M. le président. La parole est à M. Fabien Genet, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Fabien Genet. Monsieur le ministre de l’intérieur, ma collègue Marie Mercier et moi-même souhaitons vous interroger sur les violences urbaines qui ont embrasé ce week-end le quartier des Saugeraies à Mâcon, en Saône-et-Loire. Trois bâtiments communaux sportifs ou sociaux ont été détruits, en plus de véhicules incendiés, et les forces de police ont été attirées dans de véritables guets-apens. Les dégâts sont estimés à plus de 1 million d’euros.
Ces émeutes exaspèrent la population ; ces attaques contre nos biens communs révoltent leurs usagers ; ces dégradations désespèrent le contribuable. D’autant plus que les précédentes émeutes de l’été 2023 ont laissé la ville de Mâcon sans solution satisfaisante pour assurer ses bâtiments communaux, les franchises dépassant désormais 2 millions d’euros par site.
Aux dires du préfet de Saône-et-Loire et du maire de Mâcon, notre ancien collègue Jean-Patrick Courtois, ces actes interviennent sur fond de narcotrafic. Les tags retrouvés à proximité des événements sont explicites : « Donnez-nous un local, ou c’est la guerre ! », pouvait-on lire.
Dans notre pays, les dealers en sont donc à exiger des locaux communaux pour se livrer à leur commerce et embraser un quartier face à la résistance courageuse et légitime des pouvoirs publics.
Au-delà des propositions sénatoriales pertinentes défendues par nos collègues Étienne Blanc et Jérôme Durain, comment comptez-vous réarmer notre République pour ne pas perdre la bataille de la confiance de nos concitoyens, et surtout gagner la guerre contre le narcotrafic ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur.
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur. Monsieur le sénateur Genet, je ne reviendrai pas sur les faits eux-mêmes, si ce n’est pour rappeler qu’une cinquantaine d’individus ont érigé des barricades, incendié des véhicules et saccagé des bâtiments.
Compte tenu de cette situation extrêmement tendue, les forces de police ont dû travailler jusqu’à cinq heures du matin pour tenter de ramener le calme. Des personnes ont été arrêtées et placées en garde à vue et des procédures judiciaires sont en cours.
Le ministre d’État, ministre de l’intérieur, a immédiatement envoyé des renforts de police sur le terrain pour encadrer la situation pendant au moins dix jours. Mon collègue Rebsamen a eu l’occasion d’échanger avec le maire de Mâcon sur ce sujet.
Malheureusement, le narcotrafic est présent sur l’ensemble du territoire et dans toutes les communes, qu’elles soient grandes, petites ou moyennes. C’est un fléau qu’on ne peut pas nier.
Je veux saluer les services de police, quels qu’ils soient, pour leur mobilisation. Ils s’emploient de façon immédiate à lutter contre les crimes et délits que nous connaissons.
Par ailleurs, nous comptons beaucoup sur le texte qui sera discuté devant la Haute Assemblée la semaine prochaine. Il donnera des outils juridiques supplémentaires, notamment sur le plan pénal, pour lutter contre ce phénomène. En ce domaine, nous n’avons d’autre choix que de mener un combat de haut niveau.
Nous ne lâcherons rien et continuerons à travailler. Il conviendra également de conforter la complémentarité entre les polices municipale et nationale ; c’est même une évolution législative obligatoire.
Nous devrons nous mobiliser, en tout temps et en tout lieu, pour lutter contre les violences d’une manière générale. D’autant plus que, de la violence, nous sommes passés à l’ultraviolence, soit un système dans lequel la vie n’a plus de prix et où seul l’argent du narcotrafic compte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Fabien Genet, pour la réplique.
M. Fabien Genet. Je vous remercie pour ces précisions, monsieur le ministre. Je souhaite m’associer à l’hommage que vous avez rendu aux forces de sécurité ; la coopération a été parfaite entre les policiers, les gendarmes, les sapeurs-pompiers, mais également entre les services de la préfecture et la procureure de la République.
J’en appelle au Gouvernement. Il faut que nous puissions épauler les collectivités qui se retrouvent aujourd’hui sans solution pour être assurées. Les collectivités ne sauraient endurer une double peine, à savoir les dégradations et le défaut d’assurance. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
assurabilité des risques climatiques
M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe INDEP.)
