M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur. Cet amendement vise à prévoir que la convention stratégique pluriannuelle ne pourra pas avoir une durée inférieure à trois ans, afin de favoriser la stabilité de la société France Médias et de ses filiales et d’Arte France.
L’objectif de stabilité est très important, et nous pouvons effectivement nous interroger sur l’intérêt d’une convention stratégique pluriannuelle dont la durée serait limitée à deux ans, d’autant plus que la rédaction de l’article 53 prévoit déjà la possibilité de conclure une nouvelle convention après la nomination d’un nouveau président.
Il n’est pas inutile de rappeler par ailleurs que le COM d’Arte France est subordonné au contrat de groupe d’Arte-groupement européen d’intérêt économique (GEIE), dont la durée est habituellement de quatre ans.
La commission émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Rima Abdul-Malak, ministre. J’ai déjà exprimé ma position sur le besoin de visibilité des entreprises, d’où les contrats d’objectifs et de moyens proposés pour cinq ans.
Mais, étant défavorable à la création de la holding, je suis, par cohérence, défavorable à cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 32, présenté par M. Assouline, Mme S. Robert, MM. Kanner, Antiste, Chantrel, Lozach et Magner, Mme Monier, M. Stanzione, Mme Van Heghe et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Cet amendement tend à éviter un facteur d’instabilité supplémentaire au secteur de l’audiovisuel public. Il n’est pas opportun de fragiliser davantage ces sociétés en prévoyant une possibilité de renégociation de la convention stratégique pluriannuelle en cas de changement de président.
Cette possibilité pourrait notamment permettre de renégocier à la baisse les financements de la société. Or, nous le savons, l’audiovisuel public a besoin de stabilité pour mener à bien ses projets.
En poussant le raisonnement à l’extrême, l’on pourrait même imaginer que le dispositif puisse inciter à un changement de président, afin de pouvoir modifier une convention, et même rogner les financements de cette société. Il s’agit donc, pour nous, d’une disposition très dangereuse. Nous en demandons la suppression.
Je profite de l’occasion pour regretter une fois de plus l’irrecevabilité au titre de l’article 40 de la Constitution prononcée à l’encontre de notre amendement n° 36, jugé non compatible avec les termes de la loi organique relative aux lois de finances. Nous souhaitions en effet l’annexion des conventions aux projets de loi de programmation pluriannuelle des finances publiques, ce qui les aurait liées au vote de cette programmation, l’État se trouvant alors engagé davantage sur le financement des sociétés de l’audiovisuel public.
Le Parlement ne se prononcera plus sur la répartition de la ressource publique entre les sociétés, et cette répartition ne figurera plus dans les projets annuels de performances budgétaires, qui ne feront apparaître que la dotation globale octroyée à France Médias.
Un tel manque de transparence est inacceptable pour les législateurs que nous sommes, contraire à la règle d’annualité budgétaire, que le Conseil constitutionnel a érigée en principe constitutionnel, et dangereux pour le maintien de l’audiovisuel public dans son périmètre actuel.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur. Autant il peut être utile de prévoir une durée minimale de trois ans pour la convention stratégique pluriannuelle, autant il n’apparaît pas judicieux de supprimer la possibilité d’adopter une nouvelle convention en cas de changement de président. Le rôle du président est d’élaborer la stratégie de la société, et il ne semble pas opportun d’obliger un nouveau président à mettre en œuvre les priorités de son prédécesseur.
Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 33, présenté par M. Assouline, Mme S. Robert, MM. Kanner, Antiste, Chantrel, Lozach et Magner, Mme Monier, M. Stanzione, Mme Van Heghe et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La signature des conventions est précédée par des consultations publiques qui associent les différents acteurs du secteur de l’audiovisuel et du cinéma.
La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret.
Mme Hélène Conway-Mouret. Vous souhaitez que les conventions stratégiques pluriannuelles soient moins-disantes, sur le plan culturel, que les actuels COM, puisqu’elles ne comporteraient aucun engagement en faveur de la création ou de l’information. Nous vous l’avons d’ailleurs déjà fait remarquer.
