COM(2011) 326 final
du 08/06/2011
Date d'adoption du texte par les instances européennes : 22/10/2013
Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution
Texte déposé au Sénat le 17/06/2011Examen : 15/12/2011 (commission des affaires européennes)
Ce texte a fait l'objet de la proposition de résolution : n° 231 (2011-2012) : voir le dossier legislatif
Justice et affaires intérieures
Texte E 6330
Proposition de résolution européenne
de M. Jean-René Lecerf
sur l'accès à un avocat dans le
cadre des procédures pénales
COM (2011) 326 final
(Réunion du jeudi 15 décembre 2011)
M. Jean-René Lecerf. - La proposition de directive (texte E 6330), qui tend à harmoniser les règles applicables au droit d'accès à un avocat dans le cadre des procédures pénales et au droit de communiquer après une arrestation, pourrait avoir des effets importants sur notre droit interne, tel qu'il résulte notamment de la loi du 14 avril 2011 par laquelle nous avons, à la suite de la décision du Conseil constitutionnel du 30 juillet 2010, récemment modifié notre procédure de garde à vue. Or, en l'état, la proposition de la Commission européenne pourrait nous conduire à réviser ces dispositions législatives.
Cette proposition de directive participe de la reconnaissance mutuelle des décisions de justice, pierre angulaire de la coopération judiciaire en matière tant civile que pénale au sein de l'Union. Ce principe suppose une confiance mutuelle des États membres dans leurs systèmes judiciaires respectifs et en particulier leur procédure pénale.
C'est à cette fin que, suite au Livre vert publié en février 2003, la Commission européenne avait présenté en 2004 une proposition de décision-cadre visant à définir un socle minimal de droits procéduraux accordés aux personnes soupçonnées d'avoir commis des infractions pénales.
Outre le droit de bénéficier gratuitement des services d'interprétation et de traduction, ce texte prévoyait le droit à l'assistance d'un avocat, celui d'être informé de ses droits, le droit à une attention particulière pour les personnes mises en cause vulnérables ainsi que celui de communiquer avec les autorités consulaires et avec sa famille.
Mais les négociations sur ce texte ayant échoué, la Commission européenne a retenu une approche plus graduelle formalisée dans une « feuille de route » adoptée par le Conseil en novembre 2009 et annexée au programme de Stockholm approuvé par le Conseil européen en décembre 2010.
Il convient en outre de préciser que cette politique d'ensemble s'inscrit désormais dans le cadre du traité de Lisbonne aux termes duquel l'Union européenne peut établir des règles minimales en matière de procédure pénale, par voie de directives selon la procédure législative ordinaire, dans la mesure où cela est nécessaire pour faciliter la reconnaissance mutuelle.
La première application de la feuille de route a été l'adoption de la directive du 20 octobre 2010 sur le droit à l'interprétation et à la traduction dans le cadre des procédures pénales, suivie d'une proposition de directive relative au droit à être informé sur ses droits et sur les charges retenues, ainsi que le droit d'avoir accès au dossier de l'affaire, toujours en cours de négociation mais semblant faire consensus.
Quant au droit d'accès à un avocat et à celui de communiquer après une arrestation, ils constituent les troisième et quatrième mesures prévues dans le programme de 2009. La Commission européenne se fonde sur les dispositions de la Convention européenne des droits de l'homme et sur la Charte des droits fondamentaux, et invoque en outre plusieurs arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme, dont il convient néanmoins de rappeler qu'ils répondent à des cas d'espèce et dont il n'est pas toujours possible d'en déduire l'existence de principes généraux.
Quelles sont les principales dispositions de la proposition de directive ?
La première concerne le principe du droit d'accès à un avocat applicable dès le moment où la directive trouverait elle-même à s'appliquer, c'est-à-dire lorsqu'une personne est informée qu'elle est soupçonnée d'avoir commis une infraction pénale ou qu'elle est poursuivie à ce titre et jusqu'au terme de la procédure.
La personne soupçonnée ou poursuivie devrait alors avoir, dès que possible, accès à un avocat dans un délai et selon des modalités permettant l'exercice des droits de la défense. Cet accès devrait être garanti au plus tard au moment de la privation de liberté et dans les meilleurs délais, au regard des circonstances de chaque affaire, et qu'elle soit privée de liberté ou non, la personne concernée devrait pouvoir bénéficier d'un avocat dès son audition.
