M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé, pour la réplique.
M. Loïc Hervé. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, mais ça tombe mal : le pôle de compétitivité de la vallée de l’Arve a été politiquement assassiné il y a quelques mois ! Il n’existe donc plus !
M. Loïc Hervé. Restent les chambres de commerce, vous avez raison, mais la structuration collective dans la vallée de l’Arve et en Haute-Savoie reste quelque chose de très important.
Apprenons de ce qui s’est passé ces dernières années avec les trois vagues du plan de relance et moralisons l’octroi des aides pour permettre à toutes les entreprises d’en percevoir. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit également.)
défense de la souveraineté industrielle de la france dans les secteurs stratégiques
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Monsieur le ministre de l’industrie, en quelques semaines, deux fleurons de notre industrie aéronautique et spatiale sont passés sous pavillon américain, devenant la propriété de la même société Heico : d’une part, la société Exxelia, qui intervient dans l’aéronautique, le spatial, l’armement, mais aussi le médical – qui plus est, celle-ci devrait bénéficier du programme France 2030 – ; d’autre part, la société Trad, spécialisée dans la technologie des tests et analyses des effets des radiations sur les matériaux et composants électroniques, fondamentale pour la recherche spatiale, les avions de haute altitude et l’armement, entre autres.
Comment ne pas voir qu’il s’agit de secteurs de haute technologie, essentiels pour l’autonomie stratégique de la France et qui concourent à notre souveraineté industrielle ? Comment pouvez-vous laisser faire cela ?
Doit-on revoir le sinistre scénario consécutif aux décisions d’Emmanuel Macron de vendre à l’américain General Electric les turbines fabriquées par Arabelle, essentielles pour les centrales nucléaires ? Nous devons aujourd’hui les racheter au double du prix de vente, et sans en récupérer les brevets. C’est une perte d’emplois, d’argent et de savoir-faire… Vous auriez dû vous en souvenir !
Monsieur le ministre délégué, pourquoi n’avez-vous pas déclenché les dispositifs du décret Montebourg permettant au Gouvernement de contrôler les investissements étrangers dans les secteurs clés en France ? Que comptez-vous faire pour qu’Exxelia et Trad restent françaises ? (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de l’industrie.
M. Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie. Madame la sénatrice Lienemann, ce que vous appelez le décret Montebourg est en réalité la procédure de contrôle des investissements étrangers en France, qui a été élargie et renforcée lors du mandat précédent, à la suite d’un accord entre l’Assemblée nationale et le Sénat.
J’ai beaucoup travaillé sur ce sujet à l’Assemblée nationale, car j’y étais, à l’époque, président la commission des affaires économiques, et rapporteur général sur le projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises (Pacte).
Nous avons élargi les secteurs concernés. Nous avons également renforcé la procédure de contrôle du Parlement sur les investissements étrangers en France. Un rapport vous est envoyé une fois par an. Il vous permet de connaître le nombre d’investissements concernés et le nombre de ceux qui ont fait l’objet d’autorisations sous conditions. En 2021, sur 328 dossiers soumis à la procédure dite Montebourg, 124 ont été autorisés, dont 67 sous conditions.
Aller plus loin supposerait de mettre en cause le secret des affaires, voire le secret de la défense nationale. Pour pallier ce défaut, nous avons voté dans le cadre de la loi Pacte – là encore – une disposition permettant l’examen, sous le sceau du secret, de certains cas particuliers, par les présidents des commissions des affaires économiques de l’Assemblée nationale et du Sénat, et par les rapporteurs généraux du budget.
Pour cette raison, je ne peux commenter en détail les cas particuliers que vous mentionnez.
Pour autant, sachez que nous examinons les dossiers des entreprises Exxelia et Trad au regard des intérêts stratégiques de la Nation, de la souveraineté industrielle et des enjeux de secret-défense, et nous continuerons de le faire ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme Éliane Assassi. Et alors ?
