compte rendu intégral
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
Mme Jacqueline Eustache-Brinio,
Mme Martine Filleul.
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Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
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Hommages à Paul Girod, ancien sénateur, et au sergent Maxime Blasco
M. le président. Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, c’est avec beaucoup de tristesse que nous avons appris hier le décès de notre ancien collègue Paul Girod, qui fut sénateur de l’Aisne de 1978 à 2008 et présida de très nombreuses séances en tant que vice-président du Sénat. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mmes et MM. les membres du Gouvernement, se lèvent.)
Tout au long de sa vie politique, Paul Girod fut un homme de convictions et d’engagement.
Ses convictions, il les défendit avec intelligence, passion et mesure au sein de notre assemblée, notamment lors des débats sur le projet de loi portant abolition de la peine de mort, dont nous célébrons le quarantième anniversaire, dont il fut rapporteur devant le Sénat et que finalement il vota.
Je pense aussi à son infatigable implication, dans nos travées et au sein des commissions des finances et des lois, pour défendre l’aménagement du territoire et l’autonomie financière des collectivités territoriales.
« On ne pourra pas faire demain sans les collectivités territoriales comme on l’a fait hier », disait-il en 2004 devant le Sénat, « parce que, en définitive, c’est l’adhésion de notre population à l’idée même de République qui passe par son adhésion à la gestion de ce qu’elle connaît le mieux, la collectivité locale avec laquelle elle est en contact permanent ».
Conseiller régional, vice-président du conseil régional de Picardie de 1985 à 1988, il présida ensuite pendant dix ans son département de l’Aisne.
Maire de la commune de Droizy depuis 1958, Paul Girod venait, l’année dernière, d’être réélu, pour un douzième mandat consécutif, devenant ainsi le plus ancien maire de France. C’était bien là, pour lui, le plus beau de tous les mandats.
Ce record de longévité, qui l’amusait, témoignait bien sûr de son attachement au mandat d’édile, pour lui le plus passionnant. Mais il témoigne aussi et surtout de son extraordinaire engagement au service de son territoire et de ses concitoyens. Il a servi la France, avec sincérité. Il le disait encore, à l’aube de sa dernière réélection : « Ce n’est pas du dévouement, c’est un honneur. »
Au nom du Sénat tout entier, je veux assurer sa famille et ses proches de notre sympathie.
Paul Girod était enraciné dans cette terre de l’Aisne qui avait été le théâtre de terribles combats lors de la Première Guerre mondiale, une terre qui a tant souffert pour notre pays.
C’est avec la même émotion que nous avons appris la disparition du sergent Maxime Blasco, tombé vendredi dans le cadre d’une action de combat de l’opération Barkhane.
Au nom du Sénat tout entier, je veux saluer le courage et l’abnégation de ce soldat mort pour la France en luttant contre le terrorisme djihadiste au Sahel.
En notre nom à tous, je veux assurer sa famille de notre profonde compassion et lui présenter nos condoléances les plus attristées.
Sa carrière militaire fut marquée par de multiples actes héroïques. Décoré par le Président de la République de la médaille militaire, il fut avant tout un exemple de courage et d’humilité.
Il faisait partie de ces hommes dont il ne faut pas attendre qu’ils soient morts au champ d’honneur pour prendre conscience qu’ils sont grands.
Je pense à ses frères d’armes de la force Barkhane et du 7e bataillon de chasseurs alpins, qui s’inspirent de son courage et sont mus par le même amour de la France.
Voilà deux hommes aux histoires très différentes, qui ont servi notre pays avec dévouement et grandeur.
Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, je vous invite maintenant à observer une minute de silence en leur hommage. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mmes et MM. les membres du Gouvernement, observent une minute de silence.)
3
Questions d’actualité au Gouvernement
M. le président. Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.
Chacun de vous, mes chers collègues, sera attentif au respect des uns et des autres, ainsi que du temps de parole.
hausse des prix de l’énergie
M. le président. La parole est à M. Joël Bigot, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Joël Bigot. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, le prix du gaz va bondir de 12,5 % ce vendredi à l’approche de la saison hivernale. Cette augmentation, selon la Commission de régulation de l’énergie, perdurera jusqu’au printemps prochain. Elle représente une dépense supplémentaire de 600 euros par foyer sur l’année, sans compter l’augmentation parallèle du prix de l’électricité, que les associations de consommateurs évaluent à 10 % environ.