L'avocat devrait aussi être autorisé à s'entretenir avec le suspect ou la personne poursuivie pendant un temps suffisant et à intervalle raisonnable pour pouvoir exercer effectivement les droits de la défense et pouvoir assister à tout interrogatoire ou audition. Sauf lorsque le risque d'un retard compromettrait la disponibilité d'éléments de preuves, il devrait pouvoir assister à toute mesure d'enquête ou de collecte de preuves pour laquelle la législation nationale exige ou autorise la présence de la personne soupçonnée ou poursuivie, et pourrait accéder aux lieux de détention pour y vérifier les conditions de détention.
Indépendamment du droit à un avocat, la proposition reconnaît aux personnes privées de liberté dans le cadre des procédures pénales le droit de communiquer, dès que possible après l'arrestation, avec au moins une personne qu'elles désignent, afin de l'informer de la mise en détention. Les représentants légaux d'enfants privés de liberté devraient aussi être avertis le plus tôt possible de la mise en détention et des raisons qui la motivent, sauf si cela est contraire à l'intérêt supérieur des enfants concernés. Lorsqu'il n'est pas possible de communiquer avec la personne désignée par le détenu ni de l'informer, en dépit de toutes les tentatives effectuées à cet effet, la personne détenue devrait être informée du fait que le tiers n'a pu être prévenu.
Quant aux détenus étrangers, ils devraient pouvoir obtenir que les autorités consulaires soient informées de leur mise en détention. Enfin, dans le but de garantir les droits de la défense, toutes les communications entre une personne soupçonnée ou poursuivie et son avocat devraient être totalement confidentielles.
Je précise qu'à l'ensemble de ces principes, le texte ne prévoit que des dérogations très limitées, les États membres ne pouvant déroger, dans des circonstances exceptionnelles, qu'au seul droit d'accès à un avocat, pour autant que la dérogation soit nécessaire et sous réserve de garanties de procédure. Ces dérogations devraient être justifiées par des motifs impérieux tenant à la nécessité urgente d'écarter un danger qui menace la vie ou l'intégrité physique d'une ou de plusieurs personnes.
J'ajoute enfin que le texte prend en compte le mandat d'arrêt européen, puisqu'il étend le droit de bénéficier des services d'un conseil aux personnes arrêtées aux fins de l'exécution d'un tel mandat d'arrêt, dans l'État membre d'exécution. La personne visée par cette procédure pourrait également avoir accès à un avocat dans l'État membre d'émission, afin d'assister l'avocat désigné dans l'État membre d'exécution.
S'agissant de l'appréciation qu'il nous revient de porter sur cette proposition, je pense tout d'abord que nous pourrions approuver la démarche de renforcement des garanties procédurales qui figure expressément dans le programme pluriannuel dit de Stockholm, adopté en 2010. La méthode graduelle retenue par le Conseil en 2009 me paraît très pragmatique car elle permet de mieux identifier les questions et de trouver des points d'équilibre pour chaque aspect de la procédure pénale.
Il me semble aussi que cette démarche doit, selon les termes mêmes du traité, se limiter à l'établissement de règles minimales. Une directive ne peut donc prétendre tout régler et elle doit au contraire laisser une marge d'appréciation aux États membres de façon à ce que puissent être prises en compte les spécificités de chaque système juridique. Or, de ce point de vue, le texte qui nous est soumis me paraît s'inscrire davantage dans la logique d'un système accusatoire que dans celle du système inquisitoire qui est le nôtre.
De plus, j'estime qu'il serait nécessaire de lier le développement du droit d'accès à un avocat à une harmonisation de l'aide juridictionnelle, pour écarter le risque d'une justice inégale selon les moyens de l'intéressé. Forts de ce constat avec mon collègue Jean-Pierre Michel dans un rapport d'information publié récemment, nous avons fait valoir que les progrès du droit à l'assistance d'un avocat justifiait un effort de la collectivité, autrement dit une revalorisation de l'aide juridictionnelle, argument que je suis tenté de reprendre en faisant observer que le Conseil avait expressément lié ce droit d'accès à un avocat à une harmonisation des règles relatives à l'aide juridictionnelle.
Or, force est de constater que la Commission européenne n'a pas respecté la feuille de route sur ce point, puisqu'elle renvoie cette question de l'aide juridictionnelle aux États membres, entre lesquels il existe pourtant de très grandes disparités. Puisque la Commission a ainsi souhaité promouvoir des droits sans se préoccuper des conditions nécessaires pour qu'ils soient effectifs, il nous revient de rappeler qu'il est essentiel d'établir très vite des règles harmonisées pour l'aide juridictionnelle.
