toutes lettres dans la loi est essentielle, faute de quoi un très mauvais signal serait émis. Il arriverait à France Télévisions ce qui s'est passé avec la création de RFF : la société se bornerait à assurer la distribution, laissant aux producteurs extérieurs le rôle noble de la création.
M. Michel Thiollière, rapporteur. - Défavorable : il est clair que France Télévisions conservera le droit de produire !
Mme Christine Albanel, ministre. - Même avis.
L'amendement n°290 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°140, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.
Dans le second alinéa du 1° de cet article, supprimer les mots :
de commande et
M. Jean-François Voguet. - Cet amendement peut paraître anodin ; il ne l'est pas. Son objet est en effet que le pluralisme soit garanti au travers d'une production propre d'émissions par France Télévisions. Dans le schéma que propose l'article 15, les objectifs de pluralisme et de diversité seraient atteints par tout moyen, c'est-à-dire par programmation, commande ou production de programmes. Si nous souhaitons retirer la notion de commande, c'est parce que le pluralisme et la diversité ne se sous-traitent pas mais requièrent une politique ambitieuse de production. Celle-ci constitue la meilleure utilisation du produit de la redevance.
Ce qui a fait la force, et le paradoxe, de la télévision publique des années soixante, c'est d'avoir réussi, malgré une tutelle parfois insupportable sur la ligne éditoriale de l'information, à développer une originalité créatrice qui a fait des grandes fictions dramatiques, des magazines de société, des créations musicales.
Mais ne jouons pas la nostalgie et venons-en à l'essentiel : le secteur public audiovisuel doit piloter et mettre en oeuvre une audacieuse politique de création fictionnelle comme d'émissions de plateau qui fassent la part belle au pluralisme de la société, de ses habitants, de leurs idées, de leurs situations sociales, de leurs rapports économiques, sociaux ou culturels. Non, l'actualité sociale ne peut continument être traitée que par des spécialistes déconnectés des réalités, l'actualité économique ne peut être la chasse gardée de penseurs tous plus libéraux les uns que les autres ! La diversité des origines nationales des habitants de notre pays est un atout que nous devons utiliser, dans le respect du parcours de chacun, et dans la condamnation de tout ce qui fait obstacle à l'épanouissement de tous. Ce que nous attendons d'une télévision pluraliste, respectueuse des habitants de notre pays, c'est de leur donner la parole, sans condescendance ni commisération. Nous ne voulons pas d'une télévision qui infantilise, les Français n'ont pas besoin de directeurs de conscience cathodiques. Ils appellent de leurs voeux une télévision à micro ouvert, caméra à l'épaule, une télévision à hauteur d'homme. Et cela vaut aussi pour la radio.
M. Michel Thiollière, rapporteur. - Défavorable : il est évident que France Télévisions va continuer à produire des émissions, mais aussi à en commander. L'entreprise a besoin des deux aspects pour être ouverte sur la création et sur la modernité. On ne demande pas à la SNCF de fabriquer ses propres wagons !
Mme Christine Albanel, ministre. - Même avis. La loi de 1986 prévoit que les sociétés de programme peuvent produire par elles-même et aussi qu'elle peuvent passer des commandes. C'était aussi l'objet des décrets de Mme Tasca, et c'est l'objet des accords interprofessionnels qui ont été signés il y a quelques semaines.
Mme Marie-Christine Blandin. - Nous vivons un moment très intéressant pour la forme. Je partage pour l'essentiel le souci du groupe CRC -j'ai argumenté dans le même sens- même si je n'irais pas jusqu'à interdire le recours aux commandes, c'est pourquoi je m'abstiendrai par honnêteté sur cet amendement. Mais où cela devient intéressant, c'est quand on entend le Gouvernement et la commission s'activer pour que le mot « commande » figure dans le texte de la loi, alors que son absence n'aurait pas signifié l'interdiction de toute commande. En revanche, si nous parlons d'y inscrire le mot « création », ils sortent leur grande gomme et engagent la grande épuration du texte. Nous dormirions mieux si les deux mots y figuraient. L'obstination à supprimer le mot « création » et à imposer le mot « commande » fait peser un doute affreux !
