M. le président. L’amendement n° 445, présenté par Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 17
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
…° Le second alinéa de l’article L. 621-2 est ainsi modifié :
a) À la première phrase, les mots : « les revenus d’activité mentionnés au premier alinéa du présent article » sont remplacés par les mots : « leurs revenus d’activité selon les modalités prévues aux articles L. 131-6 à L. 131-6-2 et L. 613-7 »
b) À la deuxième phrase, les mots : « ne relevant pas de l’article L. 613-7, cette cotisation supplémentaire ne peut être inférieure à un montant fixé par décret » sont remplacés par les mots : « qui ne relèvent pas de l’article L. 613-7 et dont les revenus sont inférieurs au montant mentionné au sixième alinéa de l’article L. 621-1, cette cotisation est calculée sur ce dernier montant » ;
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement de précision vise à inscrire dans la loi le principe selon lequel la même assiette minimale est applicable aux cotisations indemnités journalières des professionnels libéraux et aux cotisations maladie-maternité et indemnités journalières des artisans et commerçants.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Le Gouvernement est favorable à cet amendement.
Permettez-moi par ailleurs d’apporter quelques précisions concernant cet article.
Tout d’abord, le Gouvernement a pris le temps d’instruire les modifications proposées par la commission des affaires sociales et nous craignons que leurs conséquences soient plus importantes que prévu.
Ensuite, dans le cadre des textes d’application qui seront pris par le Gouvernement en application de l’article 2 s’il est voté dans cette rédaction, nous n’envisageons pas de mettre en place un mécanisme progressif d’exonération au profit des micro-entrepreneurs. Tel n’est pas l’objectif de la commission, que nous rejoignons.
Je souhaite enfin préciser que, si le mécanisme d’exonération de cotisations maladie que nous proposons permettra un gain de pouvoir d’achat de 550 euros pour les travailleurs indépendants rémunérés au niveau du SMIC, celui-ci se situera plutôt entre 170 et 200 euros pour les micro-entrepreneurs rémunérés au même niveau, car les modalités de calcul de leurs cotisations sont différentes.
Pour résumer, il n’y aura pas de mécanisme progressif d’exonération au profit des micro-entrepreneurs et l’exonération de cotisations maladie emportera un gain différent pour les travailleurs indépendants et les micro-entrepreneurs. Je tenais à vous apporter ces précisions dans l’hémicycle afin de lever toute ambiguïté sur la portée des dispositions adoptées.
M. le président. L’amendement n° 43 rectifié bis, présenté par MM. Duplomb, J.M. Boyer, D. Laurent, Bonnus et Chasseing, Mme Demas, M. Anglars, Mme Deseyne, MM. Pointereau, Levi, Bacci, Rapin, E. Blanc et Bouloux, Mmes Imbert et Lassarade, M. Hingray, Mmes de La Provôté, Pluchet, Berthet, Chauvin et Billon, M. Daubresse, Mme Drexler, M. Babary, Mmes Joseph et M. Mercier, MM. Houpert, Détraigne, Cadec, Burgoa et B. Fournier, Mme F. Gerbaud, MM. Klinger et Bouchet, Mmes Férat, Micouleau et Bellurot, M. de Legge, Mme N. Delattre, MM. Karoutchi, Saury, J.M. Arnaud, Belin, Charon et Longeot, Mme Bonfanti-Dossat et MM. H. Leroy et Somon, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 27
Compléter cet alinéa par les mots :
du présent code et à l’article L. 731-13 du code rural et de la pêche maritime
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Chantal Deseyne.
Mme Chantal Deseyne. Cet amendement vise à permettre le cumul de l’exonération partielle de cotisations sociales des jeunes agriculteurs avec la modulation des taux des cotisations maladie et maternité en fonction des revenus des chefs d’exploitation.
La modification proposée est nécessaire afin de permettre aux jeunes agriculteurs de bénéficier de la mesure prévue par le Gouvernement en faveur du pouvoir d’achat des travailleurs indépendants.