M. Jean-François Longeot. Ma question, qui s’adresse à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, complète celle de Fabien Genet puisqu’elle a trait à l’assurance des collectivités.
Le risque climatique qui pèse sur nos collectivités n’est plus à démontrer. C’est une réalité qui se manifeste chaque année par des événements de plus en plus fréquents et dévastateurs. Ces phénomènes climatiques représentent une menace croissante pour les infrastructures publiques. Or de plus en plus de collectivités se trouvent aujourd’hui dans l’incapacité de souscrire un contrat d’assurance.
En effet, les primes d’assurance contre les risques climatiques, qui ont en moyenne augmenté de 90 % entre 2024 et 2025, ont atteint des niveaux prohibitifs pour plus de 1 500 communes.
Les conséquences d’une telle augmentation sont désastreuses pour nos collectivités. Plusieurs d’entre elles se retrouvent exclues du régime d’indemnisation des catastrophes naturelles (CatNat), qui constitue pourtant l’ultime rempart contre les aléas climatiques.
Nos territoires d’outre-mer se trouvent en première ligne face aux effets du dérèglement climatique. L’intensité des cyclones atteint désormais des niveaux records.
Le territoire métropolitain n’est pas en reste : le 1er janvier dernier, le maire de Breil-sur-Roya a dénoncé par l’absurde l’incapacité à assurer sa commune en interdisant par arrêté les catastrophes naturelles sur son territoire.
Si cet exemple prête à sourire ou à pleurer, il traduit en creux l’effondrement du principe de socialisation des risques, pourtant au fondement de nos régimes d’indemnisation. L’État ne peut se satisfaire de cette situation et son intervention est pleinement justifiée, car aucune collectivité ne saurait être laissée dans l’impasse.
Quelles solutions le Gouvernement envisage-t-il pour permettre à toutes nos collectivités de se couvrir contre les risques climatiques ? (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche. Monsieur le président Longeot, votre question porte sur les difficultés que rencontrent certaines collectivités territoriales pour s’assurer face aux risques climatiques. Ces difficultés sont réelles ; j’ai pu le constater sur le terrain à la suite des inondations qui se sont produites dans le Pas-de-Calais entre novembre 2023 et janvier 2024.
Je pense notamment à Blendecques, dont l’assureur a exigé une franchise de 500 000 euros alors que cette commune compte moins de 5 000 habitants. Quant à la commune de Breil-sur-Roya, elle a vu son contrat annulé unilatéralement par son assureur en 2024.
Ces situations ne sont pas acceptables et interrogent sur le mode de fonctionnement du régime assurantiel applicable face aux risques climatiques qui s’aggravent.
J’ai engagé des travaux avec la Caisse centrale de réassurance (CCR) afin de recenser les zones qu’il n’est plus possible de soumettre à un modèle classique d’assurance. Nous réfléchissons à trouver d’autres solutions et à faire évoluer ces modèles, mais, pour cela, l’État devra faire preuve de solidarité.
Ce sujet est une priorité du Gouvernement. C’est la raison pour laquelle les crédits du fonds Barnier augmentent de 75 millions d’euros en 2025, malgré un cadre budgétaire très contraint. Le fonds vert, qui accompagne l’adaptation au changement climatique, est également renforcé.
J’invite les collectivités qui ne trouvent pas d’assureurs à se rapprocher du bureau central de tarification (BCT), soit l’autorité administrative chargée de garantir l’accès aux assurances obligatoires. C’est lui qui a permis de débloquer la situation à Breil-sur-Roya, le 15 janvier dernier.
En plus de couvrir les risques, nous devons les prévenir. C’est tout l’enjeu du plan national d’adaptation au changement climatique (Pnacc), que j’ai présenté en octobre dernier, et de la mission « Adaptation » qui doit accompagner les collectivités locales.