Nous voulons au contraire que ces conventions soient plus ambitieuses, pour que le service public audiovisuel joue le rôle qui doit être le sien en faveur de la création et du soutien aux industries culturelles. Il doit continuer à être un moteur et à financer des productions et coproductions ambitieuses. Le monde du cinéma comme celui de la production audiovisuelle connaissent leurs besoins en matière de financement et d’exposition de leurs œuvres pour les prochaines années. Il nous semblerait donc pertinent d’associer leurs représentants à la négociation des conventions.
Cet amendement a pour objet de préparer la négociation et la rédaction des conventions stratégiques pluriannuelles dans une plus grande transparence, en vue d’une meilleure adéquation avec les objectifs et la réalité des milieux de l’information et de la création. Une fois n’est pas coutume, cet amendement rejoint les préoccupations exprimées par la commission Bataillon au travers de sa proposition n° 27.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur. Le remplacement des COM par des conventions stratégiques pluriannuelles vise à simplifier ces documents et à rendre leur préparation plus simple pour les sociétés, l’État et le régulateur. Si des consultations sont bien évidemment souhaitables, le présent amendement ne précise pas qui serait chargé de les organiser, à quel moment et pendant combien de temps. Ce peut être le rôle du Parlement de concourir à ces consultations dans des formes propres au travail parlementaire. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Si je me place dans la situation actuelle, des concertations ont lieu depuis plusieurs mois pour préparer les contrats d’objectifs et de moyens. Je vous ai d’ailleurs invités à plusieurs réunions. Plusieurs consultations ont été organisées. De nombreuses auditions ont également eu lieu, à l’Assemblée nationale comme au Sénat. Ce qui est proposé existe donc déjà.
Avis défavorable.
M. le président. L’amendement n° 34, présenté par M. Assouline, Mme S. Robert, MM. Kanner, Antiste, Chantrel, Lozach et Magner, Mme Monier, M. Stanzione, Mme Van Heghe et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 4
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
« …°Les engagements pris au titre de la diversité et l’innovation dans la création ;
« …°Les montants minimaux d’investissements de la société visée au I de l’article 44 dans la production d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles européennes et d’expression originale française, en pourcentage de ses recettes et en valeur absolue ;
« …°Les engagements permettant d’assurer la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, l’adaptation à destination des personnes sourdes ou malentendantes de la totalité des programmes de télévision diffusés, à l’exception des messages publicitaires, sous réserve des dérogations justifiées par les caractéristiques de certains programmes ;
« …°Les engagements permettant d’assurer la diffusion de programmes de télévision qui, par des dispositifs adaptés, sont accessibles aux personnes aveugles ou malvoyantes ;
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. J’ai déjà eu l’occasion de m’exprimer sur le sujet. Je suis plus que surpris de l’absence de projet ambitieux dans ce texte pour le secteur audiovisuel public, dont les seuls objectifs seraient à l’avenir budgétaires et comptables. Ce n’est pas sérieux !
Les COM actuels ont sans doute des défauts, mais la loi les encadre de manière à permettre la contribution des sociétés de l’audiovisuel public à l’industrie de programme, au développement d’une information de qualité, au maintien de la culture française, et à l’accessibilité des programmes à tous les publics, dont ceux qui souffrent de handicap.
Notre amendement tend donc à intégrer dans les mentions devant figurer dans les futures conventions stratégiques pluriannuelles celles qui doivent figurer actuellement dans les COM. Nous reprenons simplement, par conséquent, la rédaction actuelle de l’article 53 de la loi du 30 septembre 1986, afin de garantir dans ces conventions la vocation informative, éducative, culturelle et de divertissement en direction de tous les publics du secteur public de l’audiovisuel.
