Débat d'orientation budgétaire
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle une déclaration du Gouvernement suivie d'un débat d'orientation budgétaire.
M. Eric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique. - Le débat d'orientation des finances publiques permet de discuter des problèmes de fond mais aujourd'hui, en plus, je vous transmets pour la première fois les plafonds de dépense par mission pour les trois prochaines années.
Depuis un an, beaucoup a été accompli, notamment la révision générale des politiques publiques. Nous sommes aujourd'hui à un moment crucial où nous ne pouvons plus user des solutions de facilité, notamment de l'endettement à bas coût, et nous devons faire face à l'arrivée à la retraite des baby-boomers.
Les travaux du Gouvernement ont été menés sur les fondements du premier budget triennal et de la loi de programmation pluriannuelle. La contrainte financière est forte mais nous nous sommes donné les moyens de la concilier avec le maintien d'un service public de qualité et d'un système social protecteur.
Où en sommes-nous de l'année 2008 ? L'objectif reste de contenir le déficit public à 2,5 % du PIB mais il faut rester vigilant sur le niveau des dépenses.
Les recettes fiscales sont inférieures à celles prévues par la loi de finances initiale : en avril, en révisant à la baisse notre prévision de croissance pour l'estimer de 1,7 à 2 % du PIB, nous supposions par là-même une moins-value de recettes de 3 à 5 milliards par rapport à la loi de finances initiale.
Pour les dépenses, ce qui pèse essentiellement sur l'exécution est la révision à la hausse de la charge de la dette -de 5 à 7 %-, dérapage qui provient de l'inflation. La mise en réserve de crédits réalisée au début de 2008 est normalement destinée à des besoins imprévisibles. La moitié de ces crédits, soit environ 3 milliards, pourrait faire l'objet d'une annulation. L'objectif de respecter l'enveloppe votée en loi initiale demeure donc.
Pour la sécurité sociale, nous respectons le cadrage financier de la LFSS. Le déficit du régime général serait de 8,9 milliards, exactement en phase avec la loi de financement pour 2008. Ces résultats s'expliquent principalement par les mesures de régulation votées dans cette loi et par la bonne tenue des recettes due au dynamisme de l'emploi.
Sur l'assurance maladie, le comité d'alerte a prévu un dépassement de l'Ondam allant de 500 à 900 millions. Avec Roselyne Bachelot, je reste vigilant, car nous ne nous satisfaisons pas de ce dépassement, même s'il est inférieur au seuil d'alerte de 1,1 milliard et même s'il est bien inférieur au dérapage de 3 milliards de l'année dernière à la même époque.
Sans verser dans l'angélisme, je confirme dans ces conditions qu'un déficit de 2,5 points de PIB est toujours mon objectif.
Depuis un an, nous appliquons avec constance la même stratégie pour le rétablissement de nos finances publiques. Elle conjugue le développement de la croissance potentielle grâce aux réformes de structure et la maîtrise de la dépense dont il faut diviser par deux le taux de croissance pour l'amener à 1 % en euros constants par an. C'est ainsi que nous retrouverons l'équilibre de nos finances publiques en 2012, et de la sécurité sociale dès 2011.
Je sais que nous divergeons quelque peu, monsieur le rapporteur général, sur l'évaluation des efforts nécessaires à cette stratégie. Il nous faut réaliser un effort d'une dizaine de milliards par an. Ce n'est pas une mince affaire, surtout quand on ne se situe pas par rapport à une évolution tendancielle.
Comment s'articule la préparation du premier budget triennal avec la stratégie de moyen terme ? Le premier pas du retour à l'équilibre de nos finances publiques en 2012, c'est un objectif 2009 ambitieux : réduire le déficit public de 0,5 point pour le ramener à 2 points de PIB. D'autres pays l'ont déjà fait et cet effort est attendu par nos partenaires européens. Mais, au-delà, cet assainissement renforcera l'ensemble des réformes en cours pour soutenir la croissance. Car il ne peut y avoir de croissance durable sans finances publiques soutenables.
Pour y parvenir, il faut agir dans trois directions : stabiliser chaque année la dépense de l'État en euros constants sur le périmètre élargi établi lors du PLF 2008 ; réaliser 4 milliards de redressement sur l'assurance maladie dès 2009 pour assurer le retour à l'équilibre du régime général au plus tard en 2011 ; poursuivre les réformes pour trouver nos propres ressorts de croissance dans un environnement mondial difficile.
L'une des principales difficultés de cet environnement, c'est la poussée inflationniste. Or l'inflation n'est pas favorable aux finances publiques. Elle augmente d'abord les dépenses immédiatement via la charge des obligations indexées, et l'année suivante via les prestations familiales et de retraite. Et elle n'est pas forcément bénéfique aux recettes, contrairement à une idée préconçue. L'inflation que nous connaissons aujourd'hui, qui provient principalement des matières premières, pèse sur l'activité et sur les volumes produits. Certes, les prix augmentent mais les volumes diminuent. Au total, l'effet de l'inflation sur les recettes fiscales est donc très ambigu.
Pour la première fois, nous mettons à votre disposition les plafonds de dépense par mission pour les trois prochaines années. C'est une avancée majeure pour la clarté et l'efficacité de la dépense de l'État. Mais la construction de ce budget triennal se fait dans un environnement contraint comme jamais auparavant pour les raisons suivantes.
Stabiliser les dépenses en euros constants sur le périmètre de la norme élargie, c'est un effort supérieur à tout ce qui a été fait par le passé. En moyenne, de 1999 à 2007, la croissance de la dépense de l'État sur ce périmètre élargi aurait été de 1,1 %. Je tiens par ailleurs à faire disparaître les sous-dotations qui ont pu exister, notamment dans les crédits dus à la sécurité sociale. Quant aux dépenses héritées du passé, elles sont bien plus dynamiques qu'auparavant. L'arrivée à l'âge de la retraite des générations du baby-boom accroît le montant des pensions : ces dépenses progresseront de près de 2,5 milliards en moyenne par an de 2009 à 2011. La charge de la dette s'accroît également brutalement : alors que de 2003 à 2007, elle était quasiment stable, il faut s'attendre à une augmentation moyenne d'un peu plus de 2 milliards chaque année.
A titre de comparaison, 2 milliards d'euros sont équivalents à la moitié du budget des affaires étrangères ou au budget de la culture.
De 2003 à 2007, la hausse de la charge cumulée de la dette et des pensions de retraite absorbait moins de 30 % de l'augmentation des dépenses de l'État. A l'avenir, l'évolution de ces deux postes de dépenses représentera 70 % de la capacité supplémentaire du budget. Si l'on ajoute le dynamisme des prélèvements opérés au profit de l'Union européenne et des collectivités territoriales, la totalité de la progression des recettes est placée sous contrainte.
Ainsi, la norme zéro volume en global se traduit par la stabilité totale des dépenses ministérielles. S'agissant des charges de personnel, cet objectif sera atteint grâce au non remplacement de 30 627 fonctionnaires de l'État partant à la retraite. Mais les opérateurs aussi seront associés à cet effort...
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. - Pour la première fois !
M. Eric Woerth, ministre. - ... l'effort demandé à chacun découlant toujours des réformes réalisées. Lors de la révision générale des politiques publiques, tous ont intensément recherché un meilleur rendement. Comme le Président de la République l'avait promis, la moitié des gains de productivité seront reversés aux fonctionnaires.
Mais l'absence de toute hausse des dépenses s'applique aussi aux autres charges de fonctionnement. A cet égard, on ne mesure pas combien les réunions conduites dans le cadre de la révision générale des politiques publiques auront des effets au cours des prochaines années. Elles ont permis d'inscrire le budget pour 2009 dans une perspective triennale.
Enfin, certaines priorités seront affirmées. Ainsi, l'enseignement supérieur et la recherche bénéficieront d'1,8 milliard supplémentaire. De même, le Grenelle de l'environnement se déploiera selon un large éventail couvrant le logement, les transports et la recherche, grâce à des outils réglementaires, fiscaux et budgétaires. La justice aussi bénéficiera de moyens accrus, notamment pour l'administration pénitentiaire. Enfin, l'équipement des forces armées devient une quasi priorité.
Bien sûr, le financement de ces orientations par un budget global constant signifie que certaines dotations doivent diminuer. Il n'y a pas de tabou en ce domaine.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Très bien !
M. Eric Woerth, ministre. - Même les dépenses prioritaires ont été rationalisées grâce à la révision générale des politiques publiques.
Au demeurant, certaines politiques mises en avant sont financées par des budgets en réduction, car la baisse des crédits ne signifie pas qu'une orientation soit secondaire. Tout est une question de productivité de l'euro dépensé. Ainsi, la mission Écologie verra ses crédits diminuer en 2011, parce que de nouvelles ressources permettront de réduire la subvention de l'État. Toute la force du budget triennal tient à l'intégration des perspectives à moyen terme. De même, la mission Vie et logement sera marquée par la réorientation du « 1 % logement » ; la mission Sécurité traduit la future loi d'orientation pour la sécurité intérieure ; la mission Travail et emploi limitera la durée des contrats aidés, recentrés sur les personnes les plus éloignés de l'emploi. A ce stade, le revenu de solidarité active (RSA) n'apparaît pas dans le plafond de dépense, car ses modalités de mise en oeuvre ne sont pas encore déterminées. (M. Philippe Marini invite à un redéploiement) Je n'ai donc pas voulu préempter la discussion sur ce sujet.
Cette nouvelle norme budgétaire ne fait pas apparaître de gagnants ou de perdants, car il faut juger un budget non sur son montant mais sur la hiérarchie de ses priorités.
J'en viens à la sécurité sociale. Pour équilibrer les comptes du régime général en 2011, il faut tout d'abord obtenir ce résultat pour l'assurance maladie. Nous allons étudier en détail les propositions faites, car les importantes marges d'efficience qui existent permettent d'envisager cet équilibre. Tel est le sens de la politique menée avec Roselyne Bachelot : au cours d'un cycle de réunions, nous discutons avec les partenaires sociaux pour cerner leur état d'esprit avant d'annoncer des mesures. L'excellent rapport d'information de M. Vasselle sur la répartition du financement entre l'assurance maladie obligatoire, les assurances complémentaires et les ménages constitue pour nous une source d'inspiration. Nous prendrons ensuite nos responsabilités, des annonces étant envisageables avant la fin du mois de juillet. Nous pourrons peut-être accélérer les mesures envisagées pour 2009, afin de contenir le dépassement prévu en 2008.
Par ailleurs, la réduction du chômage permettra de diminuer la cotisation correspondante, donc d'accroître les versements aux caisses de retraite à taux de prélèvement social globalement inchangé.
Pour inciter à l'emploi des seniors en 2009, le Gouvernement majorera la surcote et diminuera encore les préretraites financées sur fonds publics. Toutefois, le succès de cette nouvelle culture du travail dépendra en premier lieu des entreprises.
Je souhaite clarifier les relations entre l'État et la sécurité sociale. L'an dernier, nous avons apuré la dette,...
M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales. - Très bien ! Continuez !
M. Eric Woerth, ministre. - ... mais elle s'est partiellement reconstituée. La racine du mal tient à la sous-budgétisation des crédits, si bien que les dépenses de l'État sont partiellement reportées sur la sécurité sociale.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Faute avouée, faute à moitié pardonnée !
M. Eric Woerth, ministre. - Je n'avoue pas. Je dis simplement ce qui est : il n'est jamais de bonne politique de dissimuler. La vérité finit toujours par exploser à la figure.
