M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi de dire quelques mots d’introduction à l’article 17 et, ainsi, d’anticiper sur la présentation des amendements nos 47 et 48 de la commission afin de gagner un peu de temps dans le débat.
L’article 17 met en œuvre la mesure phare du Gouvernement en matière de prévention, à savoir la création d’un parcours composé de trois rendez-vous de prévention prévus à différents moments de la vie adulte et pris en charge par l’assurance maladie.
C’est une idée intéressante et utile compte tenu de la prévalence des comportements à risque et de leurs conséquences dans notre pays.
Pour autant, que sait-on de ce qu’il faudrait faire en la matière ? Les bilans de santé en population générale ne sont pas très efficaces pour améliorer les indicateurs de santé publique. Ils touchent peu les personnes éloignées des soins, qui sont celles qui en ont le plus besoin, et peuvent même conduire à du surtraitement.
C’est du moins ce que concluent les analystes de la rubrique « Repères » de la revue Prescrire du mois dernier. C’est aussi ce que disait le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) en 2009, et ce que semble indiquer l’expérience du bilan de santé en milieu de vie conduite par nos voisins anglais depuis 2008.
Un autre exemple étranger, parfois cité à ce sujet, est celui du programme du comté de Västerbotten. Dans ces petits villages du nord de la Suède, si les consultations à caractère général portent leurs fruits depuis des décennies, c’est, semble-t-il, parce que dans ces communautés rurales à forte cohésion sociale, la continuité du suivi médical est grande et que l’éloignement des soins est faible.
D’une manière générale, mais surtout à défaut d’une parfaite couverture de la population en médecins traitants, la prévention gagne à être efficacement ciblée, soit sur la recherche de pathologies précises – c’est l’objet des programmes spécifiques, tels que le dépistage organisé du cancer colorectal, du sein ou du col de l’utérus –, soit sur des populations à risque, par exemple les personnes éloignées des soins ou traversant un moment de fragilité, par exemple à l’occasion d’une période de chômage ou d’un départ à la retraite.
C’est pourquoi la commission a accueilli le dispositif gouvernemental avec bienveillance dans ses grandes lignes, mais à la condition de préciser deux points.
Premièrement, la nature du service proposé aux assurés. Sur ce point, l’article 17 est flou. J’en veux pour preuve le nombre d’amendements en discussion commune que nous allons examiner. Si son contenu était clair, vous ne seriez pas aussi nombreux à vouloir le préciser, mes chers collègues.
En effet, pour trois rendez-vous promis, nous n’avons qu’une consultation effectivement nouvelle, entre 20 ans et 25 ans, un rendez-vous entre 40 ans et 45 ans qui pourra donner lieu à une consultation, mais pas nécessairement, et un examen entre 60 ans et 65 ans, qui est déjà en cours de déploiement depuis le quinquennat précédent. On ne sait pas très bien par ailleurs ce que seront ces rendez-vous ou ces séances de prévention.
La commission propose donc de préciser le dispositif, tout d’abord en garantissant la sincérité de la promesse faite aux assurés, ce qui commande d’appeler « consultation » le service qui leur serait rendu, lequel ne pourrait se tenir à distance. Car si l’on prétend faire un bilan personnalisé de santé, en vue notamment de mettre à jour des vaccinations, mieux vaut que le patient soit physiquement présent.
Deuxièmement, il faut lever une ambiguïté sur l’objet de ces consultations. En cette matière aussi, le mieux est l’ennemi du bien : mieux l’on précise à quoi serviront les rendez-vous, plus on les fait ressembler à des bilans globaux en population générale, lesquels sont peu efficaces.
C’est pourquoi j’émettrai un avis défavorable sur les amendements tendant à préciser l’objet des rendez-vous. En effet, ces propositions aboutiraient soit à élargir à l’excès les mailles du filet préventif, soit à prescrire au professionnel du soin ce qu’il doit faire dans l’exercice de son métier. Dans ce dernier cas, ces amendements sont satisfaits par l’appellation de « consultation ».
La commission ne prétend pas savoir mieux que la littérature scientifique ce qu’il convient de faire à ces occasions et comment cibler les assurés auxquels ces rendez-vous bénéficieront le plus. L’amendement n° 47 que je présente en son nom vise simplement à objectiver un minimum les choses, en prévoyant que les occurrences des consultations sont fixées par voie réglementaire, après avis du HCSP.
