Je l’ai voté en responsabilité, et vous aussi. Cet esprit de responsabilité vous a désormais échappé ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour la réplique.
Mme Corinne Féret. Arrêtez, monsieur le ministre, de vouloir noyer le poisson ! Arrêtez avec les contrevérités, cela suffit ! Les Français en ont assez. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Vous avez fait le choix d’accentuer la crise démocratique et sociale, et nous n’avons aucune leçon à recevoir de vous. La sagesse aurait été d’écouter les Français. On ne peut pas mettre les gens autour de la table et annoncer d’emblée que l’on continue à faire comme si de rien n’était. Le dialogue social ne fonctionne pas ainsi !
Encourager les fractures et les tensions dans un pays au bord de l’implosion ne peut que mener au pire. Plus que jamais, il importe d’entendre et même de consulter les Français. Nous avons proposé d’organiser un référendum d’initiative populaire.
M. le président. Il faut conclure !
Mme Corinne Féret. Donner la parole au peuple serait véritablement une voie d’apaisement ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
service national universel
M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Michel Canévet applaudit également.)
M. Henri Cabanel. Ma question s’adresse à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre des armées et du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, chargée de la jeunesse et du service national universel.
Dans un contexte de défiance exacerbée envers les élus, il est urgent de resserrer les liens avec les citoyens. Le dialogue en amont des projets et la coconstruction sont nécessaires. Mais il est également urgent de réinventer une culture citoyenne, notamment pour les jeunes qui ne se sentent ni légitimes, ni écoutés, ni compris. Les chiffres de l’abstention en témoignent.
J’ai été le rapporteur d’une mission d’information portant sur ce sujet, présidée par mon collègue Stéphane Piednoir. Plusieurs outils existent : la journée défense et citoyenneté, l’enseignement moral et civique, le service civique et celui dont on parle beaucoup depuis plusieurs mois, le service national universel (SNU). Généralisé ? Obligatoire ? Abandonné ? Remis à plus tard ? Tout a été dit.
Le constat concernant ces outils est qu’il faut les étudier de façon transversale, car ils sont interdépendants.
De nombreuses informations ont été données sur le SNU, dont certaines étaient fausses, comme la militarisation des jeunes.
Le SNU généralisé suscite des questions portant sur la compétence des encadrants et sur les lieux d’accueil. Il est donc nécessaire de coconstruire avec l’ensemble des parties prenantes, notamment les jeunes.
Le service civique ayant fait ses preuves, il doit être poursuivi. Sur un temps long, il permet un réel engagement envers la société, avec à la clé un CV et une ouverture sur le monde professionnel.
Madame la secrétaire d’État, comment envisagez-vous l’avenir de ces dispositifs ? Et quid de la généralisation du SNU ? Un débat parlementaire a été préconisé par notre mission d’information. L’envisagez-vous, et dans quel délai ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – MM. François Patriat et Xavier Iacovelli applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la jeunesse et du service national universel.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d’État auprès du ministre des armées et du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, chargée de la jeunesse et du service national universel. Monsieur le sénateur Cabanel, vous avez mille fois raison ! Le rapport qui comportait plus de vingt-trois mesures est tout à fait juste. Aujourd’hui, nous manquons d’une culture citoyenne renforcée, qui se construit en toute transversalité. (Exclamations sur des travées des groupes SER et GEST.)
M. David Assouline. Et qui se déconstruit !
Mme Laurence Rossignol. Elle s’est dégradée ! On s’essuie les pieds sur les Français, et ensuite…
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d’État. Monsieur le sénateur, le rapport de la mission d’information présidée par M. Stéphane Piednoir, complété par le rapport d’information de M. Éric Jeansannetas portant sur le service national universel, apporte un certain nombre de réponses.
La culture citoyenne, c’est d’abord une culture commune. Ce sont des repères communs, c’est une aspiration à la nation commune. Cela commence à l’école avec l’éducation morale et civique. Cela passe, ensuite, par des classes découvertes, par la reconnaissance de la démocratie scolaire, par la formation de nos enseignants, par la redécouverte des chantiers de patrimoine, mais aussi par la relation que nous avons avec nos élus.
