M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de l’écologie. Monsieur le sénateur Bigot, je partage votre constat sur les effets très importants de la pollution lumineuse sur la biodiversité. Vous savez que ce sujet me tient à cœur, d’autant plus que nous venons d’aboutir à un accord mondial lors de la COP 15, lequel sera repris dans la stratégie nationale biodiversité qui sera annoncée prochainement.
Les constats que vous faites et les questions que vous posez me permettent de détailler les actions que nous prévoyons d’intégrer dans la SNB pour lutter contre la pollution lumineuse et préserver notre biodiversité.
J’en préciserai quatre.
Nous prévoyons d’améliorer la connaissance des effets de cette pollution sur la biodiversité grâce à de nouveaux indicateurs et à l’enrichissement des bases de données, via notre observatoire ; d’éviter les impacts des équipements lumineux en améliorant le conseil des distributeurs auprès de leurs clients ; de développer les trames noires dans les territoires – je les ai évoquées précédemment, je n’y reviens pas – ; de mieux cibler une partie des contrôles sur les espaces les plus sensibles pour la biodiversité.
Comme vous, je salue ce que fait la ville de Saumur depuis maintenant plusieurs années, alors qu’on parlait assez peu de ce sujet jusqu’à présent. Le fonds vert accompagne les collectivités dans leurs prises d’initiatives. Cela fonctionne très bien. De nombreux projets portent sur l’éclairage public, tant mieux. Il faut évidemment continuer dans ce sens. Nous avons bon espoir, Christophe Béchu et moi, de pérenniser le fonds vert afin de pouvoir continuer d’accompagner les collectivités.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot.
M. Jean-François Longeot. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la pollution est multifacettes. Les déchets, le carbone et les transports polluent, mais la lumière aussi. Or la pollution lumineuse est l’une des grandes oubliées des politiques environnementales. Si vous me passez l’expression, nous ouvrons à peine les yeux sur ce sujet.
C’est pourquoi la note que vient de publier l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques sur ce phénomène est si précieuse. Je tiens en particulier à saluer le travail de ma collègue du Doubs, Annick Jacquemet, qui en est l’auteur. C’est la première fois que le Parlement s’intéresse à ce problème, qu’il en établit les caractéristiques, les effets, et qu’il avance des solutions pour y remédier.
Parmi les outils dont nous disposons aujourd’hui à l’échelle locale pour passer « d’un éclairage systématique à une adaptation fine de celui-ci selon le contexte », pour reprendre les termes de la note de l’Opecst, figure le fonds vert. Il a été officiellement ouvert au mois de janvier dernier sous forme d’un guichet unique pour les collectivités. Doté de 2 milliards d’euros, il a vocation à subventionner à hauteur de 40 % les projets de transition écologique des collectivités. Parmi ces projets de transition figure la rénovation des éclairages publics.
Une remise des prix des premiers lauréats a eu lieu la semaine dernière. Les résultats sont encourageants : au total, le coût des projets déposés depuis le mois de janvier a atteint l’enveloppe dédiée de 2 milliards d’euros de subventions.
D’après nos informations, et vous pourrez nous le confirmer, madame la secrétaire d’État, l’éligibilité des projets est en cours d’étude. Beaucoup d’entre eux porteraient sur l’éclairage public. Combien ? En quoi consistent ces projets ? Vont-ils servir à lutter contre la pollution lumineuse, objet du présent débat ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de l’écologie. Monsieur le sénateur Longeot, annoncé par la Première ministre le 27 août dernier, le fonds vert doit permettre le déploiement d’actions territoriales de transition écologique. Il a été ouvert officiellement au mois de janvier, sous le pilotage des préfets et sous forme de guichet unique pour que la démarche des collectivités soit la plus simple possible.
Le succès est réel puisque, à l’heure où je vous parle, environ 7 000 dossiers ont été déposés et l’enveloppe dédiée de 2 milliards d’euros a été atteinte. Les dossiers sont en cours d’étude. Cela ne signifie pas que les 2 milliards d’euros ont été dépensés. J’y insiste, car cela signifie que vous pouvez continuer à inciter les territoires à déposer des projets.