Grâce à Éric Lombard, qui exerce un pouvoir de tutelle sur les assurances dans tous leurs axes de travail, nous serons à vos côtés et soutiendrons les collectivités locales pour trouver des solutions.
influenceurs algériens
M. le président. La parole est à M. Henri Leroy, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Henri Leroy. Monsieur le ministre de l’intérieur, les Français nous observent. Ils sont exaspérés, car ils voient se répéter des comportements qui bafouent nos lois, menacent notre sécurité et piétinent notre souveraineté. Désormais, ils attendent des actes forts.
Les appels à la haine, à la violence et au meurtre diffusés par certains influenceurs algériens résidant en France ne sont pas de simples provocations : ce sont des actes de déstabilisation, une menace directe pour notre sécurité intérieure.
Ces individus qui prospèrent sur notre sol, tout en sapant nos valeurs, incarnent une cinquième colonne que nous ne devons plus tolérer.
Nous saluons les arrestations et les expulsions déjà mises en œuvre, mais le récent renvoi à l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle d’un influenceur par l’Algérie, qui a refusé de l’accueillir, illustre l’urgence d’agir encore plus fortement.
Ma question est simple : quelles seront vos prochaines mesures pour éradiquer ces menaces ?
Envisagez-vous de prendre de nouvelles décisions : suspendre la délivrance de visas ou dénoncer, voire rompre, les accords de 1968 ?
M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.
M. Bruno Retailleau, ministre d’État, ministre de l’intérieur. Monsieur le sénateur Leroy, depuis quelques semaines nous avons constaté que des propos de haine absolument intolérables et inadmissibles étaient tenus par des influenceurs algériens sur un réseau social, TikTok. Je vous rappelle la teneur de ces propos : des appels au meurtre, au viol, à la torture, ainsi que des déclarations antisémites.
Vous nous appelez à des actes fermes ; nous les avons déjà mis en œuvre : nous n’avons rien cédé et nous ne laisserons rien passer.
Chaque fois que des propos inacceptables ont été diffusés, nous avons demandé à la plateforme d’harmonisation, d’analyse, de recoupement et d’orientation des signalements (Pharos) de supprimer les vidéos concernées, ce qui a été fait.
Nous avons systématiquement localisé, interpellé et judiciarisé ces individus. Il y a quelques heures, l’un d’entre eux a été de nouveau arrêté. Nous ne céderons rien, car internet n’est pas une zone de non-droit.
Vous soulevez le cas de l’influenceur qui répond au nom de Doualemn. L’Algérie a évidemment méconnu le droit international à son propos, la convention de Chicago relative à l’aviation civile internationale de 1944, mais aussi l’accord bilatéral que nous avons passé ensemble en 1994.
Le droit international est très clair : dès lors que l’on peut prouver la nationalité d’un ressortissant, et nous le pouvions puisque l’intéressé disposait d’un passeport biométrique infalsifiable, le pays d’origine doit l’accepter. Cela n’a pas été le cas.
Vous m’interrogez plus fondamentalement sur notre riposte. Nous respectons les souverainetés, les États et les peuples, mais nous souhaitons que la France soit également respectée en retour.
Aucune douleur de l’histoire, aussi vive soit-elle, n’autorise un pays à offenser la France, aucun grief ne l’autorise à détenir un grand écrivain franco-algérien âgé et malade. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et RDSE.)
Vous connaissez parfaitement ma position sur ces accords, puisqu’il y a six ou sept ans, nous avions déposé ici une résolution visant les accords de 1968. Cependant, dans les circonstances actuelles, vous comprendrez que la gradation de la riposte ne m’appartient pas. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Henri Leroy, pour la réplique.
M. Henri Leroy. Je vous remercie, monsieur le ministre, de ces précisions que je n’étais pas le seul à attendre, j’en suis certain. De sondage en sondage, le pourcentage de Français qui s’émeuvent de cette situation ne cesse d’augmenter.
Vous avez pris le sujet à bras-le-corps ; formons le vœu que vous parveniez à en venir à bout en prenant des mesures encore plus fortes.
Dans le contexte actuel, les accords de 1968 constituent une véritable insulte à la France. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
hébergement des données relatives aux centrales nucléaires
M. le président. La parole est à M. Mickaël Vallet, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
M. Mickaël Vallet. Dans l’affaire des données des centrales nucléaires françaises, qui a menti ? Amazon a-t-il menti sur son offre initiale ? Le Gouvernement a-t-il menti devant la représentation nationale ? J’attends de vous que vous puissiez nous éclairer à ce sujet aujourd’hui.