M. Hussein Bourgi. Pour quels résultats ?
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour la réplique.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Nos concitoyens ne comprennent rien.
Nous laissons partir deux fleurons français – vous êtes ministre délégué auprès du ministre de la souveraineté industrielle, tout de même ! – alors que nous savons qu’un débat a eu lieu, notamment sur le cas d’Exxelia : vous n’avez pas trouvé au cours d’un premier tour de table d’actionnaire français – ce n’est pas un secret d’État, puisqu’on peut le lire dans tous les journaux de France et de Navarre !
Nous aimerions vous croire, mais nous voyons s’aggraver la perte de souveraineté industrielle du pays. Pouvez-vous nous garantir que l’État protégera Exxelia et Trad grâce à des capitaux majoritairement français ? (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST, ainsi que sur des travées du groupe INDEP. – M. Philippe Pemezec applaudit également.)
revenu de solidarité active
M. le président. La parole est à M. Michel Dagbert, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Michel Dagbert. Ma question s’adresse à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.
Monsieur le ministre, si depuis 2004 les départements assurent, avec le concours de l’État, le versement de l’allocation aux bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA), l’exercice de cette compétence a été – et demeure – au cœur de bien des discussions entre les départements et les gouvernements successifs.
Les départements sont chargés de l’accompagnement social et/ou professionnel de chaque bénéficiaire. Cette politique publique participe – c’est heureux – à la cohésion sociale dans le pays.
Sans remettre en cause la détermination des conseillers départementaux et le professionnalisme de leurs équipes et en leur reconnaissant un certain nombre de réussites, il faut noter que, en dépit de la baisse significative du chômage, une longue liste de propositions d’emploi reste non pourvue.
Les métiers concernés sont divers : serveurs de cafés-restaurants, agents d’entretien, agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (Atsem), aides à domicile, aides ménagères, voire professionnels de l’animation socioculturelle.
C’est suffisant pour réinterroger légitimement l’adéquation entre les parcours d’insertion proposés et la réalité du marché de l’emploi.
Monsieur le ministre, je sais que quelques départements se sont portés volontaires pour réaliser une expérimentation à ce sujet. Toutefois, celle-ci fait craindre à une importante association du secteur social une réforme qui, selon elle, s’apparente à un « retour du servage ».
N’ayant aucun doute sur la volonté qui vous anime en la matière, pouvez-vous, monsieur le ministre, devant mes collègues de la chambre haute, préciser les contours de cette évolution des politiques d’insertion et nous en donner le calendrier ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion. Monsieur le sénateur Dagbert, pendant la campagne de l’élection présidentielle de 2022, le Président de la République, alors candidat, a réinterrogé les modalités du RSA et la réussite de cet outil, héritier du revenu minimum d’insertion (RMI), créé en 1988 dans le but – c’est une fierté de notre modèle social – d’accorder et d’apporter un revenu minimum à celles et à ceux qui se trouvent sans revenus.
Aujourd’hui, les résultats en matière d’insertion professionnelle et de retour à l’emploi ne sont pas satisfaisants, comme l’a montré la Cour des comptes dans son rapport public sur le revenu de solidarité active publié en janvier 2022, car 42 % des bénéficiaires du RSA, sept ans après, le sont encore, soit de façon permanente, soit de façon discontinue, mais très régulière. De même, sept ans après leur entrée dans le RSA, seuls trois bénéficiaires sur dix ont retrouvé un emploi et seul un sur dix a retrouvé un emploi stable.
Cette situation nous oblige à agir. Nous pouvons continuer de penser que la société est quitte de son devoir de solidarité une fois qu’elle a attribué une indemnité d’un peu moins de 600 euros à une personne dépourvue de revenus.
Notre conviction toutefois est que la société sera quitte de son devoir de solidarité lorsqu’elle aura permis de retrouver un emploi – de recevoir de nouveau un revenu –, car c’est un élément d’émancipation, d’autonomie et de dignité.