Les jeunes agriculteurs étant déjà redevables de plus de cotisations que leurs aînés, alors qu’ils font partie des publics les plus vulnérables, il serait incompréhensible que demain ils soient exclus du bénéfice d’une mesure en faveur de leur pouvoir d’achat.
Le code rural et de la pêche maritime permet à tous les chefs d’exploitation agricole ayant des revenus professionnels inférieurs à un certain seuil de bénéficier d’une modulation de leurs taux de cotisations d’assurance maladie, invalidité et maternité des exploitants agricoles (Amexa).
En parallèle, dans un souci de favoriser le renouvellement des générations en agriculture et l’installation des jeunes, l’article L. 731-13 du code rural et de la pêche maritime prévoit une exonération partielle de cotisations sociales pour les jeunes agriculteurs devenant chefs d’exploitation. Cette exonération est dégressive durant cinq ans.
Le cumul des deux dispositifs – taux réduits de cotisations d’Amexa et exonération jeunes agriculteurs – n’est pas permis par la loi.
En conséquence, dans certaines sociétés agricoles, notamment les groupements agricoles d’exploitation en commun (GAEC), les jeunes agriculteurs bénéficiant de l’exonération partielle qui leur est réservée sont redevables, à revenu égal, de davantage de cotisations sociales que leurs aînés. Cela apparaît surtout à compter de la troisième année après l’installation, compte tenu du caractère dégressif de l’exonération partielle sur cinq ans. Cette anomalie doit être corrigée.
Le présent projet de loi crée une mesure en faveur du pouvoir d’achat des travailleurs indépendants et renforce ainsi la modulation du taux d’Amexa.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Vous avez tout à fait raison, madame Deseyne, de pointer cette difficulté.
En l’état actuel des choses, deux dispositifs se percutent.
Le premier permet aux jeunes agriculteurs de bénéficier d’une exonération dégressive sur leurs cotisations, de 65 % la première année à 15 % au terme de la cinquième année.
Le second est la réduction des cotisations maladie-maternité accordée aux exploitants agricoles.
De ce fait, les jeunes agriculteurs seraient perdants les quatrième et cinquième années.
Lorsque M. Duplomb a déposé cet amendement, nous nous sommes rapprochés de la Mutualité sociale agricole (MSA) pour tenter de lever cette difficulté sans permettre pour autant le cumul des deux dispositifs. Nous n’y sommes pas parvenus ; c’est pourquoi la commission a émis un avis favorable sur cet amendement.
Cette position n’est pas entièrement satisfaisante, notamment parce que cela entraînera un coût de l’ordre de 9 millions d’euros, et nous espérons remédier à cette difficulté par une autre voie. Néanmoins, dans cette attente, nous ne souhaitons pas que les jeunes agriculteurs soient pénalisés.
L’avis est donc favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Mme le rapporteur l’a dit, la disposition proposée n’est pas une solution satisfaisante, puisque cela reviendrait à permettre le cumul de deux dispositifs sectoriels, ce qui est contraire aux principes que nous observons habituellement.
Nous donnerons instruction aux opérateurs, notamment à la MSA, d’offrir un droit d’option de manière que les jeunes agriculteurs concernés puissent choisir, pour leurs quatrième et cinquième années, entre les deux dispositifs d’exonération celui qui leur est le plus favorable afin d’éviter toute perte pour eux.
L’avis est défavorable.
M. le président. L’amendement n° 158, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Les dispositions du présent article sont intégralement prises en charge par l’État conformément à l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. L’article 2 prévoit de nouvelles exonérations de cotisations sociales pour les travailleuses et travailleurs indépendants.
Nous avons bien noté votre argument selon lequel les dispositions introduites par cet article rendraient possible un gain de pouvoir d’achat de 550 euros par an pour les indépendants dont le revenu est équivalent au SMIC.
Si les travailleurs indépendants ont perdu durant la crise sanitaire en moyenne 10 % de revenus, le soutien du Gouvernement ne peut toujours se résumer à des exonérations ou des baisses de cotisations sociales.