L'amendement n°140 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°353 rectifié, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Compléter le second alinéa du 1° de cet article par une phrase ainsi rédigée :
Le cahier des charges précise notamment les conditions dans lesquelles les unités de programmes assurent, dans la collégialité des décisions, la diversité en matière d'investissements dans les programmes, notamment les oeuvres audiovisuelles d'expression originale française et européenne.
M. David Assouline. - L'Assemblée nationale a inscrit à l'article premier une disposition indiquant que France Télévisions doit veiller au pluralisme de la création audiovisuelle. Toutefois cette mention n'est accompagnée d'aucune obligation légale. C'est pourquoi le cahier des charges du service public pourrait être utilement complété par une disposition indiquant les conditions dans lesquelles les unités de programmes assurent le pluralisme des décisions en matière d'investissements dans les oeuvres audiovisuelles d'expression originale française et européenne.
Quatre éléments plaident en ce sens.
La redéfinition du cahier des charges en fait un instrument fondamental dans la réorganisation du service public et on ne peut ignorer les conséquences de l'organisation fonctionnelle du groupe public sur le pluralisme de la création.
L'inclusion d'une telle disposition ne remet nullement en cause la transformation de France Télévisions en entreprise unique et ne créé pas les conditions d'un retour à des unités de programmes par chaîne.
Gardien et contrôleur du respect du cahier des charges, le CSA, qui a aussi exprimé des craintes sur la diversité des programmes, pourrait s'assurer chaque année que l'organisation des unités de programmes ne nuit pas à la diversité de la création et contribue à l'expression de lignes éditoriales spécifiques à chacune des chaînes du groupe.
Cette disposition mettrait fin à un paradoxe de ce projet de loi, avec le maintien, obtenu par l'industrie du cinéma, de plusieurs filiales autonomes ayant vocation à investir dans la création cinématographique. Les risques de formatage et d'uniformisation de la création audiovisuelle sont d'autant plus grands que l'apport des chaînes se situe en moyenne à hauteur de 70 % du coût de la production. Dans le cinéma, la contribution des chaînes en clair ne va guère au-delà de 25 % du financement nécessaire, ce qui réduit la capacité des diffuseurs à peser sur la ligne artistique de l'oeuvre.
La rectification que nous avons apportée à notre amendement, pour préciser, à la demande de la commission des affaires culturelles, que les unités de programme oeuvrent en faveur de la diversité « dans la collégialité des décisions » le rend acceptable par le Sénat. Son adoption serait un signe encourageant pour ceux qui redoutent une perte de diversité dans la création.
M. Michel Thiollière, rapporteur. - A l'article premier, notre amendement équilibré garantit à la fois l'entreprise unique et la diversité. Il a donné lieu en commission à un débat nourri et nous l'avons même co-écrit. L'avis est donc favorable.
Mme Christine Albanel, ministre. - Lors de l'examen de l'article premier, j'ai dit mes réserves sur les décisions collégiales, car les engagements dans les unités de programme se font souvent sur un coup de coeur et non à l'issue d'une discussion. Quoi qu'il en soit, je m'en remets à la sagesse de la Haute assemblée.
Mme Marie-Christine Blandin. - Je salue la méthodologie retenue pour cet amendement : nous l'appelions de nos voeux pour l'ensemble de la loi ! Un travail en commission qui entend l'opposition, même s'il ne reprend pas toutes ses propositions, et une ministre qui s'en remet à la sagesse du Sénat.
L'amendement n°353 rectifié est adopté.
M. le président. - Amendement n°85, présenté par M. Kergueris, au nom de la commission des affaires étrangères.
Après la première phrase du deuxième alinéa du 1°bis de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :
En ce qui concerne la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France, tout nouveau cahier des charges est également transmis aux commissions chargées des affaires étrangères de l'Assemblée nationale et du Sénat.
M. Robert del Picchia, au nom de la commission des affaires étrangères. - Le Parlement sera pleinement informé et associé aux décisions importantes qui concernent l'audiovisuel public comme la nomination des présidents ou les contrats d'objectifs et de moyens.
Cet article prévoit que tout nouveau cahier des charges soit transmis aux commissions des affaires culturelles des deux assemblées afin qu'elles puissent donner leur avis. En ce qui concerne le cas de l'audiovisuel extérieur, et compte tenu de son importance sur la place et l'influence de notre pays dans le monde, il serait utile que les commissions des affaires étrangères soient également associées au contrôle parlementaire. Notre commission examine en effet chaque année les crédits consacrés à l'audiovisuel extérieur dans le cadre du projet de loi de finances.