C’est ce que nous favorisons au moyen d’un accompagnement plus intensif des bénéficiaires du RSA. Soyons clairs, il s’agit non pas de travail gratuit ni de bénévolat obligatoire – je tiens à le souligner, car ces idées ne correspondent pas à notre modèle –, mais de formation, d’accompagnement et de remobilisation collective et individuelle.
Le RSA est un droit inconditionnel – le Président de la République l’a dit –, pour tous ceux qui sont privés de revenus. Le devoir de la puissance publique est de garantir une offre d’insertion et de formation adaptée et personnalisée, sur l’ensemble du territoire. Lorsque ces deux conditions sont remplies, ceux qui bénéficient du RSA doivent s’inscrire – c’est une logique de droits et de devoirs – dans des parcours de retour vers l’emploi et d’insertion par l’emploi. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes RDSE et UC.)
hausse des salaires
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Monique Lubin. Madame la Première ministre, le prix du gazole dépasse 2 euros par litre, les tarifs des différentes sources d’énergie augmentent considérablement, les produits de première nécessité, tels que les pâtes ou le beurre, voient leur prix augmenter de 22 % à 47 %, et la liste de tout ce qui concourt à la vie quotidienne des Français est longue…
Une partie d’entre eux n’aura d’ailleurs pas d’autres choix que de se priver dans les semaines à venir… Nous savons tous qui seront les premiers à sacrifier des biens pourtant indispensables à une vie « décente ».
Vous répondez à cette situation par des primes aléatoires, de la défiscalisation, de la désocialisation d’heures supplémentaires, des rachats de RTT et par d’autres mesures encore qui n’impliquent que les salariés.
Vous refusez obstinément de satisfaire notre demande – et surtout celle des salariés –, de prendre l’initiative d’un grand débat sur les salaires. Les salariés ne demandent pas l’aumône : ils veulent vivre de leur travail !
Vous ne cessez de rappeler l’importance de la valeur travail – souvent d’ailleurs pour stigmatiser ceux qui en sont privés. Nous rétorquons : pas de valeur travail, sans travail de valeur !
La valeur d’un travail se mesure notamment à l’aune de sa rémunération. Depuis 2008, le salaire des 10 % des personnes les mieux payées a augmenté trois fois plus vite que celui des 10 % les moins rémunérées. Le travail du patron d’une enseigne de la grande distribution vaut-il 300 fois plus que celui de sa caissière ?
Il est temps de parler du partage de la masse salariale dans les entreprises. Quand mettrez-vous en œuvre une conférence nationale afin d’aborder, enfin, tous ces sujets et de soutenir, par là même, tous les salariés de France ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le ministre du travail du plein emploi et de l’insertion.
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion. Madame la sénatrice, vous avez commencé votre question en rappelant le contexte inflationniste, mais vous auriez pu faire le même constat que nous : nous sommes le pays d’Europe qui, par les mesures mises en place – le bouclier tarifaire sur les dépenses énergétiques et les aides apportées aux ménages –, a réduit le plus possible l’inflation.
Cette dernière s’élève à environ 6,5 % – c’est beaucoup, car c’est le taux le plus haut que nous ayons connu depuis 1985 –, ce qui ne représente que la moitié du taux d’inflation que connaissent nos voisins européens. Cela montre que la politique que nous menons protège les Français.
Vous nous appelez à augmenter les salaires. Notre conviction est que l’augmentation globale des salaires ne se décide pas par la loi, mais relève du dialogue social – j’y reviendrai.
Vous avez appelé de vos vœux, dans les débats, l’indexation du Smic sur les prix, mais elle ne concerne qu’une partie des salariés ! Notre position est d’encourager les branches et les entreprises au dialogue social. Dans le cadre de l’examen du projet de loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat, le Parlement a voté des mécanismes permettant de faciliter l’ouverture des négociations dès lors qu’un des niveaux de rémunération conventionnels serait inférieur au Smic.