La dette sociale, actuellement à l'Acoss, sera transférée à la Cades. (Mme Nicole Bricq approuve) Nous utiliserons une fraction des recettes CSG attribuées au FSV (Fonds de solidarité vieillesse), aujourd'hui en excédent, dans le respect de l'équilibre de son financement.
Nous traiterons également la lancinante question du Ffipsa (Fonds de financement des prestations sociales agricoles), dans le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, tant du point de vue du déficit que de la dette.
J'en viens aux collectivités locales. La Conférence nationale des exécutifs locaux, réunie jeudi dernier sous la présidence du Premier ministre, a été l'occasion de rappeler que l'ensemble des concours de l'État doit évoluer au même rythme que l'ensemble des dépenses de l'État, c'est-à-dire sur l'inflation. J'ai bien noté, monsieur le président de la commission des finances, que vous partagez cette analyse. Avec une prévision d'inflation à 2 % en 2009, l'ensemble des concours de l'État, soit 55 milliards hors dégrèvements, augmentera donc de 1,1 milliard en 2009 par rapport à 2008, soit 200 millions de plus qu'en 2008. C'est le maximum de l'effort que l'État peut s'imposer sur ses propres dépenses au bénéfice des collectivités. Pour 2010 et 2011, l'ensemble des concours de l'État continuera à évoluer comme l'inflation, ce qui conduira à une augmentation de 1 milliard supplémentaire par an.
Quelle traduction donner à cette augmentation de 1,1 milliard en 2009 ? Le Premier ministre s'est engagé, lors de la Conférence nationale des finances publiques, à ne pas réformer le FCTVA en 2009, afin de ne pas mettre en péril les plans de financement des collectivités qui ont déjà investi et qui comptent dessus. Cela n'exclut pas, en revanche, de réfléchir à l'avenir du mécanisme de cette dotation.
Une fois financée l'augmentation du FCTVA, 450 millions de crédits resteront disponibles, soit 1 % du périmètre de la contribution de l'État. Il nous faut réfléchir conjointement à l'orientation que nous leur donnons et à l'évolution de la DGF : dans le contexte budgétaire qui est le nôtre, il n'est pas possible que la DGF continue à progresser sur son rythme actuel d'indexation. Il faudra fonder la confiance entre l'État et les collectivités sur une nouvelle manière de voir les choses : nous y travaillons, avec Mmes Lagarde et Alliot-Marie.
La révision de la Constitution a été l'occasion d'ouvrir un large débat sur l'opportunité d'inscrire dans la loi fondamentale une règle de finances publiques. Le résultat auquel nous sommes pour l'instant parvenus me paraît très satisfaisant : une loi de programmation des finances publiques, qui s'inscrit dans un objectif d'équilibre. Car le plus difficile est bien de déterminer les moyens de parvenir à l'équilibre. Nous comptons, bien évidemment, sur l'aide puissante du Sénat.
Cette programmation pluriannuelle nous permettra de nous mettre en accord avec les exigences des programmes de stabilité adressés chaque année à la Commission européenne.
Un autre sujet nous tient à coeur : celui des niches fiscales et sociales. Il faut aller plus loin.
Nous n'avons fait que commencer. Le nombre de niches et leur montant sont devenus un véritable enjeu de finances publiques. C'est pourquoi le Premier ministre a décidé qu'elles seraient limitées dans le temps, et soumises à une évaluation systématique. C'est aussi pourquoi j'ai discuté, lors de mes rencontres avec les ministres, non seulement des dépenses budgétaires, mais aussi des dépenses fiscales ou des exonérations de charges sociales. Nous entendons améliorer la qualité de l'information du Parlement, instaurer un objectif de dépenses fiscales dans le projet de loi de finances, probablement de manière indicative, à ce stade. Une fois affiné, cet outil, pourra se révéler très puissant.
J'avais de la sympathie pour l'amendement de MM. Arthuis, Marini, About et Vasselle, adopté par le Sénat, qui visait à valider dans la loi de finances initiale et la loi de financement de la sécurité sociale les niches votées dans des lois ordinaires. Je comprends que la commission des lois de l'Assemblée nationale y voie une atteinte à des principes que je ne saurais contester. Reste qu'il nous faut ensemble lutter contre la prolifération, excessive à mon goût comme au vôtre, de ces dispositions.
Nous sommes face à une situation inédite pour nos dépenses publiques : la charge de l'intérêt et celle des pensions accentuent les contraintes qui pèsent sur les autres dépenses, masse salariale ou des dépenses d'intervention. Il est donc plus que jamais indispensable de réaffirmer la maîtrise de la dépense publique et d'améliorer son efficience. Nous nous en donnons pleinement les moyens, avec la révision générale des politiques publiques, le budget triennal, la maîtrise des niches et la loi de programmation des finances publiques. C'est cette alliance de réformes qui nous permettra de réussir : nous entendons atteindre, avec votre aide, cet objectif véritablement politique dès 2012. (Applaudissements à droite et sur plusieurs bancs au centre)
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Ce débat d'orientation budgétaire prend, cette année plus encore peut-être que les précédentes, un relief particulier. Outre sa vertu pédagogique il nous permet, en nous appuyant sur les résultats du premier exercice budgétaire de la nouvelle législature, d'aborder les prochaines échéances budgétaires, qui seront cruciales. Outre le fait qu'il devrait s'inscrire dans le cadre rénové d'une programmation pluriannuelle de nos finances publiques, le budget pour 2009 sera, à l'évidence, un « moment de vérité ».
La situation de nos finances publiques se caractérise, en effet, par une certaine viscosité. Le déficit public, toutes administrations publiques confondues, s'élève à 50 milliards. C'est dire l'ampleur de la tâche pour parvenir, ainsi que cela est l'engagement du Gouvernement, récemment rappelé par le Premier ministre, à l'équilibre en 2012. Quatre ans seulement nous séparent de cette échéance.
Le retour à l'équilibre suppose d'autant plus de détermination et de volonté politiques que les derniers chiffres relatifs à la croissance ne portent guère à l'optimisme. Vous l'avez-vous-même, monsieur le ministre, rappelé la semaine dernière en évaluant les moins-values fiscales entre 3 et 5 milliards. Le ralentissement économique, qui résulte à la fois des effets larvés et délétères de la crise des subprimes, de l'appréciation probablement excessive du prix des matières premières -et en tout premier lieu du pétrole- mais aussi du climat de défiance qui « empâte » nos économies développées, nous invite à redoubler d'attention. Sans correction significative, notre déficit public pourrait s'accroître de nouveau et même franchir, en 2008, le seuil des 3 % du PIB. Une telle perspective n'est pas envisageable, au moment où notre pays vient de prendre la présidence de l'Union européenne.
Pour conjurer ce danger, il est indispensable de comprimer le déficit en réduisant les dépenses tout en ne diminuant pas inutilement nos ressources. Je ne peux, de ce point de vue, cacher une légère inquiétude, notamment lorsque j'examine le mode de financement de la prochaine généralisation du RSA (Revenu de solidarité active) qui, quelle que soit la noblesse des motivations qui anime ses promoteurs -et je considère que c'est un bon dispositif- pourrait valoir un surcroît de dépense de l'ordre de 1 à 1,5 milliard. Nous avions en effet pu penser que la non-indexation des éléments ouvrant droit à la prime pour l'emploi et le pincement de la limite supérieure y ouvrant droit viendraient en déduction de ce montant.
M. Philippe Marini, rapporteur général. - C'était notre préconisation...
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Las, il semble que ceci soit déjà pris en compte dans le montant qui nous est annoncé.
Monsieur le ministre, vous nous avez dit qu'aucun arbitrage n'avait été décidé. Je vous crois, mais vous mets en garde : ce financement doit se faire par redéploiement.
De même, je ne souhaite pas que les ressources fiscales soient trop rapidement réduites. A défaut de pouvoir mettre fin à toutes ces niches fiscales, ces exemptions qui sont autant de coups de canif portés à notre pacte fiscal, je plaide pour une limitation de leurs effets. Il faut plafonner l'avantage procuré pour chaque foyer fiscal. Nous avions un barème de l'impôt sur le revenu excessif, voire confiscatoire, et ces niches permettaient en quelque sorte de faire pardonner cette spécialité française, mais aujourd'hui les niveaux de l'impôt sur le revenu sont revenus à un niveau compatible avec les autres pays occidentaux.
C'est donc avec grand intérêt que j'ai entendu le secrétaire d'État à l'outre-mer évoquer l'extinction de l'indemnité temporaire versée à certains fonctionnaires retraités dans nos territoires ultramarins.
M. Philippe Marini, rapporteur général. - Nous l'avons plaidé longtemps !
M. Gérard Longuet. - Le génie est une longue patience.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Ce dispositif, qui ne respecte pas l'équité républicaine, ne contribue pas au développement économique de ces collectivités. (M. Gaston Flosse le conteste)
Par ailleurs, une éventuelle baisse du taux de la TVA dans le secteur de la restauration ne peut, dans l'état actuel de nos finances publiques, me satisfaire.
M. Philippe Marini, rapporteur général. - Elle n'est pas souhaitable.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Pour un impact macro-économique incertain et limité, cette mesure réduirait les recettes et augmenterait le déficit de 2 à 3 milliards d'euros. Elle paraît difficilement compatible avec les engagements de retour à l'équilibre de nos comptes d'ici la fin de cette législature.
M. Philippe Marini, rapporteur général. - C'est une mauvaise promesse.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - La gravité de la situation de nos finances publiques nous oblige à des remises en ordre salutaires, mais aussi à une saine pédagogie de la réforme. Nous ne pouvons en faire l'économie car, à terme, ce seront les réformes qui feront les économies, comme l'a indiqué le Président de la République. De ce point de vue, je salue à nouveau l'ambition réformatrice de la révision générale des politiques publiques (RGPP) dont on espère qu'elle rejoindra celle qui, sous l'autorité du général de Gaulle, fut portée par le rapport Rueff-Armand. Cette démarche est portée au plus haut niveau de l'État et le ministre des comptes publics en est le moteur. Notre soutien vous est acquis.
C'est dire avec quelle impatience nous attendons les premiers résultats de la revue générale des prélèvements obligatoires (RGPO), cette petite soeur de la RGPP qui peut nous aider à rendre notre pays plus compétitif dans une économie mondialisée. J'en attends de l'audace : nous ne saurions nous satisfaire de modifications à la marge, d'un système qui date du précédent millénaire et n'est plus adapté au nomadisme économique, à la disparition des frontières fiscales ou à l'irruption des nouvelles technologies.
Est-il encore fondé d'affirmer qu'il y a des impôts payés par les ménages et d'autres supportés par les entreprises ? Cette convention politiquement correcte nous égare car les impôts et les prélèvements sociaux, inclus dans le prix des biens et services offerts aux consommateurs, sont toujours, en définitive, payés par les ménages. Les conséquences étaient sans gravité lorsque l'économie nationale échappait encore à la mondialisation, mais les discours anesthésiants ne suffisent plus aujourd'hui à masquer l'ampleur des délocalisations. Ce matin encore, nous avons appris la disparition de centaines d'emplois dans le domaine automobile. La France a produit 3,3 millions de véhicules en 2001 et 2,2 millions en 2007, soit un tiers de moins. Et qui peut encore sous-estimer l'ampleur des déficits croissants de notre balance commerciale ? Nous consommons plus que nous ne produisons.
