M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la citoyenneté.
Mme Sonia Backès, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté. Madame la sénatrice Pantel, les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, vous le savez, sont un événement planétaire qui nécessitera une mobilisation totale et sans précédent de nos forces de sécurité. Gérald Darmanin a eu l’occasion de le dire devant vous.
L’engagement du ministère de l’intérieur et des outre-mer ne pourra être que total pour garantir une sécurisation optimale de l’événement, mais aussi pour assurer la sécurité de nos concitoyens dans les territoires.
Les forces de sécurité intérieure seront en première ligne, vous l’avez dit. Chaque jour, près de 35 000 agents des forces de sécurité intérieure seront mobilisés. La réserve opérationnelle de la gendarmerie nationale, forte de 31 000 femmes et hommes, et les réserves des écoles de police et de gendarmerie seront également mobilisées.
La décision a été prise de suspendre, le temps des Jeux, la distinction entre les zones de compétence de la police et de la gendarmerie, ce qui permettra une organisation par mission plus adaptée à la situation.
L’engagement des personnels de sécurité privée, des agents des polices municipales et des militaires des forces armées sera nécessaire pour parfaire le dispositif global.
Bien sûr, nous pourrons compter sur l’appui de l’ensemble des technologies de sécurité et de renseignement autorisées par la loi.
Sur l’ensemble du territoire national, les forces de sécurité seront mobilisées pour garantir la sécurité quotidienne des Français. Le ministère de l’intérieur et des outre-mer, vous le savez, a demandé aux préfets de mettre en œuvre des plans zéro délinquance.
Vous le voyez, madame la sénatrice, tout est fait pour anticiper et préparer au mieux cet événement majeur pour la France sans mettre en difficulté les territoires. Nous savons que nous pouvons compter sur l’entière mobilisation des femmes et des hommes de la gendarmerie et de la police nationales. Nos forces de sécurité seront, n’en doutons pas, à la hauteur. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)
événements intervenus à annecy
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Guillaume Gontard. Madame la Première ministre, jeudi dernier, l’horreur a frappé Annecy et a étreint le cœur du pays tout entier : sept personnes, dont quatre enfants, ont été victimes d’une sauvagerie aussi absurde qu’incompréhensible.
À toutes les victimes, à leurs parents, à leurs familles, à leurs proches, à la ville d’Annecy meurtrie, à son maire, François Astorg, à la France sidérée, les écologistes apportent tout leur soutien.
Le pire de l’humanité côtoie souvent le meilleur. Nous admirons l’héroïsme des passants, qui ont tenté de s’interposer, et celui d’Henri, qui a mis l’assaillant en fuite. Nous saluons le professionnalisme des forces de l’ordre, qui ont interpellé rapidement l’individu, le sang-froid de celles et de ceux qui ont prodigué à temps les premiers soins. Nous remercions les médecins, qui ont travaillé sans relâche. Grâce au bouclier inestimable que constituent nos services publics, le pire a été évité.
Madame la Première ministre, alors que les vautours avaient quitté leur nid plus vite qu’à l’accoutumée, vous avez, avec la droiture que nous vous connaissons, appelé chacun à la dignité. Nous saluons ce propos et nous le faisons nôtre.
Face à l’horreur, le plus grand danger qui guette le corps social est la désunion.
Face à la folie, la colère et la haine, émotions compréhensibles, sont néanmoins parfaitement vaines.
La haine néonazie qui s’est déversée en toute impunité dans les rues d’Annecy appelle la condamnation la plus ferme de tous les républicains.
La haine raciste qui se déchaîne contre le maire d’Annecy appelle le soutien sans faille de toute la classe politique.
Nous appelons chacun et chacune à ne pas céder aux sirènes de la démagogie, à ignorer les solutions toutes faites, aussi ineptes qu’injustes. La haine, la peur et le rejet de l’autre ne protégeront jamais nos enfants, bien au contraire.
Ce sont la justice, la bienveillance, l’inclusion, la solidarité, la prise en charge de la maladie mentale, tout ce qui permet de lutter contre la misère et l’isolement, tout ce qui renforce la communauté humaine qui protégeront la Nation et ses enfants.