Les projets de rénovation énergétique et d’éclairage public ont connu un succès rapide. C’est une bonne nouvelle pour le sujet qui nous occupe aujourd’hui. L’accélération de la rénovation des parcs de luminaires d’éclairage public est en effet un moyen de lutter contre la pollution lumineuse.
Le fonds vert s’applique à l’éclairage public extérieur sécurisant les cheminements des personnes. Il permet de financer des études comme un diagnostic territorial, une stratégie d’extinction en cours de nuit ou encore la création d’une trame noire.
Ces subventions permettent à la fois de financer de l’ingénierie et surtout des investissements de modernisation du parc de luminaires. L’objectif est de diminuer le nombre de points lumineux et leur puissance. Ces subventions sont un véritable levier pour accompagner les collectivités dans la dépollution lumineuse.
Aujourd’hui, 2 000 projets portent sur le renouvellement des parcs d’éclairage public. Ils représentent 28 % des projets déposés dans le cadre du fonds vert. Par ailleurs, je peux d’ores et déjà vous dire, compte tenu du nombre de dossiers qui ont été déposés, que nous atteindrons l’objectif que nous nous étions fixé de rénovation de 10 % du parc d’éclairage.
Je profite d’ailleurs de votre question pour vous rappeler que 150 millions d’euros du fonds vert sont destinés à la préservation de la biodiversité. Cette enveloppe, en revanche, n’est pas atteinte. Je vous encourage donc à communiquer au maximum sur cette possibilité de subvention auprès des collectivités que vous représentez.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Chevrollier. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Guillaume Chevrollier. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, effondrement de la biodiversité, destruction des populations d’oiseaux et d’insectes, halo lumineux au-dessus des villes, altération du sommeil, augmentation des risques cardio-vasculaires et de cancer : on ne compte plus aujourd’hui les effets nocifs de la pollution lumineuse sur la santé du vivant et sur notre environnement, effets d’ailleurs très bien documentés dans de nombreuses études scientifiques.
La croissance démographique, doublée d’une forte urbanisation, a conduit à l’explosion des émissions lumineuses, notamment du fait de l’éclairage public. Non seulement cet éclairage artificiel nocturne participe au dérèglement climatique en perturbant les écosystèmes, mais il contribue au gaspillage énergétique. Selon l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), l’éclairage public correspond à 41 % de la consommation d’électricité des communes et émet annuellement 670 000 tonnes de CO2.
Afin de lutter contre ces nuisances lumineuses, la France s’est dotée d’une réglementation « ambitieuse », selon le terme de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques dans une note datant de janvier 2023. Cette réglementation fait notamment du maire l’autorité compétente pour s’assurer du respect des dispositions de sobriété de l’éclairage public nocturne. Je redis ici combien l’action à l’échelle communale est importante pour agir efficacement contre la pollution lumineuse.
Dans mon département de la Mayenne, les élus sont conscients de ces enjeux et prennent des engagements forts. À titre d’exemple, la commune de La Bazouge-des-Alleux a reçu le label « Villes et villages étoilés », créé par l’Association nationale pour la protection du ciel et de l’environnement nocturnes et lutte activement pour la qualité de la nuit.
De nombreuses communes de mon territoire, à l’instar de Montjean, se lancent dans la révision de leur éclairage public, en partenariat avec le syndicat Territoire d’énergie Mayenne. D’ici à 2026, tous les luminaires qui éclairent totalement ou partiellement vers le ciel doivent être remplacés, mâts et câbles compris pour les plus anciens. Pour la Mayenne, le coût de l’opération s’élève à plusieurs millions d’euros.
À travers le fonds vert, l’État peut accompagner utilement un tel partenariat entre une commune et le syndicat d’énergie. Il est néanmoins nécessaire d’améliorer les critères d’éligibilité à ce financement et de rendre plus fluide la coordination entre les différentes parties prenantes.
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Guillaume Chevrollier. Je termine, monsieur le président.