Nous voyons bien le piège, depuis la suppression d’une partie des cotisations sociales des employeurs au travers du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, de cette stratégie qui consiste à tirer vers le bas le montant des cotisations sociales.
Cette spirale peut s’avérer infinie si, au nom du principe d’égalité, chaque catégorie professionnelle revendique la baisse des cotisations sociales pour avoir les mêmes « avantages » que d’autres corps de métier.
Enfin, cette baisse de cotisations pour les travailleurs indépendants pose une sérieuse question d’équité depuis l’intégration des indépendants au régime général de sécurité sociale, ces derniers bénéficiant des mêmes prestations sociales, alors que leurs taux de cotisation sont largement inférieurs.
S’il faut améliorer la situation de ces travailleurs, cela doit passer par la relance des dépenses publiques, en particulier celles des collectivités territoriales, pour augmenter, par exemple, les contrats passés avec les indépendants.
En conclusion, cet amendement de repli vise à garantir la compensation financière de la baisse de cotisations sociales par l’État.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Il me semble que cet amendement est doublement satisfait : non seulement l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale prévoit la compensation de toute mesure de réduction de cotisations sociales, mais le Gouvernement s’est engagé devant l’Assemblée nationale et dans l’étude d’impact à compenser cette mesure par une fraction de TVA équivalente – M. le ministre nous le confirmera sans doute.
Je demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Effectivement, l’amendement est satisfait dans la mesure où, comme je l’indiquais précédemment, la loi Veil prévoit un principe de compensation. Il faudrait que le Gouvernement affirme sa volonté de déroger à cette disposition s’il souhaitait qu’il n’y ait pas compensation.
Pour cette seule raison, l’avis est défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. J’ai bien entendu les explications que vous avez données, monsieur le ministre, et je tiens à vous remercier de prendre à chaque fois le temps de nous expliquer votre avis. Même si, avec mon groupe, je ne partage pas vos positions, il est agréable qu’un ministre nous accorde ce temps. (Mme Françoise Gatel et M. Thani Mohamed Soilihi applaudissent.)
Je retire mon amendement, mais je tiens à redire, même si le Gouvernement et Mme le rapporteur l’ont sans doute entendu, que nous sommes farouchement opposés aux exonérations de cotisations sociales : même si elles sont compensées par l’État, ce n’est pas une solution.
M. le président. L’amendement n° 158 est retiré.
Je mets aux voix l’article 2, modifié.
(L’article 2 est adopté.)
Après l’article 2
M. le président. L’amendement n° 84 rectifié quater, présenté par MM. Savary, Retailleau, Mouiller, Allizard, Anglars, Babary, Bacci, Bansard, Bas, Bascher et Bazin, Mmes Bellurot, Belrhiti et Berthet, MM. E. Blanc et J.B. Blanc, Mme Borchio Fontimp, MM. Bouchet et Bouloux, Mmes Bourrat et V. Boyer, MM. Brisson, Burgoa, Cadec, Calvet et Cambon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Chain-Larché, MM. Charon et Chatillon, Mme Chauvin, M. Chevrollier, Mme de Cidrac, MM. Courtial et Cuypers, Mme L. Darcos, MM. Darnaud et Daubresse, Mmes Delmont-Koropoulis, Demas, Deseyne, Di Folco, Drexler, Dumas et Dumont, M. Duplomb, Mmes Estrosi Sassone et Eustache-Brinio, MM. Favreau, B. Fournier et Frassa, Mme Garnier, M. Genet, Mme F. Gerbaud, M. Gremillet, Mme Gruny, M. Hugonet, Mmes Imbert, Joseph et Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre, de Legge et Le Gleut, Mmes Lopez et Malet, M. Mandelli, Mmes M. Mercier, Micouleau et Muller-Bronn, M. de Nicolaÿ, Mme Noël, MM. Panunzi, Paul, Pellevat et Perrin, Mme Pluchet, M. Pointereau, Mmes Procaccia et Raimond-Pavero, MM. Rapin et Reichardt, Mmes Renaud-Garabedian et Richer, MM. Rietmann, Rojouan, Saury, Sautarel et Savin, Mme Schalck, MM. Segouin, Sido, Sol, Somon et Tabarot, Mmes Thomas et Ventalon et MM. C. Vial et J.P. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 161-22-1 A du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Le revenu tiré de la reprise d’activité mentionnée au premier alinéa n’est pas assujetti aux cotisations d’assurance vieillesse d’origine conventionnelle rendues obligatoires par la loi.