Madame la Première ministre, que comptez-vous faire pour assurer la tenue de cette ligne de dignité ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER, RDPI et UC.)
M. le président. La parole est à Mme la Première ministre.
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Monsieur le président Gontard, vous avez rappelé les faits. Le drame qui a touché Annecy jeudi dernier a profondément marqué notre communauté nationale.
Qu’il me soit permis, de nouveau, d’exprimer mon soutien aux victimes, ma solidarité envers les familles, les proches et les Annéciens.
Qu’il me soit permis, encore, car nous ne le faisons jamais assez, de rendre hommage à la police nationale, à la police municipale, aux secours, aux soignants et aux citoyens qui ont permis de stopper rapidement ce drame et de sauver les victimes. À l’heure qu’il est, leurs jours ne sont plus en danger.
Monsieur le président Gontard, l’enquête fera la lumière sur les circonstances précises de ce drame ; il ne m’appartient pas d’en anticiper les conclusions.
Certains ont tenté de qualifier les faits et leur auteur alors même que nous ne connaissions pas l’identité de ce dernier et que certaines victimes étaient entre la vie et la mort. Face à un tel drame, il n’y a pas de place pour des polémiques politiciennes.
Soyez assuré, monsieur le président, que je refuserai toujours les accusations hâtives et les tentatives de récupération. Elles ne sont pas dignes du drame que nous avons traversé.
Le ministre de l’intérieur et les forces de sécurité intérieure sont mobilisés. Nous sommes au travail pour protéger les Français. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
revenus des infirmières
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Daniel Chasseing. Le Président de la République veut renforcer la souveraineté de la France en matière de production de médicaments, c’est bien.
Il faut toutefois également améliorer les conditions de travail des infirmières libérales.
J’ai récemment rencontré en Corrèze les représentants d’un collectif de trois cent quarante infirmières. Tous les jours de la semaine, week-ends et jours fériés compris, ces professionnelles, passionnées par leur métier, se rendent au domicile de personnes dépendantes afin de leur prodiguer des soins chroniques.
Piliers du maintien à domicile, elles sont pourtant maltraitées en termes de revenus. L’indemnité forfaitaire de déplacement est passée de 2,30 euros à 2,50 euros en 2011 ; l’indemnité kilométrique de 0,35 euro à 0,50 euro en 2009 ; et les actes médicaux infirmiers de 3 euros à 3,15 euros en 2009. Depuis, aucune augmentation n’est intervenue !
Dans la nomenclature des actes, le bilan des soins infirmiers (BSI) a remplacé les actes infirmiers de soins (AIS). Il existe trois forfaits : le BSA pour une prise en charge légère, le BSB pour une prise en charge intermédiaire et le BSC pour une prise en charge lourde.
À titre d’exemple, une personne âgée de 93 ans, dépendante, mais non incontinente, est classée BSA. Dans son cas, trois passages à domicile sont prévus : le matin pour une toilette lourde, le midi pour la prise de médicaments et le soir pour une nouvelle toilette. Alors que l’infirmière percevait 36 euros dans le cadre des AIS, elle ne peut plus facturer aujourd’hui que le BSA, soit 13 euros.
Certaines infirmières sont obligées de refuser des soins. De nombreux actes sont hors nomenclature.
Madame la ministre, il faut conserver les infirmières. Elles sont les collaboratrices indispensables des médecins, les fantassins du maintien à domicile. Pourtant, elles n’ont bénéficié d’aucune revalorisation depuis 2011.
Comptez-vous prendre en compte leurs légitimes revendications ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains. – Mme Victoire Jasmin applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé. Monsieur le sénateur Chasseing, vous avez raison de souligner l’importance et le rôle primordial des infirmiers et infirmières libéraux dans notre système de santé. Il s’agit de la première profession de santé libérale en France métropolitaine. Elle est également la plus présente en zone rurale et dans les petites agglomérations.