Nous avons rendez-vous avec la réalité économique. Les impôts de production, notamment les cotisations assises sur le travail, sont des activateurs de délocalisations, tout comme la taxe professionnelle. Il faut rompre avec les tabous et mettre en chantier des réformes qui ne peuvent plus attendre. Nous avons déjà débattu de cette question il y a un an. La problématique fiscale ne fait que s'aviver avec la dématérialisation des transactions. Le commerce par Internet, le e-business, rend la perception des impôts et taxes aléatoire, et les États se livrent à une concurrence fiscale sans merci.
Dans un contexte économique international de crise, je rappelle la nécessité absolue de tenir fermement la dépense publique, de poursuivre l'action réformatrice engagée par le Gouvernement. Il ne faut pas confondre lutte contre la vie chère par l'intensification de la concurrence et amélioration du pouvoir d'achat par l'amélioration de la compétitivité. Tous les acteurs publics -État, sécurité sociale, collectivités territoriales- doivent participer à la maîtrise des dépenses publiques et à l'équilibre de la dépense fiscale.
Notre façon de gouverner et de légiférer est en cause : nombre de lois créent de nouvelles normes génératrices de dépenses publiques -souvent pour les collectivités territoriales. Ainsi, nous avons récemment doublé le nombre d'heures de formation des assistantes maternelles. Qui en supportera le coût ? (Mme Catherine Procaccia approuve)
M. Philippe Marini, rapporteur général. - Le contribuable local.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Notre démarche est souvent contradictoire, pathologique, voire schizophrénique. (Marques d'approbation sur les bancs UMP) Aurons-nous la sagesse de ne légiférer que d'une main tremblante ? De même, nous tenons la dépense budgétaire mais nous multiplions la dépense fiscale et nous plombons les ressources des budgets à venir. Je redoute notamment les conséquences fiscales du Grenelle de l'environnement.
Nous devons tous, membres du Gouvernement comme parlementaires, être convaincus de la nécessité vitale d'équilibrer les dépenses publiques. Monsieur le ministre, vous devez convaincre vos collègues d'éviter, par exemple, pour faire un coût d'éclat, de diminuer la TVA dans le secteur du logement. Les finances publiques n'y résisteraient pas. Ou alors la proclamation du retour à l'équilibre des finances publiques en 2012 ne serait que pure illusion. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. - Ce débat, qui vise à déterminer les meilleures orientations possibles pour nos finances publiques pour l'année à venir et les trois suivantes, me paraît crucial. La conjoncture économique maussade, le poids des déficits et de la dette, le niveau élevé des dépenses publiques et des prélèvements obligatoires exigent que nous prenions des décisions à la hauteur de l'enjeu. Seules des réformes d'ampleur permettront à notre pays de faire face au défi que constitue le vieillissement de la population. En matière de retraite, de santé et de dépendance, celui-ci pourrait se traduire par au moins trois points de PIB de dépenses supplémentaires d'ici à 2050. Seul un véritable assainissement de nos finances pourra garantir la pérennité de notre modèle social en cessant de reporter les dépenses d'aujourd'hui sur les générations de demain. (M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, approuve)
Nous avons déjà, plusieurs fois, pris cet engagement formel qu'il nous faut désormais impérativement tenir en nous attaquant aux causes structurelles des déficits sociaux. Après les déficits record du régime général -plus de 11 milliards d'euros en 2004 et 2005- et la légère décrue de 2006, 2007 a connu un nouveau dérapage des comptes avec un déficit de 9,5 milliards d'euros -dont un dépassement de plus de 3 milliards de l'Ondam et une progression supérieure à 6 % des prestations de la branche vieillesse.
Nous revenons cette année à la situation de 2006, avec un déficit attendu de 8,9 milliards : il se maintient à son niveau depuis trois ans plutôt que de se résorber, c'est inquiétant.
Les recettes continuent de progresser à un rythme élevé, plus de 4 %, grâce à l'augmentation de la masse salariale du secteur privé. Cette bonne tenue pourrait ne pas se prolonger longtemps. Les dépenses évoluent très différemment selon les branches. Le déficit de la branche retraite se creuse très nettement, pour atteindre 5,6 milliards sous l'effet conjoint du départ en retraite des générations du baby-boom et des départs anticipés pour carrière longue. Il y aurait 120 000 départs anticipés cette année, pour un coût estimé à 2,5 milliards. Les dépenses de la branche maladie progressent moins vite que l'an passé, grâce au plan d'économie de l'été dernier et aux franchises. Cependant, on prévoit un nouveau dépassement de l'Ondam, entre 500 et 900 millions, un peu en-deçà du seuil de déclenchement de la procédure d'alerte. Au total, le déficit de la branche pourrait dépasser l'objectif initial de 4 milliards. Pour la branche famille, l'excédent, retrouvé en 2007 après trois années de déficit, est confirmé cette année. La branche AT-MP enregistre elle aussi un excédent pour la deuxième année consécutive.
Au total, les déficits cumulés des deux branches déficitaires sur les deux derniers exercices, approchent les 20 milliards : c'est dire le chemin à parcourir pour revenir à l'équilibre de nos finances sociales et pour respecter l'objectif très ambitieux du Gouvernement, d'un retour à l'équilibre du régime général dès 2011 !
Je vous remercie, monsieur le ministre, de nous avoir transmis un document préparatoire au débat que nous avons ce matin, plus complet que l'année dernière et surtout plus respectueux de la spécificité des finances sociales. Vous ne nous donnez pas de trajectoire pluriannuelle détaillée pour l'évolution de l'Ondam, comme le prévoit pourtant la loi organique, mais vous définissez clairement vos grandes orientations ; nous attendons avec impatience d'en connaître le détail, qui devra figurer dans les prochaines loi de financement et loi de finances, ainsi que dans la première loi de programmation des finances publiques que nous examinerons à l'automne.
Pour conforter l'avancée incontestable que représentent les lois de financement de la sécurité sociale et la loi organique du 2 août 2005, nous souhaitons que l'information du Parlement en matière de finances sociales soit aussi transparente et précise qu'en en matière de loi de finances. Il est important que le cadrage pluriannuel figurant à l'annexe B du projet de loi de financement, propose des scénarios d'évolution solidement établis à partir d'hypothèses crédibles et différenciées. Nous souhaitons aussi que les mesures nouvelles soient chiffrées, en particulier dans l'annexe 9. Pour exercer pleinement son pouvoir de contrôle, le Parlement doit disposer d'un chiffrage plus précis et plus exhaustif des réformes proposées, en recettes comme en dépenses, à l'exemple de ce qui se passe en loi de finances.
La loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale du 2 août 2005, a confié à la Cour des comptes un pouvoir de certification des comptes de la sécurité sociale. Cet exercice nous offre un nouvel éclairage sur la comptabilité et la gestion des organismes de sécurité sociale et de nouveaux moyens d'exercer notre contrôle. Cette année, pas plus que l'an passé, la Cour n'a été en mesure de certifier les comptes de la branche famille, en raison de l'ampleur des incertitudes les entourant. Nous devons faire en sorte que cela change pour que l'année prochaine, la Cnaf présente des comptes améliorés à la Cour. Ensuite, pour que le refus de certifier les comptes de la branche recouvrement et de l'Acoss ne se renouvelle pas, il va falloir résoudre les points de « désaccord » entre la Cour, les services de l'Acoss et vos services, monsieur le ministre : nous sommes prêts à travailler avec vous en ce sens.
L'année 2009 sera stratégique, des décisions majeures, peut-être douloureuses, devront être prises pour inverser les tendances actuelles et pour revenir à l'équilibre de nos comptes sociaux. Nous ne pouvons plus repousser encore les échéances ! Aussi, je souhaite que le Gouvernement s'attèle en profondeur à sa mission : vous pouvez compter sur notre soutien ! (Applaudissements à droite et au centre)
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. - J'espère que ce débat d'orientation budgétaire est le dernier « de l'ancien temps », celui d'avant la révision constitutionnelle ! Car, si comme je l'espère le Congrès aboutit lundi, l'an prochain nous conclurons un tel débat par le vote d'une résolution : nos échanges en seront transformés et la Haute assemblée, devra prendre toutes ses responsabilités ! (Marques d'approbation à droite et au centre)
M. Aymeri de Montesquiou. - Tout à fait !
M. Philippe Marini, rapporteur général. - J'espère aussi que, l'an prochain, nous disposerons en séance d'écrans et de projecteurs, comme il y a quelques années pour la loi de finances, pour examiner ensemble les chiffres dont nous parlons ! J'espère encore que nous serons sortis du temps des menaces, de ce contexte des plus difficiles que nous connaissons aujourd'hui, affecté par deux chocs au moins : le choc de l'énergie, qui appelle un changement de nos comportements, donc des règles nouvelles, comme celles qu'a suggérées le Grenelle de l'environnement ; le choc financier qui, bien au-delà de la crise des subprimes, est une crise de confiance dans l'appréciation des risques financiers, qui touche toute la planète et qui rendra plus difficile l'accès au crédit, pour les entreprises et pour les particuliers, sans oublier les conséquences sur le coût même de la dette publique.
Notre environnement économique se caractérise donc par des risques de discontinuité. L'inflation renaît, le prix de l'énergie augmente, la parité monétaire nous désavantage, notre croissance marque le pas : l'équation que vous devez résoudre, monsieur le ministre, est des plus difficiles ! La commission des finances voit dans cette difficulté une motivation supplémentaire pour soutenir vos efforts ! L'année 2009 est le tournant de la législature : c'est dans cette année vérité que nous saurons si nous sommes sur la bonne trajectoire ! Que nous saurons également, dans quelle mesure unifier les perspectives triennales que nous communiquons aux instances européennes, et les nouvelles perspectives triennales que nous élaborons en interne.
Sur la méthode, cependant, beaucoup reste à faire. Vous allez dans le bon sens, en intégrant les opérateurs aux normes des finances publiques et en répondant par là aux critiques que nous faisions régulièrement, contre les facilités que l'État s'accordait en « s'agencisant » de plus en plus, c'est-à-dire en se fractionnant toujours davantage, au risque de ne plus pouvoir maîtriser les dépenses publiques. S'agissant de la masse globale des dépenses du secteur public, il faut raisonner par grands secteurs : l'État, la sécurité sociale, les collectivités locales. Nous serons bien sûr très attentifs à la façon dont l'enveloppe normée des collectivités locales sera calculée pour 2009.
Nous sommes très attachés au maintien des droits d'accès au FCTVA.
M. Roland du Luart. - Eh oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général. - Il faudra faire preuve de pédagogie pour expliquer que le contrat est bien respecté.
Mme Nicole Bricq. - Ce sera dur...
M. Philippe Marini, rapporteur général. - Si le principe d'autonomie fiscale des collectivités territoriales est inscrit dans la Constitution, nous nous inquiétons de ce que nous lisons ça et là sur la taxe professionnelle dont vous savez l'importance pour les intercommunalités. Il faut veiller au respect du principe d'autonomie afin de ne pas déstabiliser des collectivités dont les dotations évolueront à des rythmes très raisonnables.
Vous avez bien voulu nous associer dans votre propos à la révision générale des politiques publiques. Les décisions prises sur les missions déjà évaluées dégageront des économies nettes de 6 milliards l'an, soit 4 à 5 % des crédits concernés. Nous souhaitons qu'elle se poursuive, rubrique par rubrique, avec persévérance et exhaustivité.