En l’état, la proposition de loi aura pour conséquences d’appauvrir l’industrie de programme, de faire reculer la francophonie et d’isoler les publics souffrant de handicap, les références n’étant plus mentionnées dans les conventions, pour laisser la place aux chiffres et à la comptabilité. Un projet de holding de cette sorte n’est franchement pas à visage humain !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur. Le remplacement des COM par des conventions stratégiques pluriannuelles vise précisément à éviter de multiplier les thèmes abordés, ce qui aurait inévitablement pour conséquence de transformer ces documents en catalogues de bonnes intentions sans véritable portée opérationnelle, comme c’est le cas aujourd’hui.
Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Même si je comprends, sur le fond, que vous souhaitiez réaffirmer ces enjeux, j’observe que les engagements au titre de la diversité et de l’innovation dans la création, ainsi que les montants minimums d’investissement que vous voulez insérer après l’alinéa 4 de l’article 5 figurent déjà dans la loi de 1986. Et les engagements en matière d’inclusion des personnes en situation de handicap se trouvent dans les cahiers des charges.
Avis défavorable.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 35 est présenté par M. Assouline, Mme S. Robert, MM. Kanner, Antiste, Chantrel, Lozach et Magner, Mme Monier, M. Stanzione, Mme Van Heghe et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 62 est présenté par M. Bacchi, Mme Brulin et M. Ouzoulias.
L’amendement n° 68 rectifié bis est présenté par MM. Dossus, Benarroche, Breuiller, Dantec, Fernique et Labbé et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 10
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Sylvie Robert, pour présenter l’amendement n° 35.
Mme Sylvie Robert. Cet amendement de repli vise à supprimer une disposition particulièrement dangereuse pour le service public, mais susceptible de se révéler assez fructueuse pour les services audiovisuels privés. Elle a été introduite en commission sur proposition du rapporteur, qui, sous couvert de « mieux distinguer et préserver l’offre de service public », a prévu que la convention stratégique pluriannuelle fixerait les recettes commerciales – publicité et parrainage – des différentes sociétés en fonction du niveau de ressources publiques prévues.
Le budget global des sociétés serait ainsi gelé et plafonné pour plusieurs années dès la rédaction de ces conventions, et ce sans avoir connaissance des aléas pouvant affecter l’économie pendant la durée de la convention.
En vertu de ce dispositif, seules les sociétés privées d’audiovisuel pourraient profiter d’un marché publicitaire soudainement en bonne santé, et non les sociétés publiques, malheureusement tenues par les conventions plafonnant leur budget global et restreignant leurs objectifs commerciaux.
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour présenter l’amendement n° 62.
Mme Céline Brulin. Cet amendement vise aussi à supprimer le plafonnement en valeur des recettes publicitaires et des parrainages, c’est-à-dire la possibilité pour les conventions stratégiques pluriannuelles de fixer les recettes publicitaires en fonction du niveau de ressources publiques.
Nous sommes évidemment favorables à un audiovisuel public sans publicité. Cela pourrait tout à fait constituer une différence notable avec les acteurs privés. Toutefois, pour cela, il faut financer l’audiovisuel public, trouver d’autres ressources et recettes, ce que ne prévoit absolument pas la présente proposition de loi.
Nous avons déjà eu l’expérience de l’arrêt de la publicité après vingt heures, qui devait être compensé, mais qui ne l’est finalement plus. La proposition de loi, qui prétend vouloir armer l’audiovisuel public face aux plateformes et aux acteurs privés – ces derniers disposent, nous le savons, de moyens considérables –, le désarme finalement, tout en lui demandant de développer de nouvelles offres ; nous avons notamment évoqué le numérique.
Non content de désarmer le secteur public, le texte renforce en outre la concurrence déloyale avec le privé, puisque les plateformes et l’ensemble des acteurs privés bénéficieront des recettes publicitaires qui n’iront plus vers l’audiovisuel public.
Ces dispositions sont très dangereuses pour l’audiovisuel public, qui a besoin de moyens substantiels face à la redoutable concurrence des autres acteurs du secteur.
M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour présenter l’amendement n° 68 rectifié bis.