Cet amendement, qui a été adopté à l'unanimité de notre commission, ne remet pas en cause les compétences de la commission des affaires culturelles, qui dispose d'une légitimité et d'une expertise particulière. Je tiens d'ailleurs à saluer la qualité du travail effectué par ses rapporteurs.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. - Avis très favorable.
Mme Christine Albanel, ministre. - Sagesse.
L'amendement n°85 est adopté.
M. le président. - Amendement n°139, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.
Après le deuxième alinéa du 1° bis de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le président de la société France Télévisions présente une fois par an l'état d'avancement du contrat d'objectifs et de moyens devant le Conseil d'administration et les deux commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat.
M. Ivan Renar. - Nous souhaitons pouvoir apprécier les résultats du cahier des charges de l'audiovisuel public. Il conviendrait d'ailleurs d'en faire de même pour les opérateurs privés. Les engagements du groupe Bouygues lors de la privatisation de TF1 n'ont en effet pas été tous tenus au cours de ces dernières années. Où est passé le « mieux-disant culturel » ? Nous attendons avec impatience le jour où TF1 diffusera, aux heures de grande écoute et en version originale, un Fellini ou un Visconti...
Au fait, quand interviendra la deuxième coupure publicitaire, madame la ministre ?
En ce qui concerne le contrôle des missions de service public, à quoi peut bien servir cette communication annuelle, à moins de s'inspirer du modèle de télévision publique britannique qui a permis de révéler de très bons artisans ?
Il ne s'agit pas de sanctionner le travail accompli, mais cette consultation devrait permettre d'analyser ce qui fait obstacle aux missions de service public afin que les deux assemblées puissent mieux ajuster le financement des opérateurs publics à leurs besoins.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. - Cet article traite du cahier des charges et non du contrat d'objectifs et de moyens. Avis défavorable.
Mme Christine Albanel, ministre. - Cet amendement est satisfait par l'article 18.
L'amendement n°139 est retiré.
M. le président. - Amendement n°86, présenté par M. Kergueris, au nom de la commission des affaires étrangères.
Compléter le dernier alinéa du 1° bis de cet article par une phrase ainsi rédigée :
Le rapport annuel sur l'exécution du cahier des charges de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France est également transmis aux commissions chargées des affaires étrangères de l'Assemblée nationale et du Sénat.
M. Robert del Picchia, au nom de la commission des affaires étrangères. - Aux côtés des commissions des affaires culturelles, les commissions chargées des affaires étrangères doivent être destinataires du rapport annuel sur l'exécution du cahier des charges relatif à l'audiovisuel extérieur. Cet amendement a également été adopté à l'unanimité des membres de notre commission.
L'amendement n°86, accepté par la commission et par le Gouvernement, est adopté.
M. le président. - Amendement n°264, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et MM. Desessard et Muller.
Supprimer le 2° de cet article.
Mme Marie-Christine Blandin. - L'Élysée est une extraordinaire officine de communication. Les Français ont cru qu'on allait libérer les écrans publics des marques. Ils sont donc étonnés de voir persister la réclame qui introduit la météo et autres réjouissances... Non, ce n'est pas de la publicité : on ne vous avait pas tout dit ! C'est du parrainage. La désintoxication, ce n'est pas pour demain...
Si la météo ne permet pas à l'entreprise de vente d'électroménager de faire la pluie et le beau temps, il n'en va pas de même pour d'autres parrainages qui peuvent influencer les contenus des programmes. Avant d'envisager des limitations, je préfère proposer une mesure radicale et éthique : la suppression des marques des écrans publics. (M. Jean-Pierre Sueur applaudit)
M. le président. - Amendement identique n°354 rectifié, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Mme Bernadette Bourzai. - Toutes les émissions pourront être parrainées, sauf celles ayant été exclues par l'Assemblée nationale. Ce recours au parrainage pour les chaînes publiques, alors même que le projet de loi supprime la publicité, est pour le moins surprenant. Ne sonne-t-il pas comme un aveu, le service public audiovisuel ne verrait pas sa perte de recettes publicitaires intégralement compensée ? La manne du parrainage attendue par France Télévisions devait en effet s'élever à 85 millions.