Permettez-moi de rappeler les épisodes précédents. Il y a dix mois, lors des questions d’actualité au Gouvernement, j’interrogeais votre prédécesseure sur la volonté d’EDF de confier à Amazon l’hébergement des données relatives au renouvellement des pièces de nos centrales nucléaires.
Mme la secrétaire d’État chargée du numérique avait alors affirmé : « [cette expérimentation] ne porte […] pas sur des données sensibles ». S’agissant d’un contrat estimé à 860 millions d’euros, cette précision était effectivement essentielle.
Or la presse nous apprenait récemment que ladite expérimentation avait pris fin, faute d’avoir obtenu d’Amazon la garantie que les données seraient hébergées en France et ne seraient pas transmissibles à des services américains. Lesdites données étaient donc bien sensibles.
Cette affaire est sérieuse et j’attends du Gouvernement deux réponses précises.
Premièrement, confirmez-vous les informations rapportées par Le Canard enchaîné sur les nouvelles exigences d’Amazon ?
Deuxièmement, le Gouvernement a-t-il, oui ou non, menti sur le niveau de sensibilité de ces données ?
Le technocapitalisme états-unien pose à notre pays un défi inédit. Les Français, tous actionnaires d’EDF, n’accepteraient pas de constater que la start-up nation ait pu leur mentir ou faire preuve, au choix, d’incompétence ou de naïveté.
Je vous remercie par avance de votre éclairage.
Ma question s’adressant à Mme la ministre déléguée chargée de l’intelligence artificielle et du numérique, il serait appréciable, en son absence, que son ministre de tutelle me réponde. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
M. Éric Lombard, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Monsieur le sénateur Vallet, je vous remercie de cette question qui porte sur un point exigeant toute notre attention : la protection de nos données.
Je profite de cette réponse pour rendre hommage à Mme Clara Chappaz, qui est remarquablement engagée sur ces sujets.
Protéger nos données implique de constituer sur le territoire national des acteurs permettant de recueillir les données souveraines et sensibles. Nous y travaillons et je peux ainsi vous indiquer que, dans le cadre de mes responsabilités précédentes, j’ai supervisé un projet en développement, appelé NumSpot, destiné précisément à héberger les données souveraines de façon certaine et sécurisée.
Pour les données non sensibles, de grands acteurs internationaux proposent des services à des prix compétitifs et à des conditions techniques extrêmement exigeantes, utilisés par un certain nombre d’acteurs publics et privés.
Les données sur lesquelles EDF travaille avec Amazon dans le projet que vous citez portent sur des informations non sensibles, pour lesquelles le risque que vous évoquez n’existe pas.
Nous serons très attentifs à suivre ce dossier, car nous gardons toujours à l’esprit notre responsabilité de veiller à ce que les données devant être protégées le soient. Le ministère que j’ai l’honneur de diriger s’en assure avec la plus grande attention.
M. le président. La parole est à M. Mickaël Vallet, pour la réplique.
M. Mickaël Vallet. Monsieur le ministre, si ces données ne sont pas sensibles, je peine à comprendre que les exigences auprès d’Amazon aient été rehaussées au niveau qui a été rapporté dans la presse.
Par ailleurs, en ma qualité de parlementaire, j’ai demandé il y a plusieurs semaines à EDF de me fournir le contrat, mais je n’ai pas encore obtenu de réponse.
Je ne doute pas que le ministère pourra m’aider dans cette démarche. S’il ne le faisait pas, alors la Commission d’accès aux documents administratifs (Cada) s’en chargera, car cela correspond à sa jurisprudence.
Nous finirons par obtenir ce contrat et par y voir clair. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
retrait des prestations sociales aux personnes condamnées pour trafic de drogue
M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Frédérique Puissat. Ma question s’adresse à M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l’accès aux soins.
Monsieur le ministre, permettez-moi de vous adresser un triple remerciement, avant de vous poser une question.