M. Thomas Dossus. Cet amendement a pour objet de retirer du texte une mesure assez hypocrite qui a été votée en commission.
Lors de la discussion générale, le rapporteur a voulu nous rassurer en disant qu’il ne souhaitait pas réduire les recettes de l’audiovisuel public. Or l’article 5 de la proposition de loi, relatif aux conventions stratégiques pluriannuelles, a été amendé en commission par ses soins. Il a été ajouté une mention selon laquelle les recettes publicitaires et de parrainage devraient être plafonnées par lesdites conventions.
En clair : on vient plafonner, geler le budget de l’audiovisuel public, déjà fortement contraint, alors que nous avons adopté précédemment la suppression de la contribution à l’audiovisuel public.
Toutefois, comme si cela ne suffisait pas, comme s’il n’était pas suffisant de brider les ressources de l’audiovisuel public, le rapporteur a aussi fait adopter un amendement autorisant les chaînes privées à réaliser jusqu’à trois coupures publicitaires par film diffusé. D’un côté, on limite et on plafonne la publicité sur le service public ; de l’autre, on dérégule et on laisse faire pour le privé. Il y a là un « deux poids, deux mesures » assez révoltant. C’est assez hypocrite quand on regarde le texte dans sa globalité.
Je ne souhaite naturellement pas une extension de la publicité, dans quelque média que ce soit. Mes engagements sur d’autres textes sont constants. En revanche, je souhaite qu’au lieu de corseter les revenus de la télévision publique, notamment ceux qui sont issus de la publicité, on s’interroge d’abord sur la manière de créer des financements suffisants et durables. Supprimer la publicité, oui ! Mille fois oui ! Mais cela ne peut pas se faire avant d’avoir trouvé des financements durables et surtout pas en imposant des règles au service public en laissant le privé prendre la voie strictement inverse.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur. La fixation d’un plafond de recettes publicitaires et de parrainage paraît indispensable pour mettre un terme à la dérive actuelle, qui voit France Télévisions et Radio France recourir de plus en plus à la publicité et au parrainage, faute d’être capables de rationaliser leurs dépenses et de faire des choix stratégiques. Cette dérive est dangereuse – autant que l’hypocrisie ! – pour la spécificité du service public et fragilise l’ensemble du secteur, notamment les entreprises ne pouvant pas disposer de dotations publiques, qui demeurent considérables.
Il est à noter que le montant du plafond serait fixé dans la convention stratégique pluriannuelle. Ce plafond pourrait, dans un premier temps, consister à geler le montant des recettes publicitaires en attendant le développement d’autres ressources, liées notamment aux revenus générés par les investissements dans la production pour ce qui est de France Télévisions.
Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Avis favorable.
Si les recettes publicitaires constituent une ressource d’appoint pour le service public, elles n’en demeurent pas moins indispensables à son équilibre économique et à l’accomplissement de ses missions.
Comme nous avons pu le voir en 2009 au moment de la suppression de la publicité après vingt heures, les recettes perdues à cette occasion par France Télévisions n’ont pas été automatiquement dirigées vers les chaînes privées. Qui a capté le marché de la publicité depuis toutes ces années ? Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft, c’est-à-dire les Gafam ! D’ailleurs, ils continuent à le faire.
Le débat porte au fond surtout, pour les chaînes privées comme pour les chaînes publiques, sur la concurrence des Gafam. C’est le vrai sujet.
Plafonner les recettes publicitaires et de parrainage de France Télévisions risquerait de fragiliser la capacité de l’entreprise à maintenir son niveau actuel de soutien à la création audiovisuelle et cinématographique française et à mener à bien les investissements indispensables pour le renforcement des offres numériques.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. C’est un débat important. L’essentiel à mes yeux est de faire sauter des fausses vérités qui sont assénées au cours de nos discussions.
Le marché de la publicité et du parrainage de France Télévisions représente seulement 1 % du marché total de la publicité en France : 3 % du marché de la publicité télévisuelle, et 0,4 % du marché de la publicité digitale. C’est donc relativement marginal.