Ces occurrences pourraient d’ailleurs très bien être des bornes d’âge – mais tous les scientifiques ne s’accordent pas forcément sur ce point – autant que des situations de fragilité, telles que le bénéfice d’allocations chômage ou l’absence de médecin traitant déclaré depuis une certaine durée.
Quoi qu’il en soit, le succès des examens de prévention dépendra étroitement des efforts effectués en matière « d’aller vers » les populations qui auront le plus besoin de ces examens.
C’est pourquoi je présenterai l’amendement n° 49, qui vise à améliorer la capacité de la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam) d’informer utilement les assurés.
Si nous voulons que notre pays prenne enfin le virage préventif, l’important, mes chers collègues, n’est pas de préciser dans la loi l’objet des rendez-vous, mais de s’assurer que les personnes dont la situation les conduit à laisser leur état de santé se dégrader se retrouvent au moment adéquat face à un professionnel du soin qui leur accordera la considération qu’elles méritent.
La commission ne pouvait guère promettre davantage – article 40 de la Constitution oblige –, mais elle tient à ce que l’article 17 suscite autant que possible la confiance des Français.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, sur l’article.
Mme Victoire Jasmin. Monsieur le ministre, la création d’un portefeuille de la santé et de la prévention relevait d’une très bonne intention, mais ce n’était, hélas ! qu’un effet d’annonce, pour ne pas dire du vent.
J’ai fait des propositions concernant la prévention pour les jeunes de 12 à 17 ans, car celle-ci est dans un angle mort, que ce soit pour la prévention du suicide, des risques addictifs ou des pathologies mentales. La vraie prévention n’est pas au rendez-vous et c’est bien dommage.
Dans certains territoires, comme le mien, la Guadeloupe, et plus généralement dans les outre-mer, il n’y a pas de pédopsychiatres. Dans l’Hexagone, il faut six à douze mois, voire plus, pour obtenir un rendez-vous. Cette situation est inquiétante.
La santé des femmes est également en cause. La fédération des centres de lutte contre le cancer, Unicancer, nous le signale et nous alerte à ce sujet. Sur l’ensemble du territoire national, en particulier en outre-mer, de grandes disparités se font jour.
Monsieur le ministre, les intentions ne valent pas actions !
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, sur l’article.
Mme Émilienne Poumirol. Monsieur le ministre, votre thème « virage », la prévention, est la promesse gouvernementale pour ce PLFSS.
Bien que certaines mesures nous apparaissent intéressantes, nous sommes bien loin du virage annoncé. Le texte n’évoque en effet que la prévention médicale, qui s’apparente selon moi plus à du dépistage qu’à de la prévention. Aucun article ne traite de la prévention primaire – la qualité de l’air, l’alimentation, les effets de la sédentarité, les conditions de travail, etc.
Si notre système de sécurité sociale a été conçu à l’origine dans une option curative – et c’était normal – qui accapare 97 % des dépenses de santé, face à la montée préoccupante des maladies chroniques – de 2 % par an –, à l’apparition de nouvelles pandémies, à l’accroissement des inégalités sociales dans le domaine de la santé, il est aujourd’hui indispensable de repenser notre modèle de santé et de prévention.
Son objectif ne doit plus simplement être l’augmentation de l’espérance de vie, mais l’augmentation de l’espérance de vie en bonne santé. À titre d’exemple, alors que 46 % des Français de plus de 65 ans sont en bonne santé, ce taux est de 77 % en Suède.
Si nous voulons un modèle fondé non pas sur le soin, mais sur la santé, il faut agir, non seulement sur les maladies, mais sur les déterminants de la santé, ce qu’on appelle en général l’exposome.
Il s’agit là d’un véritable changement de paradigme, c’est-à-dire d’une approche décloisonnée de la santé, dont les professionnels travaillent encore aujourd’hui beaucoup trop « en silo », et il faut prendre en considération la santé environnementale dans l’ensemble des politiques publiques telle qu’elle est développée par le concept que nous connaissons tous de santé intégrée, ou One Health.
Des travaux ont été menés dans cette assemblée sur la question de la prévention de la santé environnementale, que ce soit par mon collègue Bernard Jomier, ou par le groupe GEST, notamment par Mélanie Vogel, dans le cadre de la mission d’information intitulée Protéger et accompagner les individus en construisant la sécurité sociale écologique du XXIe siècle, aux travaux de laquelle j’ai participé.