Nous sommes convaincus de l'importance d'un retour à l'équilibre en 2012 mais il est encore très incertain, parce qu'il faut annuler 50 milliards de déficit public et compenser les mesures qui ont abouti à des dépenses fiscales supplémentaires. Celles-ci constituent notre principal défi. Le Sénat avait exprimé sa conception en adoptant, à l'occasion de la première lecture de la révision constitutionnelle, l'amendement que j'avais défendu avec MM. About, Arthuis et Vasselle. De notre point de vue, il doit y avoir une hiérarchie des normes : Constitution, loi organique, loi financière, loi ordinaire. La commission des lois de l'Assemblée nationale n'a pas partagé cette vision des choses, mais nous persistons et signons car il faut un cadre général dans lequel puisse prévaloir le sens des responsabilités. Or, quand tous les autres textes sont portés par des ministres dépensiers, ceux que vous nous présentez sont les seuls qui tendent vers l'objectif. Les lois de finances de la République doivent être le lieu où sont validés les éléments qui ont une influence sur le solde des finances publiques.
Nous serons très attentifs à ce qui sera réalisé en deux domaines. Nous aurions d'abord souhaité que la revue générale des prélèvements obligatoires figurât au premier rang des préoccupations et qu'elle fût le pendant de la révision générale des politiques publiques. Nous manquons en effet d'une stratégie fiscale. Or, si l'on peut contester sur certains points l'analyse du président Arthuis, il n'est pas contestable que les prélèvements obligatoires expriment à la fois une vision sociale et la politique que l'on souhaite conduire. Et, quand on ne vote que par détails, par retouches, on perd de vue la politique elle-même. M. Dassault, notre rapporteur spécial, interviendra sans doute sur les exonérations de charges qui représentent la moitié du déficit. Nous sommes prêts à vous dire que si nous réduisions chaque année d'un dixième le plafond des exonérations pour revenir de 1,6 Smic à 1,5 en 2009 puis à 1,4 en 2010..., nous accomplirions déjà un chemin appréciable vers un changement des comportements et de logique. (Applaudissements sur plusieurs bancs à droite)
La charge de la dette, qui s'était tenue sur un palier de 45 milliards entre 2000 et 2006, a augmenté de 12 % en 2007 du fait de l'évolution des marchés financiers pour s'établir à 52 milliards. Les tensions des taux d'intérêt, l'inflation, les perspectives incertaines de nos finances publiques conduisent à son alourdissement. J'aurais aimé pouvoir vous projeter ce graphique. (L'orateur présente des courbes) Il montre les conditions d'emprunt des États européens. L'Allemagne obtient les meilleures conditions, la Grèce les moins bonnes. La France, qui bénéficie d'abord des mêmes conditions que l'Allemagne, décroche depuis un an.
Mme Nicole Bricq. - Eh oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général. - Sans être en mauvaise position, on nous demande 30 points de base de plus -cela nécessite une trajectoire de rétrécissement...
Le débat d'orientation budgétaire est un rendez-vous nécessaire, mais nous l'avons préparé dans des conditions difficiles car, jusqu'à ces derniers jours, nous ne disposions que de peu d'éléments sur 2009 et j'ai dû inventer certains éléments pour présenter la semaine dernière mon rapport à la commission...
M. Gérard Longuet. - On ne s'en est pas aperçu.
M. Philippe Marini, rapporteur général. - ...les arbitrages n'étant pas encore définitivement actés. La commission des finances soutient et soutiendra, monsieur le ministre, vos efforts d'assainissement, de rigueur et de bonne gestion de l'État comme de la sécurité sociale. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales chargé des équilibres financiers généraux de la sécurité sociale. - Au risque de vous apparaître plus laborieux que les orateurs qui m'ont précédé, je me dois de dissiper certains malentendus. Nous avons les uns et les autres à travailler ensemble à un meilleur équilibre des comptes -ceux de la sécurité sociale comme ceux de l'État- et le président About a déjà tracé quelques pistes.
Pour atteindre l'objectif ambitieux que s'est fixé le régime général d'un retour à l'équilibre en 2011, il faut un engagement fort du Gouvernement. La dette accumulée du régime général passera de 25 milliards aujourd'hui à 30 milliards fin 2008. Ces montants ne sont plus soutenables dans la situation actuelle des marchés financiers et la Caisse des dépôts a fait savoir qu'elle ne pourrait plus garantir le financement par l'Acoss.
A la Conférence sur les finances publiques de mai dernier, le Gouvernement s'est engagé à régler la question d'ici 2012. La solution envisagée serait un transfert de la dette à la Cades. A quelle hauteur ? Concernant quelles branches ? Incluant le FVS et Ffipsa ? Et la totalité de la dette jusqu'à fin 2008 ou seulement 2007 ? Nous avons voté une loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale prévoyant que tout transfert doit s'accompagner d'une recette nouvelle.
Mme Nicole Bricq. - Oui.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - M. Gouteyron, qui fut président de la Cades, sait que tout transfert suscite des difficultés... (L'intéressé opine du chef) Le Gouvernement se refuse à transférer sur les générations futures la dette que nous avons produite. Une date limite, 2021, a été fixée pour la Cades. Le ministre semble écarter une hausse de la CRDS : il faut donc trouver une autre ressource, aussi fiable et dynamique. Redéploiement d'une partie des recettes du FSV, suggère M. Woerth. Mais ces sommes sont aléatoires. Et suffiront-elles ? A-t-on la garantie que le déficit ne sera pas simplement transféré au FSV ? Attention à l'effet de ciseaux : quand la conjoncture est favorable, le fonds dégage des excédents mais en cas de ralentissement économique le déficit se creuse, il est de 5 milliards.
Des avancées ont marqué, en 2007, les relations entre l'État et la sécurité sociale. Un ministère des comptes publics a été créé, mais si la dette antérieure, de 5 milliards d'euros, a été apurée, une nouvelle s'est formée. Il conviendrait de chiffrer correctement le coût de certaines dépenses fiscales et de l'AME, gravement sous-évaluée ! Le déficit cumulé du Ffipsa atteint désormais 6 milliards d'euros. Or, aucun début de solution n'apparaît -plusieurs pistes ont été abandonnées... Où en est-on, monsieur le ministre ? Vous dites vouloir régler ce problème en 2009, mais vous ne dites pas comment. J'avais voulu supprimer du texte de loi les mots « le cas échéant », afin que le Gouvernement soit contraint d'assurer l'équilibre des comptes. Il n'en a rien été et le Gouvernement peut ainsi éviter d'honorer l'engagement pris, pourtant, devant la représentation nationale.
Des mesures de fond sont nécessaires pour que la branche maladie revienne à l'équilibre en 2011. Le directeur de la Cnam a proposé un plan comportant recettes nouvelles et économies à réaliser grâce aux réserves d'efficience. Mme Bachelot a demandé un effort supplémentaire de 1 milliard d'euros, pour atteindre les 4 milliards. Pour nous, il faut aussi envisager des mesures structurelles. Les affections de longue durée représentent les deux tiers des dépenses des soins de ville et l'essentiel de leur hausse -on ne pourra éviter des mesures plus contraignantes, le niveau devient insupportable.
Il faut aussi associer l'hôpital à la politique de réduction du déficit.
Mme Marie-Thérèse Hermange. - Oui !
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Et se pencher sur la répartition de la charge des dépenses entre régime de base et régimes complémentaires.
MM. Marini et Arthuis ont évoqué la question des normes, qui aggravent le poids des dépenses notamment pour les collectivités locales. Il y a aussi la multiplication des agences, structures ad hoc et autorités administratives. Pas de texte de loi sans une création : voyez le projet de loi sur la démocratie sociale que nous examinerons demain, il crée une Haute autorité. Elle coûtera !
La branche vieillesse vient de faire l'objet d'un document d'orientation du Gouvernement. Les orientations sont bonnes mais reste la déclinaison. Pour réduire le déficit de la branche, il faut promouvoir l'emploi des seniors car la France est lanterne rouge de l'Europe ; n'hésitons pas à pénaliser les entreprises qui renâclent. La prise en compte des carrières longues après la réforme des retraites a donné lieu à des abus et des effets d'aubaine, il convient d'éviter d'autres dérapages. Quant aux dispositions relatives à la pénibilité, il faut en mesurer le coût, ce qui n'a pas été fait en 2003. Aller piocher dans les excédents de la branche famille...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. - C'est dangereux.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Cela peut être envisagé, mais les excédents ne pourront pas tout financer, réforme des retraites, financement des dépenses liées à la perte d'autonomie...
M. Philippe Marini, rapporteur général. - Elles répondent à un besoin des familles !
M. Alain Vasselle, rapporteur. - ...et branche maladie. Il faut chiffrer globalement les besoins à venir liés au vieillissement de la population. Quel dommage de ne pas profiter de la réforme constitutionnelle pour imposer une étude d'impact pour chaque projet de loi de finances ou loi de financement de la sécurité sociale ! Un amendement commun avait été déposé par la commission des finances et la commission des affaires sociales, concernant les exonérations, car toute nouvelle loi en comporte, sans qu'on soit assuré de leur compensation.
M. Philippe Marini, rapporteur général. - Absolument !
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Il faudra aussi revenir sur le nombre d'années d'activité nécessaire pour accéder à la retraite. Il y faudra du courage et de la pédagogie.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Bien sûr !
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Quant au financement de la protection sociale, plus de 30 milliards d'euros ont été compensés par l'État -à l'euro près, je vous en félicite, monsieur le ministre. Mais il y a dans les exonérations compensées une source de fragilité du financement. En effet, 2,4 milliards d'euros demeurent non compensés. Il s'agit des mesures d'intéressement et de participation et des mesures antérieures à 1974.
C'est ce qui a amené la Cour des comptes à se poser la question de la certification des comptes de l'Acoss.
Les niches sociales représentent une perte d'assiette de plus de 40 milliards ; avec les 30 milliards de compensations, on dépasse les 70 milliards. Faut-il aller vers un plafonnement des niches fiscales ? Ce ne doit pas être l'occasion pour le budget de se servir de la loi de financement de la sécurité sociale pour chercher des compensations ! La loi de financement de la sécurité sociale sert trop souvent de variable d'ajustement.
M. Philippe Marini, rapporteur général. - Mieux vaudrait supprimer les niches que les plafonner.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Notre collègue député Yves Bur vient de publier un rapport extrêmement complet sur cette question. Il propose toute une série de dispositions, comme limiter dans la durée ces exonérations ou les soumettre à des études d'impact régulières. De notre côté, nous avons proposé un système de validation des mesures d'exonération en loi de financement de la sécurité sociale. Cela a même fait l'objet, à notre initiative, d'une proposition de loi organique votée par le Sénat en janvier dernier. Le Gouvernement nous avait alors dit que cette mesure était d'ordre constitutionnel. Nous avons donc tenté de l'inscrire dans le cadre de la révision en cours. Le Sénat a adopté un amendement en ce sens mais la commission des lois estime que cette disposition ne relève pas de la Constitution mais bien de la loi organique.
M. Philippe Marini, rapporteur général. - La commission des lois de l'Assemblée nationale !
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Dans ce cas, il faudra que l'Assemblée nationale soit saisie de notre proposition de loi organique et l'adopte !
Yves Bur reprend aussi l'une de nos propositions de l'année dernière, à savoir l'instauration d'une contribution forfaitaire de faible montant sur l'ensemble des niches sociales, la flat tax. Notre système de protection sociale, même parfaitement réformé, ne pourra subsister sans l'apport de ressources nouvelles.
Plusieurs possibilités existent. Nous ne devons en écarter aucune. Nous avons proposé la création de taxes sur les boissons sucrées et les produits de grignotage, dans un souci autant sanitaire que financier. Nous attendons un rapport du Gouvernement sur ce sujet : vous nous l'aviez promis pour la fin du mois de juin, où en est-on ? Dans le même ordre d'idée, des marges existent encore pour la taxation de certains produits alcoolisés.
