M. le président. L’amendement n° 255, présenté par Mme Cukierman, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 8

Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

2° bis Après l’article L. 2151-1, il est inséré un article L. 2151-… ainsi rédigé :

« Art. L. 2151-.- Pour les marchés passés selon une procédure formalisée, les acheteurs peuvent autoriser la présentation de variantes. Les variantes sont autorisées sauf mention contraire dans l’avis de marché ou dans l’invitation à confirmer l’intérêt.

« Pour les marchés passés selon une procédure adaptée, les variantes sont autorisées.

« Les opérateurs économiques sont libres de présenter une variante. »

II. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… . – Le 2° bis du I entre en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard un an à compter de la publication de la présente loi.

Ces dispositions s’appliquent aux marchés pour lesquels une consultation est engagée ou un avis d’appel à la concurrence est envoyé à la publication à compter de leur entrée en vigueur.

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Cet amendement s’inscrit dans la même veine. Moi aussi, je demeure convaincue que la commande publique a un effet levier dans de nombreux domaines, y compris celui de la réindustrialisation de notre pays.

Après discussion, entre autres, avec la Fédération nationale des travaux publics, il apparaît que la notion de variantes est aujourd’hui bien trop peu souvent utilisée alors qu’elle permettrait, si elle était facilitée, de mieux valoriser le savoir-faire écologique des entreprises.

M. le président. Quel est l’avis de la commission de l’aménagement du territoire ?

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis. Sur la possibilité pour les acheteurs d’autoriser la présentation de variantes environnementales, la commission de l’aménagement du territoire sollicite l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Le Maire, ministre. Même si l’on comprend la logique, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements, dont les objets sont contraires au droit européen.

M. Fabien Gay. Cela faisait longtemps qu’on n’avait pas entendu cet argument !

M. le président. Quel est maintenant l’avis de la commission de l’aménagement du territoire ?

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. Si le droit européen nous empêche de réindustrialiser notre pays, comment allons-nous faire ?

Aujourd’hui, notamment quand il est question d’enjeux énergétiques, un certain nombre de pays savent se faire entendre et imposer des systèmes qui leur permettent de rester au sein de l’Union européenne tout en protégeant leur population.

L’argument selon lequel le dispositif proposé n’est pas conforme au droit européen est léger. À un moment donné, il faudra bien, non pas s’affranchir des règles européennes, mais défendre des positions fortes devant la Commission européenne. On ne peut systématiquement s’en tenir à cet état de fait, qui contraint in fine notre pays à l’immobilisme au prétexte que rien ne se fera tant que le droit européen n’aura pas bougé.

Je maintiens mon amendement.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi, pour explication de vote.

M. Pierre-Antoine Levi. J’entends les arguments de Cécile Cukierman. Toutefois, à la suite des explications du ministre, de l’avis du rapporteur de la commission de l’aménagement du territoire et compte tenu du sort funeste qui attend mon amendement, je préfère le retirer.

M. le président. L’amendement n° 176 rectifié bis est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° 255.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de dix-neuf amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 344 rectifié, présenté par MM. Devinaz et Bourgi, Mmes Harribey et Monier et MM. Pla et Tissot, est ainsi libellé :

Alinéa 9

Rédiger ainsi cet alinéa :

3° À la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 2152-7, après le mot : « alinéa », sont insérés les mots : « , dont la priorisation d’un ou de plusieurs critères environnementaux, » ;

La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz.

M. Gilbert-Luc Devinaz. Cet amendement vise à valoriser le critère environnemental dans la commande publique.

Dans son avis du 11 mai 2023, le Conseil d’État a rappelé que la définition de l’offre économiquement la plus avantageuse demeure du domaine réglementaire et que la loi Climat et résilience prévoit d’introduire les critères environnementaux dans les marchés publics au plus tard en 2026. Il s’agit d’énumérer ces critères pour permettre leur prise en compte sans attendre cette échéance.