Je ne peux que déplorer que les conclusions de cette mission d’information, pourtant éclairantes et constructives, n’aient pas été davantage prises en compte dans ce PLFSS. (Mme Annie Le Houerou applaudit.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Braun, ministre. Permettez-moi de répondre aux différents orateurs, ce qui nous permettra peut-être de gagner du temps dans le débat d’amendements.
Je me réjouis de l’ensemble des amendements qui ont été déposés à cet article, et je me félicite que le Sénat se soit emparé du sujet de la prévention.
C’est la première fois que le ministère de la santé est aussi celui de la prévention. L’on peut certes déplorer que les choses n’aillent pas assez loin, mais c’est un premier pas qui est loin d’être négligeable, et il sera suivi par un certain nombre de mesures complémentaire qui ne figurent pas dans le PLFSS.
Je suis globalement en accord avec les propos de Mme la rapporteure, même si nous aurons quelques légers différends.
L’intérêt de ces rendez-vous de prévention est non pas de toucher les personnes qui se rendent tous les mois chez leur médecin et qui ont un suivi parfaitement régulier, mais bien d’aller chercher les publics qui sont les plus éloignés du soin et de la santé. Tel est l’un des enjeux des conseils nationaux de la refondation (CNR) territoriaux.
Dans les quartiers nord de Marseille, j’ai constaté l’importance des médiateurs de santé dans le cadre de la prévention – nous pourrons y revenir lors d’un futur débat.
Il est nécessaire d’aller vers des publics éloignés du soin et de leur proposer des parcours de santé à l’issue des rendez-vous de prévention. Ces derniers ne sont pas des one shot, si je puis dire, mais bien le début d’une prise en charge beaucoup plus globale.
Force est de constater que les dépistages organisés n’ont pas toujours l’efficacité attendue : seulement 50 % des femmes qui devraient bénéficier d’un dépistage du cancer du sein et 30 % des hommes qui devraient bénéficier d’un dépistage du cancer colorectal en bénéficient réellement. C’est dire l’importance de ces rendez-vous de prévention et la confiance qu’il faut accorder aux professionnels de santé pour adapter leur contenu à chaque individu.
Nous avons préféré le terme « rendez-vous » à celui de « consultation », car ce dernier peut prêter à confusion dans la mesure où il donne à penser qu’il se fera systématiquement face à un médecin. Or nous estimons – nous attendons sur ce point l’avis du HCSP – que d’autres professionnels de santé peuvent participer à cet effort de prévention.
Les jeunes de 12 à 17 ans sont une cible que nous devons toucher dans le cadre de la prévention. Ils font déjà l’objet de rendez-vous obligatoires, mais le travail que nous engagerons à ce sujet dans le cadre des Assises de la pédiatrie et de la santé de l’enfant permettra de préciser à nouveau les choses.
Enfin, je vous informe du lancement, la semaine dernière, d’une mission « sport-santé » dans le cadre de la prévention primaire, secondaire et tertiaire. Celle-ci a pour objet de compléter d’autres propositions, comme les trente minutes d’activité physique à l’école et les deux heures d’activité sportive au collège et au lycée.
Cette mission doit également faire le point sur les maisons sport-santé, lancées dans le cadre de la stratégie Ma santé 2022 – conformément à l’engagement du Président de la République, le nombre de celles-ci excède les 500 –, ainsi que sur les prescriptions d’activité physique adaptée.
Cette mission, dont les résultats sont attendus pour la fin du premier trimestre de 2023, est menée conjointement par le ministère des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques, le ministère des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées et mon ministère.
Si vous le souhaitez, mes collègues et moi-même pourrons présenter les résultats de cette mission devant la commission des affaires sociales au début de 2023.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. le président. Je suis saisi de trente-cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 47, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 4 et 5
Rédiger ainsi ces alinéas :
« Art. L. 1411-6-2. – Tous les adultes de dix-huit ans ou plus bénéficient de mesures de prévention sanitaire et sociale qui comportent notamment des consultations de prévention. Ces consultations ont pour objectifs de prévenir les risques pour la santé associés à l’âge, au sexe ou au mode de vie, de promouvoir les comportements favorables à la santé, et de repérer les violences sexistes et sexuelles. Elles ne peuvent être réalisées par télémédecine.