Monsieur le sénateur, vous avez absolument raison de souligner que nos jeunes se détournent des urnes. Lors des dernières élections régionales, neuf sur dix d’entre eux ne se sont pas déplacés pour voter. (Mme Laurence Rossignol et M. Bernard Jomier s’exclament.) Il est plus important que jamais de prendre des mesures pour y remédier.
À cette fin, nous disposons déjà des conseils de jeunesse et des conseils municipaux de jeunes. Demain, le service national universel sera un moment pivot, mais non exclusif, qui complétera la journée Défense et mémoire.
Avec ma collègue Patricia Mirallès, je travaille sur les questions mémorielles, afin de renforcer la force mentale et morale de notre jeunesse. (Mme Éliane Assassi et M. Pierre Laurent protestent.) Il est essentiel de lui redonner confiance en nos institutions, en lui proposant des temps de rencontre et en favorisant une mixité sociale et territoriale.
Le SNU, en permettant aux jeunes ultramarins de venir en métropole…
M. David Assouline. Comme s’ils ne venaient pas auparavant !
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d’État. … et aux jeunes métropolitains de découvrir l’outre-mer, contribue à cet objectif.
De même, il encourage les jeunes des territoires ruraux à découvrir les zones urbaines, et inversement. La découverte de la beauté des territoires ruraux est ainsi une chance pour nos jeunes issus des zones périurbaines, et celle-ci mérite d’être défendue. (Exclamations sur les travées du groupe SER.)
Monsieur le sénateur, je me tiens à votre disposition pour les débats parlementaires au sein des groupes et des commissions. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et RDSE, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
Mme Laurence Rossignol. Vous êtes la secrétaire d’État d’un pays imaginaire !
M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour la réplique.
M. Henri Cabanel. Dans notre rapport, nous préconisons effectivement un débat parlementaire. C’est essentiel pour notre jeunesse, et nous ne souhaitons pas nous en priver.
Le SNU, le service civique et les autres dispositifs peuvent et doivent devenir des outils d’intégration sociale et d’éducation à la citoyenneté.
pêche dans les aires marines protégées
M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Jacques Fernique. Monsieur le secrétaire d’État Hervé Berville, dimanche dernier, vous avez crânement proclamé avoir fait reculer Bruxelles sur l’interdiction du chalutage de fond dans les aires marines protégées.
Non, vous n’avez pas fait plier la Commission européenne : dès le départ, son plan d’action n’était pas contraignant. En affirmant aux pêcheurs que ce plan « condamnerait la pêche artisanale française », dès « demain », vous avez joué un jeu dangereux et aggravé un climat déjà électrique à l’encontre des défenseurs de l’environnement. (Marques d’agacement sur les travées du groupe Les Républicains.)
Il est audacieux de se prévaloir de la cause de la pêche artisanale pour soutenir en réalité le chalutage industriel de fond ! Cela pourrait se comparer à une subvention à Amazon que l’on présenterait comme un soutien aux commerces de proximité…
Nos pêcheurs ont besoin non pas de ce genre de tromperie, mais d’écosystèmes en bon état pour pouvoir continuer à pêcher dans vingt ou trente ans. Vos aires marines protégées sont-elles des supercheries ? Lorsque la Commission européenne a recommandé de mettre un terme au chalutage de fond dans ces espaces, vous avez été pris à votre propre jeu de dupes et vous avez saisi l’occasion pour vous ériger en héros de la pêche artisanale.
Il fallait oser, alors que vous laissez des chalutiers géants détruire la pêche côtière et que vous vous opposez à la demande de nos pêcheurs d’interdire l’usage de la senne démersale près des côtes !
Les pêcheurs sont en colère et refusent la casse sociale. Sans solution durable, l’apaisement ne sera pas possible ; nous ne souhaitons pas qu’un incendie comme celui de l’Office français de la biodiversité, à Brest, se reproduise.
Monsieur le ministre, plutôt que de stigmatiser les défenseurs de l’environnement, comme certains s’y essaient à fond et sur tous les fronts ces derniers temps, quand mettrez-vous en cohérence vos déclarations et vos actes ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de la mer.
M. Hervé Berville, secrétaire d’État auprès de la Première ministre, chargé de la mer. Monsieur le sénateur Fernique, je ne sais pas où vous avez pêché ces informations (Sourires.), car elles sont tout simplement fausses.