Madame la secrétaire d’État, au regard de ces initiatives locales et d’une réglementation qui demeure incomplète, comment le Gouvernement compte-t-il accompagner encore plus nos territoires ruraux en matière de lutte contre la pollution lumineuse ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de l’écologie. Monsieur le sénateur Chevrollier, je l’ai dit précédemment, nous souhaitons mieux accompagner les collectivités dans leur lutte contre les pollutions lumineuses, grâce au fonds vert pour le volet relatif au financement et à la forfaitisation de l’amende pour le volet relatif à la facilitation du contrôle.
Accompagner les collectivités, c’est aussi les soutenir dans leur ingénierie. L’information et la formation des élus seront un chantier que le ministère devra ouvrir avec la révision de l’arrêté du 27 décembre 2018. En complément, les professionnels de l’éclairage, les services de l’État et la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies pourront être des forces de proposition pour aider les collectivités à faire le bon choix technique.
Pour la mise en avant des collectivités vertueuses, je tiens à rappeler le soutien que le ministère accorde à l’Association nationale de protection du ciel et de l’environnement nocturnes, en particulier pour son concours Villes et villages étoilés, que vous avez cité, lequel a récemment été ouvert aux territoires. De même, le ministère, au travers des parcs nationaux et des parcs naturels régionaux, soutient les territoires et les aide à porter des projets de réserve internationale de ciel étoilé.
M. le président. La parole est à Mme Martine Filleul.
Mme Martine Filleul. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les élus locaux se mobilisent déjà depuis plusieurs années contre la pollution lumineuse. Leurs approches sont multiples.
Dans mon département, Douai a mis en place une trame sombre. La lumière est réduite de 90 % la nuit et des détecteurs de présence ont été installés pour les humains.
Lille, afin de protéger ses corridors écologiques, remplace les anciennes LED à lumière blanche ou bleue, qui représentent une catastrophe pour la biodiversité, par de nouvelles LED ambrées, dont la longueur d’onde ne gêne plus les espèces animales. Les résultats sont systématiquement éloquents.
Les effets néfastes observés sur les espèces animales sont également largement documentés sur l’être humain.
Comme le souligne l’Opecst dans son rapport, ces effets incluent des altérations du sommeil, des troubles de la mémoire, de l’humeur, de l’attention, une augmentation des risques cardio-vasculaires, de cancer, de diabète ou d’obésité.
Œuvrer pour une adaptation de l’éclairage privé et public vers des LED de nouvelle génération, c’est agir pour la biodiversité et directement pour la santé de nos concitoyens.
Madame la secrétaire d’État, quelles orientations le Gouvernement entend-il prendre pour la santé de nos concitoyens ? Allez-vous compléter la législation pour lutter contre les risques de phototoxicité de certaines sources lumineuses ? L’État a-t-il répertorié les bonnes pratiques mises en place par les élus locaux dans les territoires ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de l’écologie. Madame la sénatrice Filleul, je vous remercie pour le partage des bonnes pratiques. Vous avez cité certaines communes qui participent à la dépollution lumineuse. Il est toujours très intéressant de pouvoir s’en inspirer.
Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, des collectivités mettent en place un certain nombre de dispositifs. Il est très intéressant que l’équilibre des éclairages fasse l’objet d’une concertation avec les habitants de la ville, afin de prendre en compte au mieux leur usage de l’espace public.
Vous avez raison, nous devons aller plus loin concernant les mesures que nous demandons aux différents acteurs. À ce titre, je me réjouis de la signature, le 27 mars dernier, de la charte d’engagement des acteurs du transport avec le ministère de la transition énergétique et celui de la transition écologique et de la cohésion des territoires pour tendre vers plus de sobriété énergétique, grâce à des mesures d’extinction des panneaux lumineux.
Je l’ai dit également, je souhaite que nous allions plus loin en renforçant l’extinction des bâtiments non résidentiels. Actuellement, l’heure d’extinction s’étend d’une heure à sept heures du matin. Je souhaite étendre cette plage horaire, qui débuterait, par exemple, une heure après la fin de l’activité et irait jusqu’à une heure avant sa reprise.
Je souhaite aussi que nous réfléchissions à la diminution des nuisances lumineuses issues des serres et des verrières, telles que les serres agricoles. Les éclairages excessifs et non directifs de certaines serres ont des conséquences importantes sur la faune, les insectes, les oiseaux, les chauves-souris, mais aussi sur le paysage nocturne. On parle de ciel rouge et jaune.