J'aurais encore eu un mot à dire sur le financement de la dépendance mais j'ai déjà été trop long...
Les sujets à régler sont donc nombreux et, nous en sommes conscients. Notre commission souhaite que les prochaines lois financières permettent de les traiter en profondeur, dans la transparence et dans le souci des générations futures. C'est ce qu'attendent nos concitoyens. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Philippe Marini, rapporteur général. - Excellent !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. - Le problème du financement de notre patrimoine historique et architectural est revenu au premier rang des préoccupations de la commission des affaires culturelles et de son groupe d'études sur le patrimoine. Les orientations qui seront retenues dans le projet de loi de finances pour 2009 sont attendues avec appréhension. Notre commission a pu en prendre la mesure en entendant, ces dernières semaines, les propriétaires de monuments privés et les élus des villes à secteur sauvegardé. Ces inquiétudes concernent à la fois le niveau des crédits budgétaires qui seront consacrés à ce secteur et l'avenir des politiques fiscales qui contribuent à son financement.
Les récentes annonces concernant une « remise à plat » des « niches fiscales » ont visé, en particulier, deux des principaux leviers de notre politique patrimoniale : le régime fiscal des monuments historiques et celui adossé à la loi Malraux. Tout en saluant le courage avec lequel le Gouvernement s'attache à évaluer l'efficacité de nos dépenses fiscales, afin de lutter contre les effets d'aubaine que certaines mesures peuvent susciter, j'insiste sur les différences essentielles qui séparent ces deux dispositifs des produits d'optimisation fiscale.
Comme l'ont d'ailleurs reconnu l'Assemblée nationale et l'Inspection générale des finances, ces dépenses fiscales se substituent directement à la dépense budgétaire. Il s'agit, non d'inciter, mais d'accompagner les investissements nécessaires, par une juste compensation des contraintes architecturales et environnementales que le législateur impose à ces propriétaires. Cette dépense publique est, en outre, largement compensée par ses retombées économiques et fiscales, directes ou indirectes, en termes d'emploi, de recettes de TVA ou de tourisme. Ces leviers essentiels de notre politique patrimoniale ne doivent pas perdre leur efficacité.
Instituer un plafonnement pourrait poser problème, sauf à définir, en concertation avec les acteurs concernés, un niveau réaliste et raisonnable.
M. Philippe Marini, rapporteur général. - Voilà une ouverture !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. - D'autres points de convergence semblent pouvoir aisément apparaître, en vue de mieux encadrer ces dispositifs et d'améliorer la lisibilité de l'effort public consenti.
Ne cédons pas, toutefois, à la tentation de la complexité, comme cela avait été pointé du doigt par notre commission avant d'être finalement sanctionné par le Conseil constitutionnel, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2006.
Quelles sont, dans ces conditions, les évolutions envisagées concernant ces deux régimes fiscaux et, surtout, quelle sera la méthode de concertation retenue ? Un maintien à niveau de l'effort budgétaire en faveur de la sauvegarde de notre patrimoine historique sera-t-il assuré pour 2009 ? Un nouveau fléchissement serait un signal très négatif et aurait des conséquences préoccupantes sur l'activité des entreprises d'entretien et de restauration concernées par le patrimoine.
J'en viens au financement du déploiement de la télévision numérique terrestre. La loi du 5 mars 2007 avait prévu la création d'un GIP chargé de mettre en oeuvre les mesures propres à l'extinction de la diffusion des services de télévision par voie hertzienne terrestre en mode analogique. Le GIP France télé numérique gère aussi le fonds chargé d'aider les foyers exonérés de redevance audiovisuelle à financer le passage à la télévision numérique terrestre. Ce GIP doit être financé à parité par l'État et les chaînes de télévision ; c'est pourquoi je me permets d'insister pour qu'il soit doté dès 2009 des moyens indispensables à son intervention.
Selon la première étude de perception du grand public menée par France télé numérique, un Français sur dix s'interroge sur le passage au tout numérique. Au regard de l'importance de ce chantier, qui place la France en position éminente, il faut aider nos concitoyens les plus démunis à effectuer les adaptations nécessaires pour continuer à regarder une télévision dotée de la technologie la plus avancée.
Notre commission sera, bien sûr, très attentive à la suite de ce débat budgétaire. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Thierry Foucaud. - Vous persistez dans la « même stratégie » malgré la croissance en berne, les comptes publics dans le rouge, des perspectives sombres pour 2009, une précarisation accélérée de l'emploi, des comptes sociaux en difficulté. Tel est le résultat patent de plus d'un an de votre politique ! Même le CAC 40 est en chute libre et a perdu plus de 30 % de sa valeur ! Seules les distributions de dividendes et l'augmentation du nombre des contribuables de l'ISF montrent que tout ne va pas si mal pour certains.
Nous devons donc mettre en question les choix opérés depuis le printemps 2007, et pour certains bien avant, avant de donner sens à ce qui pourrait constituer une alternative à une politique de plus en plus inefficace et de plus en plus décriée par l'opinion publique.
La situation des finances publiques et sociales est préoccupante, et personne, n'en conteste la gravité. La dette publique d'État atteint désormais un encours de 966 milliards, niveau jamais égalé auparavant. Fait plus préoccupant, la part de la dette constituée de titres de court terme est en progression sensible depuis le début de l'année, à 102 milliards. S'agissant de l'exécution budgétaire 2008 en cours, malgré les habituelles mesures de gel mises en oeuvre depuis le début de l'année, la situation fin mai présente un découvert de plus de 50 milliards, malgré les bonnes rentrées de l'impôt sur les sociétés et une TVA portée par la hausse des prix de l'énergie. Ce n'est qu'au prix de manoeuvres dilatoires sur les dépenses d'intervention que le solde budgétaire global n'est pas plus dégradé.
Votre discours sur la situation des comptes publics est un peu celui d'un pyromane qui viendrait à s'inquiéter de l'incendie qu'il a lui-même allumé
Les prévisions de croissance de l'Insee demeurent relativement modestes puisqu'on parle d'un taux de 1,6 % cette année et inférieur à 2 points l'an prochain. Pourquoi, avec 5 % de croissance mondiale, les pays de la zone euro et la France en particulier présentent-ils une telle faiblesse de leur croissance ? Ce n'est pas la faute aux garanties collectives des salariés ou à l'absence de flexibilité du marché du travail, mais bien plutôt à la politique économique et monétaire européenne qui impose austérité sur les dépenses budgétaires, liberté de circulation des capitaux, taux d'intérêt élevés et raréfaction de la création monétaire.
Les responsables, ce ne sont pas non plus les collectivités territoriales accusées d'être trop dépensières et qui devraient s'obliger à la même rigueur que l'État. Encore heureux qu'elles n'aient pas trop réduit leurs dépenses d'investissement, sinon nous aurions déjà connu la récession !
Ce qui met en cause la croissance, ce sont les politiques guidées par les critères de convergence, par le pacte de stabilité, par l'autisme de la Banque centrale européenne. A quoi sert d'économiser quelques centaines de millions d'euros en supprimant des emplois publics quand le seul relèvement des taux directeurs de la BCE -dont l'indépendance est consacrée par le Traité de Lisbonne que vous avez voté- nous coûte 2 ou 3 milliards de plus sur le service de la dette chaque année ? Les politiques d'austérité conduisent à peu près partout aux mêmes résultats : mauvais état des comptes publics, dette sans cesse plus lourde, faible croissance et aggravation continue des inégalités sociales. De ce point de vue, le Gouvernement s'est distingué avec une loi Tepa qui n'a eu de conséquence que sur la fiscalité du patrimoine. Le budget, déjà mal en point, va enregistrer une moins-value fiscale d'au moins 400 millions pour permettre à 3 000 assujettis à l'ISF de se libérer de tout ou partie de leur impôt, au prétexte qu'ils financent les PME : 400 millions pour 530 millions de capitaux mobilisés, quel gaspillage de fonds publics pour un résultat macro-économique ridicule ! Alors que 450 millions suffisent à défiscaliser les intérêts du livret A et du livret de développement durable qui représentent un encours de 200 milliards d'euros !
Il faut mettre un terme, à ce que le rapport Migaud-Carrez appelle « l'évolution déraisonnable de la dépense fiscale ». Le premier budget de l'État, aujourd'hui, n'est pas celui de l'éducation, mais bel et bien la masse considérable des dépenses fiscales. Cette année, et plus encore l'an prochain, 73 milliards de recettes fiscales vont ainsi disparaître ! Et cela, compte non tenu des 30 milliards de recettes fiscales que l'État a cantonnés pour financer les allégements de cotisations sociales, ni des 12 milliards destinés à compenser la réforme de la taxe professionnelle, ni des 5 milliards de recettes utilisés à mal compenser le RMI aux départements, sans parler de l'APA, et j'en passe ! Entre dépenses fiscales et recettes dédiées, ce sont des milliards et des milliards qui manquent aujourd'hui pour équilibrer les comptes publics !
Et quels sont les résultats de cette dépense fiscale ? Les 23 milliards d'augmentation de la dépense fiscale depuis 2003 n'ont pas atteint leur objectif en matière de croissance et d'emploi, mais l'impôt sur les sociétés a baissé, l'imposition des revenus du capital s'est allégée, et celle des patrimoines s'est fortement réduite.
Nous ne souhaitons pas que la loi de finances 2009 se contente de quelques modifications cosmétiques, associées à une nouvelle purge de la dépense publique. L'annonce de 30 à 35 000 suppressions d'emplois publics laisse pourtant craindre que ce soit le choix du Gouvernement. De même, il est de plus en plus question que les collectivités territoriales soient mises à contribution. Le pacte de stabilité s'annonce sévère : blocage de la DGF, mise en cause du FCTVA, nouvel allégement de la taxe professionnelle sans compensation ; c'est une déclaration de guerre aux élus locaux ! On dirait que les mots « dépense » et « publique » sont pour vous incompatibles... II est vrai que la dépense privée est tellement plus vertueuse, comme le montrent les milliards que Total engloutit chaque année à racheter ses propres actions -le super à 1,60 euro le litre sert donc à quelque chose...-, ou encore les dizaines de milliards que nos banques ont « claqué » dans les subprimes américains et qui se traduisent aujourd'hui par des suppressions d'emploi massives... !
En transformant les milliards de dépense fiscale inefficace en dépense publique utile, nous répondrons aux besoins populaires, en matière d'emploi, de logement, de protection sociale, de vie sociale et associative, de sécurité, de services publics. Pour retrouver le chemin de la croissance, la France doit retrouver le chemin de la dépense publique, chemin qui est aussi celui de la justice fiscale et sociale ! (Applaudissements à gauche)
M. Aymeri de Montesquiou. - Un an après l'élection du Président de la République, les Français sont impatients de constater les effets des réformes votées par la majorité. Notre pays a besoin de profondes réformes pour sortir de la léthargie dans laquelle il est plongé depuis plus de vingt-cinq ans. Comme l'écrivait Voltaire, « les Français arrivent tard à tout, mais ils arrivent ». Cessons de nous enfoncer dans une spirale sans fin de déficits et de perte de compétitivité, alors que nos partenaires bénéficient d'une croissance vertueuse. Jusqu'à présent, nous n'avions que peu réagi. Le monde ne nous attendra pas. Donnons tort à Voltaire et montrons-nous enfin des précurseurs de la réforme.
Sans réforme donc sans croissance, la France ne pourra atteindre aucun des objectifs auxquels elle aspire : ni la création de richesses, ni la compétitivité, ni la paix sociale ; et nous reculerons encore dans la hiérarchie mondiale. Bien sûr, le contexte international accroît la difficulté de la tâche mais nos compatriotes attendent des résultats. Cela exige du Gouvernement une politique volontariste et lisible.