Il nous revient aussi de veiller à assurer la conciliation entre le respect des droits de la défense et la recherche des auteurs d'infractions, cette question étant sans doute la plus délicate du sujet qui nous préoccupe. Je précise sur ce point que le conseil des barreaux européens estime que la présence de l'avocat assurerait l'impartialité des procédures et la recevabilité des preuves rassemblées en sa présence et devrait être de mise chaque fois que la question est suffisamment grave pour justifier une privation de liberté ; le conseil national des barreaux français, que j'ai reçu, fait valoir, pour sa part, que le renforcement du rôle et de la présence de l'avocat dans la phase d'enquête de la procédure pénale est une garantie essentielle de l'État de droit, du procès équitable et du respect effectif des droits de la défense.
A l'inverse, dans une note conjointe du 22 septembre 2011, la Belgique, la France, l'Irlande, les Pays-Bas et le Royaume-Uni ont exprimé de fortes réserves sur la proposition de la Commission européenne, proposition qui poserait, selon ces pays, des difficultés substantielles dans la mise en oeuvre des enquêtes et des procédures pénales par les États membres, position identique à celle défendue par le Garde des Sceaux le 8 juin dernier devant la commission des affaires européennes de l'Assemblée nationale.
Avec Jean-Pierre Michel, nous avons à ce propos souligné que le droit à l'assistance d'un avocat soulevait le risque d'une judiciarisation de la garde à vue susceptible d'entraîner une confusion certaine entre la phase policière et la phase judiciaire de l'enquête ; la récente décision du Conseil constitutionnel du 18 novembre 2011, rendue en réponse à une question prioritaire de constitutionnalité, est venue d'ailleurs opportunément rappeler que le renforcement des droits de la défense n'avait pas pour effet d'imposer une juridictionnalisation de la garde à vue. Elle rappelle que la garde à vue demeure une mesure de police judiciaire qui n'a pas pour objet de permettre un débat contradictoire sur la légalité ou le bien-fondé des éléments de preuve, un tel débat ayant sa place devant la juridiction d'instruction ou de jugement.
Le commentaire de la décision relève que l'évolution possible du droit de l'Union, qui serait induite par la proposition de directive, ne trouve pas de fondement dans la jurisprudence actuelle du Conseil constitutionnel, sa décision du 30 juillet 2010 ayant imposé l'assistance d'un avocat à raison de la privation de liberté. Il n'en va donc pas de même si la personne consent à être entendue librement, ce point n'ayant d'ailleurs pas été tranché par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme.
J'ajoute que si le Conseil constitutionnel a déclaré les dispositions issues de la loi du 14 avril 2011 conformes à la Constitution, il a néanmoins formulé une réserve d'interprétation - qui me paraît importante - en imposant deux garanties minimales pour l'audition d'une personne soupçonnée d'avoir commis une infraction, à savoir, d'une part, que la personne, avant de pouvoir être interrogée, doit être informée de la nature et de la date de l'infraction qu'on la soupçonne d'avoir commise ou tenté de commettre et, d'autre part, qu'elle doit être informée de son droit de mettre fin à l'entretien en quittant les locaux de police ou de gendarmerie.
Ces garanties étant posées pour l'audition libre, c'est bien, à mon avis, l'existence d'une contrainte telle que la privation de liberté qui devrait être le critère du droit d'accès à un avocat, et non la notion de suspect retenue par la proposition européenne. Précisons qu'en pratique, d'après le ministère de la justice, les avocats seraient effectivement présents dans 20 % des procédures, essentiellement dans les 30 minutes d'entretien que le code de procédure pénale prévoit dans le cadre de la garde à vue, cette moyenne s'accompagnant de fortes disparités géographiques.
Je considère aussi que le droit communautaire devrait se concentrer sur des règles minimales permettant d'assurer un exercice effectif des droits de la défense, qui constitue une exigence essentielle et que, conformément à ce que prévoit le traité, la directive devrait se borner à fixer des règles minimales en autorisant les États membres à préciser le contenu de ce droit, en adéquation avec leurs traditions et systèmes juridiques.
Est-il, en effet, indispensable que l'avocat soit présent lors de toute mesure d'enquête, ou de collecte de preuves qui exige la présence de la personne soupçonnée ou poursuivie, notamment la prise d'empreintes digitales ou un prélèvement ADN ?
Faut-il confier à l'avocat le contrôle des lieux de détention, mission qui relève dans notre pays de la responsabilité des autorités publiques ? Je considère que non.
En revanche, il est important que l'avocat puisse bénéficier d'un certain nombre de droits au cours d'un interrogatoire ou d'une audition. Ces droits doivent être encadrés afin de ne pas bloquer le déroulement des enquêtes. Le texte doit fixer des règles minimales dans ce sens, tout en laissant une marge d'appréciation suffisante aux États membres.