En favorisant un investissement écologique et responsable, les collectivités font le choix d’une commande publique vertueuse. La diffusion de ces bonnes pratiques doit servir de fer de lance pour lancer un nouveau dogme, celui d’un verdissement progressif de la commande publique.

M. le président. L’amendement n° 190 rectifié, présenté par Mme Havet, M. Buis, Mme Schillinger, M. Rohfritsch, Mmes Duranton et Phinera-Horth et M. Mohamed Soilihi, est ainsi libellé :

Alinéa 9

Rédiger ainsi cet alinéa :

3° À la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 2152-7, après le mot : « alinéa », sont insérés les mots : « , dont la prise en compte d’un ou de plusieurs critères environnementaux, » ;

La parole est à Mme Nadège Havet.

Mme Nadège Havet. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 140 rectifié n’est pas soutenu.

L’amendement n° 157, présenté par Mmes Bonnefoy, Préville et Briquet, MM. Montaugé, Marie, J. Bigot et Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte, Jacquin, Cozic et Éblé, Mme Espagnac, MM. Féraud, Jeansannetas, P. Joly, Lurel et Raynal, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, M. Mérillou, Mme Monier, MM. Redon-Sarrazy, Stanzione et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 9, seconde phrase

Remplacer les mots :

peut également être

par les mots :

est également

II. – Alinéa 12

Remplacer les mots :

peuvent figurer

par le mot :

figurent

La parole est à Mme Nicole Bonnefoy.

Mme Nicole Bonnefoy. Cet amendement vise à rendre la prise en compte par les acheteurs publics de critères environnementaux et sociaux beaucoup plus ambitieuse.

Nous ne pouvons plus nous contenter de faire des critères environnementaux une variable d’ajustement au service au mieux d’une action isolée, au pire du greenwashing. Alors que nous n’avons jamais été aussi proches d’un point de non-retour, les acheteurs publics peuvent encore se passer de la prise en compte des conséquences climatiques et environnementales de leur commande !

L’offre économiquement la plus avantageuse sert à discriminer les autres offres au profit de la meilleure. Elle est aujourd’hui définie par la voie réglementaire. Ce projet de loi souhaite accélérer la prise en compte des critères environnementaux dans le choix des offres déjà planifiées pour 2026 par la loi Climat et résilience.

Aussi, je propose d’inclure systématiquement au moins un critère environnemental ou social. La meilleure offre est celle dont le coût pour la planète est le plus faible. C’est devenu une évidence, mes chers collègues. Ne passons pas à côté de cette ambition pour nos industries vertueuses et pour notre planète.

M. le président. L’amendement n° 226, présenté par MM. Fernique, Salmon, Breuiller, Benarroche, Dantec, Dossus, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel, est ainsi libellé :

Alinéa 9, seconde phrase

Remplacer les mots :

peut également être

par les mots :

est également

La parole est à M. Jacques Fernique.

M. Jacques Fernique. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Les quatre amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 222 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Fialaire, Guiol, Requier, Bilhac, Cabanel et Gold et Mme Guillotin.

L’amendement n° 303 rectifié bis est présenté par MM. Longeot, Moga, Levi et S. Demilly, Mme Garriaud-Maylam, M. Détraigne, Mme Vermeillet, M. Bacci, Mmes Létard, Dindar et Canayer, MM. Capo-Canellas, Poadja, Le Nay, Cigolotti et Kern, Mme Muller-Bronn, M. L. Hervé, Mme Billon, MM. Duffourg, J.M. Arnaud, P. Martin et Belin et Mme Perrot.

L’amendement n° 389 est présenté par M. Cardon.

L’amendement n° 395 rectifié bis est présenté par Mme Berthet, MM. Anglars, Brisson, Burgoa, Bouchet et Cuypers, Mme Imbert, MM. D. Laurent, Perrin, Rietmann, Sido, Tabarot et E. Blanc, Mme Bellurot et M. Grosperrin.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 9, seconde phrase

Remplacer le mot :

peut

par le mot :

doit

La parole est à M. Henri Cabanel, pour présenter l’amendement n° 222 rectifié.