Je pense que nous pouvons aussi travailler sur la diminution des puissances lumineuses des stades avant et après les événements sportifs.
Toutes ces mesures ne nécessitent pas encore un véhicule législatif. On peut agir assez rapidement par voie réglementaire.
Je n’oublie pas ce qu’a dit Mme la rapporteure, notamment sur la lumière bleue ; un rapport a été rendu sur son caractère néfaste pour les enfants. Nous pouvons mettre en œuvre ensemble un certain nombre de mesures. Réfléchissons-y en nous appuyant sur le rapport de l’Office, mais aussi sur les mesures que vous pourriez proposer, madame Filleul.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Richer.
Mme Marie-Pierre Richer. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je pose une question au nom de ma collègue Marta de Cidrac, à laquelle je m’associe.
On l’ignore, mais pour près de 60 % des Européens et 80 % des Américains, il est impossible d’observer la Voie lactée. Environ un tiers de l’humanité est victime de ce que l’on appelle la pollution lumineuse, qui affecte également la biodiversité sur près de 20 % des terres émergées.
De 1990 à 2010, les zones illuminées ont progressé de 6 % par an. Le rythme reste aujourd’hui soutenu, à peine tempéré par les récentes prises de conscience.
Inéluctablement, nos espaces de vie sont gagnés par la pollution lumineuse, générant stress, anxiété et perturbation du sommeil.
Ce phénomène exerce aussi une forte pression sur la biodiversité et a des conséquences multiples, dont certaines sont encore mal évaluées. Une telle perturbation du vivant ne sera pas, à terme, sans conséquence. Je pense notamment aux insectes, essentiels au bon maintien des réseaux trophiques.
Dans de nombreuses communes, notamment celles de mon territoire, des mesures ont été prises, comme l’extinction de l’éclairage public aux heures creuses de la nuit. À la maîtrise de la consommation énergétique préconisée dans le plan climat-air-énergie territorial (PCAET) s’ajoute donc la protection de la biodiversité.
Madame la secrétaire d’État, il nous faudra malgré tout aller plus loin pour atteindre un équilibre entre préservation de la biodiversité et progression des zones illuminées.
Quelle feuille de route le Gouvernement compte-t-il suivre pour y faire face et dans quels délais ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de l’écologie. Madame la sénatrice Richer, l’équilibre entre préservation de la biodiversité et progression des zones illuminées réside dans la multiplicité des solutions et dans le développement des technologies.
La lutte contre les nuisances lumineuses peut en effet prendre diverses formes, comme l’extinction totale en cœur de nuit, à l’instar de ce qui se fait dans l’intégralité des communes du parc naturel régional du Gâtinais français. Elle peut aussi passer par le pilotage intelligent de l’éclairage, qui a été testé à Paris, à Bordeaux ou à Toulouse. Les solutions doivent être étudiées au cas par cas, selon la volonté locale, que ce soit pour la création de trames noires ou la mise en œuvre de mesures de réduction du halo lumineux des grandes métropoles. Les solutions techniques existent et les LED ont l’avantage de permettre une modulation de leur puissance et de pouvoir être gérées à distance.
Aujourd’hui, les collectivités, qu’elles soient rurales ou urbaines, peuvent trouver une solution adaptée.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Richer, pour la réplique.
Mme Marie-Pierre Richer. Madame la secrétaire d’État, on disait autrefois avec admiration que New York était la ville qui ne dort jamais. Aujourd’hui, on doit tendre vers l’inverse. À cet égard, les maires sont des acteurs essentiels.
J’ai bien écouté les mesures que vous avez décrites. J’espère sincèrement qu’elles produiront leurs effets. La protection du vivant et notre qualité de vie sont à ce prix, pour les générations actuelles et à venir.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Madame la secrétaire d’État, vous avez évoqué la charte d’engagement des acteurs du transport. Cela m’a fait penser à un article de Stéphane Foucart paru dans le journal Le Monde, qui m’a beaucoup impressionné. Je pense qu’il ne vous a pas échappé.