« Pour les travailleurs indépendants mentionnés à l’article L. 613-7, le taux global mentionné au premier alinéa du I du même article L. 613-7 est réduit à proportion de la quote-part des cotisations et contributions de sécurité sociale dont sont redevables ces travailleurs indépendants correspondant aux cotisations mentionnées au deuxième alinéa du présent article, dans des conditions déterminées par décret. » ;
2° Au deuxième alinéa, les mots : « premier alinéa du » sont supprimés et le mot : « opposable » est remplacé par le mot : « applicable ».
II. – Le présent article s’applique aux revenus tirés, à compter du 1er octobre 2022, de l’activité reprise par le bénéficiaire d’une pension de vieillesse personnelle servie par un régime de retraite de base légalement obligatoire ayant pris effet à compter du 1er janvier 2015.
III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. René-Paul Savary.
M. René-Paul Savary. C’est un amendement que j’ai rectifié, et si M. le ministre est à l’écoute du Sénat, je suis sûr qu’il lui donnera un avis favorable.
En effet, le présent texte est intitulé « Projet de loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat ». Je vous propose, mes chers collègues, de prendre une mesure d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat des personnes qui cumulent emploi et retraite.
Si ce cumul donne naturellement lieu à rémunération, les cotisations vieillesse qui sont versées dans ce cadre ne permettent pas de bénéficier de droits nouveaux. Ce sont donc des cotisations versées pour rien.
On dit souvent que, sans cotisation, il ne peut y avoir de droits, alors même que nous accordons de nombreuses exonérations… Or ces cotisations-là n’ouvrent aucun droit. Il faudra remédier à cette situation dans le cadre d’un prochain texte sur les retraites.
En attendant une solution pérenne, et pour favoriser le cumul emploi-retraite, nous devons accorder aux personnes concernées une exonération des cotisations vieillesse portant simplement – tel est l’objet de la rectification de mon amendement – sur les retraites complémentaires. Je suis d’accord pour dire qu’il faut contingenter une telle disposition de manière à ce qu’elle n’emporte pas de conséquences financières trop lourdes.
Ma proposition rectifiée est donc bien une mesure d’urgence, mais je crois qu’elle mérite que nous y réfléchissions, car il est important que le principe selon lequel des cotisations donnent droit à une prestation soit respecté.
Mme Cathy Apourceau-Poly. L’augmentation des salaires serait une solution…
M. le président. Le sous-amendement n° 451, présenté par Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Amendement n° 84 rectifié bis, après l’alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le deuxième alinéa du présent article n’est pas applicable aux indemnités mentionnées à l’article L. 382-31. » ;
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Le sous-amendement n° 451 vise à exclure les élus de ce dispositif, puisque leurs cotisations ouvrent des droits.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 84 rectifié bis ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. L’amendement qui a été examiné par la commission a été rectifié depuis et je qualifierais volontiers la version actuelle de cet amendement de juste et d’honnête.
La situation des personnes qui cumulent emploi et retraite et qui cotisent, mais qui n’ont pas de droits à ce titre, pose une difficulté qui est presque d’ordre constitutionnel. C’est une question que nous abordons depuis de nombreuses années.
Le Gouvernement a souvent été interpellé sur ce sujet, nous n’avons jamais eu de réponse et nous attendons une hypothétique réforme des retraites pour le traiter au fond.