« Le nombre, le contenu et les occurrences de ces consultations sont fixés par voie réglementaire après avis du Haut Conseil de la santé publique. » ;
II. – Alinéa 9
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 6° Le nombre et les occurrences des consultations de prévention mentionnées à l’article L. 1411-6-2. » ;
III. – Alinéa 12
Remplacer les mots :
rendez-vous de prévention, consultations et séances mentionnés
par les mots :
et aux consultations de prévention mentionnées
IV. – Alinéa 13
Remplacer les mots :
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement tend à préciser la nature des rendez-vous de prévention prévus à cet article en les renommant « consultations » et en proscrivant le recours à la télémédecine, afin que le service rendu à l’assuré ressemble bien à un examen de santé.
J’ai entendu votre remarque, monsieur le ministre, mais l’un n’exclut pas l’autre. Sauf erreur de ma part, il existe des consultations sexuelles réalisées par des infirmières. Le mot « consultation », dont l’acception est plus large, me paraît plus opportun.
Cet amendement vise par ailleurs à objectiver le séquençage du parcours de prévention en sollicitant le HCSP pour déterminer les éléments déclencheurs de ces examens.
M. le président. L’amendement n° 319 rectifié, présenté par Mme Lassarade, MM. Milon, Bonne, Burgoa, D. Laurent, Cambon et Calvet, Mmes Thomas et Di Folco, M. Bouchet, Mmes Richer et Dumont, M. Charon, Mmes Puissat et L. Darcos, MM. Perrin et Rietmann, Mme Gosselin, MM. Allizard, Panunzi et Cadec, Mme Delmont-Koropoulis, M. Rapin, Mmes Jacques et Dumas, M. Laménie, Mme Micouleau, M. Belin, Mme Raimond-Pavero et MM. Bonhomme, Gremillet et Babary, est ainsi libellé :
Alinéa 4, première phrase
Après les mots :
rendez-vous de prévention
insérer les mots :
et de bilan personnalisé
La parole est à Mme Florence Lassarade.
Mme Florence Lassarade. La population des patients ayant été atteints par un cancer est de plus en plus importante, qu’il s’agisse de patients qui n’ont plus de traitement à l’issue d’un cancer ou de patients qui ne sont plus traités que par hormonothérapie lors de la phase de rétablissement.
En effet, si le taux d’incidence du cancer reste relativement stable chez l’homme et augmente chez la femme depuis 1990, les taux de mortalité diminuent pour les deux sexes : –2 % pour les hommes et –0,7 % pour les femmes entre 2010 et 2018 selon la Ligue contre le cancer.
Quelque 3,8 millions de Français vivent avec le cancer et 160 000 en décèdent chaque année.
Il est donc nécessaire d’adapter ces rendez-vous aux besoins spécifiques de cette population nombreuse en matière de prévention. Inclure un objectif de bilan aux consultations de prévention permet de prendre en compte les besoins spécifiques des populations concernées.
Le terme « bilan » permet par ailleurs de couvrir plus largement les besoins de l’ensemble de la population au moment de ces consultations qui, pour permettre de proposer des mesures de prévention efficaces, doivent dans un premier temps établir un bilan des pratiques et des mesures de prévention déjà mises en place par chaque personne concernée.
M. le président. L’amendement n° 753, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4, deuxième phrase
Compléter cette phrase par les mots :
y compris sur les risques physiques et psychiques liés au travail
II. – Alinéa 5
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Ils ont notamment pour objectif, en fonction des besoins, de promouvoir l’activité physique et sportive et une alimentation favorable à la santé, de prévenir certains cancers et addictions et de promouvoir la santé sexuelle. Une attention particulière est portée à la prévention des risques en matière de santé environnementale et de santé mentale, qu’il s’agisse de souffrance psychique ou d’épuisement professionnel, dans l’ensemble des consultations de prévention prévues et pour tous les âges. Ils sont adaptés aux besoins de chaque individu et prennent notamment en compte les besoins de santé des femmes et la détection des premières fragilités liées à l’âge en vue de prévenir la perte d’autonomie. » ;
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cette liasse d’amendements peut évoquer une liste à la Prévert, mais j’estime opportun que, comme pour tous les examens obligatoires réalisés dans les centres de protection maternelle et infantile (PMI), une liste d’items soit fixée, sans que celle-ci soit trop prescriptive pour le médecin.