M. Henri Cabanel. À l’échelle européenne, trois directives de 2014 permettent aux pouvoirs adjudicateurs et aux entités qui attribuent des marchés dans le cadre de procédures de passation de marchés publics de se fonder, outre le prix ou le coût, sur des critères supplémentaires pour déterminer l’offre économiquement la plus avantageuse. Il peut s’agir, par exemple, de la qualité de l’offre, y compris de ses caractéristiques sociales, environnementales et innovantes.

La proposition de règlement pour une industrie « zéro net » établie par la Commission européenne prévoit que les pouvoirs adjudicateurs et les entités compétentes évaluent, lors de l’attribution d’un marché public, la contribution des offres à la durabilité et à la résilience en fonction d’une série de critères.

En France, selon l’article R. 2152-7 du code de la commande publique, modifié par le décret du 2 mai 2022, le marché doit être attribué à l’offre économiquement la plus avantageuse, après une analyse reposant sur un seul critère, tel que le prix, ou sur une pluralité de critères non discriminatoires, comprenant la qualité, les délais d’exécution et l’organisation.

À l’usage, il est apparu que les acheteurs ont peu recours aux critères qualitatifs pour déterminer l’offre économiquement la plus avantageuse, alors que ceux-ci sont de puissants vecteurs pour favoriser le contenu local. Cet amendement vise donc à renforcer l’importance du rapport qualité-prix dans la détermination de l’offre économiquement la plus avantageuse pour un marché public.

M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour présenter l’amendement n° 303 rectifié bis.

M. le président. La parole est à M. Rémi Cardon, pour présenter l’amendement n° 389.

M. Rémi Cardon. Cet amendement vise simplement à remplacer « peut » par « doit », notamment dans la partie où il est précisé que l’offre économiquement la plus avantageuse peut également être déterminée sur la base de critères non seulement économiques, mais aussi qualitatifs, environnementaux et sociaux.

Il me semble important que les mots aient un sens : cela doit être clair et net. Cet amendement tend donc à renforcer l’importance du rapport qualité-prix par la prise en compte de la qualité ainsi que de critères environnementaux et sociaux.

J’en profite pour poser une question au ministre, au vu du texte et des débats en cours : l’industrie doit-elle être verte ou peut-elle être verte ?

M. le président. La parole est à Mme Martine Berthet, pour présenter l’amendement n° 395 rectifié bis.

Mme Martine Berthet. Cet amendement, qui vise à favoriser la production en France et en Europe, est défendu.

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 302 rectifié bis est présenté par MM. Longeot, Moga, Levi, S. Demilly et Folliot, Mme Garriaud-Maylam, M. Détraigne, Mme Vermeillet, M. Bacci, Mmes Létard, Dindar et Canayer, MM. Capo-Canellas et Poadja, Mme Saint-Pé, MM. Le Nay, Cigolotti et Kern, Mme Muller-Bronn, M. L. Hervé, Mme Billon, MM. Duffourg, J.M. Arnaud, P. Martin et Belin et Mme Perrot.

L’amendement n° 338 rectifié bis est présenté par MM. Chasseing et Verzelen, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Decool, Wattebled et Capus, Mme Paoli-Gagin et M. Fialaire.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 9

Compléter cet alinéa par les mots :

ainsi que la contribution de l’offre à la résilience, compte tenu de la proportion de produits provenant d’une seule source d’approvisionnement, notamment d’un pays tiers à l’Union européenne

La parole est à M. Jean-François Longeot, pour présenter l’amendement n° 302 rectifié bis.

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter l’amendement n° 338 rectifié bis.

M. Daniel Chasseing. Cet amendement a pour objet d’ajouter à la définition de l’offre économiquement la plus avantageuse un critère de contribution de l’offre à la résilience, sur la base de la proportion de produits provenant d’une seule source d’approvisionnement. Il est conforme aux exigences du futur règlement européen.