Lorsque cet amendement a été présenté en commission, il a reçu un avis défavorable, notamment en raison de son coût élevé – je l’ai dit clairement et honnêtement aux membres de la commission.
La nouvelle proposition présentée par M. Savary est bien différente. Son périmètre est moins important. De ce fait, son coût l’est lui aussi : de 800 millions d’euros, il passe à 300 millions, soit près de trois fois moins.
La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement dans la rédaction qui lui était alors soumise, mais elle n’a pas émis d’avis sur la présente rédaction.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 84 rectifié bis et le sous-amendement n° 451 ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Je précise que l’Assemblée nationale a introduit un article proposé par le président du groupe GDR, André Chassaigne, permettant aux élus en situation de cumul de leur mandat et de la retraite d’acquérir des droits.
Comme l’a dit Mme le rapporteur, la première version de l’amendement examinée en commission était coûteuse. Mme le rapporteur évoque un coût de 800 millions d’euros, l’estimation des services de l’État était plutôt autour de 1,3 milliard d’euros.
Le coût de la rédaction actuelle de cet amendement est estimé à un tiers du précédent, soit environ 500 millions d’euros, quand Mme le rapporteur l’estime à 300 millions.
En tout état de cause, ce sont des sommes considérables qui méritent débat.
Le Gouvernement est ouvert à l’idée de rendre contributives des cotisations acquittées dans le cadre d’un cumul emploi-retraite. Cela nécessite de travailler sur la question des retraites et ce n’est pas la même démarche que celle qui est proposée, qui consiste à exonérer de cotisations les revenus d’activité perçus en sus d’une retraite.
Le Gouvernement considère que tout revenu d’activité doit être soumis à contribution et que le présent débat doit être renvoyé soit à un projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) soit à un texte portant sur les retraites.
J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement et ce sous-amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Je suis au regret de dire à mon ami René-Paul Savary que je ne suis pas d’accord avec son amendement.
Je rejoins tout à fait les explications que vient de donner M. le ministre : il est préférable que les cotisations ouvrent droit à un surcroît de retraite, autrement dit, qu’elles servent.
La proposition qui nous est faite revient à retirer plusieurs centaines de millions d’euros à la sécurité sociale. Dans le cadre du PLFSS, la commission des affaires sociales est souvent contrainte de se gendarmer pour essayer de préserver l’équilibre des comptes de la sécurité sociale. Or vous proposez, mon cher collègue, de supprimer certaines de ses recettes.
Il me paraît préférable, comme l’a indiqué M. le ministre, de transformer le plus rapidement possible cette cotisation en un droit supplémentaire.
Une telle disposition reviendrait tout de même à amputer l’Agirc-Arrco de plusieurs centaines de millions d’euros de recettes.
M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote.
M. Henri Cabanel. Je partage moi aussi le point de vue exprimé par M. le ministre, à ceci près qu’il ne faudra en aucun cas oublier ceux qui ne relèvent pas du régime général – je pense notamment aux personnes qui sont affiliées à la Mutualité sociale agricole.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je comprends bien toutes les préoccupations qui ont été évoquées, mais nous examinons un texte d’urgence sur le pouvoir d’achat. Cet amendement ne prétend pas résoudre définitivement la difficulté que j’ai pointée, mais il me semble important de réfléchir dès à présent aux solutions que nous pouvons y apporter.
Je souscris naturellement au principe selon lequel une cotisation doit donner lieu à une prestation, mais l’article 40 de la Constitution empêche les parlementaires de faire une telle proposition.
J’attire votre attention sur un exemple précis : les difficultés liées aux déficits de personnels dans les professions médicales et paramédicales. Dans ce contexte, il est important que des médecins ou des infirmières puissent revenir travailler dans un service, même s’ils sont à la retraite. Il serait tout à fait légitime de satisfaire de telles demandes et cet amendement constitue une incitation au travail.