Tout d’abord, je tiens à vous remercier de votre présence en Isère lundi dernier, un département souvent novateur en matière de santé et d’action sociale, vous ne me démentirez pas sur ce point.
Ensuite, je vous remercie de votre visite au sein des services de la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) de l’Isère. Vous avez ainsi pu rendre hommage au travail accompli par les 900 agents de la CPAM de l’Isère, par sa directrice et, au-delà, par tous les agents des CPAM qui œuvrent dans notre pays.
Enfin, je vous remercie de la thématique qui a été abordée lors de cette visite : la lutte contre la fraude à l’assurance maladie.
Monsieur le ministre, nous avons pu aborder lundi deux points particulièrement intéressants.
Le premier concernait la mise en place des pôles interrégionaux d’enquêteurs judiciaires (Piej), au nombre de six au niveau national. Créés par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, ces pôles rassemblent des agents extrêmement engagés, aux profils variés, qui nous permettront de progresser dans la recherche des réseaux et des personnes qui fraudent nos systèmes sociaux.
Le second point, qui fera l’objet de ma question, touche au protocole interservices tout à fait singulier et particulier mis en place en Isère.
Ce protocole lie le parquet à la caisse d’allocations familiales (CAF) et à la CPAM. Il prévoit que, dès lors qu’une personne est condamnée et qu’elle a bénéficié de prestations soumises à plafonds de revenus, le procureur puisse saisir la CAF et la CPAM afin que ces organismes recalculent les sommes qui pourraient avoir été indûment perçues et les récupèrent auprès des intéressés ayant fraudé.
Il s’agit, en somme, de frapper au porte-monnaie les personnes condamnées.
Ma question est simple, monsieur le ministre : entendez-vous généraliser ce dispositif ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins.
M. Yannick Neuder, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l’accès aux soins. Madame la sénatrice Puissat, je vous remercie de votre question. Face au déficit de la sécurité sociale à l’heure où nous devons boucler ses budgets, le sujet que vous abordez représente d’abord un enjeu de justice sociale : la fraude me semble inadmissible de manière générale et il convient d’appliquer une tolérance zéro en la matière.
Mme Nathalie Goulet. Ah !
M. Yannick Neuder, ministre. Le Haut Conseil du financement de la protection sociale (HCFiPS) évoque jusqu’à 13 milliards d’euros de fraudes détectées, sur lesquelles nous aurions la capacité d’agir.
Mme Nathalie Goulet. Ah !
M. Yannick Neuder, ministre. Je me suis rendu en Isère, à vos côtés, afin de mettre en lumière des initiatives locales associant le procureur de la République, les caisses d’allocations familiales, les caisses primaires d’assurance maladie, ainsi que les forces de gendarmerie et de police qui, grâce à de petites équipes de cyberenquêteurs, parviennent à recouvrer le produit des fraudes. Celles-ci sont proprement inadmissibles pour nos assurés sociaux.
Le budget de la sécurité sociale est issu du programme du Conseil national de la Résistance, fondé sur des valeurs qui nous rassemblent : l’éducation, la santé et la sécurité. C’est cela que nous devons à nos concitoyens.
Je vous confirme que cette expérience, qui s’est d’ores et déjà étendue à Paris, Marseille, Blois et à six autres villes de France, a vocation à se déployer au niveau régional afin de former quelque 450 cyberenquêteurs et de renforcer la sécurité du système, notamment grâce à la sécurisation des cartes Vitale.
Vous l’aurez compris, ce gouvernement, sous l’égide du Premier ministre, est pleinement mobilisé pour prendre soin des Français, pour faire preuve d’une tolérance zéro vis-à-vis des agressions subies par nos soignants et pour assurer leur protection, mais aussi pour ne tolérer aucune fraude, en particulier de la part de ceux qui s’adonnent au narcotrafic tout en percevant des prestations sociales (Mme Émilienne Poumirol s’exclame.). Une telle situation est insupportable pour nos concitoyens, et nous nous devons de lutter contre de tels agissements.
Madame la sénatrice, je compte sur votre concours et sur celui de l’ensemble du Sénat pour généraliser ces mesures dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour la réplique.