François Braun et moi-même ne cessons de le réaffirmer : le Gouvernement soutient l’implication essentielle des infirmiers libéraux auprès des patients. À cet égard, nous accordons bien entendu une importance prioritaire à la question de leur rémunération, d’une part, parce qu’il est important de reconnaître financièrement l’étendue des services de santé qu’ils assurent, d’autre part, parce que, comme l’ensemble de nos concitoyens, les infirmiers diplômés d’État libéraux (Idel) sont touchés par les tensions sur le pouvoir d’achat qui affectent l’ensemble des secteurs économiques.
Face à cette situation, nous avons souhaité que les partenaires conventionnels mènent des négociations ciblées en vue d’apporter rapidement un soutien à l’activité de soins des Idel. Ces discussions se sont ouvertes avec l’assurance maladie. Les échanges de la semaine dernière se sont bien déroulés et devraient, nous l’espérons, aboutir rapidement à un accord. Nous ne pouvons que nous en féliciter.
Je sais par ailleurs que des débats relatifs au déploiement des bilans de soins infirmiers traversent la profession. J’ai eu l’occasion de suivre la tournée d’une infirmière libérale, avec qui j’ai discuté longuement de ce sujet.
Si le déploiement du BSI a été décalé, cette réforme du mode de financement des actes infirmiers demeure pertinente – je tiens à vous rassurer sur ce point, monsieur le sénateur –, et nous souhaitons la poursuivre rapidement. Il s’agit en effet d’un outil efficace, dont les infirmiers se sont d’ores et déjà saisis.
Une meilleure reconnaissance des Idel passe aussi par une meilleure connaissance de leurs compétences, de leur expertise et par l’ouverture d’un nouveau champ d’exercice autonome en exercice coordonné pour la prise en charge des plaies chroniques, le droit de prescription et d’administration de l’ensemble des vaccins ou encore l’expérimentation de la réalisation de certificat de décès.
Enfin, dans le cadre de l’examen de la proposition de loi visant à améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels, déposée par Frédéric Valletoux, le Gouvernement soutiendra un amendement visant à créer le statut d’infirmier référent.
Nous travaillons également à la définition de ce statut dans le cadre de l’ambitieux chantier de refondation du métier d’infirmier que nous avons ouvert le 26 mai dernier. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour la réplique.
M. Daniel Chasseing. Je vous remercie, madame la ministre, d’être à l’écoute de ces professionnelles. Elles font un travail formidable pour le maintien à domicile. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
activisme de l’association les soulèvements de la terre contre le maraîchage
M. le président. La parole est à Mme Laurence Garnier, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Laurence Garnier. Madame la Première ministre, dimanche dernier, des délinquants des Soulèvements de la Terre ont violé des propriétés privées, détruit des outils de travail, saccagé les cultures des maraîchers nantais. Ils ont arraché des cultures expérimentales, économes en eau, qui étaient précisément destinées à préparer la transition écologique du maraîchage.
Sur le site, et c’est encore plus grave, des élus ceints de leur écharpe tricolore étaient présents aux côtés de ces délinquants. Ils sont la honte de notre République. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur des travées des groupes RDSE, INDEP et RDPI.)
Le 25 mai, à Saint-Brévin-les-Pins, ils défilaient, la main sur le cœur, contre les violences d’extrême droite ; le 11 juin, à Pont-Saint-Martin, ils soutenaient les violences des écoterroristes d’extrême gauche.
Madame la Première ministre, vous êtes garante de l’ordre public et vous avez les moyens d’agir.
Les conseils des ministres se succèdent, mais la dissolution promise des Soulèvements de la Terre n’a toujours pas été prononcée. C’est pour quand ?
M. Roger Karoutchi. Très bien !
Mme Laurence Garnier. Vous devez aussi agir à l’encontre des élus présents et demander à votre ministre de l’intérieur et des outre-mer de les suspendre de leurs fonctions, comme le code général des collectivités territoriales l’y autorise.
M. David Assouline. Vous aussi, vous en voulez aux élus ?
Mme Laurence Garnier. L’écologie est en train de devenir le totem d’immunité d’une extrême gauche qui appelle de ses vœux la « zadisation » de notre pays. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et INDEP.)