Or, le décret du 27 mars 1992 associe le parrainage à la publicité et au télé-achat. La définition est d'ailleurs claire : « Toute contribution d'une entreprise ou d'une personne morale publique ou privée, n'exerçant pas d'activité de radiodiffusion ou de production d'oeuvres audiovisuelles, au financement d'émissions télévisées, afin de promouvoir son nom, sa marque, son image, ses activités ou ses réalisations ».
Depuis quelques années, les « programmes courts » se sont multipliés sur les chaînes et se confondent avec les spots publicitaires. Ces programmes permettent aux « parrains » de contribuer à la conception de programmes et il est fréquent que le CSA rappelle les chaînes à l'ordre, notamment lorsqu'il considère que l'indépendance éditoriale du diffuseur est mise en cause.
Il n'est donc pas opportun d'élargir les possibilités de parrainage des émissions des chaînes publiques.
M. Jean-Pierre Sueur. - Très bien !
M. le président. - Amendement n°30, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles.
Rédiger comme suit le 2° de cet article :
2° Le cinquième alinéa est ainsi rédigé :
« Ces sociétés peuvent faire parrainer leurs émissions dans les conditions déterminées par ces cahiers des charges à l'exception des émissions d'information politique, de débats politiques et des journaux d'information. »
M. Michel Thiollière, rapporteur. - L'Assemblée nationale a considérablement restreint la possibilité pour France Télévisions de faire parrainer ses émissions. Ainsi des émissions comme « Stade 2 », « Tout le sport » ou « Ce soir ou jamais » ne pourraient plus faire l'objet de parrainage, ce qui aurait un impact de 9 millions pour France Télévisions.
Il convient donc de trouver un compromis entre le dispositif adopté à l'Assemblée et le droit existant en interdisant le parrainage pour les émissions d'information et de débats politiques et les débats d'actualité.
Nous considérons que cela relève plutôt d'une forme de mécénat culturel ; le risque d'influence nous a paru marginal.
M. le président. - Sous-amendement n°266 à l'amendement n°30 de Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et MM. Desessard et Muller.
I. - Dans le dernier alinéa de l'amendement n°30, après les mots :
émission d'information
insérer le mot :
notamment
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter l'amendement n°30 par un paragraphe ainsi rédigé :
II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour les sociétés visées au I de l'article 44 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication des restrictions apportées à la possibilité de faire parrainer les émissions d'information est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Mme Marie-Christine Blandin. - La précaution introduite par la commission n'est pas suffisante. Il faut élargir encore le champ des matières sensibles à protéger.
Les émissions de santé publique sont très appréciées. J'ai pu mesurer, lors de l'élaboration d'un rapport sur les risques chimiques, la force des lobbies, qui sont passés de la conviction à l'intimidation et des cadeaux à la menace ; c'est l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques qui m'a permis de tenir le cap de l'indépendance. Imagine-t-on une émission sur le diabète parrainée par une multinationale du sucre ?
Le même raisonnement vaut pour les émissions d'information sur l'environnement. L'admirable émission Compléments d'enquête sur les risques chimiques n'aurait pas eu le même contenu si elle avait été parrainée par l'Union des industries chimiques... De même, une émission d'enquête de la RTBF sur la disparition des abeilles n'aurait pu mettre en scène toutes les hypothèses si elle l'avait été par un fabricant de produits phytosanitaires.
Tout ce qui fait débat ne doit pas être exposé au miroir déformant des intérêts économiques qui, s'ils peuvent largement s'exprimer à l'antenne, ne doivent pas, s'ils sont financeurs, pouvoir influencer les réalisateurs, quelle que soit par ailleurs la qualité du cahier des charges.
M. le président. - Sous-amendement n°213 rectifié à l'amendement n°30 de Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles, présenté par Mlle Joissains, MM. Gilles, Retailleau et Hérisson et Mme Bruguière.
I. - Compléter le dernier alinéa de l'amendement n° 30 par une phrase ainsi rédigée :
Les émissions relatives à la santé publique ne peuvent être parrainées par les entreprises et les établissements pharmaceutiques visées aux articles L. 5124-1 à L. 5124-18 du code de la santé publique.