Le dispositif proposé est en effet relativement général, de sorte qu’il risque d’être insuffisant quant à son contenu. Cet amendement – comme bien d’autres – vise donc à préciser et à renforcer le dispositif en l’orientant éventuellement sur un certain nombre de risques les plus courants actuellement.
Selon la Ligue contre l’obésité, en 2022, 17 % des Français sont en situation d’obésité.
Selon Santé publique France, le nombre de nouveaux cas de cancer entre 1990 et 2018 a augmenté de 68 % chez l’homme et de 93 % chez les femmes.
Les troubles dépressifs ont pour leur part augmenté de près de 2 points entre 2010 et 2017, alors qu’ils avaient été stables entre 2005 et 2010, touchant majoritairement les femmes, les étudiants et les chômeurs.
Enfin, selon l’Insee, en 2050, 4 millions de seniors seront en situation de perte d’autonomie.
Surpoids, addictions, cancers, risques professionnels, perte d’autonomie : tous ces facteurs touchent, selon la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), en majorité les classes populaires et les habitants des outre-mer.
S’attaquer aux déterminants sociaux de la santé suppose de lister ces risques dont les incidences sont très inégales, monsieur le ministre.
Cet amendement vise donc à renforcer les rendez-vous de prévention afin d’en faire un dispositif de prévention global en mesure d’apporter un soutien efficace à la lutte contre les principaux risques et inégalités de santé.
M. le président. L’amendement n° 752, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Alinéa 4, deuxième phrase
Compléter cette phrase par les mots : y compris sur les risques physiques et psychiques liés au travail
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Selon Santé publique France, avec près de 44 500 cas recensés en 2019, les troubles musculo-squelettiques (TMS) sont la première cause de maladie professionnelle en France.
Si l’on n’avait pas attaqué la santé au travail et cessé de recruter des médecins du travail, nous ne serions peut-être pas contraints d’introduire la prise en compte de tels troubles dans un dispositif général.
Selon l’enquête Sumer remise à Santé publique France en octobre 2022, 86 % des maladies professionnelles reconnues dans le BTP sont des TMS, et 64 % des artisans du BTP déclarent des douleurs musculaires et articulaires.
De manière générale, selon la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), en 2016, 87 % des maladies professionnelles reconnues sont des TMS, un phénomène en hausse continue de 7 % par an depuis 2005.
Les ouvriers – en 2012, ils représentaient, selon la Dares, la « quasi-totalité des salariés du régime général victimes de maladies professionnelles », au-delà donc des TMS – et les employés sont les principales victimes de cette épidémie qui a trait à la dégradation continue des conditions de travail.
Ce chiffre de la Dares, confirmé par l’enquête de 2020 commandée par l’Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail, montre que les femmes, les travailleurs migrants et les personnes LGBTI sont susceptibles d’occuper des emplois et de travailler dans des secteurs caractérisés par une exposition accrue aux risques pour la santé et aux risques de TMS, y compris les risques psychosociaux et organisationnels.
Aussi, cet amendement vise à compléter les dispositions bienvenues de l’article 17 en renforçant les rendez-vous de prévention afin de les ouvrir à la prévention des risques psycho-sociaux et des troubles musculo-squelettiques.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 616 rectifié est présenté par MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Fialaire, Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
L’amendement n° 998 est présenté par M. Marseille.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 4, deuxième phrase
Compléter cette phrase par les mots :
comme à des tiers-lieux dédiés à la prévention
La parole est à M. Bernard Fialaire, pour présenter l’amendement n° 616 rectifié.
M. Bernard Fialaire. Je salue la mise en place de ces consultations de prévention à des âges clés de la vie, car elles sont essentielles pour améliorer le parcours de santé, pour sensibiliser, pour conseiller ou encore pour effectuer des dépistages et même des mises à jour de vaccination.
Toutefois, ces rendez-vous seront assurés par des professionnels de soins libéraux de moins en moins représentés, notamment dans les déserts médicaux et les départements et régions d’outre-mer.
Les déserts médicaux sont également des déserts de prévention et des déserts numériques où l’information est peu accessible.
Aussi, notre collègue Stéphane Artano propose que la consultation de prévention puisse intégrer la programmation de tiers-lieux de prévention proches des patients les plus isolés, pour rendre la santé publique du dernier kilomètre plus inclusive.
M. le président. L’amendement n° 998 n’est pas soutenu.
Les deux amendements suivants sont également identiques.