Vous avez parlé de certains outils – défiscalisation, désocialisation –, mais vous avez oublié de dire les efforts que nous faisons pour améliorer le partage de la valeur, pour faciliter les accords d’intéressement et pour que les primes – vous les qualifiez d’aléatoires, mais des millions de Français en bénéficient ! – soient elles aussi plus faciles à verser. Je vous assure que celles et ceux qui peuvent en bénéficier sont bien plus heureux que ne le laissent entendre les mots que vous employez pour les qualifier.
Vous avez dit que, depuis 2008 – cette date nous fait réfléchir sur la responsabilité des uns et des autres, tous confondus ! –, un écart croissant se serait creusé. Or, l’écart entre le premier et le dernier décile ne s’est pas creusé, grâce aux outils de redistribution dont notre pays dispose, car ils permettent de compenser les écarts entre les revenus primaires – c’est également un motif de fierté !
Dans quelques semaines, j’ouvrirai, sous l’autorité de la Première ministre, une négociation interprofessionnelle ayant pour objet le partage de la valeur. Ce sera une première. J’espère que vous utiliserez à meilleur escient l’énergie que vous mettez à critiquer la politique du Gouvernement, en accompagnant cette discussion. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – MM. Pierre-Antoine Levi et Pierre Louault applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour la réplique.
Mme Monique Lubin. C’est au service des salariés que je continuerai à déployer mon énergie, monsieur le ministre !
Vos propos, dont certains éléments sont factuels, je vous l’accorde, ne sont à l’évidence pas entendus par la majorité des salariés, en dépit de ce que vous venez de dire. Ils ont besoin de cette conférence salariale pour que tous les entrepreneurs de France, à la mesure de leurs moyens et de la taille de leur entreprise, soutiennent leur pouvoir d’achat.
Je constate que vous êtes plus prompt à dégainer le 49.3 pour mettre fin à un débat budgétaire – pourtant riche, comme l’a rappelé M. Véran plus tôt –, qu’à donner suite au vœu exprimé depuis quelque temps maintenant par la majorité des salariés. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
mobilisation interprofessionnelle et hausse des salaires
M. le président. La parole est à Mme Anne Chain-Larché, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Anne Chain-Larché. Ma question s’adressait à Mme la Première ministre.
Madame la Première ministre, à vous entendre, tout va bien.
Or, les Français le constatent chaque jour, la France devient le pays de la pénurie ! Nous sommes en pénurie de médicaments, en pénurie de carburants et, confrontés à la grève, en pénurie de transports, alors même que la pénurie d’électricité est annoncée pour cet hiver !
Face à ces pénuries, nous faisons un terrible constat : le Gouvernement n’a rien anticipé ! Il aura fallu attendre quelques semaines avant de réquisitionner une partie du personnel de quelques raffineries seulement. Pour quel résultat ? Les Français font la queue, pendant des heures, devant les rares stations-service ouvertes.
La grève s’étend aux centrales nucléaires : onze sur dix-huit étaient touchées hier.
Si cette grève se poursuit, elle pourrait provoquer une terrible pénurie d’électricité, dont l’entreprise Réseau de transport d’électricité (RTE) redoute les « conséquences lourdes » pour cet hiver.
Qu’attendez-vous pour protéger les Français des pénuries dans ces secteurs stratégiques ? Vous faudra-t-il, comme pour les raffineries, attendre plusieurs semaines avant d’agir ? Allez-vous enfin réquisitionner toutes les raffineries ?
Allez-vous réquisitionner le personnel des centrales nucléaires ? (Murmures sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.) Allez-vous mettre en place un service minimum dans les transports, comme le prévoit la proposition de la loi de Bruno Retailleau votée au Sénat ? (Exclamations sur les mêmes travées.)