Je n’ai pas déclaré que la Commission avait reculé. J’ai indiqué qu’elle avait confirmé ce que je vous avais dit ici le 8 mars : il s’agissait d’un plan de communication, et non d’un projet destiné à être traduit en actes législatifs. Écoutez donc ce qui se dit au Sénat !
M. Jacques Fernique. Bien sûr !
M. Hervé Berville, secrétaire d’État. La Commission européenne, devant les parlementaires européens, avait évoqué une intention de traduire, peut-être, ce plan en actes législatifs. Or quand c’est flou, il y a parfois un loup.
M. Marc-Philippe Daubresse. Un loup de mer ! (Sourires.)
M. Hervé Berville, secrétaire d’État. Face à cette ambiguïté, j’ai donc demandé à la Commission européenne, lors du Conseil européen, de confirmer que cette décision serait laissée aux États membres.
Concernant les aires marines protégées, permettez-moi de clarifier les choses. Vous étiez aux responsabilités et vous avez vous-même créé des aires marines protégées entre 2012 et 2014. Tout y était-il interdit ? Non.
Le code de l’environnement prévoit quatorze types d’aires marines protégées, allant de la réserve intégrale, où aucune activité humaine n’est autorisée, à des zones où la pêche est possible. Tous les élus locaux littoraux le savent bien : certaines activités de pêche peuvent être vertueuses et protéger l’habitat marin.
Ma position, celle de l’ensemble des élus locaux des façades littorales, est cohérente : depuis vingt ans, nous avons démontré qu’une pêche côtière artisanale pouvait exister en France. Les pêcheurs à la coquille, les producteurs d’huîtres ou les pêcheurs de langoustines ravagent-ils la planète ? Non ! Or, si une traduction législative avait été adoptée, cela aurait mené à la fin de cette pêche-là.
Nous assumons donc de continuer à défendre la pêche artisanale et côtière et d’autoriser, dans des zones proches de nos côtes, des pratiques de pêche vertueuses et éprouvées. Nous allons continuer à la défendre avec vous, les élus locaux. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP. – M. Claude Nougein applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, pour la réplique.
M. Jacques Fernique. Monsieur le secrétaire d’État, votre communiqué ressemblait tout de même à un communiqué de victoire, comme un poisson d’avril légèrement décalé.
Il va falloir envisager la transition : vous ne pourrez pas rejeter en bloc toute évolution concernant le chalutage de fond dans les aires marines protégées. Ce ne sera pas tenable. Où sont les mesures structurelles pour nos pêcheurs artisanaux,…
M. le président. Il faut conclure !
M. Jacques Fernique. … afin de garantir une pêche durable et socialement viable ? Défendre le statu quo reviendrait, à terme, à les couler. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
démissions d’élus locaux (i)
M. le président. La parole est à M. Franck Menonville, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Franck Menonville. Monsieur le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, près de 4 000 élus ont quitté leurs fonctions depuis le début de leur mandat, en 2020, et le seuil des 1 000 maires démissionnaires a été dépassé ce lundi, comme l’a annoncé le président de l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF) dans un entretien au Figaro.
Cette vague sans précédent est très inquiétante. Dans mon département de la Meuse, on relève le départ de dix maires, de 64 adjoints, de 207 conseillers, d’un président de communauté de communes et d’un vice-président.
Ces élus sont le maillon de proximité de la vaste chaîne des acteurs de l’intérêt général dans notre République. Placés en première ligne face aux nombreux défis actuels, ils exercent leur mission dans un climat parfois délétère.
Leur pouvoir se dilue progressivement, notamment en raison des transferts de compétences, et ils subissent les complexités administratives et les lourdeurs bureaucratiques qui entravent leur action, sans oublier le poids des responsabilités qui leur incombent.
Il est de plus en plus difficile de concilier l’exercice du mandat avec une vie professionnelle et personnelle, et cela implique de nombreux sacrifices.
S’y ajoutent les actes d’intimidation et les agressions envers les élus, qui se multiplient ces derniers temps : nous observons avec inquiétude la radicalisation, la montée de l’individualisme et le durcissement croissant de la société post-covid. Les causes qui déprécient l’attractivité du mandat local sont multiples.
Monsieur le ministre, à trois ans des prochaines élections municipales, prévues en 2026, il est urgent d’adresser un message de confiance à nos élus locaux et d’engager une vaste réflexion sur leur statut.