Il me semble en outre que le cadre européen devrait prévoir des dérogations adaptées aux infractions les plus graves, ce dans le prolongement des travaux de notre rapport d'information sur l'intervention de l'avocat auprès des personnes impliquées dans des affaires liées à la grande criminalité et au terrorisme.
Nous avons préconisé que l'avocat soit choisi par la personne gardée à vue sur une liste agréée par le barreau, voire, comme en Espagne, prévoir une désignation d'office par le bâtonnier.
La Cour européenne des droits de l'homme admettant elle-même des dérogations aux droits de la défense dans des circonstances exceptionnelles et pour des motifs impérieux, et notre code de procédure pénale autorisant le report de la présence de l'avocat dans ces cas, il est donc nécessaire que la directive prévoie un régime dérogatoire assurant la couverture effective des infractions les plus graves.
Enfin, si le droit de communiquer après une arrestation constitue une garantie importante pour les personnes concernées, il me semble nécessaire de bien l'encadrer. On ne peut pas aller - comme l'envisage le texte - jusqu'à permettre de communiquer avec toute personne librement désignée par la personne privée de liberté, compte tenu des risques que cela pourrait comporter pour le déroulement de l'enquête, voire pour la sécurité des personnes. Il serait sans doute plus équilibré de prévoir - comme le fait déjà le droit français - le droit de faire prévenir un proche et son employeur ou, dans le cas des personnes de nationalité étrangère, les autorités consulaires.
En conclusion, je crois que nous devons accueillir favorablement cette nouvelle étape dans le renforcement des garanties procédurales. Cependant, comme le prévoit le traité, il faut établir des règles minimales qui tiennent compte des différences entre les traditions et systèmes juridiques des États membres. Il ne faut pas non plus introduire de confusion entre la phase policière et la phase judiciaire de l'enquête.
Nous souhaitons que les discussions sur le texte de la Commission européenne permettent d'avancer sur cette base et de trouver un équilibre allant dans ce sens.
M. Joël Guerriau. - Parallèlement à ce dispositif, le droit européen encadre-t-il aussi la communication du nom des personnes gardées à vue ou mises en examen par exemple en en protégeant la confidentialité ?
M. Jean-René Lecerf. - Non, il n'y a pas de texte sur ce point.
M. Joël Guerriau. - Il s'agit pourtant d'un élément important si l'on veut que la présomption d'innocence puisse être effective.
M. Jean-René Lecerf. - Certes, mais tout cela n'est pas simple comme l'on a pu le constater chez nous, où le passage de la notion d'inculpation à celle de mise en examen n'a pas changé grand chose.
M. Alain Richard. - Il convient de ne pas oublier qu'une garde à vue constitue une véritable course contre la montre au cours laquelle un équilibre délicat doit être maintenu entre l'objectif de recherche des infractions et la défense des droits de la personne.
De ce point de vue, les allers-retours que nous avons connus depuis deux ans entre le Parlement et le Conseil constitutionnel sont allés dans le sens de cet équilibre, y compris en ce qui concerne la possibilité d'auditions libres, que je considère comme l'expression la plus directe des droits de la personne concernée.
En revanche, j'estime que la proposition de directive perturbe l'équilibre auquel nous sommes parvenus en favorisant les outils de retardement de la procédure mis à la disposition des avocats, en prévoyant un dispositif de vérification du lieu de détention très différent de nos règles, et en requérant l'assistance de l'avocat lors de la commission de différents actes matériels liés à l'enquête.
En conséquence, je soutiens la proposition de résolution qui nous est soumise.
En termes de méthode, pourrais-je savoir comment il est possible de disposer du dernier état de la directive, ne serait-ce que pour pouvoir participer au débat en séance en pleine connaissance de cause au cas où des modifications seraient intervenues entretemps ?
M. Simon Sutour, président. - Je vous conseille de vous adresser aux fonctionnaires de l'antenne du Sénat à Bruxelles, qui est rattachée à notre commission et qui est au service de l'ensemble des instances du Sénat comme en témoigne l'organisation récente du déplacement de la commission des lois dont elle a eu la charge.
M. Richard Yung. - Je précise que cette antenne à Bruxelles constitue une ressource particulièrement précieuse pour tous les types de demande ou de recherche.
S'agissant de la proposition de directive, je m'interroge sur la possibilité de définir un système applicable aux systèmes judiciaires de tous les pays européens, qui connaissent de profondes différences, à commencer par celle existant entre notre organisation et celle du Royaume-Uni.