La situation exige des mesures fortes et du courage, mais en avez-vous ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion. Madame la sénatrice, pour avoir la chance d’accompagner Mme la Première ministre dans un certain nombre de rencontres avec les différents présidents de groupe parlementaire dans le cadre de la réforme des retraites,…
M. Bruno Retailleau. C’est relaté dans Le Canard enchaîné !
M. Olivier Dussopt, ministre. … je puis vous assurer que les partenaires sociaux qui participent aux négociations salariales dans les différents secteurs ne se posent pas la question de savoir si Mme la Première ministre a du courage : ils le constatent. Je puis témoigner des efforts qu’elle fait elle-même pour promouvoir ce dialogue. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)
Concernant les centrales nucléaires, comme dans l’ensemble des secteurs, nous encourageons la négociation. EDF doit ouvrir un cycle de négociations. Nous espérons qu’il soit de nature à dissuader les salariés de se mettre en grève pour assurer un bon fonctionnement de l’entreprise.
Concernant les réquisitions, je suis désolé de vous rappeler, madame la sénatrice, que nous sommes respectueux du droit de grève, garanti par la Constitution. La jurisprudence en la matière est claire : les réquisitions doivent être proportionnées, justifiées par un impératif d’urgence…
Mme Sophie Primas. Elle y est, l’urgence !
M. Olivier Dussopt, ministre. … ou de trouble à l’ordre public, et respectueuses de l’exercice du droit syndical. C’est ce que nous avons fait, en veillant à ce que les réquisitions auxquelles nous avons procédé dans les raffineries s’inscrivent parfaitement dans ce cadre. À ce titre, les tribunaux administratifs de Lille et de Rouen ont considéré que les décisions prises par le Gouvernement étaient conformes à la loi et qu’elles pouvaient ainsi s’appliquer.
S’affranchir de la règle de droit ou encore des principes constitutionnels, cela n’est pas possible ! Ce serait la meilleure façon d’être inefficace : les décisions seraient immédiatement censurées par le juge administratif. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Anne Chain-Larché, pour la réplique.
Mme Anne Chain-Larché. Monsieur le ministre, l’impératif est là ! Il faut agir vite, car chaque jour de grève fait perdre plusieurs milliards d’euros à l’économie française. Cela vient creuser encore plus le trou abyssal de la dette !
En vérité, votre Gouvernement est débordé par ses contradictions, par son arrogance, par son déni de la réalité (Exclamations sur les travées du groupe RDPI.), par son incapacité à ressentir une quelconque empathie vis-à-vis des Français qui galèrent toujours plus dans notre pays où règne – excusez-moi de le dire –, la chienlit ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Nouvelles exclamations sur les travées du groupe RDPI.)
finances locales et inflation
M. le président. La parole est à M. Rachid Temal, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Rachid Temal. Monsieur le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, permettez-moi d’être ici, pour quelques instants, le porte-parole des régions, des départements, des intercommunalités, des villes et villages de notre pays.
Ces collectivités sont très durement affectées par l’inflation : leurs coûts sont multipliés par huit à ce jour. Or elles représentent, rappelons-le, 70 % des dépenses d’investissement public dans notre pays. Ainsi, sans leurs investissements, des pans entiers de notre économie s’effondreraient et des milliers d’emplois seraient détruits.
Nous travaillons tous, sur ces travées, au quotidien, avec les élus et les associations d’élus – nous étions dans le Val-d’Oise ce week-end, avec mes collègues ici présents. Nous constatons que, pour la première fois, ils n’arrivent pas à boucler leur budget.
Ils sont obligés de s’interroger, nous disent-ils, sur la fermeture de services et sur la suppression de postes. Nous ne pouvons qu’imaginer les Français qui, dans quelques semaines ou mois, en allant dans les piscines ou gymnases publics de leur commune, trouveront porte close, car les collectivités n’auront plus les moyens de les ouvrir.