Crise des crédits hypothécaires américains, renchérissement du prix des hydrocarbures, hausse continue du prix des matières premières et des produits alimentaires, surévaluation de l'euro : tout contribue à ralentir la croissance de la zone euro et de l'économie française. L'annonce par le PDG de Gazprom qu'avant la fin de l'année le baril de pétrole atteindra 250 dollars et les 1 000 m3 de gaz les 1 000 dollars n'est pas absurde. L'entrée en récession, sur les deux premiers trimestres de l'année, du Danemark, pays vertueux et souvent cité en exemple, constitue un signal d'alarme sur les risques encourus par notre pays à moyen terme.
L'état de nos finances publiques reste préoccupant. « Il faut arrêter la fuite en avant » déclarait encore récemment le Premier ministre. Néanmoins, on constate un nouveau creusement de 41 milliards au premier trimestre, la dette publique dépasse désormais les 1 250 milliards, soit 65,3 % du PIB. Cela sans tenir compte des engagements hors bilan qui dépassent les 300 milliards.
La récente hausse du taux de refinancement de la BCE à 4,25 % vient encore surenchérir le coût des intérêts de notre dette, second budget de l'État. Il serait dangereux, car irresponsable, que quiconque mise sur un surcroît d'inflation pour rogner une partie de ces engagements, sauf à vouloir rembourser ces dettes au détriment des ménages, déjà suffisamment mis à contribution. En revanche, monsieur le ministre, votre hypothèse d'une inflation à 2 % et d'un baril de pétrole à 125 dollars ne me semble pas du tout réaliste.
Je regrette que le débat sur les lois de finances, engagé à l'occasion du projet de loi constitutionnelle, n'ait pas abouti : chaque année le Gouvernement aurait du présenter un budget en équilibre et améliorer la sincérité des comptes.
Notre déficit affaiblit l'autorité qui devrait être la nôtre au moment où la France préside l'Union européenne. Avoir les moyens de nos ambitions politiques suppose d'être exemplaires, et d'abord sur le plan budgétaire, Comment prétendre insuffler une nouvelle dynamique à une Union européenne résignée à jouer les seconds rôles ? Sur quelle autorité morale pouvons-nous nous appuyer lorsque nos comptes publics sortent des limites, déjà extensibles, du Pacte de stabilité ? Les références à une histoire glorieuse mais déjà lointaine sont dépassées, voire contreproductives.
La méfiance de nos concitoyens envers l'Europe ne risque pas de s'amenuiser et leur hostilité grandit à l'égard de la BCE qui peine à trouver des arguments pour justifier sa politique. Certes, elle confirme son inflexible indépendance face aux politiques, mais une banque centrale ne doit-elle pas poursuivre à côté de l'objectif de stabilité des prix celui de soutien à l'activité ?
L'engagement de votre gouvernement à tenir les critères de stabilité avant 2012, modérément ambitieux, demande néanmoins de réels efforts. La série de mesures structurelles énergiques, comme le projet de loi de modernisation de l'économie, a été saluée par le FMI pour son effet dynamisant.
Enfin, la révision générale des politiques publiques donnera une vision globale de leur efficacité ou de leur inefficacité. Les audits menés par votre prédécesseur permettent déjà de rationaliser certains postes de dépenses. Mais beaucoup reste à faire : je pense entre autres à la politique erratique de la gestion immobilière de l'État. Il est ubuesque que l'État ne connaisse pas l'étendue de son parc immobilier ! Nos collègues Bernard Angels, Marie-France Beaufils, Paul Girod et Adrien Gouteyron avaient parfaitement analysé dans leur rapport d'information ces dysfonctionnements. L'État doit élaborer une politique immobilière d'ensemble, qui ne saurait ni se résumer à des opérations de cession, qui ne sont pas sa finalité, ni se cantonner à une logique essentiellement ministérielle, donc cloisonnée. Sur ce point, je salue l'heureuse initiative de mettre en place un opérateur unique de rationalisation et de valorisation de 45 milliards d'actifs.
Vous souhaitez réinstaurer la confiance, alors que nombre de nos compatriotes souffrent du retour de l'inflation. La hausse des prix des hydrocarbures serait plus supportable si elle ne s'accompagnait de la peur du déclassement social. Les instituts statistiques peuvent bien proclamer depuis des années une inflation comprise entre 2 et 3 points, les Français constatent quotidiennement que les prix des produits de consommation courante augmentent beaucoup plus. Les plus modestes, alors qu'ils peinent, chaque mois, à subvenir à leurs besoins élémentaires ou même à se loger, se moquent de savoir que le prix des produits de haute technologie n'a jamais été aussi bas.
Aujourd'hui, les dépenses contraintes -c'est-à-dire le logement, les assurances, les transports et le téléphone- absorbent en moyenne 30 % des revenus, contre 12 % en 1960.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Oui !
M. Aymeri de Montesquiou. - Ceux qui gagnent 20 000 à 55 000 euros par an, c'est-à-dire la moitié des Français, constituent le véritable moteur de la consommation. Trop riches pour percevoir des aides sociales, ils sont trop pauvres pour jouer des multiples allégements fiscaux et souhaitent pouvoir vivre décemment de leur travail. Leur incompréhension est manifeste envers la multiplication inconsidérée des niches fiscales, cette « mauvaise herbe fiscale » selon l'expression de M. Marini.
Quelque 227 nouvelles niches ont été créées entre 1997 et 2006, portant leur nombre estimé à 650. En 2008, l'État aura ainsi abandonné 27 % de ses recettes fiscales, représentant 3,8 % du PIB. Certaines satisfont un objectif légitime d'allégement fiscal ou d'allocation des ressources, mais leur prolifération souligne que l'aspect parfois confiscatoire de notre fiscalité en vient à générer d'injustes absurdités.
M. Philippe Marini, rapporteur général. - Absolument !
M. Aymeri de Montesquiou. - M. Charles de Courson a souligné que les mille principaux bénéficiaires des niches fiscales réussissaient, par le truchement des investissements outre-mer, à réduire de moitié leur impôt sur le revenu, en obtenant une diminution moyenne de 300 000 euros. Mieux -ou pire !- les 100 000 contribuables obtenant le meilleur profit des dérogations fiscales ont réduit leurs impôts de 15 240 euros en moyenne, soit un manque à gagner de 1,5 milliard pour l'État. Ce n'est ni juste, ni équitable. De surcroît, les niches ont parfois une efficacité douteuse. Ainsi, le dispositif de Robien amplifie le retournement spectaculaire du marché immobilier dans certaines villes moyennes. De même, n'en déplaise à mes collègues ultramarins, la défiscalisation des investissements outre-mer a renchéri le logement et accru les difficultés des opérateurs de logements sociaux.
Revoir l'ensemble du système serait ardu, en raison d'une incidence macro-économique non négligeable, mais surtout parce que, selon l'expression de Gilles Carrez, « dans chaque niche, il y a un chien qui mord ». (Sourires) La sophistication de l'exception fiscale est telle que le législateur se heurte à l'objectif constitutionnel d'intelligibilité et de clarté de la loi, comme en 2005, lorsque le Conseil constitutionnel avait censuré le plafonnement de certains avantages dans le secteur sauvegardé.
Pourtant, des solutions existent. Je propose un principe simple : dès lors qu'un avantage n'est plus qu'un instrument d'optimisation fiscale au service des mieux informés, il n'a plus sa raison d'être. La mission d'information de l'Assemblée nationale propose notamment d'instaurer un maximum global de réduction en euros et d'y associer un véritable toilettage, l'ensemble devant faire économiser plusieurs milliards d'euros à l'État.
Les attentes des Français sont considérables. Nous n'avons que trop tardé. Non seulement nos partenaires européens ne nous attendront pas dans le grand jeu économique mondial, mais la Chine, l'Inde et le Brésil sont devenus nos concurrents directs. Si vous ne parvenez pas d'ici 2012 à tenir vos engagements budgétaires -qui ne sont pas excessivement ambitieux- rien ne pourrait plus entraver notre déclin !
Votre volonté est évidente, vos efforts sont certains. Je souhaite que vous puissiez dire dans quatre ans que mes propos d'aujourd'hui n'étaient que ceux d'un Cassandre mal avisé. (Applaudissements au centre et sur le banc des commissions)
M. Christian Gaudin. - Ce débat d'orientation budgétaire intervient à un moment charnière de la préparation du projet de loi de finances pour 2009, malheureusement un des plus difficiles à boucler depuis de nombreuses années.
Je remercie M. le ministre et M. le président de la commission des finances pour cette discussion en pleine session extraordinaire. On évoque beaucoup le renforcement des pouvoirs du Parlement, qui passe par un accroissement des contrôles, mais aussi par une plus grande écoute des parlementaires. Je n'en doute pas pour le présent débat.
La semaine dernière, nous avons adopté le projet de loi de règlement pour 2007 : les résultats insatisfaisants doivent nous alerter sur la situation de notre économie, de nos finances publiques et sur leur avenir. Je suis plutôt pessimiste quant aux marges de manoeuvre permettant le redressement, mais je ne suis pas résigné, car à cette inquiétude il faut opposer un devoir de responsabilité de notre part, de la part du Gouvernement et de tous les Français.
Dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, la Cour des comptes analyse les causes et les conséquences de leur dégradation. Certaines critiques sont sans appel !
Le déficit public est remonté à 2,7 % du PIB, avec une situation qui s'est aggravée, à contre-courant du retour général à l'équilibre observé dans le reste de la zone euro, notamment en Allemagne. Cette aggravation est due à l'insuffisante maîtrise des dépenses, qui n'a pu compenser les réductions d'impôts et de cotisations sociales. Par rapport à l'année 2006, le résultat ne s'améliore que de 0,6 milliard d'euros, après prise en compte du nouveau calendrier de versement des pensions aux agents de l'État.
Le déficit de l'État augmente en 2007 quel que soit le référentiel comptable ; le besoin de financement des collectivités territoriales s'alourdit aussi ; le déficit des régimes de base de sécurité sociale et du fonds de solidarité vieillesse reste proche de 11 milliards d'euros, la dette sociale augmentant de 9 milliards.
Après avoir baissé en 2006, la dette publique a de nouveau augmenté en 2007 -là encore, contrairement à la tendance observée dans les autres pays européens- pour atteindre 63,9 % du PIB, soit 47 000 euros par actif, en négligeant une partie des dettes de réseau ferré de France (RFF) bien que seul l'État puisse les rembourser. L'augmentation du ratio de la dette résulte mécaniquement du déficit.
Enfin, l'objectif d'équilibrer les comptes publics en 2012 suppose de ramener la croissance annuelle des dépenses en volume de 2,2 % en moyenne au cours des dix dernières années à 1,1 % par an, alors qu'elle s'est établie à 2,5 % en 2007. Cet objectif exige d'économiser 46 milliards d'euros à l'horizon 2012. Nous devons planifier cet effort. Comme l'a dit Alain Lambert en commission la semaine dernière, nous connaissons l'objectif pour 2012, il faut donc répartir précisément les efforts annuels à réaliser, et surtout s'y tenir afin de ne pas reconstruire l'an prochain un nouveau plan de redressement pluriannuel qui repoussera encore le retour à l'équilibre.