Madame la Première ministre, vous avez cédé à Notre-Dame-des-Landes. Ne cédez plus face au totalitarisme vert. (Bravo ! et applaudissements sur les mêmes travées.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.
M. Olivier Véran, ministre délégué auprès de la Première ministre, chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. Madame la sénatrice Laurence Garnier, je vous remercie de votre question.
Le constat que vous faites est très largement partagé, indépendamment d’ailleurs des clivages politiques. (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
Quand on milite pour le climat, on n’arrache pas des salades et du muguet. Quand on milite pour la Terre, on ne harcèle pas et on n’humilie pas les agriculteurs, qui nous nourrissent et qui font vivre la terre.
Quand on prétend défendre une cause sociale, écologique, humaniste, on ne s’en prend pas aux personnes ni aux forces de l’ordre. On n’organise pas des manifestations interdites. Ce sont là des évidences.
Aussi, je vous confirme que la Première ministre et le Gouvernement ont la ferme intention de présenter en conseil des ministres le dossier de dissolution des Soulèvements de la Terre.
M. David Assouline. Et celle du GUD, c’est pour quand ?
M. Olivier Véran, ministre délégué. Le dossier, qui doit être impeccable, est en cours de constitution.
Vous avez également interrogé le Gouvernement sur la présence d’élus à ces manifestations. Il y a clairement quelque chose qui ne va pas. Un élu de la République, quel que soit son mandat, quel que soit le parti auquel il appartient, n’a pas à participer à une manifestation lorsqu’elle est interdite par la préfecture. C’est la base ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, UC et Les Républicains.)
Mme Sophie Primas. Très bien !
M. Olivier Véran, ministre délégué. Un élu de la République n’a pas à cautionner par sa présence des exactions, en l’occurrence contre des agriculteurs, et d’autant moins quand il prétend par ailleurs défendre ces derniers lorsqu’il est dans son territoire ou sa circonscription. Ça aussi, c’est la base, madame la sénatrice : nous sommes pleinement d’accord sur ce sujet. (Mme Laurence Rossignol s’exclame.)
Enfin, quand on arbore une écharpe tricolore, quand on est investi de la confiance de ses concitoyens, qu’on est porteur d’un mandat, qu’il soit local ou national, on doit tout simplement en être digne. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains. – Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. David Assouline. Cela ne vous rapportera aucune voix !
contours de france travail et conditionnalité du rsa
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Monique Lubin. Monsieur le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion, le rapport très bien documenté que vient de publier l’Observatoire des inégalités prouve, s’il le fallait encore, avec des arguments extrêmement sérieux, que la fracture sociale continue de s’aggraver dans notre pays.
Les ouvriers et les employés, qui représentent 20 % de la population, ne voient pas leurs conditions de vie s’améliorer. Pis, ils jugent que leurs enfants n’ont pas de perspectives d’avenir. En outre, ils subissent de plein fouet la réforme des retraites, qui les pénalisera en premier. Je n’y reviens pas.
Un projet de loi relatif au plein emploi nous sera prochainement soumis. Il était question que ce texte prévoie des heures de travail obligatoires pour les bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA). Cette mesure n’y figure plus. D’abord, elle était pour le moins incongrue, ensuite, elle était impossible à mettre en œuvre.
Il reste que selon nous, ce projet de loi servira une fois de plus à jeter l’opprobre sur les plus pauvres et à les stigmatiser. Penser qu’on pourra faire travailler des gens qui sont aujourd’hui les plus éloignés de l’emploi relève d’un raisonnement simpliste. Ceux qui sont aujourd’hui encore au RSA sont ceux qui sont les plus éloignés de l’emploi.
Monsieur le ministre, quelles mesures allez-vous prendre dans les prochains mois pour enfin vous attaquer à la fracture sociale, sans pour autant stigmatiser, comme toujours, les plus pauvres ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion. Madame la sénatrice Lubin, vous m’interrogez sur les difficultés liées à la fracture sociale. Parmi les causes de cette fracture figurent la précarité et le maintien dans la précarité, ainsi que l’exclusion et le maintien dans l’exclusion.