Il dit que cette charte prévoit qu’il faut « équiper […] progressivement les dispositifs de publicités lumineuses […] afin que ceux-ci puissent être éteints. », qu’il faut « mettre en œuvre, lors de la fermeture des gares, stations ou aéroports […], l’extinction ou la mise en veille des publicités lumineuses équipées du dispositif le permettant. » Si le dispositif ne le permet pas, il ne se passe rien !
Enfin, cette charte contient un chef-d’œuvre, dont je félicite l’auteur, que vous connaissez peut-être, madame la secrétaire d’État. On y parle d’« établir une stratégie “sobriété” fondée sur des trajectoires de réduction des consommations électriques et d’émissions carbone du parc des publicités lumineuses en tenant compte des caractéristiques, usages et besoins des univers de transports selon leurs périmètres à la date de signature de la présente charte ». Tout cela n’est pas très clair ! Le moins que l’on puisse dire, c’est que c’est vague et flou.
Madame la secrétaire d’État, comptez-vous muscler un peu tout cela ? J’ai entendu ce que vous avez dit précédemment, mais il ne faut pas en rester au stade des intentions.
Enfin, que comptez-vous faire particulièrement pour les publicités situées à l’entrée des villes ? Les entrées de ville sont un gros problème urbanistique. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elles ne sont pas très urbaines. On a créé des catastrophes dans toutes nos agglomérations. Les publicités sont énormes, on ne voit qu’elles, toutes les heures de la soirée et même de la nuit. Que comptez-vous faire pour mettre fin à cette pollution totalement inutile et préjudiciable ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de l’écologie. Monsieur le sénateur Sueur, l’article du Monde sur la charte d’engagement des acteurs du transport, qui a été signée récemment et dont l’initiative revient à Agnès Pannier-Runacher et à Clément Beaune, ne m’a évidemment pas échappé.
Pour ma part, j’ai été très claire. J’ai rappelé que les opérateurs se sont engagés à éteindre 100 % de leurs panneaux lumineux dès la fermeture des gares, des aéroports et des métros d’ici au 1er janvier 2024. Ils s’engagent également à établir une stratégie de sobriété de la gestion de leur parc de panneaux lumineux. La RATP s’est ainsi engagée à réduire sa consommation électrique de 35 % d’ici à 2026, la SNCF de 45 % d’ici à 2031 et le groupe Aéroports de Paris de 50 % d’ici à 2030.
Au-delà des incitations ou même des obligations légales, il faut faire confiance à des opérateurs aussi importants en France, qui ont pris des engagements. De même, il faut faire confiance à la parole politique, que je viens confirmer ici, au Sénat, dans le cadre de ce débat. La parole politique peut avoir du poids.
On verra si ces engagements seront suivis d’effets. Je suis très curieuse de voir comment la RATP va réduire sa consommation électrique d’ici à 2026. On va suivre cela de près. Je le répète, il faut faire confiance à ces opérateurs importants, qui ont pignon sur rue, et avec qui nous avons des discussions de façon très régulière.
Vous m’avez enfin interrogée sur la publicité lumineuse dans les entrées de ville. Sachez que des évolutions réglementaires sont en cours d’élaboration. Ainsi, un arrêté fixera les normes techniques applicables aux publicités lumineuses. Un décret permettra de limiter le format des panneaux d’affichage extérieurs. Son objet est plus large que la seule publicité lumineuse, car il s’appliquera aussi à la publicité non lumineuse. Je vais faire en sorte qu’il soit publié rapidement.
M. le président. La parole est à Mme Else Joseph. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Else Joseph. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, c’est un cauchemar : je ne vois plus la Voie lactée et je ne peux plus méditer sous le ciel étoilé, comme le faisait Kant. La pollution lumineuse nous prive de certains trésors de la vue, qui sont en fait ceux de l’esprit.
La lumière artificielle nocturne s’est beaucoup répandue. Elle ne cesse par ailleurs d’augmenter dans le monde.
La lutte contre la pollution lumineuse est une nécessité pour la santé, mais aussi pour faire face à la hausse des coûts de l’énergie, aussi bien pour les collectivités que pour les individus. Cette pollution affecte nos écosystèmes ; elle perturbe les équilibres écologiques, en entraînant, par exemple, la perte d’orientation des oiseaux migrateurs.