Monsieur le ministre, je salue votre réalisme. Des contraintes croissantes pèseront sur le budget de la France, avec le ralentissement attendu de la croissance mondiale, le renchérissement des matières premières, notamment du pétrole, et le déséquilibre flagrant dans l'évaluation du dollar et de l'euro. Dans le contexte de crise financière internationale, ces constats auront des conséquences dramatiques, marquées par une croissance atone, l'inflexion du marché immobilier, la faiblesse de la consommation et des investissements, l'augmentation des prix énergétiques ou alimentaires et le déséquilibre de la balance commerciale.
Comme parlementaires, nous devons mettre des mots sur une réalité toujours plus difficile. Je vous appelle donc à plus de prudence dans les prévisions. Mieux vaut sous-estimer la croissance, comme l'a longtemps fait le Canada, quitte à enregistrer des plus-values permettant de réduire la dette publique. Ne pas surévaluer nos capacités correspondrait à la gestion de bon père de famille dont la France a bien besoin car nous ne pouvons plus prendre de risques financiers.
Nous subissons des contraintes structurelles extrêmement importantes : le dynamisme des pensions de retraite et de la charge de la dette absorbera 70 % des modestes augmentations budgétaires. Les marges de manoeuvre seront bientôt nulles !
Ce qui m'inquiète le plus, c'est l'avenir de nos enfants et l'image que notre pays donne à ses partenaires européens ou mondiaux.
Nous sommes liés aux générations futures par un pacte tacite. Ne transformons pas ce lien en un fardeau financier, imposé par un héritage qu'elles ne pourraient refuser ! Par ailleurs, nous dépendons de nos partenaires européens, principalement de la zone euro, tout comme ils dépendent de nous. Le pacte de stabilité doit donc sous-tendre nos réflexions en matière de finances publiques. Or nous n'envoyons pas aujourd'hui de signaux très convaincants à nos amis européens, qui nous soupçonnent d'utiliser la zone euro pour amortir la dégradation de nos finances publiques.
Les dépenses publiques ne peuvent plus augmenter. Cela concerne toutes les administrations, de l'État au système social en passant par les collectivités territoriales. Nous ne pourrons que difficilement créer de nouvelles recettes. Il faut donc limiter leur affaissement. Il en va de la soutenabilité de nos finances publiques.
Mon inquiétude n'est pas résignation. Réformons en profondeur les méthodes de travail, en particulier budgétaires, développons une culture de la responsabilité.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Très bien !
M. Christian Gaudin. - Élus par les Français, nous devons les respecter. Être responsables, c'est leur dire la vérité sur les difficultés à venir, c'est être persévérants dans les réformes, même impopulaires, c'est être fidèles à nos engagements, en particulier à ceux prix envers nos voisins européens.
Dans les évolutions envisageables à moyen ou long terme, on parle beaucoup des dépenses fiscales. Evaluées à 73 milliards d'euros en 2008, elles ne sauraient être écartées a priori de tout mécanisme de régulation. Leur croissance est souvent sous-estimée car certains dispositifs sortent, « en raison de leur histoire » et sans plus de justification économique, de la liste des dépenses fiscales annexée au projet de loi de finances. Malgré ce biais, on observe un fort développement de ces dépenses, surtout depuis l'instauration d'une norme de dépense budgétaire en 2001 : de 398 en 2000, elles sont passées à 486 en 2008. Dans le projet de loi de finances pour 2008, seules 80 % sont chiffrées et il ne s'agit, pour la moitié d'entre elles, que d'un ordre de grandeur. Pour apprécier la croissance de leur montant total, il faut tenir compte des variations annuelles de ce taux de chiffrage, qui augmente depuis 2005. Il apparaît alors que le coût total des dépenses fiscales a crû en moyenne de 5 % par an de 2004 à 2007 et augmentera encore de 5 % en 2008, rythme bien supérieur à celui des dépenses couvertes par la norme. Il pourrait être envisagé, parallèlement à une amélioration de leur recensement et de leur chiffrage, d'encadrer leur évolution par une norme spécifique.
On pourrait imaginer, comme l'évoque le rapport que vous avez remis au Parlement, des limitations dans le temps ou en volume de ces dépenses fiscales. Nous ne manquons pas d'imagination à ce sujet et vous savez que le Sénat et sa commission des finances se sont déjà largement penchés sur la question de la suppression des niches fiscales.
Il serait également souhaitable de réserver à la loi de finances la possibilité de créer des dépenses fiscales, mais je ne n'irai pas ici plus avant dans ce débat en cours sur l'article 34 de la Constitution. Un système de caducité automatique des dépenses fiscales, non reprises dans la plus prochaine loi de finances, pourrait être instauré.
Un mot sur la TVA sociale ou TVA de compétitivité, je laisse à chacun, suivant sa sensibilité, le choix de l'appellation. Vous savez combien les centristes sont attachés à ce sujet délicat. Où en sont, monsieur le ministre, vos réflexions sur cette réforme qui pourrait assurer le rééquilibrage de notre compétitivité internationale ? (M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, approuve)
Alors que nous venons d'étudier longuement le projet de loi de modernisation de l'économie, je souhaiterais revenir encore à la charge sur l'importance, dans le paysage économique qui est le nôtre, de la valeur ajoutée des petites et des moyennes entreprises comptant entre 100 et 300 salariés. L'exemple allemand est régulièrement évoqué. Pour rendre à nos PME leur compétitivité sur le plan international, nous devons leur créer un environnement favorable à l'investissement pour l'innovation. Je crois beaucoup en elles pour emmener notre pays sur le chemin du redressement.
Je rappelle, une fois encore, les quelques mesures d'ordre fiscal que Philippe Marini et moi-même avions formulées dans notre rapport d'information La bataille des centres de décisions : promouvoir la souveraineté économique de la France à l'heure de la mondialisation.
La fiscalité française et son environnement sont complexes, instables et insuffisamment attractifs. Le taux facial de l'impôt sur les sociétés pourrait être diminué, et son assiette harmonisée en même temps que consolidée. La France ne peut se permettre de demeurer durablement hors jeu de la compétition fiscale. Nous avions ainsi suggéré l'objectif d'un taux légèrement inférieur à 30 %.
L'initiative communautaire de l'assiette commune, premier pas vers la possibilité de légiférer, à l'unanimité, en matière de fiscalité des entreprises à l'échelon européen, à la différence du débat sur les taux, actuellement bloqué, devrait pouvoir aboutir.
Notre régime fiscal a besoin de stabilité : prévisibilité et lisibilité doivent être les mots d'ordre des décideurs politiques que nous sommes. Il en va de notre crédibilité aux yeux de nos voisins étrangers.
J'en viens, enfin, au rôle des collectivités territoriales dans le redressement de nos finances publiques.
L'insertion, dans le projet de loi de finances pour 2008, des prélèvements en faveur des collectivités au sein de l'enveloppe normée des dépenses est une nouvelle contrainte budgétaire pour l'État et pour les collectivités. Pour 2009, où elle ne devrait atteindre que 2 %, et pour les années suivantes, il faut en être conscient, la hausse des dotations des collectivités sera extrêmement limitée.
Notre devoir d'élus nous appelle à faire comprendre que tout le monde doit participer à l'assainissement de nos finances publiques. Régions, départements et communes devront aussi contribuer à l'effort de maîtrise des dépenses publiques. Inversement, l'État doit s'imposer à lui-même la fameuse « règle d'or » imposée aux collectivités locales. J'ajoute que l'instauration d'un dialogue suivi en vue de la réforme tant attendue de la fiscalité locale est une condition sine qua non de l'apaisement des relations.
Je n'ai pas besoin de vous conjurer, monsieur le ministre, car je sais que vous partagez cette éthique de responsabilité, de ne pas enjoliver la situation économique et financière de la France dans la construction du budget pour 2009. Nous devons être clairs et transparents pour les Français, pour nos partenaires européens, pour l'avenir. (Applaudissements au centre et au banc des commissions)
présidence de M. Adrien Gouteyron,vice-président
Mme Nicole Bricq. - « Je réduirai la dette et le déficit qui ont été creusés par l'échec des politiques antérieures, alors que nos politiques réussiront. Les générations futures ne peuvent pas accepter que les générations actuelles vivent à leur crédit » : telle était la profession de foi du candidat UMP Nicolas Sarkozy, à l'élection présidentielle.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Nous le suivons !
Mme Nicole Bricq. - Mais à peine élu, le président s'affranchit du retour à l'équilibre des comptes publics, repousse cette échéance à 2012 et engage son gouvernement dans une politique de baisse d'impôts et de dépenses fiscales improductives, dilapidant ainsi ses quelques marges de manoeuvre, alors que la crise démarre aux États-Unis. Le Gouvernement justifiera après coup son plan de l'été 2007 par une nécessaire relance, censée soutenir l'économie réelle quand celle-ci serait affectée. Mauvaise pioche : à l'été 2008 tous les indicateurs sont au rouge. La Cour des comptes estime nécessaire une économie de 46 milliards, tandis que notre rapporteur général compte 65 milliards pour satisfaire, d'ici à 2012, la trajectoire transmise aux instances de l'Union européenne.
Avec vos choix politiques, l'équation est impossible à résoudre : croissance en baisse, inflation et taux d'intérêt à la hausse, alourdissent mécaniquement la dette tandis que la charge de la dette, devenue « dynamique », selon la curieuse expression du rapporteur général, s'élève à 52 milliards.
En même temps les recettes se contractent, tandis que le poids des dépenses fiscales engagées dans les trois dernières années pèsera sur les budgets 2009 et 2010. Le scénario du Gouvernement communiqué à Bruxelles est intenable, nul ici ne se fait d'illusion. On connaît le sort qui attendait dans le temps anciens les messagers porteurs de mauvaises nouvelles...
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Arrêtez, nous tenons à vous. (Sourires)
Mme Nicole Bricq. - ...mais la situation est suffisamment grave sans qu'il soit nécessaire d'en rajouter. Le Gouvernement n'a plus de marges de manoeuvre. Alors qu'il a lancé de multiples chantiers inspirés par le Président et retardé l'ajustement budgétaire, il a négligé le principal : toute réforme a un coût initial. Si économies il y a, elles ne se produisent qu'à moyen ou long terme.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Exact.
Mme Nicole Bricq. - Condamné a une discipline financière qu'il n'a pas anticipée, le Gouvernement n'a plus de cartouche. On voit là plus clairement que jamais l'injustice du paquet fiscal, qui a miné la confiance : en privilégiant les situations de rente, en proposant un agenda partisan et des mesures socialement biaisées, vous avez ruiné toute possibilité de mobilisation des salariés, qui ont bien compris qu'ils seraient les dindons de la farce. Quel paradoxe ! Alors que les salaires ne sont pour rien dans l'inflation, liée à la hausse du coût des matières première, ce sont eux qui vont payer la facture !
Alors qu'il faudrait s'engager dans une politique contracyclique, vous n'en avez plus les moyens. Le pays a besoin, dans bien des domaines, de la dépense : en matière de recherche et d'enseignement supérieur, en matière d'innovation, pour se doter de PME fortes et bien armées à l'export, pour assurer la solidarité qu'exige le décentrement de notre monde. Le débat sur le financement du revenu de solidarité active grâce au redéploiement de la prime pour l'emploi est à cet égard emblématique : la redistribution se fera des pauvres vers les plus pauvres. Et que dire du risque de voir le RSA devenir une subvention au temps partiel et aux bas salaires, ou de l'effet du glissement de la prime pour l'emploi vers le RSA, qui pénalisera les couples bi-actifs, puisque les deux dispositifs n'ont pas la même base de calcul ?
Vous vous apprêtez à mettre en oeuvre un plan de rigueur de grande ampleur qui amputera la croissance et fera croître le chômage.