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter l'amendement n° 30 par un paragraphe ainsi rédigé :
II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour les sociétés visées au I de l'article 44 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication de l'impossibilité de faire parrainer les émissions de santé publique est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Mlle Sophie Joissains. - Je reprends en partie les arguments de Mme Blandin. Il semble que la réglementation interdise le parrainage par les médicaments ; toutes les émissions relatives à la santé sont-elles concernées ?
M. le président. - Sous-amendement n°214 rectifié à l'amendement n°30 de Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles, présenté par Mlle Joissains, MM. Gilles et Hérisson et Mme Bruguière.
Compléter le dernier alinéa de l'amendement n°30 par une phrase ainsi rédigée :
Les sociétés parrainant les émissions doivent être clairement identifiables pour le téléspectateur en début ou en fin de générique.
Mlle Sophie Joissains. - Nous renforçons la transparence au bénéfice des téléspectateurs.
M. le président. - Sous-amendement n°267 à l'amendement n°30 de Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et MM. Desessard et Muller.
Compléter le dernier alinéa de l'amendement n°30 par une phrase ainsi rédigée :
Ces sociétés doivent être clairement identifiables pour le téléspectateur.
Mme Marie-Christine Blandin. - Même objectif que le précédent. J'ai quant à moi fait jouer le principe de précaution en évitant d'entrer dans les détails, de peur que M. Portelli ne m'oppose la distinction entre la loi et le règlement...
M. le président. - Amendement n°231, présenté par M. Maurey et les membres du groupe UC.
Après les mots :
émissions d'information
rédiger comme suit la fin du deuxième alinéa du 2° de cet article :
politique et des journaux télévisés.
M. Hervé Maurey. - Nous ne voulons pas que les émissions d'information générale ou sportive soient interdites de parrainage.
M. le président. - Amendement identique n°424, présenté par MM. P. Dominati, Bécot et Houel.
M. Philippe Dominati. - Il est défendu.
M. le président. - Amendement n°355, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Au deuxième alinéa du 2° de cet article, après les mots :
émissions d'information
insérer le mot :
politique
Mme Bariza Khiari. - Amendement de repli : il faut éviter que les émissions politiques soient polluées par le parrainage et les risques de conflits d'intérêt. Nous verrouillons le dispositif de l'Assemblée nationale afin que le parrainage ne puisse entrer par la petite porte.
M. le président. - Amendement n°265, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et MM. Desessard et Muller.
I. - Après le deuxième alinéa du 2° de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les émissions de santé publique et de culture scientifique et technique ne peuvent faire l'objet de parrainage.
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour les sociétés visées au I de l'article 44 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication de l'impossibilité de faire parrainer les émissions de santé publique et de culture scientifique et technique est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Mme Marie-Christine Blandin. - Je vise ici non seulement les émissions de santé publique mais aussi celles, éloignées de Thalassa et de ses agréments, relatives à la culture scientifique et technique ; je pense aux nanomatériaux, au nucléaire, aux éoliennes, bref, à tout ce qui fait débat.
M. le président. - Amendement n°243, présenté par M. Maurey.
Après le mot :
sociétés
rédiger comme suit la fin du dernier alinéa du 2° de cet article :
mentionnées à l'article 44 assurent la promotion de leurs programmes et services. »
M. Hervé Maurey. - Les émissions d'autopromotion des sociétés de programmes de France Télévisions seront d'autant plus nécessaires à l'heure de l'entreprise unique. En outre, la rédaction de l'article 15 limite les possibilités d'autopromotion aux services mentionnés dans la loi, alors que d'autres vont apparaître.
M. Michel Thiollière, rapporteur. - Avis défavorable aux amendements identiques n°s264 et 354 rectifié, comme au sous-amendement n°266. Avis favorable au sous-amendement n°213 rectifié, étant entendu que les règles encadrant le parrainage seront précisées par un décret en Conseil d'État et que le CSA en contrôlera le respect. Avis favorable de même au sous-amendement n°214 rectifié, et défavorable au sous-amendement n°267.
M. David Assouline. - Pourquoi ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. - Parce que le décret prévoit déjà cette mention.