Mme Frédérique Puissat. Dès lors que vous frappez au porte-monnaie, notamment les narcotrafiquants, vous nous trouverez à vos côtés, messieurs les ministres de l’intérieur, de la justice et de la santé ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
pollution des canalisations d’eau
M. le président. La parole est à M. Alain Duffourg, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Alain Duffourg. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation.
Une enquête du journal Le Monde et un sujet d’Envoyé spécial ont démontré la présence de substances toxiques dans les canalisations d’eau potable, en particulier du chlorure de vinyle monomère (CVM), issu de la dégradation des tuyaux en polychlorure de vinyle (PVC) installés dans les années 1980.
Cette substance a été reconnue cancérogène par les autorités de santé et présente un risque élevé pour la santé publique. Des élus de mon territoire m’ont alerté sur ce phénomène, mais l’ensemble du territoire national est touché.
Plusieurs centaines de foyers, sans le savoir, ont bu de l’eau du robinet contaminée et risquent, par là même, d’être concernés.
Pour remédier à cette difficulté, il faudrait remplacer l’ensemble des canalisations. Cependant, les présidents des syndicats d’eau et les maires ne disposent pas des moyens financiers nécessaires pour ce faire.
Monsieur le ministre, pouvez-vous leur apporter une réponse à ce sujet ?
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation.
M. François Rebsamen, ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation. Monsieur le sénateur Duffourg, la gestion de l’eau potable, le maintien de sa qualité et la lutte contre son gaspillage constituent un enjeu actuel majeur.
Nos objectifs communs sont de trois ordres : premièrement, la sécurisation de l’accès à une ressource qui, pour des raisons liées au changement climatique et à l’adaptation, se raréfie ; deuxièmement, le soutien à une meilleure efficience du service public de l’eau ; troisièmement, la garantie d’une évolution contenue des prix pour le consommateur.
L’État est à l’écoute des élus locaux sur ce sujet, comme en témoigne le travail réalisé avec le Sénat pour assouplir les dispositions légales et faire le pari de la différenciation territoriale.
Vous évoquez, monsieur le sénateur, le sujet du financement du remplacement des canalisations d’eau potable en raison de la présence de CVM.
Ce problème se rapproche de celui du dépassement du niveau de concentration maximale de nitrates dans l’eau dans certaines communes rurales, en raison d’un défaut d’investissement soit dans la protection des sources, c’est-à-dire des puits de captage, soit dans l’assainissement.
Sur ces sujets, il est évident que les investissements nécessaires peuvent dépasser les moyens de certaines petites communes isolées.
Tout d’abord, la mutualisation des moyens techniques et financiers des collectivités, même si elle n’est plus obligatoire, peut constituer l’un des leviers d’amélioration de la maîtrise des réseaux de distribution d’eau potable et d’assainissement.
Ensuite, l’État, par l’intermédiaire des préfets, mais également des agences régionales de santé (ARS), puisque vous évoquez un problème de santé, et des agences de l’eau, établira une cartographie nationale de ce phénomène et une estimation des coûts que son traitement engendrerait.
Le cas échéant, il conviendra d’apporter un appui aux collectivités qui seraient incapables de réaliser les investissements nécessaires.
M. le président. Il faut conclure.
M. François Rebsamen, ministre. J’ajoute que chacun prendra sa part, sans pour autant remettre en cause le principe de la compétence des collectivités territoriales dans ce domaine, auquel ces dernières sont très attachées.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Mieux vaut boire du chablis !
M. le président. La parole est à M. Alain Duffourg, pour la réplique.
M. Alain Duffourg. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.) Vous ne répondez pas précisément à ma question, monsieur le ministre.
Je me permets de vous rappeler que cette question écrite avait été déposée auprès de votre ministère au mois d’octobre dernier, sans obtenir de réponse.
Pour autant, je constate que vous savez faire de la politique quand vous le souhaitez, et même de la politique politicienne, en écartant certains partis et, par là même, des millions de Français.
Aujourd’hui, je vous demande simplement de nous indiquer les mesures que vous comptez prendre pour que nos concitoyens puissent boire une eau saine, car je suis vivement interpellé sur ce dossier. Il vous appartient de les rassurer. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)