Selon un rapport publié au début de l’année 2022 par la Cour des comptes, lui aussi très bien documenté, sept ans après une première inscription au RSA, 42 % des bénéficiaires sont toujours inscrits au RSA, soit de manière continue, soit de manière récurrente, et seulement 33 % de ces mêmes inscrits ont retrouvé un emploi, lequel, souvent, n’est pas stable – et c’est un euphémisme.
Il nous faut agir. Le fait que quatre allocataires sur dix soient toujours au RSA au bout de sept ans signe une forme d’échec collectif.
C’est un échec en termes de formation. Nous y répondons avec le plan d’investissement dans les compétences (PIC). Cela prend du temps, mais c’est efficace.
C’est un échec de notre capacité à accompagner. Lorsque le revenu minimum d’insertion (RMI) a été créé en 1988, la loi prévoyait que 20 % des fonds devaient être consacrés à l’insertion et 80 % à l’allocation. Aujourd’hui, nous consacrons moins de 10 % des fonds à l’insertion. C’est aussi une explication.
Le Gouvernement souhaite investir de manière massive dans l’accompagnement, comme cela est préconisé dans le rapport que m’a remis le haut-commissaire à l’emploi et à l’engagement des entreprises au mois d’avril.
Nous souhaitons réformer l’accompagnement des allocataires du RSA, d’abord – je l’ai dit – en y consacrant des moyens, ensuite en prévoyant un diagnostic social et professionnel de chacun, ainsi qu’un suivi.
Aujourd’hui, près d’un allocataire sur cinq, soit 17 % des allocataires, ne bénéficie ni d’un suivi social ni d’un suivi professionnel. Nous souhaitons donc élaborer avec eux, en application de la loi du 1er décembre 1988 relative au revenu minimum d’insertion, un contrat d’engagement réciproque prévoyant des activités d’insertion, de formation et d’accompagnement. Il s’agit, non pas de bénévolat obligatoire ni de travail gratuit, mais d’accompagnement.
Obtiendrons-nous des résultats pour tout le monde ? Peut-être pas. Mais le pire serait de renoncer, car 1,95 million de foyers ne vivent aujourd’hui que du RSA,…
M. le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre.
M. Olivier Dussopt, ministre. … ce qui n’est pas une situation acceptable. C’est cela qui nourrit la fracture sociale que vous dénoncez, madame la sénatrice. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour la réplique.
Mme Monique Lubin. Monsieur le ministre, une fois n’est pas coutume, je partage votre point de vue. Le rapport de la Cour des comptes est parfaitement explicite. Nous savons que, dans une mesure assez importante, l’inclusion ne fonctionne pas.
Cela étant, le projet de loi dont nous aurons l’occasion de discuter contient certaines mesures dont je ne comprends pas bien l’utilité. En revanche, je n’ai pas vu qu’il prévoyait des moyens supplémentaires. Je crains qu’on ne confie l’insertion des bénéficiaires du RSA…
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.
Mme Monique Lubin. … à des personnes qui ne connaissent pas suffisamment ces publics. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)
zones à faibles émissions
M. le président. La parole est à M. Philippe Tabarot, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Tabarot. Ma question s’adresse à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
La loi du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités et la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets ont engagé la mise en place progressive de zones à faibles émissions (ZFE).
L’objectif est d’éviter 7 000 décès, qui, chaque année, sont directement liés aux oxydes d’azote, ces derniers provenant majoritairement du transport routier.
Pour autant, comme vous le savez, monsieur le ministre, ces mesures sont mal vécues par un grand nombre de nos concitoyens. Cette mauvaise perception est confirmée par une consultation sénatoriale : 86 % des plus de 50 000 personnes interrogées sont défavorables ou très défavorables aux ZFE.
Nos concitoyens voudraient bien, mais ne peuvent pas toujours se séparer de leur automobile, faute de moyens pour le faire ou de transports en commun adaptés.