M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 40 rectifié est présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Capus, Guerriau et A. Marc, Mme Mélot et MM. Lagourgue, Grand, Chasseing, Malhuret, Decool et Menonville.

L’amendement n° 155 est présenté par Mmes Préville, Bonnefoy et Briquet, MM. Montaugé, Marie, Kanner, J. Bigot et Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte, Jacquin et Lurel, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, M. Mérillou, Mme Monier, MM. Redon-Sarrazy, Stanzione et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 245 est présenté par Mme Varaillas, MM. Gay, Lahellec et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 9

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Parmi les offres présentant des solutions aux performances techniques équivalentes, l’offre présentant les performances environnementales les plus élevées est privilégiée par l’acheteur.

La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin, pour présenter l’amendement n° 40 rectifié.

M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour présenter l’amendement n° 155.

Mme Angèle Préville. L’article 13 introduit des dispositions qui permettent aux acheteurs publics de mieux prendre en compte les critères environnementaux.

Les auteurs de cet amendement proposent d’aller un peu plus loin en permettant à l’acheteur public de se tourner vers l’option écologique la mieux-disante, dès lors que les caractéristiques techniques des différentes offres présentent des performances finales équivalentes. L’objectif est bien d’inciter davantage de collectivités territoriales à s’interroger sur leur stratégie d’achat et à mieux intégrer les enjeux environnementaux.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas, pour présenter l’amendement n° 245.

M. le président. Les quatre amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 127 rectifié est présenté par Mme Delattre, MM. Artano, Fialaire, Guiol, Requier, Bilhac, Cabanel et Gold et Mme Guillotin.

L’amendement n° 189 rectifié est présenté par MM. Menonville, Médevielle et Verzelen, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Decool et Chasseing, Mme Paoli-Gagin et MM. Capus et Wattebled.

L’amendement n° 215 rectifié est présenté par MM. Duplomb, J.M. Boyer et Klinger, Mmes Micouleau et Belrhiti, MM. Mandelli et Pointereau, Mme Joseph, MM. Grosperrin, Mouiller et Burgoa, Mme Berthet, M. Cambon, Mme Imbert, M. Segouin, Mme Bellurot, MM. B. Fournier et Houpert, Mme Dumont, MM. Lefèvre, Savary et de Nicolaÿ, Mmes Lassarade et Gosselin, MM. E. Blanc, Brisson et D. Laurent, Mme Lherbier et MM. Piednoir et Charon.

L’amendement n° 263 est présenté par M. Cuypers.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 9

Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :

Les produits ayant obtenu le label écologique de l’Union européenne en application du règlement (CE) n° 66/2010 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 établissant le label écologique de l’UE sont présumés satisfaire aux critères comprenant des aspects environnementaux. Ces critères sont hiérarchisés ou pondérés par rapport aux autres critères.

La parole est à M. Henri Cabanel, pour présenter l’amendement n° 127 rectifié.

M. Henri Cabanel. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter l’amendement n° 189 rectifié.

M. Daniel Chasseing. Cet amendement de Franck Menonville vise à prévoir que les produits ayant un label écologique de l’Union européenne sont présumés satisfaire aux critères comprenant les aspects environnementaux. Il a également pour objet de prévoir que ces critères soient hiérarchisés, pondérés par rapport aux autres critères.

M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour présenter l’amendement n° 215 rectifié.

M. le président. L’amendement n° 263 n’est pas soutenu.

L’amendement n° 227, présenté par MM. Fernique, Salmon, Breuiller, Benarroche, Dantec, Dossus, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel, est ainsi libellé :

Alinéa 12

Remplacer les mots :

peuvent figurer

par le mot :

figurent

La parole est à M. Jacques Fernique.

M. Jacques Fernique. Cet amendement concerne les conditions d’attribution d’un contrat de concession pour un soumissionnaire. Le Gouvernement propose que les critères environnementaux et sociaux puissent figurer en sus du critère économique. Ce serait une possibilité, mais en aucun cas une obligation.