M. Jean-René Lecerf. - Je précise que les États ayant émis les plus vives réserves à l'encontre de la directive relèvent de systèmes très différents, puisque c'est par exemple à la fois le cas de la France et du Royaume-Uni que vous évoquiez. Mais l'objectif poursuivi par le texte n'est autre que de parvenir à ce qu'une décision de justice s'applique de la même façon, quel que soit le pays où elle a été prononcée, ce qui suppose véritablement une forme d'acceptation des systèmes en vigueur dans les autres États membres.
Toutefois, force est de constater que la proposition de la Commission est davantage inspirée du système de type accusatoire que du système inquisitoire en vigueur chez nous, et qu'il pourrait nous rendre plus difficile la recherche des infractions.
De même, le texte fait référence à la notion de suspect, dont une définition précise est donnée par le droit anglais, alors que tel n'est pas le cas en France. Ce sont des points auxquels nous devons être particulièrement attentifs.
M. André Gattolin. - S'agissant des droits des personnes étrangères, vous avez évoqué l'intervention des autorités consulaires ; or l'on sait que celle-ci peut parfois poser des difficultés
M. Jean-René Lecerf. - Sauf si les étrangers en question sont des ressortissants d'États de l'Union européenne.
M. Alain Richard. - Existe-t-il un document présentant, par exemple sous la forme d'un tableau comparatif, les quelques grands modèles judiciaires auxquels se rattachent les États européens ?
Mlle Sophie Joissains. - Il pourrait effectivement être intéressant d'en disposer.
M. Simon Sutour, président. - Ce travail a sans doute dû être réalisé par la commission des lois.
M. Jean-René Lecerf. - L'appréciation de ces différences est parfois complexe. Par exemple, si l'on ne prend que le cas de l'Allemagne, l'on s'aperçoit qu'une notion telle que l'indépendance du parquet doit s'apprécier au vu d'un examen de la situation concrète des procureurs, comme le fait par exemple qu'ils puissent être nommés à vie.
Avant que la commission ne se prononce sur la proposition de résolution, je souhaiterais préciser que le rapport de Guy Geoffroy et Marietta Karamanli déposé au nom de la commission des affaires européennes de l'Assemblée nationale, aboutit à des conclusions très proches de celles que je vous ai exposées, et qui ont présidé à la rédaction de la proposition de résolution que je vous soumets.
*
A l'issue du débat, la commission des affaires européennes a adopté, à l'unanimité, la proposition de résolution européenne suivante :
Proposition de résolution européenne
Le Sénat,
Vu l'article 88-4 de la Constitution ;
Vu l'article 82 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative au droit d'accès à un avocat dans le cadre des procédures pénales et au droit de communiquer après l'arrestation (texte E 6330) ;
Affirme son attachement au renforcement des garanties dans les procédures pénales et approuve la démarche par étapes retenue dans la « feuille de route » adoptée par le Conseil le 30 novembre 2009 ;
Rappelle que, conformément à l'article 82 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, l'objectif doit être de renforcer les garanties procédurales par la détermination de règles minimales tenant compte des différences entre les traditions et systèmes juridiques des États membres ;
Considère que le droit d'accès à un avocat est un droit essentiel dans le cadre des procédures pénales ; que, comme l'avait prévu la « feuille de route », l'harmonisation des règles qui lui sont applicables est indissociable d'une harmonisation des règles relatives à l'aide juridictionnelle afin d'assurer l'effectivité des droits ;
Souligne que ce droit d'accès à un avocat doit s'exercer dans des conditions permettant d'assurer la nécessaire conciliation entre le respect des droits de la défense et la recherche des auteurs d'infractions, tout en évitant une confusion entre la phase policière et la phase judiciaire de l'enquête ; qu'en principe, l'exercice de ce droit devrait être lié à la privation de liberté ;
Estime que le contenu de ce droit devrait faire l'objet de règles minimales permettant d'assurer un exercice effectif des droits de la défense ; que ne paraissent pas relever de ces règles minimales le droit de l'avocat d'être présent lors de toute mesure d'enquête ou de collecte de preuves qui exige la présence de la personne soupçonnée ou poursuivie ni le contrôle par l'avocat des lieux de détention ; que le texte devrait en outre mieux encadrer les droits reconnus à l'avocat au cours d'un interrogatoire ou d'une audition tout en laissant une marge d'appréciation suffisante aux États membres ;
Juge nécessaire de prévoir des dérogations strictement encadrées lorsque ces dérogations paraissent justifiées par des motifs impérieux tenant aux circonstances particulières de l'enquête, pour les catégories d'infractions les plus graves ;
Estime que le droit de communiquer avec un tiers après l'arrestation devrait être mieux précisé et concerner, comme le prévoit le droit français, le droit de faire prévenir un proche ou, dans le cas des personnes de nationalité étrangère, des autorités consulaires.