Je rappelle également que, en 2014, un retraité touchait un revenu équivalant à 108 % du salaire moyen d’un actif, mais que ce taux a été ramené à 103 %. Selon les prévisions actualisées, même dans l’hypothèse d’un retour à l’équilibre du système de retraites, le niveau de vie d’un retraité ne dépassera pas 85 % de celui d’un actif touchant un salaire moyen.
Par conséquent, plutôt que de déporter les difficultés sur les retraités, ce qui ne peut conduire qu’à leur appauvrissement, il convient de prendre en compte ces difficultés dès à présent. Voilà pourquoi le cumul emploi-retraite doit bénéficier des mêmes conditions que toute autre forme d’activité. Il doit non seulement être soumis à cotisations, mais il doit aussi produire des droits, d’où l’amendement que je vous ai présenté et que je maintiens.
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.
Mme Monique Lubin. Une fois n’est pas coutume, je suis d’accord avec M. le ministre. Il me semble, en effet, qu’il ne serait pas bon de supprimer des cotisations, alors qu’elles vont dans le pot commun et qu’elles participent à la richesse générale.
En revanche, je considère qu’il est tout à fait légitime que ceux qui cotisent puissent bénéficier des prestations correspondantes.
Si l’amendement de mon collègue René-Paul Savary a pour effet de rappeler cela au Gouvernement, c’est une bonne chose.
M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.
M. Philippe Mouiller. Je me trouve dans une position un peu particulière, car j’entends les arguments de mes collègues et je suis d’accord avec tout le monde !
Pourtant, je voterai cet amendement, car si l’on veut tenir l’équilibre budgétaire, il faut nécessairement des cotisations – nous nous accordons tous sur ce point. Le cumul emploi-retraite est un sujet important que nous traiterons dans le cadre du projet de loi sur la réforme des retraites. C’est un dispositif efficace qui permet à des retraités d’accéder à l’emploi ou bien de se mobiliser dans des contextes particuliers, comme celui du manque de médecins ou d’infirmières auquel mon collègue a fait référence.
Aujourd’hui, il s’agit de trouver rapidement les moyens d’améliorer les retraites d’un certain nombre de nos concitoyens. Certes, le texte prévoit d’augmenter de 4 % le niveau des pensions, mais laissez-moi prendre un exemple concret, celui de mon territoire.
On y trouve beaucoup de gens qui touchent de petites retraites. Issus du monde agricole ou anciens artisans, ils espèrent que le Gouvernement fera évoluer leur situation. Il s’agit également d’un territoire où il y a de l’emploi et où les entreprises cherchent à recruter, ce qui rend possible une forme d’adéquation : des gens sont prêts, pendant quelques mois, pour passer une période où les fins de mois sont difficiles, à se mobiliser et à travailler parce qu’ils sont encore en état de le faire. Comment leur expliquer, dès lors, qu’ils devront cotiser, payer des charges, sans bénéficier d’aucun droit en retour ?
Que ce soit pour améliorer le pouvoir d’achat des retraités ou pour faciliter tout ce qui peut permettre de traverser cette période extrêmement difficile, et en attendant de nécessaires réformes de fond, je crois que nous devrions tous adopter une position commune et soutenir cet amendement. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains, ainsi qu’au banc des commissions.)
M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote.
Mme Victoire Jasmin. Cet amendement de M. Savary fait écho à celui que j’avais déposé en 2019, lors de l’examen du projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé, et dont l’objet était non pas complètement identique, mais très proche.
En effet, dans mon territoire, on trouve de nombreuses personnes qui ont cotisé le nombre d’annuités suffisant pour être à la retraite, mais qui sont contraintes de continuer de travailler tout simplement parce qu’elles en ont besoin.
Par exemple, dans le secteur de la santé, je connais un psychiatre – il y en a peu en Guadeloupe et aucun pédopsychiatre – qui a atteint l’âge de la retraite, alors qu’on a encore besoin de ses services. Et je pourrais vous citer bien d’autres cas semblables.
Cet amendement me parle, il fait écho aux situations que je rencontre dans mon territoire et je suis favorable à ce que nous avancions sur ce sujet.