Notre groupe propose de sortir de cet entre-deux en rendant obligatoire pour les acheteurs la prise en compte des critères environnementaux et sociaux dans les paramètres de la commande publique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission de l’aménagement du territoire ?

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis. Les amendements nos 344 rectifié et 190 rectifié tendent à écraser la rédaction retenue par la commission. Nous avons pourtant explicité le fait que les acheteurs publics pouvaient déjà tenir compte de critères qualitatifs pour l’attribution d’un marché public en attendant l’entrée en vigueur de la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, qui rendra obligatoire la prise en compte des critères environnementaux dans la commande publique.

La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.

Cette même loi prévoit déjà qu’au moins un critère d’attribution des marchés publics ou des contrats de concession prenne en compte des caractéristiques environnementales, au plus tard en 2026. Or les amendements nos 157, 226, 222 rectifié, 389, 395 rectifié bis, 303 rectifié bis et 227 ont pour objet d’anticiper son entrée en vigueur tout en imposant la prise en compte de plusieurs critères qualitatifs dans l’attribution du marché ou du contrat de concession. Je ne souhaite pas revenir sur l’équilibre de cette loi. Comme de nombreux acteurs l’ont souligné lors des auditions, ce sera déjà un beau défi que de respecter les échéances de ce texte.

La commission émet donc un avis défavorable sur ces sept amendements.

Le droit européen et le code de la commande publique prévoient que les marchés publics soient attribués selon des critères objectifs, précis et liés à l’objet du marché ou à ses conditions d’exécution. La contribution de l’offre à la résilience évoquée par les amendements identiques nos 302 rectifié bis et 338 rectifié bis constitue un critère pour le moins imprécis, qui pourrait être source d’insécurité juridique.

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements.

Les amendements identiques nos 40 rectifié, 155 et 245 sont contraires au droit de l’Union européenne. C’est à l’acheteur de déterminer, au cas par cas, les critères et leur poids dans l’évaluation globale des offres. Les acheteurs ont l’obligation d’utiliser en tout état de cause non seulement un critère portant sur la qualité de l’offre, mais aussi un critère d’attribution portant sur le prix ou le coût. Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur ces trois amendements.

Enfin, il revient aux acheteurs publics d’arrêter librement les critères environnementaux qui permettront d’attribuer les marchés publics. Prévoir que des labels sont présumés satisfaire ces critères, comme le font les amendements nos 127 rectifié, 189 rectifié et 215 rectifié, est contraire à cette approche. Cela reviendrait à contraindre le choix des acteurs publics, ce qui n’est conforme ni à l’esprit ni à la lettre du droit de la commande publique, non plus qu’aux directives européennes qui l’encadrent.

La commission émet un avis défavorable sur ces trois amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Le Maire, ministre. Je ne m’abriterai pas, cette fois, derrière le droit européen, même s’il a son importance. Au fond, tous ces amendements se résument à une seule question, essentielle : devons-nous obliger à un achat public vert ou seulement favoriser celui-ci ? Cela renvoie à la manière dont nous développons l’industrie verte et le verdissement de notre économie.

Si nous obligeons à un achat vert, nous renonçons à développer une industrie verte nationale. En effet, en 2023, si vous forcez une collectivité territoriale qui veut s’équiper en panneaux solaires à choisir un produit vert, comme le proposent les auteurs d’un certain nombre d’amendements, celle-ci n’achètera que des panneaux chinois. Je sais que certains y seraient favorables – nous avons eu le même débat au sein du Gouvernement.

Quand je dis qu’il faut réserver les primes aux véhicules électriques produits en Europe, certains m’appellent à donner aussi ces primes aux véhicules chinois, pour équiper au plus vite la France de véhicules électriques, peu importe que ceux-ci soient chinois ou français ; or pour moi, cela importe. Je préfère que ces véhicules soient français ou européens.

Il faut donc bien mesurer la portée de ces amendements. Si nous obligeons les achats publics à être verts dans certaines filières, nous obligerons les acheteurs publics à acheter chinois – je dis cela avec tout le respect que j’ai pour notre partenaire chinois. Pour certains produits, notamment les panneaux photovoltaïques, l’offre actuelle est exclusivement chinoise.