M. Philippe Marini, rapporteur général. - A quand vos propositions ?
Mme Nicole Bricq. - Quelle est la stratégie du Gouvernement ?...
M. Philippe Marini, rapporteur général. - Quelle est la vôtre ?
Mme Nicole Bricq. - ...La révision générale des politiques publiques n'a pas pour but d'améliorer l'efficience de l'État, mais de justifier a priori la réduction de la dépense publique et du nombre des fonctionnaires. L'économie ne dépassera pas 6 milliards...
M. Philippe Marini, rapporteur général. - C'est déjà quelque chose.
Mme Nicole Bricq. - ...dont vous vous apprêtez, si j'ai bien compris les propos du Président de la République, à dépenser déjà trois pour financer la baisse de TVA en faveur des restaurateurs. Sans compter le coût des niches fiscales déjà engagées et de celles que leur ajoutera la loi pour la modernisation de l'économie.
M. Philippe Marini, rapporteur général. - Environ 400 millions.
Mme Nicole Bricq. - La norme de dépense pour 2009 est fixée à 2 %. Tous les budgets seront touchés : rien ne peut être sanctuarisé. Les dépenses d'intervention en souffriront.
Sur la question des dépenses fiscales le débat, nous dites-vous, est ouvert ? Plafonner, réévaluer, limiter dans le temps, supprimer, comme le recommande le rapporteur général, les niches verticales... Il faudra attendre le budget pour 2009 pour savoir quelle voie vous aurez choisie, et si j'en crois les propos du président Valade, qui défendait tout à l'heure les niches sur le patrimoine et les monuments historiques, il y aura fort à faire.
Quant à la réforme constitutionnelle, le groupe socialiste s'est rallié à l'amendement présenté par MM. Marini, Arthuis, About et Vasselle.
Contrairement à la majorité, nous ne désertons pas ce terrain, comme vous le verrez cet après-midi lorsque nous reprendrons le débat sur la réforme des institutions.
Il semble que 3 milliards d'euros de crédits seront annulés et qu'on imposera un nouveau tour de vis aux collectivités locales. La semaine dernière, lors de la réunion de la Conférence nationale des exécutifs, le Premier ministre n'a pas caché son intention d'encadrer plus sévèrement les dotations de l'État -notamment la dotation générale de fonctionnement (DGF). C'est une cible tentante, d'autant que l'hypothèse du retour à l'équilibre d'ici 2012 fait des collectivités locales une variable essentielle. Or, leur endettement ne pèse que pour 11 % dans la dette publique : difficile d'en faire un bouc émissaire. Comment pourraient-elles, dans ces conditions, réduire drastiquement leurs dépenses, auxquelles le Gouvernement assigne un taux de croissance de 1,4 %, alors que leurs recettes sont amputées du fait de la réforme de la taxe professionnelle et de la baisse des recettes des droits de mutation ? Tout le monde sait ici que le schéma du Gouvernement n'est pas réaliste. Et l'état délicat des marchés financiers rend peu propice la cession d'actifs non stratégiques.
Il est paradoxal de débattre de la fiscalité sans disposer des résultats de la revue en cours. Certaines intentions pointent, dont l'orientation vers un impôt à large assiette et faible taux. Cela nous inquiète d'autant plus que vous avez déjà raboté le seul impôt progressif dont nous disposons. Ça suffit.
Vous utiliserez certainement des artifices comptables pour rester en dessous de la toise des 3 %, mais vous ne tromperez ni les parlementaires ni la Cour des comptes.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Elle constitutionnalise la sincérité.
Mme Nicole Bricq. - Le déficit est structurel et non conjoncturel.
Quant au transfert des dettes de la sécurité sociale à la Cades, il relève à la fois du contournement de l'obligation d'y associer une recette et du détournement, puisque les excédents du Fonds de solidarité vieillesse devraient aller au Fonds de réserve des retraites. (M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, approuve)
Je suis dans l'opposition, vous n'êtes donc pas tenus de suivre mes conseils, mais vous pouvez les écouter. Donnez un peu d'air aux finances publiques.
M. Philippe Marini, rapporteur général. - Oxygénons-les ! (Sourires)
Mme Nicole Bricq. - Revenez sur les largesses accordées aux situations rentières, qui n'améliorent en rien la compétitivité ni le positionnement de la France face à la mondialisation. Revenez sur le paquet fiscal, coûteux et impropre à rétablir confiance et croissance. Il n'y a pas de honte à reconnaître une erreur, mais il est diabolique de persévérer. Cessez d'encourager les exonérations sociales et les niches fiscales. Il serait plus raisonnable de viser la stabilisation des prélèvements obligatoires puisque la baisse de 4 points promise par le Président de la République n'a aucune chance d'être atteinte. Cessez de développer un climat anxiogène autour de la dette en l'individualisant pour chaque Français. Placez plutôt en face la somme des actifs...
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - 500 milliards.
Mme Nicole Bricq. - ...et l'encore bonne signature de la France. Financez de grandes politiques d'économies d'énergie, prenez en compte l'impact du vieillissement de la population, investissez dans l'innovation et la connaissance : repensez notre modèle de développement pour réussir le passage de la France dans le XXIe siècle. Vous ne le préparez pas, mais l'histoire des peuples montre qu'ils n'oublient jamais longtemps les fautes de leurs gouvernants. (Applaudissements à gauche)
M. Roland du Luart. - Le rapporteur général, Philippe Marini, a raison de souligner que l'année 2009 marque un tournant en matière de finances publiques : ces dernières ont atteint une sorte de point de rupture sous la double pression de l'endettement et du vieillissement de la population. Certes, le ralentissement de la croissance économique, l'augmentation des taux d'intérêt et le regain d'inflation rendent plus difficile à atteindre l'objectif de 2,5 points de PIB de déficit public fixé pour 2008.
Monsieur le ministre, vous avez prévu d'annuler environ la moitié des crédits mis en réserve et vous suivez de près l'évolution des dépenses de la sécurité sociale, mais nos difficultés sont surtout structurelles, liées au poids croissant de la dette dont la charge a longtemps été contenue, voire occultée, par les baisses de taux. A cet égard, le groupe UMP se félicite de la mise en place d'une stratégie de moyen terme reposant sur des réformes de structure et sur une maîtrise durable de la dépense publique. Nous saluons la confirmation de l'objectif d'un retour à l'équilibre des finances publiques en 2012, et dès 2011, espérons-le, pour la sécurité sociale. La présentation d'un budget pluriannuel redonnera à nos concitoyens de la perspective, et peut-être même de la confiance.
Le cap des réformes fixé par le Président de la République doit donc être tenu, par gros temps comme par petit temps. La hausse des prix et des taux d'intérêt contraint l'État à stabiliser ses dépenses afin de respecter le « 0 volume ». Nous mesurons l'effort que cela représente, d'autant plus que les crédits progresseront dans certains secteurs comme l'enseignement supérieur, la recherche et la justice C'est là que la RGPP prend tout son sens en permettant d'identifier les gisements de productivité et d'atteindre quasiment l'objectif de non-remplacement d'un fonctionnaire partant à la retraite sur deux en 2009, soit plus de 30 000 postes.
Comme notre commission des finances, nous vous encourageons à étendre à l'ensemble des dépenses d'intervention cet exercice de clarification et de rationalisation, et à passer en revue l'ensemble des niches fiscales et sociales. Beaucoup d'entre elles mériteraient d'être évaluées -l'ancien rapporteur des crédits de l'outre-mer que je suis en est convaincu. (M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, approuve)
Enfin, nous souhaitons que soit poursuivie la clarification des relations entre l'État et la sécurité sociale, et surtout entre l'État et les collectivités territoriales -le Sénat insiste naturellement sur ce dernier point. Lors de la Conférence nationale des exécutifs du 10 juillet dernier, le Gouvernement a annoncé sa volonté d'appliquer la règle du « 0 volume » aux concours qu'il verse aux collectivités locales. Si ces dernières doivent contribuer à l'effort de retour à l'équilibre des comptes publics, cela doit se faire dans la transparence et la cohérence. Ainsi, l'inclusion du Fonds de compensation pour la TVA (FCTVA) dans le périmètre soumis au « 0 volume » peut être source de confusion et d'inquiétude parmi les élus locaux. Certes, ce fonds n'est pas réformé en 2009 afin de ne pas remettre en cause les plans de financement des investissements des collectivités locales, mais la forte progression prévue -660 millions d'euros- affectera une grande partie du milliard de progression de l'enveloppe globale des concours concernés. Les autres dotations, et en particulier la DGF, risquent d'en subir les conséquences. Surtout, l'inclusion du FCTVA dans l'enveloppe des concours de l'État risque de provoquer une confusion sur sa nature, que la majorité des élus considère comme un remboursement. S'ajoutant à la différence entre les 15 % remboursés et les 19,6 % de TVA versés, cette mesure risquerait d'être perçue comme une double peine budgétaire affectant les investissements. Monsieur le ministre, pouvez-nous préciser ce point, ainsi que vos intentions concernant l'évolution future du FCTVA ? Nous souhaitons qu'aucune décision ne soit prise sans concertation préalable.
Dans le même esprit, le groupe UMP s'est fermement opposé à ce qu'une nouvelle réforme de la taxe professionnelle soit engagée sans évaluation de la réforme précédente ni concertation approfondie avec les élus locaux. Le Gouvernement nous a entendus sur ce point : un rapport sera présenté au Parlement au début de l'automne et d'éventuels ajustements seront examinés sur cette base. Aucune réforme de la taxe professionnelle ne sera inscrite dans le projet de loi de finances pour 2009, conformément à notre souhait, et la réforme des valeurs locatives sera également conduite dans la concertation.
Mme Lagarde a exclu que la réforme de la taxe professionnelle entraîne une perte de recettes ou d'autonomie financière des collectivités locales. Nous sommes également très attachés à nos départements et apprécions que le Président de la République et le Gouvernement se soient clairement démarqués de la proposition de suppression avancée par la commission Attali. Pouvez-vous nous le confirmer ? A la disparition de tel ou tel échelon, nous préférons la clarification des compétences qui s'ajouterait à la concertation lancée sur l'intercommunalité dans la perspective du projet de loi de modernisation de la démocratie locale prévu pour le premier semestre 2009.
Sur tous ces sujets, le Sénat ne manque pas de propositions, comme en attestent les travaux de l'Observatoire de la décentralisation.
Nous nous félicitons de l'installation, à l'automne, de la commission consultative de l'évaluation des normes, prévue par le collectif budgétaire pour 2007 : les élus locaux y seront mieux associés à l'élaboration des textes réglementaires qui ont un impact sur les collectivités territoriales. Car nous sommes au point de rupture : les collectivités locales peuvent contribuer encore davantage au redressement des finances publiques, mais à condition que l'État cesse de multiplier ses transferts de charges déguisés ! Les comptes doivent être clairs, pour l'État, les collectivités et la sécurité sociale : oui à la réforme des finances locales, mais dans la concertation et sans précipitation, sans remettre en cause les investissements ni l'autonomie des collectivités locales, et sans augmenter les prélèvements obligatoires.
C'est sur ce socle d'un partenariat équilibré, que nous installerons la gouvernance efficace et responsable que nous appelons de nos voeux : État, collectivités locales, sécurité sociale, entreprises, contribuables, tous ensemble prêts à consentir un effort supplémentaire pour le retour de la croissance, l'équilibre de nos finances publiques et préserver notre modèle social ! (Applaudissements à droite et au centre)
La séance est suspendue à 13 heures.
présidence de M. Christian Poncelet
La séance reprend à 15 heures.