Avis défavorable aux amendements identiques n°s231 et 424, retrait de l'amendement n°355, satisfait par celui de la commission ; l'amendement n°265 est en partie satisfait par le nôtre et il n'y a de toute façon guère d'émissions scientifiques sur France Télévisions... Avis défavorable enfin à l'amendement n°243.
Mme Christine Albanel, ministre. - Avis défavorable aux amendements identiques n°s264 et 354 rectifié, favorable à l'amendement n°30, défavorable au sous-amendement n°266. Sagesse sur le sous-amendement n°213 rectifié, dont je suis prête à lever le gage, comme au 214 rectifié, bien que ce qu'il propose figure déjà dans le décret de 1992. Défavorable au sous-amendement n°267.
Défavorable aux amendements identiques n°s231 et 424, ainsi qu'à l'amendement n°355, satisfaits par l'amendement n°30. Défavorable à l'amendement n°265, ainsi qu'à l'amendement n°243.
M. Jean-Pierre Sueur. - Je soutiens les amendements n°s264 et 354 rectifié. On ne peut faire comme s'il allait de soi que le parrainage est bénéfique et judicieux ! Comment expliquer que ce projet de loi, dont l'objet est de supprimer la publicité sur les chaînes publiques, généralise le parrainage ? En toute logique, il faut supprimer l'une et l'autre !
Il ne faut pas cultiver l'hypocrisie, dites-vous. Assurément. Mais le parrainage est une publicité hypocrite ! L'information, la communication, la création sont une chose, la publicité en est une autre. J'ai toujours trouvé hypocrite la dénomination « publireportage » pour qualifier des articles promotionnels dans la presse. Il n'y a pas de honte à faire de la publicité, mais qu'on l'appelle par son nom ! S'agit-il de mécénat ? Alors qu'on le dise ! Si vous ne pouvez démontrer qu'il est cohérent de supprimer la publicité tout en généralisant le parrainage, qui est une forme dégradée, ambiguë, pernicieuse de publicité, votez donc nos amendements !
Mme Christine Albanel, ministre. - Le parrainage est une façon d'associer durablement un nom à un programme court. Il n'est pas généralisé mais simplement conservé, car c'est une ressource pour l'audiovisuel public, notamment pour les actualités sportives. Le parrainage est moins agressif que la publicité, et ne remet pas en cause le projet de suppression de celle-ci.
M. David Assouline. - Nous ne cherchons pas à tarir les ressources de France Télévisions, bien au contraire, mais nous souhaitons que le parrainage soit encadré, de même que nous aurions été favorables à une publicité moins agressive, par exemple avec la suppression des tunnels de publicités. Ces amendements sont dans l'esprit de la loi, je regrette qu'ils soient rejetés.
M. Michel Thiollière, rapporteur. - La publicité, c'est produire soi-même un spot à ses fins, tandis que le parrainage, c'est accompagner une oeuvre audiovisuelle indépendante. La marque associe son nom à une émission, et en retire un bénéfice commercial, mais n'intervient en rien dans le contenu. Nous encadrons cette pratique pour éviter toute confusion.
M. François Fortassin. - Quelle est la différence entre publicité et parrainage ? L'une est exclusivement, bassement mercantile ; l'autre est associé à un contenu éthique. Mais la frontière est fine...
M. Jean-Pierre Sueur. - C'est le moins que l'on puisse dire !
M. François Fortassin. - Par exemple, comment empêcher que dans une émission scientifique ou relative à la santé, les propos d'un intervenant soient conditionnés par tel ou tel avantage secret qu'il aurait obtenu d'un laboratoire ? Ne pourrait-on créer une commission d'éthique pour interdire quelqu'un d'antenne quand la dérive devient flagrante ? C'est délicat, certes, mais le CSA ne pourrait-il au moins se pencher sur ce problème ?
L'amendement n°264, identique à l'amendement n°354 rectifié, n'est pas adopté.
M. Jean-Pierre Sueur. - La ministre a déclaré que le projet de loi ne changerait pas fondamentalement les choses. Dans ce cas, pourquoi modifier la loi ? La nouvelle rédaction, moins restrictive, permet le parrainage de toutes les émissions. Or le parrainage est plus pervers que la publicité, qui s'affiche comme telle : on ne dit pas « notre produit est le meilleur », mais « voyez comme nous sommes bons, nous vous permettons de voir la météo, ou une belle émission » ! Il faut être très vigilant. La rédaction actuelle suffit ; elle pourrait même être plus restrictive. Quid d'une émission littéraire qui serait parrainée par une maison d'édition et qui dirait qu'un livre, publié par l'éditeur en question, est nul ?