Je préfère donc que nous favorisions les produits verts tout en laissant la possibilité à l’acheteur d’attendre un peu qu’une offre française soit disponible, tout en retenant pour le moment une offre française, même si celle-ci n’est pas aussi vertueuse du point de vue climatique.

Je souhaite que chacun mesure bien l’importance de ce vote.

Je demande donc le retrait des amendements nos 344 rectifié et 190 rectifié, déjà satisfaits par l’alinéa 9 de l’article 13. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements nos 157, 226, 222 rectifié, 389, 395 rectifié bis et 303 rectifié bis. Je comprends la logique qui sous-tend ces amendements, mais je veux vraiment que chacun mesure les conséquences qu’aurait leur adoption. Si nous introduisons une obligation de respecter des critères environnementaux dans l’attribution des marchés publics avant 2026, délai prévu par la loi Climat et résilience, nous pénaliserons certaines filières françaises, qui ne sont pas prêtes.

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements nos 302 rectifié bis et 338 rectifié bis, car on ne peut imposer de critères sur la résilience et les pays d’origine que sur certains produits sensibles.

Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur les amendements nos 40 rectifié, 155, et 245 : il est bon d’introduire un critère environnemental, mais il n’est pas possible de neutraliser complètement le critère de prix. Sinon, nous favoriserons l’émergence de monopoles et des entreprises arriveront et proposeront des produits verts à des prix prohibitifs. Obliger l’acheteur public à privilégier l’offre la plus écologique sans tenir compte du prix est non seulement contraire au droit européen, mais aussi dangereux pour les acheteurs.

Je demande le retrait des amendements nos 127 rectifié, 189 rectifié et 215 rectifié. Le label écologique européen peut faire partie des critères déterminés par l’acheteur, mais il ne peut être imposé de manière transversale. Comme vous le savez, chaque marché est soumis à des critères liés à son objet.

Enfin, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 227, qui soulève aussi la question de l’obligation de respecter un critère environnemental dans un contrat de concession.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je comprends les arguments de M. le ministre, qui a montré que l’instauration immédiate de critères environnementaux ne favoriserait pas l’émergence de filières françaises.

Je pense que nous sommes piégés par l’absence de critères de proximité. Cette dernière est pourtant un élément écologique important en ce qu’elle réduit les retombées environnementales liées au transport. Tant que le gouvernement français ne fait pas preuve de détermination pour créer un rapport de force en Europe en faveur de l’introduction d’un critère de proximité, nous aurons le plus grand mal à faire émerger des filières françaises. La commande publique joue un rôle déterminant.

Je me souviens de discussions lorsque je siégeais au Parlement européen : mes collègues prônaient le principe de subsidiarité et la proximité dans les discours, mais, quand il s’agissait de passer à l’action sur les marchés, ce principe n’était plus valable ! Il est important d’établir une certaine solidarité entre l’action publique, l’impôt public, payé localement, et le soutien à certaines filières industrielles.

Pendant des années, on nous a promis que cela ferait baisser les prix ; las, cela a contribué à la désindustrialisation de notre pays ! Dans le rapport de force européen, il est essentiel que nous puissions introduire le critère de proximité dans les marchés publics.

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Je ne partage pas tout à fait votre lecture, monsieur le ministre. L’amendement de M. Fernique vise à rendre obligatoire la prise en compte des critères environnementaux parmi les critères de choix de l’offre la plus avantageuse.

Il ne s’agit donc pas d’introduire un critère environnemental exclusif, mais de souligner que ce critère doit absolument être pris en compte. C’est une incitation forte.

Vous nous dites que l’industrie française n’est pas prête. Il est donc d’autant plus nécessaire de l’inciter fortement. Si nous ne le faisons pas, elle ne sera peut-être jamais prête. Il est crucial que ces critères soient imposés partout et je suis convaincu que nous pouvons progresser rapidement dans ce sens.