Ma question est simple, monsieur le ministre : qu’entendez-vous modifier dans le projet de loi de finances pour 2023 pour que les collectivités territoriales puissent enfin fonctionner dignement et assurer leurs missions de service public ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur le sénateur Temal, les élus que vous avez croisés dans le Val-d’Oise,…
M. Rachid Temal. Comme ailleurs !
M. Christophe Béchu, ministre. … les membres du Gouvernement, les députés et les sénateurs des autres groupes les rencontrent aussi. Personne ne peut nier que le retour de l’inflation, à des niveaux que nous n’avions plus connus, même si elle est plus faible en France qu’ailleurs, ne nous aide pas à résoudre les équations dont nous parlons.
S’ajoute à cette question celle de l’énergie. Or je tiens à rappeler que les régions, les départements, les villes et les villages de ce pays, dont vous vous êtes fait le porte-parole, sont – je tiens à le rappeler – protégés par le bouclier tarifaire qui est le même que celui qui vaut pour les ménages. (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et SER.)
M. Jean-Raymond Hugonet. C’est de la flûte ! (L’orateur joint le geste à la parole.)
M. Laurent Duplomb. C’est faux !
M. Christophe Béchu, ministre. Premièrement, si l’inflation pèse sur les dépenses, elle contribue parfois aux recettes. La progression des recettes de TVA des régions s’élèvera à 9 % pour l’année en cours, la revalorisation des bases des impositions sera de plus de 1,2 milliard d’euros, et la revalorisation automatique sera plus forte encore l’année prochaine.
Deuxièmement, les collectivités locales ont déjà connu des difficultés à boucler leur budget lorsque les gouvernements que vous soutenez ont baissé de 11 milliards d’euros la dotation globale de fonctionnement (DGF), il y a quelques années. Pour la première fois depuis treize ans, le gouvernement dirigé par Élisabeth Borne propose de revaloriser le montant de la DGF de 200 millions puis de 320 millions d’euros – ces chiffres vous seront présentés dans quelques jours. (M. Emmanuel Capus applaudit.)
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Très bien !
M. Christophe Béchu, ministre. Troisièmement, un filet de sécurité, autrement plus robuste que celui auquel vous avez contribué pendant l’examen du dernier projet de loi de finances rectificative (PLFR), sera inclus dans le projet de loi de finances (PLF) qui vous sera transmis. Ce n’est que la deuxième étape de notre grande bataille qui consiste à obtenir une baisse des prix de l’énergie et qui se joue demain et après-demain lors du Conseil européen.
Enfin, concernant l’établissement d’un dispositif de protection tarifaire pour les collectivités et les entreprises qui ne sont pas couvertes, à ce stade, par les tarifs réglementés de vente d’électricité (TRV), nous agissons dans trois directions (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.) : nous le défendons à l’échelle européenne, nous utilisons la contribution sur les rentes pour solvabiliser les dispositifs de compensation et nous prévoyons un filet de sécurité renforcé pour compenser le reste. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP.)
M. Emmanuel Capus. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Rachid Temal, pour la réplique.
M. Rachid Temal. Monsieur le ministre, je ne suis pas certain que le maire Béchu tiendrait les mêmes propos que vous. J’ai bien indiqué dans ma question que je parlais pour tous les groupes, je crois que tous les sénateurs et toutes les sénatrices entendent parler des mêmes difficultés lorsqu’ils rencontrent les maires.
Vous nous parlez des villages – tant mieux ! –, mais les maires des villages, quand nous les rencontrons, nous disent la même chose.
Je rappelle que 45 millions de Français ne sont pas inclus dans vos mesures, ils vont donc également être pénalisés. On peut toujours tourner en rond…
Aujourd’hui, les associations d’élus proposent qu’il existe un bouclier fiscal pour l’ensemble des communes et qu’il n’affecte pas leur capacité d’investissement. Acceptez-vous ou non cette proposition ? De plus, se pose la question des bases locatives.
Vous nous parlez de mesures, mais je vous rappelle que vous supprimez la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE)…
M. Laurent Duplomb. Très bien !
M. Rachid Temal. C’est 8 milliards d’euros en moins pour les collectivités ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Valérie Létard applaudit également.)
coût de l’énergie pour les collectivités territoriales