Quelles initiatives comptez-vous prendre pour restaurer l’attractivité de cet engagement et revaloriser concrètement le mandat municipal avant ce renouvellement ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC. – M. Paul Toussaint Parigi applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur le sénateur Menonville, je vous remercie de cette question.
1 293 : tel le nombre exact de maires qui ont démissionné depuis le début de leur mandat. Pour autant, il faut toujours se méfier des chiffres : entre 2014 et 2020, quelque 2 925 maires avaient démissionné. La moyenne est donc comparable : de l’ordre de quarante par mois.
Nous sommes seulement à la moitié du mandat, et nous avons connu beaucoup de démissions au tout début, dont certaines étaient certainement liées au covid-19 et à un contexte compliqué d’entrée dans la fonction.
Je le vois dans mon département : dans certaines équipes municipales, la mayonnaise n’a pas pris, car elles n’ont pas eu le temps ni l’occasion de travailler ensemble.
La conjoncture n’explique cependant pas tout, il faut tenir compte également de la montée de la violence.
Je tiens à saluer la loi de 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, qui a renforcé la protection fonctionnelle.
Il en va de même de la loi récente visant à permettre aux assemblées d’élus et aux différentes associations d’élus de se constituer partie civile pour soutenir pleinement, au pénal, une personne investie d’un mandat électif public victime d’agression, défendue par Éric Dupond-Moretti et Gérald Darmanin et portée par le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
Il faut évidemment aller plus loin. À cet égard, deux éléments vont compter.
Je me tourne tout d’abord vers Mathieu Darnaud, rapporteur de la mission d’information sur l’avenir de la commune et du maire en France. La Haute Assemblée entend ainsi déterminer les leviers qui peuvent être actionnés et objectiver les chiffres que j’évoquais il y a quelques instants. C’est souhaitable et précieux.
Ensuite, la semaine prochaine, Élisabeth Borne recevra l’ensemble des représentants des associations d’élus, dont David Lisnard, avec lequel nous avons déjà commencé à échanger à ce propos. La question du statut de l’élu sera évidemment l’un des thèmes de l’agenda territorial que je porterai, avec Dominique Faure, dans la continuité de ces discussions. Ce sujet rythmera la vie démocratique de notre pays dans les prochains mois.
Les maires sont les fantassins de la République. Ils sont à portée de baffe de nos concitoyens. Ils assument toutes les missions et portent toutes les responsabilités. Le moment est venu d’étudier comment mieux les accompagner. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP.)
fusillades à marseille
M. le président. La parole est à M. Stéphane Le Rudulier, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Stéphane Le Rudulier. Monsieur le ministre de la justice, ces dernières heures, la guerre des gangs sur fond de trafic de drogue a fait rage à Marseille, avec trois morts de plus. Nous nous dirigeons malheureusement vers un nouveau record, après les 39 victimes de 2021.
Ces règlements de comptes ont déjà fait plus de 300 morts en dix ans, transformant Marseille et son Vieux-Port en un nouveau Medellin, en une nouvelle French Connection. La ville est aujourd’hui l’otage des cartels. Pourtant, des moyens sécuritaires ont été mis en œuvre : plus de 300 policiers supplémentaires, trois compagnies républicaines de sécurité et 39 points de deal démantelés.
C’est une guerre d’usure et non pas une guerre éclair, certes, mais, alors que nos forces de l’ordre combattent au quotidien ce cartel, la justice et l’arsenal juridique semblent marquer le pas.
Monsieur le ministre de la justice, pensez-vous que la réponse pénale est à la hauteur de la stratégie de déstabilisation des réseaux menée par les forces de l’ordre ?
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer. Monsieur le sénateur Le Rudulier, pardonnez-moi de remplacer M. le ministre de la justice.
M. Jérôme Bascher. Il aurait été mieux qu’il soit présent !
M. Gérald Darmanin, ministre. Je tiens, au nom du Gouvernement, à saluer l’engagement de nos forces de l’ordre, qui interviennent quotidiennement partout, notamment à Marseille, une ville magnifique, mais gangrenée par le trafic de drogue depuis longtemps.
Les policiers et les gendarmes mènent des opérations antidrogue chaque demi-heure dans tous les quartiers de cette ville. Depuis le 1er janvier dernier, ils ont saisi 1,2 tonne de cannabis et procédé à 509 interpellations de trafiquants.