J’en viens à un élément important, d’ordre culturel. Notre rapporteur nous dit en substance que la différenciation du service public avec le secteur privé se joue après vingt heures, en raison de l’absence de publicité. Or cette différenciation existe nettement en dehors de ce créneau : là où l’on compte trois minutes de publicité sur France Télévisions, on compte quarante minutes sur TF1. Ce n’est pas le volume des parrainages recueillis sur France Télévisions qui peut faire de cette société une société « TF1 bis ».
Il faut faire attention à ce qui est en train d’être fait. On a déjà supprimé la publicité sur le service public de l’audiovisuel après vingt heures. Le secteur privé avait réclamé cette suppression, le gouvernement de Nicolas Sarkozy l’avait fait. Finalement, cette disposition n’a pas favorisé le secteur privé, mais internet et les Gafam. Or les compensations prévues à l’époque n’ont pas été au rendez-vous ; la taxe sur les services fournis par les opérateurs de communications électroniques (Toce) est désormais entièrement captée par le Gouvernement, et non plus reversée à France Télévisions à titre de compensation.
On peut continuer à rogner, et à rogner encore. À aucun moment, monsieur Hugonet, vous ne prévoyez de dispositif de compensation parallèlement au plafonnement des recettes publicitaires et des parrainages (Mme Marie-Noëlle Lienemann acquiesce.). Vous dites donc que France Télévisions aura dorénavant moins de recettes. Je ne comprends pas cette position.
Vous savez très bien aussi qu’imposer ainsi un plafonnement des recettes publicitaires à une société employant des personnels pour chercher ces ressources – car c’est un travail – revient en quelque sorte à dire à ces derniers qu’ils ne doivent pas trop se casser la tête à le faire, puisque ces recettes, étant plafonnées, seront rabotées s’ils en font trop. Ce faisant, on démobilise les équipes, qui risquent de ne même plus trouver les ressources acceptées.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.
Mme Catherine Morin-Desailly. Nous avons souvent eu le débat sur la publicité dans cet hémicycle.
Je me souviens encore de la proposition de loi qui a visé, avec succès, à supprimer la publicité commerciale dans les programmes jeunesse de la télévision publique. Les chaînes concernées y ont opposé une forte résistance – vous pensez bien ! –, mais nous y sommes arrivés. L’état d’esprit est bien de différencier le modèle économique de l’audiovisuel public, dont le financement doit être libéré des contraintes commerciales, et celui de l’audiovisuel privé.
Pour moi, le vrai scandale, c’est la suppression pure et simple de la Toce. Forcément que l’audiovisuel public a eu tendance à multiplier les parrainages et les tentatives de capter un peu de publicité : ce que le législateur avait voté n’a jamais été respecté !
Comme David Assouline, j’ai voté la création de cette taxe, destinée à compenser la suppression de la publicité après vingt heures. Or, à partir de 2009, son montant n’a cessé de diminuer. Elle a fini par disparaître totalement voilà deux ou trois ans. À présent, nous devons déterminer quelles ressources publiques, quelles compensations seront prévues au titre de la loi de finances pour la suppression de la publicité après vingt heures. Ni plus ni moins.
Madame la ministre, quels sont les engagements du Gouvernement au sujet de la Toce ? Certes, vous n’êtes pas responsable de la situation actuelle ; vous n’étiez pas ministre de la culture lorsque ces décisions ont été prises. Mais pourquoi a-t-on supprimé définitivement la Toce ?
Je suis scandalisée qu’une taxe affectée, décidée par le législateur et assortie d’un objectif précis, soit complètement détournée de son objet pour aller remplir le puits sans fond de Bercy. Point barre.
Je ne vous le cache pas, ayant voté sa création en connaissance de cause, alors que l’on supprimait la publicité après vingt heures sur France Télévisions, je ne suis pas très contente de ce qui s’est passé !