C’est la raison pour laquelle la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a souhaité, après avoir procédé à une cinquantaine d’auditions, présenter un rapport d’information intitulé Zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) : sortir de l’impasse, que nous espérons réaliste, concret et de bon sens.
Au terme de ce travail, nous avons formulé un certain nombre de recommandations en réponse aux inquiétudes de nos concitoyens, auxquelles se mêlent parfois colère et rejet, dans le contexte que nous connaissons de baisse du pouvoir d’achat.
Aussi, monsieur le ministre, êtes-vous prêt à renforcer les dispositifs d’accompagnement pour les ménages modestes et ceux qui résident loin des ZFE, tels que le prêt à taux zéro ou le leasing social ?
Êtes-vous prêt à synchroniser le développement d’offres de transport en commun et à assouplir le calendrier de restriction de circulation, comme le Sénat le préconise ?
Êtes-vous prêt à rendre ce dispositif plus lisible et à engager une réelle planification de plus long terme, pour éviter d’envoyer 13 millions d’automobiles à la casse dans moins de deux ans ?
Êtes-vous prêt, tout simplement, à réconcilier qualité de l’air et acceptabilité sociale ?
Si tel n’est pas le cas, monsieur le ministre, il est à craindre que les tensions sociales que les gouvernements ont connues à la suite de la hausse du prix du carburant, de l’instauration des limitations de vitesse à quatre-vingts kilomètres par heure ou de la taxe carbone ne soient qu’un hors-d’œuvre ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur le sénateur Tabarot, avant toute chose, sachez que je suis prêt à vous recevoir, ainsi que le président Longeot, pour que vous puissiez me remettre le rapport sénatorial que vous venez d’évoquer, dont je salue l’existence et la temporalité.
Comme je vous l’ai indiqué ici même voilà quelques semaines, l’association France urbaine et les élus qui sont déjà concernés par une partie des ZFE, à commencer par Jean-Luc Moudenc, premier vice-président de France urbaine, et Anne-Marie Jean, vice-présidente de l’Eurométropole de Strasbourg, me remettront le 10 juillet prochain un rapport présentant tout ce qui, selon eux, ne va pas, tout ce qu’il convient d’améliorer et la manière de rendre plus facile, plus acceptable et plus soutenable l’ensemble du dispositif des ZFE.
J’ai lu dans des articles de presse des idées qui me semblent pertinentes.
Permettez-moi toutefois de vous livrer dès maintenant un ou deux éléments susceptibles de contribuer à apaiser les inquiétudes.
La loi ne prévoit nullement l’interdiction pour les véhicules Crit’Air 2 de circuler un jour dans les ZFE. Quant aux véhicules Crit’Air 3, il n’y a que dans les agglomérations qui connaîtraient un dépassement de seuils qu’ils ne pourront plus circuler. Le nombre d’agglomérations susceptibles de se trouver dans cette situation est à l’heure actuelle de cinq.
La loi prévoit qu’une partie des quarante-trois agglomérations concernées pourront bénéficier d’exonérations compte tenu de la qualité de leur air. Nous sommes sur le point de publier ces chiffres. De nombreuses agglomérations de plus de 150 000 habitants sont concernées.
Je vous rejoins sur de nombreux points, monsieur le sénateur. Si nous avions demandé aux Français s’ils étaient favorables à la diminution du nombre de décès provoqués par les particules fines et le dioxyde d’azote, ainsi qu’à l’augmentation de l’espérance de vie, 100 % d’entre eux auraient répondu oui. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Pour autant, ce n’est pas parce qu’un objectif est noble que les moyens qui permettent de l’atteindre ne doivent pas être étudiés de manière fine.
Vous indiquez, y compris dans votre rapport, que la pollution de l’air n’est pas due exclusivement au transport routier, et qu’une approche globale est nécessaire.
Pour notre part, notre objectif est simple : protéger la santé de nos concitoyens, mettre en œuvre une réforme concrète et assouplir le dispositif des ZFE en préservant l’essentiel, mais en évitant les crispations qui pourraient résulter d’une application aveugle.
accord européen sur le télétravail
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)