Cette activité soutenue des 500 policiers que nous avons installés de façon pérenne, à la demande du Président de la République et de la Première ministre, s’inscrit en effet dans une guerre d’usure. Mais il est nécessaire de faire davantage, notamment en permettant à la justice de suivre ces opérations importantes de police judiciaire et de police de sécurité publique.
Le garde des sceaux a précisé hier, devant l’Assemblée nationale, les moyens considérables qu’il met à disposition du parquet de Marseille, lequel traite particulièrement ces dossiers de trafic de stupéfiants, ainsi que des juges du siège et des greffiers. Une centaine de magistrats au total, à Marseille seulement, accompagne le travail que je mène en commun avec le garde des sceaux.
Il est également nécessaire de renforcer la coopération avec le fisc, la douane et les autorités locales, telles que la ville de Marseille et sa métropole, afin d’aider les forces de l’ordre à mieux intervenir dans certains quartiers.
Enfin, il est crucial de mettre en place les moyens législatifs appropriés pour faire face aux nouvelles méthodes de communication utilisées par les criminels, notamment les conversations cryptées sur internet.
J’ai eu l’occasion de le dire ce matin devant la commission des lois du Sénat : les écoutes téléphoniques « à la papa » fonctionnent mal, et le droit ne nous permet pas d’écouter ces communications cryptées pour lutter contre le banditisme, contrairement à ce qui est possible dans la lutte contre le terrorisme.
Je soumets à la sagacité de votre assemblée cette réflexion, pour aider la police et la justice à être encore plus efficaces. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Stéphane Le Rudulier, pour la réplique.
M. Stéphane Le Rudulier. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse.
Il est effectivement crucial d’améliorer la chaîne pénale, notamment en augmentant le nombre de places en prison et en évitant la prolifération des non-lieux ou des classements sans suite, car ils procurent un sentiment de toute-puissance aux narcotrafiquants, qui n’hésitent plus aujourd’hui à tuer des mineurs.
Je comprends votre détermination, mais je suis plus inquiet concernant le ministre de la justice, qui déclarait récemment qu’il n’existait pas de coupe-gorges en France. Je l’invite à Marseille, où l’on trouve bien pire que cela : des narco-cités ayant fait sécession, dans lesquelles la kalachnikov a remplacé Marianne, avec un usage débridé des armes à feu. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Alain Duffourg et Stéphane Ravier applaudissent également. – Murmures sur les travées du groupe SER.)
utilisation du s-métolachlore
M. le président. La parole est à Mme Florence Blatrix Contat, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Florence Blatrix Contat. Le S-métolachlore, un herbicide agricole utilisé pour de nombreuses cultures de printemps, notamment le maïs, a un impact avéré sur la qualité de l’eau et sur notre environnement. Ses produits de dégradation s’accumulent dans les nappes phréatiques pendant des dizaines d’années.
Depuis le 1er janvier 2021, les métabolites du S-métolachlore font partie des molécules recherchées dans l’eau mise en distribution et de nombreuses collectivités ont été confrontées à des dépassements réguliers de la norme ; 1,6 million de nos concitoyens sont concernés.
L’un des principaux fabricants de ce produit a d’ailleurs indiqué que celui-ci ne devait pas être utilisé dans les parcelles situées dans les aires d’alimentation de captage d’eau. En juin dernier, l’Agence européenne des produits chimiques (AEPC) a classé cet herbicide comme substance cancérigène et perturbateur endocrinien suspecté.
Saisie en 2021 par les trois directions générales de l’alimentation, de la prévention des risques et de la santé, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a rendu plusieurs études inquiétantes et, le 15 février dernier, a logiquement annoncé engager une procédure de retrait concernant cet herbicide.
Or, à la veille de la présentation du plan Eau par le Président de la République, le ministre de l’agriculture a annoncé devant le congrès de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) avoir demandé à l’Anses de revenir sur sa volonté d’interdire les principaux usages du S-métolachlore.
Monsieur le ministre, au nom de la souveraineté alimentaire, que nous appelons tous de nos vœux, mais qui a parfois bon dos, s’agissant de l’usage des pesticides, comptez-vous réellement jouer avec la santé de nos concitoyens en revenant sur la décision de l’Anses de retirer le S-métolachlore ?