Mme Sylvie Robert. Merci !
M. David Assouline. Nous avons été trahis !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 35, 62 et 68 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 37, présenté par M. Assouline, Mme S. Robert, MM. Kanner, Antiste, Chantrel, Lozach et Magner, Mme Monier, M. Stanzione, Mme Van Heghe et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
avant l’examen du projet de loi de finances, le Parlement est informé de la répartition indicative
par les mots :
lors de l’examen de la loi de finances le Parlement, sur le rapport d’un membre de chacune des commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat ayant les pouvoirs de rapporteur spécial, approuve la répartition décrite par un projet annuel de performance
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Il s’agit d’un amendement de repli.
La répartition des ressources publiques entre les sociétés sous tutelle de la holding France Médias doit, comme c’est le cas aujourd’hui, être débattue et votée chaque année lors de l’examen du projet de loi de finances. De plus, afin d’être sécurisées, les dotations de chaque société doivent être individualisées dans un fascicule dédié de projet annuel de performance (PAP) présenté dans ce cadre.
Je l’ai rappelé en défendant un autre amendement : la règle d’annualité budgétaire a été érigée en principe à valeur constitutionnelle par le Conseil constitutionnel. Elle découle en effet de l’article 47 de la Constitution, qui régit le vote de la loi de finances par le Parlement dans les conditions fixées par la Lolf.
En votant cette proposition de loi, nous allons renier nos pouvoirs dans le seul objectif de faire plaisir à quelques acteurs du paysage audiovisuel privé, au détriment du service public audiovisuel et des téléspectateurs.
Monsieur le rapporteur, vous êtes parlementaire comme moi. Je ne comprends toujours pas pourquoi vous jugez inutile de préserver notre droit de connaître les crédits de chaque société audiovisuelle et de les voter. Pourquoi renoncer à ce gage de transparence ? Pourquoi nous déposséder de ce pouvoir de contrôle ? Je n’ai pas entendu de réponse ; je vous demande avec force de revenir sur ce point.
Nous savons très bien que la holding a peu de chances de voir le jour. Mais, au nom de la logique, je ne comprendrais pas que vous soyez défavorable à mon amendement d’appel.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur. En votant un tel amendement, on remettrait tout simplement en cause une compétence essentielle de la holding concernant la répartition des moyens en fonction des priorités.
Il est très important que les priorités comme les moyens fassent l’objet d’une programmation dans le cadre de la convention stratégique pluriannuelle et que les dirigeants conservent la souplesse nécessaire pour mettre en œuvre ces priorités. Cette absence de souplesse est l’une des causes principales des difficultés que connaissent à l’heure actuelle les sociétés de l’audiovisuel public. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Rima Abdul-Malak, ministre. L’organisation des dotations dans un tel cadre suppose un débat à part entière, que je me garderai bien d’engager.
Toutefois, ce que vient de dire M. le rapporteur montre qu’une telle holding prendra énormément de place et exigera des effectifs pléthoriques. Pour gérer le budget de tout l’audiovisuel public, il faudra bien plus que vingt ou trente personnes.
M. David Assouline. Au moins ça !
M. le président. L’amendement n° 1 rectifié, présenté par MM. Karoutchi, E. Blanc, Piednoir et Belin, Mmes Micouleau et Ventalon, M. Mandelli, Mme Deroche, M. Chatillon, Mme Puissat, M. Levi, Mmes Devésa, Guidez, Belrhiti, Bellurot et Lassarade, MM. Burgoa et B. Fournier, Mme M. Mercier, MM. Longeot, Tabarot et Bouchet, Mmes Dumont et V. Boyer, MM. Sautarel, D. Laurent et Daubresse, Mme Canayer, MM. Houpert et Regnard, Mme Estrosi Sassone, MM. Panunzi et Pointereau, Mme Garriaud-Maylam, MM. Cambon et Lefèvre, Mme Raimond-Pavero et M. Bazin, est ainsi libellé :
Alinéa 27
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone.