M. Bruno Belin. Face aux trop nombreuses charrettes de fermeture de classes que nous constatons tous dans nos communes, nous nous disons que le ministre de l’éducation nationale a bien changé.
La situation, elle, est toujours la même. Dans ces écoles, les élèves de la génération autotests terminent leur troisième année scolaire covid dans une situation de grande souffrance psychologique, certains sont même en plein décrochage.
Monsieur le Premier ministre, puisque le ministre concerné est absent, quelle est la stratégie du Gouvernement en matière de carte scolaire, notamment en milieu rural ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la jeunesse et de l’engagement. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de la jeunesse et de l’engagement. Monsieur le sénateur Belin, le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, parce que c’était la volonté du Président de la République, a souhaité qu’aucune école ne ferme dans un territoire rural, qu’aucune école ne ferme nulle part sans l’accord du maire concerné.
Oui, monsieur le sénateur, c’est bien en concertation avec les maires, avec les élus locaux, que l’on construit cette carte scolaire, mais également notre territoire, qu’on l’accompagne, que l’on réfléchit à l’installation d’habitations, que l’on rénove les centres-bourgs. Tout cela a été fait. (Marques d’opposition sur les travées du groupe Les Républicains.)
Au-delà de cela, alors même que l’on dénombre 78 000 élèves en moins, 14 380 postes ont été créés. L’encadrement dans les écoles rurales n’a jamais été aussi fort ! Cette volonté du Président de la République a été mise en œuvre par ce gouvernement.
Vous avez évoqué la préparation de la carte scolaire. Il s’agit d’un moment clé, parce que celle-ci est construite avec les élus locaux, dans un dialogue intense et essentiel. (M. Bruno Belin fait un signe de dénégation.)
L’engagement du Président de la République est que pas une école ne soit fermée dans les territoires ruraux sans l’accord des élus locaux. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Une sénatrice du groupe CRCE. Il était bien question de ne pas fermer de classe !
M. le président. La parole est à M. Bruno Belin, pour la réplique.
M. Bruno Belin. Les élus ruraux ont le sentiment que l’État fait tout pour que la France des campagnes aille de mal en pis : carburant hors de prix, constructions et plan local d’urbanisme interdits, communes sans trésorerie, territoire sans téléphonie, médecins partis et, maintenant, carte scolaire sans stratégie.
C’est une faute et une erreur.
C’est une faute, parce que le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports ne tient pas son engagement d’écouter les élus.
C’est une erreur, parce que la France des campagnes est en train de se reconstruire, grâce à ses élus. Ceux-ci tiennent d’une main la fibre, de l’autre des services qu’ils attirent, tout en essayant de sauver des commerces.
La modernité, c’est la ruralité. L’espoir, c’est l’espace. Il est encore temps de revenir sur cette décision en donnant des instructions pour faire cesser la casse des classes et pour sacraliser la ruralité. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Cécile Cukierman applaudit également.)
pénurie de personnels médicaux dans les établissements scolaires
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Perrot, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Évelyne Perrot. Ma question s’adressait à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, mais il est absent ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Les infirmières scolaires viennent de tirer la sonnette d’alarme dans la presse locale de mon département. Nous savons que leur situation est emblématique de ce que vivent leurs consœurs sur le territoire national.
Dans mon département de l’Aube, on ne compte que quarante-quatre infirmières scolaires, alors que les besoins ne cessent d’augmenter. Celles-ci se partagent entre plusieurs établissements dans différents secteurs, perdant beaucoup de temps en déplacements.
Au lycée, une infirmière doit être présente quotidiennement, ce qui n’est pas le cas en primaire et au collège. Ses fonctions sont multiples : suivi de la prévention, organisation d’actions de santé et maintenant tracing pour la covid. Elle n’a plus suffisamment de temps pour être à l’écoute des élèves. Il faudrait au moins un poste fixe par établissement.
Des infirmières à la retraite ne demandent pas mieux que d’effectuer des vacations, voire d’occuper des postes dans l’éducation nationale, mais les règles de cumul emploi-retraite limitent cette possibilité. En outre, le système fiscal qui les ferait passer dans une autre tranche d’imposition se révèle peu motivant.
Malheureusement, ce qui est vrai pour les infirmières l’est également pour les orthophonistes et pour les médecins scolaires. Le besoin de professions médicales à l’école est plus criant que jamais.
Madame la secrétaire d’État, concernant les infirmières scolaires, pour parer les manques les plus urgents, envisagez-vous, comme pour les médecins, de faire sauter le plafond de cumul emploi-retraite ? À plus long terme, allez-vous revoir à la hausse leurs grilles de rémunérations afin de les maintenir plus longtemps dans l’emploi, rendant ainsi leur profession plus attractive ?
Enfin, votre ministère s’est-il penché sur le problème des professions médicales scolaires ? Quel est votre plan pour augmenter les effectifs ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la jeunesse et de l’engagement.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de la jeunesse et de l’engagement. Madame la sénatrice Perrot, vous l’avez rappelé, la santé des enfants et des adolescents est essentielle. On a vu à quel point la médecine scolaire, les infirmières, les médecins, mais aussi les conseillers techniques et les conseillers principaux d’éducation (CPE) avaient été des piliers dans cette période de crise sanitaire, qui n’est pas terminée.
À cette occasion, la question de la santé mentale de ces enfants et adolescents est apparue plus fortement. Madame la sénatrice, d’une certaine manière, vous avez fait un plaidoyer en faveur de la reconnaissance de ces professionnels et de leurs engagements, en soulignant à quel point ils sont essentiels.
Le projet du ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports et de son ministre Jean-Michel Blanquer est évidemment d’aller vers plus de prévention, de revaloriser ces métiers pour recréer de l’attractivité.
Il est vrai qu’il est encore beaucoup trop difficile de trouver des médecins scolaires. De telles difficultés ne sont pas seulement liées aux spécificités de la médecine scolaire, c’est bien plus large que cela, les offres de postes restent ouvertes et leur nombre est stable. Aujourd’hui, le rendement du concours est encore insuffisant.
C’est la raison pour laquelle les premières actions qui ont été menées, au-delà des questions de mobilité, ont conduit à développer une formation spécialisée transversale, de manière à créer plus d’attractivité. Il s’agissait d’encourager des vocations en revalorisant financièrement les indemnités, d’abord dans les territoires les plus difficiles.
Ainsi, depuis 2018, tous ceux qui exercent au moins dans un établissement classé en réseau d’éducation prioritaire (REP) ou REP+ gagnent 1 000 euros net annuels en plus. En 2019, les médecins scolaires ont bénéficié d’une revalorisation un peu plus large, de 950 euros bruts par an. En 2021, cette revalorisation se traduit par une augmentation moyenne pour les médecins scolaires de plus de 1 775 euros annuels.
La question des rémunérations est fondamentale – c’est d’ailleurs le nerf de la guerre –, mais nous sommes au début du chemin qui doit conduire à revaloriser ce métier, à recréer de l’attractivité et de la reconnaissance pour que ces professionnels aient envie de travailler au sein des établissements scolaires. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
action du gouvernement contre la délinquance
M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Valérie Boyer. Monsieur le ministre de l’intérieur, ma question porte sur les résultats de la délinquance publiés par votre ministère.
Je tiens tout d’abord à rendre hommage aux forces de l’ordre et à leur dévouement – je crois pouvoir associer à cet hommage l’ensemble de mes collègues.
Oui, les atteintes aux biens et les manifestations ont baissé, c’est une bonne chose, même si l’on ignore ce que cette baisse doit au télétravail et au confinement.
En revanche, oui, les atteintes aux personnes ont augmenté et c’est le plus douloureux. Cela touche l’intégrité corporelle des personnes. Certaines d’entre elles ont peut-être entendu, avant d’être agressées, « calmez-vous, ça va bien se passer » ! (Rires sur les travées du groupe Les Républicains.)
Monsieur le ministre, comment expliquez-vous cette flambée des agressions physiques dans notre pays ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ça va bien se passer ! (Sourires.)
M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur. Madame la sénatrice Boyer, dans votre département des Bouches-du-Rhône, les atteintes aux biens ont diminué de 13,5 % et les violences contre les personnes ont augmenté de 2,8 %. Tels sont les chiffres qu’a dévoilés la préfète de police avant-hier et dont je sais que vous avez pris connaissance.
Le maire Les Républicains des neuvième et dixième arrondissements, M. Royer-Perreaut – vous le connaissez bien –, dans le cinquième secteur de Marseille que représente le député M. Guy Teissier, a indiqué dans la presse, hier, qu’il soutenait le Président de la République, notamment en raison des moyens très importants que le Gouvernement avait investis pour lutter contre l’insécurité dans une ville que vous connaissez bien. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Cela représente, madame la sénatrice, 42 % d’augmentation de saisies de drogue et 2 000 trafiquants interpellés dans la ville de Marseille, soit 100 % d’augmentation et 147 % d’augmentation de confiscation d’avoirs. En outre, 120 médiateurs ont été mobilisés pour les bataillons de la prévention qu’a développés Nadia Hai.
La secrétaire départementale du groupe Les Républicains, Mme Martine Vassal, a souligné ce progrès, tout comme le maire socialiste de Marseille, Benoît Payan, ce qui prouve que notre action est saluée par les acteurs de terrain. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Enfin, madame la sénatrice, puisque vous interviendrez sans doute de nouveau à la fin de ma réponse, je vous livre cette citation. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sophie Primas. Calmez-vous, ça va bien se passer !
M. Gérald Darmanin, ministre. « Je n’adhère pas au discours de LR qui décrit une France qui n’est pas tout à fait la mienne, une France nostalgique, recroquevillée sur elle-même. Notre pays a plus de force qu’on le croit. J’ai trouvé que la formation politique dont je suis membre a dérivé. » Ces mots sont d’Éric Woerth, que je vous demande de relire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Huées sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sophie Primas. Zéro !
M. Gérald Darmanin, ministre. Il est le président de la commission des finances de l’Assemblée nationale, issu de l’opposition, et c’est un homme de bien. Permettez, monsieur Retailleau, qu’il y ait des gens qui préfèrent la France aux combinaisons partisanes ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour la réplique. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Valérie Boyer. Je croyais poser ma question au ministre des Français, pas à un chef de parti, en pleine campagne électorale. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Nous sommes ici au Sénat, nous sommes la représentation nationale. Eh oui ! Pendant cinq ans, vous avez laissé ensauvager la France. (Exclamations sur les travées des groupes RDPI et SER.)
Je vais vous citer des données qui figurent non pas dans Télé-Loisirs (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.), mais sur le site du ministère de l’intérieur. Les Français victimes n’ont pas un sentiment d’insécurité, mais ont ressenti dans leur chair ces agressions physiques : en cinq ans, +18 % de coups et blessures, +60 % de risques, +38 % d’agressions sexuelles. En trois ans, les agressions envers les élus ont été multipliées par trois. Toutes les heures, un gendarme ou un policier est blessé.
De plus, la Cour des comptes a démontré qu’il y avait moins de policiers sur le terrain et pointé une chute du taux d’élucidation des crimes et délits.
Monsieur le ministre, il est bien triste de recevoir ce type de réponse quand on pose une question. Les Français méritent mieux que ces discours électoralistes. Ils méritent des résultats et certainement pas la condescendance, le mépris, voire le sexisme dont vous faites preuve. (M. le ministre de l’intérieur le nie.)
On ne peut masquer par ce type de réponse le triste bilan qui est le vôtre en matière de sécurité, domaine qui est resté l’angle mort du quinquennat. Les Français attendent des résultats. Vous avez parlé des moyens là où il fallait des actes.
Les actes ne sont pas au rendez-vous pour lutter contre les agressions physiques, ne vous en déplaise, monsieur le ministre, et ce sont les chiffres de votre ministère qui le prouvent. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
rapport d’oxfam sur la hausse des inégalités
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Angèle Préville. « La première bataille c’est de loger tout le monde dignement. Je ne veux plus d’ici à la fin de l’année avoir des femmes et des hommes dans les rues, dans les bois ou perdus, c’est une question de dignité. » Voilà ce que promettait Emmanuel Macron en arrivant au pouvoir en 2017.
Que reste-t-il de cette belle promesse ? Rien, et ce qui est advenu est même pire. Notre pays compte 4,6 millions de Français mal logés, dont sans doute 300 000 personnes sans domicile fixe. La construction de logements sociaux s’est effondrée sous l’effet de vos mesures : on en recense environ 80 000 par an, là où il en faudrait 150 000. Telle est la brutalité de votre bilan.
L’abbé Pierre disait que « les hommes politiques ne connaissent la misère que par les statistiques » et qu’« on ne pleure pas devant les chiffres ». Quelque 100 000 bébés naissent désormais chaque année dans le dénuement le plus total, avec des parents dans l’impossibilité de leur acheter du lait et des couches sans l’aide alimentaire. Voilà la triste réalité.
De fait, durant votre quinquennat, les inégalités n’ont cessé de se creuser et la pauvreté a explosé, tout comme la fortune des milliardaires, qui a augmenté de 86 % en un an – oui, 86 % ! D’une certaine manière, vous accompagnez les riches dans une marche inexorable vers une forme de sécession.
Je pourrais vous asséner les nombreux constats dressés par le rapport Oxfam et par la Fondation Abbé Pierre, tous plus alarmants les uns que les autres, mais avez-vous envie de les écouter ?
Les années qui viennent de s’écouler sont perdues pour les Français, tout au moins pour « ceux qui ne sont rien », comme on dit chez vous. Leur mise au ban tient à votre cynisme, car ils ne font pas partie de votre électorat.
Pourtant, notre pays a signé au mois de septembre 2015 l’Agenda 2030, qui est un programme universel de développement durable comportant dix-sept objectifs, dont le premier s’intitule singulièrement « Pas de pauvreté ».
Que comptez-vous faire pour pallier cet oubli monstrueux ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du logement.
Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement. Madame la sénatrice Angèle Préville, ce que nous avons fait pour les personnes à la rue, c’est ce que vous n’avez pas fait dans la mandature précédente. (Exclamations sur les travées des groupes SER et Les Républicains.)
Nous avons ouvert 60 000 places d’hébergement. Nous sommes ainsi passés de 140 000 places à 200 000 places. Surtout, pour la première fois, nous avons arrêté de fermer les places aux beaux jours. Pendant toutes les mandatures précédentes, cela ne dérangeait personne que tout le monde se précipite pour loger les personnes en difficulté dans des structures d’hébergement durant l’hiver et que nous fermions ces structures dès que les beaux jours arrivaient.
Nous travaillons désormais à renforcer la qualité de ces places pour pouvoir répondre à tous les besoins. Quand je suis arrivée au ministère du logement, j’ai demandé à ouvrir 1 500 places pour des femmes qui ne trouvaient pas d’hébergement à leur sortie de la maternité et qui étaient prises en charge dans les hôpitaux. Nous avons ouvert des places pour ces femmes avec leur bébé.
L’hébergement n’est pas une fin en soi : la solution est dans le logement. C’est la raison pour laquelle nous avons lancé, avec le Président de la République, le plan Logement d’abord pour faciliter l’accès au logement. Depuis 2018, ce sont 330 000 personnes qui sont sorties de la rue ou des structures d’hébergement pour accéder au logement.
On le voit dans nos rues : pour la deuxième année consécutive, à Paris, lors de la Nuit de la solidarité, le nombre de personnes à la rue a baissé significativement.
On le voit aussi dans le travail que nous menons avec les associations. Alors que, jusqu’à présent, elles faisaient la trésorerie pour l’État, elles sont désormais enfin financées.
Oui, nous nous préoccupons des plus fragiles. Oui, nous nous préoccupons des personnes à la rue. Ce gouvernement a fait plus qu’aucune mandature précédente. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour la réplique.
Mme Angèle Préville. Madame la ministre, nous parlons de votre bilan.
Réduire la pauvreté passe nécessairement par l’augmentation des salaires et par celle du SMIC à hauteur de 15 %, comme nous le proposons.
Les faits sont têtus : la fracture sociale est abyssale, votre bilan désastreux. Cela devrait à tout le moins susciter une réaction de votre part – question d’humanisme sans doute… (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
rachat de la branche nucléaire de general electric par edf
M. le président. La parole est à M. Cédric Perrin, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Cédric Perrin. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance, dont je regrette l’absence.
Le chef de l’État sera demain à Belfort, devant les salariés de General Electric, pour annoncer une bonne nouvelle. C’est un projet que les élus du territoire de Belfort ont défendu collectivement : l’ancienne branche énergie d’Alstom revient sous pavillon français.
Mme Sophie Primas. Très bien !
M. Cédric Perrin. Loin de moi l’idée de jouer les rabat-joie. Cette annonce met fin à près de dix ans de batailles syndicales, de tensions entre salariés et directions d’usine, de reniements de la parole donnée par l’État et de mensonges des dirigeants de General Electric.
C’est une victoire que nous devons en partie à la patience des salariés.
Remercions-les de ne pas s’attarder vainement sur le cynisme d’un président qui a lui-même organisé, lorsqu’il était à votre place en 2014, madame la ministre déléguée, le dépeçage de leur usine.
Remercions-les de supporter la politique énergétique sans vision d’un gouvernement qui agit dans la précipitation, à quelques semaines de l’élection présidentielle.
Remercions-les d’avoir attendu la conversion, tout aussi récente que miraculeuse, du Président de la République au nucléaire. Après la fermeture de Fessenheim, il multiplie les annonces en la matière et son déplacement à Belfort en est la preuve. (M. Laurent Duplomb s’exclame.)
Ce que le Président de la République voit comme une étape de son triomphe jupitérien est plutôt un nouveau pas douloureux vers Canossa, tant sa politique énergétique a été marquée par l’inconstance et les renoncements.
Aussi, je n’ai qu’une question : avez-vous réellement une stratégie pour la relance du nucléaire français ou n’est-ce là que du cynisme électoral, une fois de plus ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’industrie.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’industrie. Monsieur le sénateur Perrin, la politique énergétique que nous menons est fondée sur le professionnalisme et la rigueur (Marques d’ironie sur les travées du groupe Les Républicains.).
Un rapport a été commandé à la société Réseau de transport d’électricité (RTE) pour que nous puissions, sur la base de la précédente programmation pluriannuelle de l’énergie, tirer les conséquences de l’accélération de notre engagement dans la réduction de notre empreinte carbone. Cela concerne toutes les activités, qu’il s’agisse du transport pour lequel nous développons la voiture électrique et l’hydrogène bas-carbone ou de l’industrialisation de notre pays, qui nécessite que nous augmentions notre stock d’électricité. L’écriture de ce rapport a pris deux ans (Mêmes mouvements.), 4 000 experts y ont été associés et son contenu a été transmis de manière transparente à l’ensemble des organisations environnementales.
Par conséquent, je ne crois pas que le Gouvernement se soit réveillé quelques semaines avant l’échéance électorale pour agir. (Mme Sophie Primas s’exclame.)
En outre, ce rapport est très clair et les faits sont têtus. Barbara Pompili pourra le confirmer : nous disposons de trois leviers pour être au rendez-vous de nos engagements énergétiques en 2030 et en 2050 et pour produire une électricité qui soit bas-carbone et compétitive. Chacun sait désormais l’importance de ce dernier point, car c’est ainsi que nous pourrons faire le maximum en matière d’efficacité énergétique.
Voilà quatre ans que nous avons investi massivement dans l’efficacité énergétique, que ce soit par le biais de processus industriels ou par celui de la rénovation thermique. Je salue à cet égard le travail exceptionnel mené par Emmanuelle Wargon et Barbara Pompili.
Une autre de nos priorités est d’accélérer le déploiement des énergies renouvelables, car la politique énergétique, loin de reposer sur un seul pilier, exige aussi que nous développions ce type d’énergies. Là encore, nous avons investi massivement, non seulement dans leur déploiement, mais aussi dans les filières d’équipements industriels de l’énergie renouvelable, comme le montre l’exemple de l’éolien marin.
Enfin, nous veillons à élaborer une nouvelle feuille de route pour le nucléaire, puisque ce travail a été engagé il y a deux ans. Dans le plan de relance, 470 millions d’euros sont consacrés au nucléaire et l’entreprise EDF a été confortée dans sa structure bilancielle pour le nucléaire.
Nous ne faisons donc qu’appliquer une politique qui est judicieuse pour notre industrie et pour notre empreinte carbone. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Cédric Perrin, pour la réplique.
M. Cédric Perrin. Madame la ministre, j’ai vécu sur le terrain, à Belfort, avec les salariés, la population et les syndicats, les rebondissements d’un combat difficile pour sauvegarder cet outil de production, cette compétence développée de longue date qui a permis à la France de gagner son indépendance énergétique.
Pour ma part, je ne retiens que les 1 300 salariés qui ont perdu leur emploi à Belfort et les compétences gaspillées en masse, parce que nous avons tergiversé pendant trop longtemps. Le gâchis est monumental.
Ce que je regrette le plus, toutefois, c’est que vous voudriez nous faire croire à un cadeau, alors que tout cela n’est que cynisme. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
négociations commerciales dans le secteur de l’agroalimentaire
M. le président. La parole est à M. Jean Bacci, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean Bacci. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Monsieur le ministre, des distributeurs bradent l’alimentation et le travail de nos agriculteurs, en prétextant préserver le pouvoir d’achat de nos concitoyens. Or la vitalité de nos territoires passe par le renouvellement générationnel du monde agricole et par la sécurisation des PME transformatrices – c’est tout l’intérêt de la loi visant à protéger la rémunération des agriculteurs, dite Égalim 2.
Alors que les négociations commerciales annuelles entre la grande distribution, les industriels et les filières agricoles, qui se termineront le 1er mars prochain, sont particulièrement tendues, deux points concentrent les attentes.
D’une part, il faut que les résultats de ces négociations soient scrupuleusement analysés par vos services, pour que nous puissions savoir si la matière première agricole en a fait les frais, alors que la loi prévoit que son prix ne doit pas être négociable. Quand on entend un géant de la distribution vanter la côte de porc à 1,20 euro et la baguette à 0,29 euro, on peut sérieusement en douter.
D’autre part, il faut que la loi soit strictement respectée. Je vous ai déjà alerté sur la nécessité d’un arsenal de sanctions suffisamment dissuasif, car, objectivement, la médiation ne permet pas l’évitement des pratiques abusives. On ne peut accepter que les industriels répercutent la hausse de leurs charges en diminuant le prix de la matière première agricole et de la transformation. Seul un contrôle très strict de ces dispositions – vous vous êtes visiblement engagé à les multiplier, monsieur le ministre – permettra d’accompagner les agriculteurs et les PME vers la rentabilité face à l’explosion des coûts de production.
Dans la filière porcine, en un an, les prix payés aux producteurs ont diminué de 14 %, alors que les coûts de production ont augmenté de 27 %.
S’il est confirmé que des pratiques illégales perdurent, il faudra passer des contrôles aux sanctions, afin de dissuader les récalcitrants. Le Gouvernement ne peut pas avoir la main qui tremble.
Monsieur le ministre, vous engagez-vous à sanctionner les contrevenants avant cette échéance du 1er mars prochain ? Rendrez-vous publics les résultats chiffrés de ces négociations ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)