Est-ce compatible avec le plan Eau visant à protéger la ressource en eau ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.
M. Olivier Véran, ministre délégué auprès de la Première ministre, chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. Madame la sénatrice Florence Blatrix Contat, je vous prie d’excuser l’absence du ministre de l’agriculture, qui accompagne le Président de la République en Chine. Je vais tâcher de répondre à votre question à sa place.
Nous partageons l’envie de nous débarrasser des pesticides ayant un impact sur la santé des gens. Comme vous l’avez dit, l’impact de celui que vous évoquez est non pas avéré, mais suspecté. Le principe de précaution doit donc l’emporter, comme c’est le cas pour toutes les substances susceptibles d’avoir des effets sur la santé. C’est le sens de l’histoire et le sens du travail que conduisent la France et l’Europe.
S’agissant de ce pesticide en particulier, l’enjeu de souveraineté alimentaire est, certes, important, mais il s’agit aussi d’être capables d’avancer en Européens sur ces questions.
La France n’est pas une île. Si elle était le seul pays de l’Union européenne à interdire une telle substance, nous nous retrouverions dans une situation abracadabrantesque : elle importerait des produits alimentaires des autres pays européens, parce qu’elle ne serait plus capable de produire elle-même ces aliments, à défaut de substances permettant de les cultiver dans de bonnes conditions. Nous importerions donc à grands frais les produits mêmes qui auraient été soumis à ces substances dans les pays voisins.
Nous souhaitons parvenir à une solution, et l’Europe accorde pour cela un délai de deux ou trois ans. La volonté française, de manière générale, est de se passer de toutes les substances qui peuvent emporter des conséquences sur la santé, et il s’agit d’un objectif partagé. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Florence Blatrix Contat, pour la réplique.
Mme Florence Blatrix Contat. Monsieur le ministre, il est inutile de reporter le règlement cette question, qui relève de la santé publique. Il est urgent de travailler aux alternatives pour les agriculteurs, ainsi qu’à leur résilience.
Nous avons l’occasion de prendre de l’avance à ce sujet sur nos partenaires européens. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
police aux frontières dans les aéroports de paris
M. le président. La parole est à Mme Anne Chain-Larché, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Anne Chain-Larché. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
En septembre prochain, la France accueille la Coupe du monde de rugby et en août 2024 les jeux Olympiques ; dix millions de passagers supplémentaires sont attendus dans nos aéroports, en particulier à Roissy-Charles-de-Gaulle, vaisseau amiral du groupe Aéroports de Paris (ADP).
Souvenez-vous, le groupe ADP est cette entreprise que Bruno Le Maire entendait privatiser à tout prix en 2019 pour payer la facture des « gilets jaunes »… Elle devrait rapporter plus de 150 millions d’euros de dividendes à l’État actionnaire pour 2022 : nous avons bien fait de nous opposer à sa privatisation ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
Mais revenons à notre avenir proche. Ma question concerne l’organisation des contrôles aux frontières à Roissy-Charles-de-Gaulle, où arrivent les vols long-courriers, laquelle organisation relève de votre responsabilité.
On nous parle d’embauches à venir, mais 355 postes de policiers aux frontières ont été supprimés. On nous parle d’automatisation, mais les sas de passage rapide aux frontières extérieures (Parafe) – ces bornes qui lisent les passeports biométriques – ne sont pas assez nombreux et sont souvent fermés, faute de personnel pour les surveiller.
Résultat, deux heures d’attente sont parfois nécessaires pour passer la frontière. Oui, deux heures… Quelle belle première image pour la France !
Face à cette désorganisation, les voyageurs étrangers au fort pouvoir d’achat préféreront atterrir à Bruxelles ou à Francfort et gagner Paris en train. L’attractivité de la France est menacée, car celle-ci n’est pas prête à faire face, et nous nous dirigeons vers une pagaille qui risque de ternir encore plus l’image du pays.
Monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour améliorer l’accueil des visiteurs étrangers dans nos aéroports ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer. Madame la sénatrice, je partage avec vous le souci de bien accueillir les personnes étrangères qui arrivent par les vols long-courriers, notamment tôt le matin, comme c’est le cas des vols qui viennent d’Asie ou des Amériques, dans les aéroports parisiens, singulièrement à Roissy-Charles-de-Gaulle.