L’amendement n° 492 rectifié est présenté par Mme Delmont-Koropoulis, MM. Bascher, Bonhomme et Bonne, Mme Borchio Fontimp, MM. Bouchet, Burgoa, Cambon et Charon, Mmes Dumas, Lopez et Micouleau et MM. Milon et Sido.
L’amendement n° 877 est présenté par Mme Jasmin, M. Bourgi, Mme G. Jourda, MM. Pla, Lurel et Chantrel, Mmes Monier et Espagnac, MM. Montaugé et Tissot et Mme Préville.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 4, dernière phrase
Après les mots :
de prévention
insérer les mots :
et de bilan personnalisé
La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis, pour présenter l’amendement n° 492 rectifié.
Mme Annie Delmont-Koropoulis. Il est défendu.
M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour présenter l’amendement n° 877.
Mme Victoire Jasmin. La population des patients ayant été atteints par un cancer est de plus en plus importante, qu’il s’agisse de ceux qui n’ont plus de traitement ou de ceux qui ne sont plus traités que par hormonothérapie. En effet, si le taux d’incidence du cancer reste relativement stable chez l’homme et augmente chez la femme, il y a fort heureusement moins de décès.
Si la population de ces patients doit être concernée par les rendez-vous de prévention, il est nécessaire de les adapter à ses besoins spécifiques. On pourra le faire en incluant un objectif de bilan.
Le terme « bilan » indique, par ailleurs, que l’on couvrira plus largement les besoins de l’ensemble de la population au moment de ces consultations, qui permettront ainsi de proposer des mesures de prévention efficaces.
Le groupe Unicancer indique qu’il faudrait inclure la notion de bilan personnalisé. Monsieur le ministre, faites ce qui doit être fait pour donner une réalité concrète à ces recommandations. Unicancer est une référence et cette proposition devrait contribuer à améliorer la prise en charge des personnes.
M. le président. L’amendement n° 891 rectifié, présenté par MM. Iacovelli, Hassani, Lévrier et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Alinéa 4, dernière phrase
Compléter cette phrase par les mots :
ainsi que des troubles de santé mentale
La parole est à M. Xavier Iacovelli.
M. Xavier Iacovelli. Nous le savons, la santé mentale a trop longtemps été un tabou ; désormais, la parole se libère et la santé mentale prend enfin la place qu’elle doit avoir dans notre système de soins. En effet, souffrir en silence, souffrir sans que cela se voie ou souffrir seul, toutes ces situations sont le symptôme d’une prise en charge défaillante.
Chers collègues, laissez-moi vous rappeler quelques faits : 64 % des Français ont déjà ressenti un trouble ou une souffrance psychique, les Français sont les plus grands consommateurs au monde de psychotropes et un Français sur cinq est touché, chaque année, par un trouble psychique.
Dans l’Atlas de la santé mentale en France, il est indiqué que, en 2017, plus de 7 millions d’individus ont bénéficié d’une prise en charge spécialisée due à un trouble psychique diagnostiqué ou d’un traitement psychotrope. Malheureusement, ces chiffres ne donnent qu’une image partielle de la réalité puisque la prévalence des troubles de santé mentale demeure difficile à caractériser à cause du non-recours aux soins et de la difficulté de poser un diagnostic.
C’est pourquoi nous proposons que ces rendez-vous de prévention déjà ciblés soient aussi l’occasion de détecter en amont ces troubles. Il ne s’agit pas de préciser les missions des médecins, mais de dire aux Français, après tant de tabous, que leur santé mentale occupera désormais une place centrale dans la prise en charge.
Je regrette que notre amendement visant à permettre la mise en œuvre d’une consultation de santé mentale à l’adolescence ait été jugé irrecevable. L’établissement d’un diagnostic est d’autant plus difficile chez les mineurs, alors même qu’à l’échelle mondiale, parmi les jeunes âgés de 10 ans à 19 ans, un sur sept souffre d’un trouble mental. En outre, Santé publique France rappelle qu’environ la moitié des troubles mentaux se manifestent avant l’âge de 14 ans.
Des mesures ont déjà été prises par le Gouvernement, que nous avons votées, mais il faut continuer de porter un effort commun dans ce sens. C’est la raison pour laquelle nous avions présenté cet amendement ciblant les adolescents et c’est aussi pour cela que nous présentons cet amendement qui vise à préciser la nature du rendez-vous de prévention à l’âge adulte, tel que le prévoit l’article.