Les nouvelles technologies ont apporté des solutions. Il existe désormais des éclairages intelligents, mais aussi, depuis quelques années, des luminaires qui illuminent non plus le ciel, mais la rue, sans avoir d’effet sur l’environnement naturel.
Beaucoup a été fait, mais beaucoup reste à faire. Ne tombons pas dans un autre extrême en passant de la pollution lumineuse à l’obscurité intégrale. La lumière, c’est la maîtrise par l’homme de son environnement.
La lutte contre la pollution lumineuse doit être un réel progrès collectif et non une énième démarche punitive, un combat au service de tous et non une futile initiative qui oppose les uns aux autres.
Madame la secrétaire d’État, beaucoup de questions ont été posées, le sujet de notre débat étant très large. Le combat contre la pollution lumineuse requiert de nombreuses actions et surtout un véritable pilotage.
Des expérimentations ont eu lieu dans certaines zones protégées. Quelles leçons peut-on en tirer ? Doit-on les généraliser ? Qu’en est-il de la cartographie de ces expérimentations ?
Que comptez-vous faire pour accompagner les collectivités locales dans la lutte contre la pollution lumineuse et les aider à choisir les techniques les plus efficaces ? Nos communes doivent être aidées en matière d’ingénierie et d’investissements. Elles doivent aussi bénéficier de réelles compensations.
Enfin, comment mieux protéger l’environnement nocturne ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de l’écologie. Madame la sénatrice Joseph, dans le temps qui m’est imparti pour vous répondre, je me focaliserai sur votre question concernant les expérimentations.
Les aires protégées sont d’excellents territoires pour expérimenter de nouvelles approches en matière d’éclairage. Ces espaces présentent souvent des enjeux de préservation de la biodiversité nocturne et bénéficient d’instances de concertation qui permettent d’avancer collectivement sur ces sujets.
On peut citer, par exemple, l’action des parcs nationaux, comme le parc national des Cévennes, évoqué par Mme la sénatrice Pantel voilà quelques instants. C’est un exemple de mobilisation d’acteurs multiples : des équipes du parc national, des élus, des habitants, des partenaires institutionnels, mais également des syndicats d’électricité de la Lozère et du Gard.
Les parcs naturels régionaux sont aussi des territoires actifs et précurseurs. Ils peuvent réduire l’éclairage public nocturne, comme l’a fait le parc naturel régional du Gâtinais français. Plusieurs actions axées sur la maîtrise de l’énergie ont conduit notamment à l’extinction de l’éclairage la nuit dans la majorité des communes du parc.
Les parcs peuvent également rénover le matériel vétuste d’éclairage public en finançant des projets innovants alliant sobriété énergétique, réduction de la pollution lumineuse et de ses conséquences sur la biodiversité. C’est ce qu’ont fait le parc naturel régional des Causses du Quercy et le parc naturel régional des Préalpes d’Azur. Je souhaite que nous généralisions cette démarche dans tous les parcs nationaux et régionaux. J’en ferai part à leurs responsables.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Marc Laménie. Je remercie tout d’abord l’Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques et Mme la rapporteure d’avoir inscrit la question de la pollution lumineuse à l’ordre du jour de nos travaux. Ce débat est de qualité.
Beaucoup de sujets, qui nous intéressent tous, ont déjà été abordés, je n’y reviens pas. Je m’attarderai seulement sur le volet concernant les collectivités territoriales.
Mon département, les Ardennes, qui est également celui d’Else Joseph, compte 449 communes, dont beaucoup de villages et de bourgs. Beaucoup ont déjà mis en œuvre l’extinction nocturne de l’éclairage public, d’autres conservent l’éclairage toute la nuit, mais cela a un coût.
Vous avez évoqué le financement des mesures d’économies d’énergie, le rôle des fédérations départementales, des syndicats d’électrification. Les collectivités s’engagent et investissent pour réaliser des économies. C’est important.
Outre le fonds vert, il existe différents dispositifs de financement. Je pense notamment à la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) et à la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL), mais il y en a d’autres. Comment ces dispositifs s’articulent-ils entre eux ?