Après un certain temps, le parrain téléphonera aux journalistes pour leur rappeler son rôle.
Les collectivités territoriales sont souvent sollicitées pour parrainer des émissions. Je suis très réservé envers cette pratique. Si une collectivité territoriale veut se payer une campagne de communication, qu'elle le fasse. D'ailleurs, elles ne s'en privent guère. Imaginez qu'un journaliste critique la gestion de la collectivité parrainant l'émission. Elle mettra sans doute fin à son parrainage. Il faut donc laisser la loi telle qu'elle est.
Mme Christine Albanel, ministre. - Le décret de 1990 proscrit tout lien étroit entre le parrain et l'objet d'une émission. Ainsi, l'émission Apostrophes était parrainée par les stylos Dupont, non par une maison d'édition.
Au sous-amendement n°266, je préfère l'amendement n°30 qui recentre la restriction de parrainage autour de la notion d'émission politique.
Mme Marie-Christine Blandin. - Le sous-amendement n°266 et l'amendement n°265 ont en réalité le même objet : protéger les émissions scientifiques ou de santé publique. Peut-être que l'amendement présenté par Mlle Joissains sauvera au moins la santé publique...
Il reste que les enquêtes sont en péril. Imaginez une émission consacrée à la politique énergétique. Gageons que le contenu ne sera pas le même selon qu'elle sera parrainée par l'entreprise pétrolière, par un fabricant de panneaux solaires ou par Areva. Ce n'est pas un fantasme paranoïaque ! Nous avons déjà eu ce genre d'expérience. Que croyez-vous qu'il arriva lorsque certains centres de culture scientifique, technique et industrielle (CCSTI) se sont trouvés au bord de la faillite parce que l'État n'avait plus les moyens de les financer ? De grandes firmes ont frappé à la porte ! Ainsi, les producteurs d'OGM ont fourni un certain nombre d'éléments. Ce n'est pas gênant, sinon que la pluralité des opinions n'a plus été assurée.
Il faut donc protéger les émissions scientifiques et techniques contre le parrainage.
Le sous-amendement n°266 n'est pas adopté.
M. le président. - Je mets aux voix le sous-amendement n°213 rectifié bis.
Mme Marie-Christine Blandin. - Après le naufrage de mon amendement, je me raccroche à la bouée lancée par Mlle Joissains, (sourires.) car il faut au moins sauver la santé publique.
J'approuve le fond de la rectification proposée, mais j'observe que les rectifications proposées par l'opposition à ses amendements suscitent une plus grande sévérité lorsqu'elles sont soumises au service de la séance.
M. le président. - Le service de la séance indique qu'il ne s'est jamais opposé à la rectification d'un amendement de l'opposition. Il vous apportera toutes les justifications que vous souhaitez.
Mlle Sophie Joissains. - En effet, la rectification porte sur le fond, puisqu'elle permettra de faire parrainer les émissions de santé publique par les entreprises dénuées de tout lien avec la santé.
Le sous-amendement n°213 rectifié bis est adopté.
Le sous-amendement n°214 rectifié est adopté.
Le sous-amendement n°267 devient sans objet.
L'amendement n°30, sous-amendé, est adopté.
Les amendements n°s231, 424, 355, 265 et 243 deviennent sans objet.
M. le président. - Amendement n°31, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles.
Compléter cet article par un 3° ainsi rédigé :
3° Après le cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le cahier des charges de la société visée au I de l'article 44 précise les conditions dans lesquelles elle met en oeuvre, dans des programmes spécifiques et à travers les oeuvres de fiction qu'elle diffuse, sa mission de promotion de l'apprentissage des langues étrangères prévue à l'article 43-11. »
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. - Les enfants passent quotidiennement trois heures et demie devant la télévision, souvent pour regarder des oeuvres anglo-saxonnes, dont la diffusion en version originale sous-titrée pourrait donc améliorer la connaissance des langues étrangères. L'amendement est conforme aux nouvelles missions du service public énuméré à l'article premier bis.
En pratique, l'offre de fiction en version originale serait facultative pour les téléspectateurs, grâce aux progrès que permettra la télévision numérique terrestre.
Mme Christine Albanel, ministre. - Avis favorable.
M. le président. - Amendement n°32, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles.
I. - Compléter cet article par un 4° ainsi rédigé :
4° Après le cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le cahier des charges de la société visée au I de l'article 44 précise les conditions dans lesquelles, à compter de l'extinction de la diffusion par voie hertzienne terrestre en mode analogique des services de télévision sur l'ensemble du territoire métropolitain, cette société met en place les services de médias audiovisuels à la demande permettant la mise à disposition gratuite au public de l'ensemble des programmes qu'elle diffuse, à l'exception des oeuvres cinématographiques et, le cas échéant, des programmes sportifs, pendant une période minimale de sept jours à compter de leur première diffusion à l'antenne. »
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour les sociétés visées par le I de l'article 44 et par l'article 49 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication du sixième alinéa de ladite loi est compensée par la création d'une taxe additionnelle aux droits de consommation sur les tabacs prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. - Nous voulons que France Télévisions mette gratuitement ses programmes en ligne, sept jours après leur diffusion télévisée. Nous obtiendrions ainsi un service public du média global.
Concrètement, ce nouveau service s'adresserait bien sûr principalement aux jeunes.
Ce dispositif reprend le remarquable modèle britannique mis en place par la BBC. Sa plate-forme rencontre un tel succès qu'il est difficile aux opérateurs de lui attribuer une bande passante suffisante. La chaîne Arte met également ses émissions en ligne sept jours après leur télédiffusion.
Bien sûr, la mise en place de ce système prendra un certain temps.
Mme Christine Albanel, ministre. - Sur le fond, je suis favorable à la disponibilité gratuite sur internet des émissions du service public, mais cette télévision de rattrapage est un service nouveau, dont le modèle économique n'est pas stabilisé. Il est donc délicat de l'imposer par la loi, surtout avec une telle précision.
En outre, France Télévisions ne dispose pas nécessairement des droits autorisant ce rattrapage.
Retrait ou rejet.
L'amendement n°31 est adopté.
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. - Il semble incroyable que les émissions de France Télévisions soient disponibles sur internet moyennant paiement, alors que M6 par exemple met gratuitement ses programmes en ligne une semaine après leur diffusion. Si vous avez manqué Plus belle la vie sur France 3, vous devez payer pour voir cette émission sur internet, bien qu'elle ait déjà été financée par la redevance.
L'amendement de la commission est équilibré, puisqu'il laisse à France Télévisions le temps d'organiser cette offre gratuite sur internet. Il y a trois ans pour négocier les droits.
M. David Assouline. - Nous soutenons l'amendement équilibré de la commission. L'investissement de départ est certes important pour France Télévisions, il s'agit d'amortir un effort considérable, mais dans trois ans. Mais il est normal que soit assurée, à terme, la gratuité de ce service, financé par la redevance. Il serait paradoxal que seul le privé fournisse une offre gratuite, laquelle a de surcroît des retombées importantes, puisqu'elle porte la renommée du groupe, comme on l'a vu avec l'offre d'Arte.
L'amendement n°32 est adopté.
L'article 15, modifié, est adopté.
Prochaine séance aujourd'hui, mercredi 14 janvier 2009, à 15 heures.
La séance est levée à minuit cinquante.
Le Directeur du service du compte rendu analytique :
René-André Fabre
ORDRE DU JOUR
du mercredi 14 janvier 2009
Séance publique
À 15 HEURES
1. Suite de la discussion du projet de loi organique (n° 144, 2008-2009), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la nomination des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France et du projet de loi (n° 145, 2008-2009), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision.
Rapport (n° 150, 2008-2009) de Mme Catherine Morin-Desailly et M. Michel Thiollière, fait au nom de la commission des affaires culturelles.
Avis (n° 152, 2008-2009) de M. Bruno Retailleau, fait au nom de la commission des affaires économiques.
Avis (n° 151, 2008-2009) de M. Joseph Kerguéris, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
À 21 HEURES 30
2. Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, sur la situation au Proche-Orient.
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DÉPÔT
La Présidence a reçu de M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, pour l'accélération des programmes de construction et d'investissement publics et privés.