Le renflouement du chèque énergie de 100 euros est une bonne nouvelle, étant entendu que nous la demandons chaque année depuis 2019. Néanmoins, il est urgent de trouver de nouveaux outils de régulation des prix de l’énergie.
Par le biais de la TVA, dont le taux est toujours à 20 % sur le gaz et l’électricité, les recettes de l’État vont progresser. La baisse, même temporaire, du taux de TVA est une piste parmi d’autres pour soutenir les Français qui verront leur pouvoir d’achat mis à mal. En Italie et en Espagne, les gouvernements ont déjà baissé les taxes pour amortir les effets de la hausse sur le budget des ménages.
Il s’agit là de dépenses contraintes, incompressibles et de première nécessité pour l’ensemble des ménages. Si rien n’est fait, la précarité énergétique, qui touche déjà 7 millions de nos concitoyens, explosera et aggravera encore la paupérisation massive mise en évidence dans un récent rapport de l’Institut national de la statistique et des études économiques, l’Insee.
Monsieur le Premier ministre, vous avez annoncé des « mesures supplémentaires dans les tout prochains jours ». Pouvez-vous aujourd’hui rassurer les Français en présentant les options qui sont sur votre table en vue du débat budgétaire qui va avoir lieu au Parlement ? Qu’allez-vous faire concrètement, dès maintenant, pour aider les Français qui ne pourront pas faire face ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la biodiversité.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Bigot, vous l’avez dit, nous sommes confrontés à une forte hausse du prix de l’énergie, qui repose pour une grande part sur celle du prix du gaz, dans un contexte de reprise économique mondiale, d’augmentation de la demande et, parallèlement, de réduction des productions russe et norvégienne.
Or, vous le savez, la France importe 99 % du gaz naturel qu’elle consomme. Les évolutions des marchés internationaux ont donc des conséquences sur les tarifs de la vente de gaz, et notamment sur les tarifs réglementés, 2,8 millions de ménages étant directement concernés. Les Français sont pourtant protégés de ces variations dues à des facteurs extérieurs par l’Arenh, l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique, ainsi que, précisément, par les tarifs réglementés, qui atténuent fortement cette hausse.
Dans un tel contexte, nous devons toutefois approfondir notre action. Nous agissons en déployant et en renforçant le chèque énergie, qui a bénéficié à près de 6 millions de foyers. Son montant a été l’an dernier de 150 euros en moyenne, mais il a pu monter jusqu’à 277 euros. Afin de parer aux circonstances que nous connaissons, il sera renforcé par un chèque exceptionnel de 100 euros qui sera versé directement dans les boîtes aux lettres de ses 6 millions de bénéficiaires avant la fin de l’année.
Quant au chèque énergie proprement dit, il sera de nouveau versé en 2022 ; les Français le recevront directement dans leurs boîtes aux lettres au mois de mars.
Le dispositif MaPrimeRénov’ doit également permettre, par des aides à la rénovation énergétique, de réduire nos consommations énergétiques, mais aussi de faire baisser les factures.
L’urgence est de mettre en place des dispositifs de plus court terme en relais de ces dispositifs de moyen et long terme. Le Premier ministre l’a rappelé hier, nous travaillons à des mesures qui permettront de faire face à cette situation exceptionnelle.
M. le président. La parole est à M. Joël Bigot, pour la réplique.
M. Joël Bigot. J’entends bien votre réponse, madame la secrétaire d’État. MaPrimeRénov’ est une opération à moyen et long terme. Ce que les Français attendent, ce sont des mesures immédiates. J’en ai proposé quelques-unes, comme la baisse de la TVA. D’autres dispositifs de cette nature doivent pouvoir préserver le pouvoir d’achat des Français, qui risque d’être mis à mal par la situation actuelle. Il faut d’urgence intervenir, via des mesures rapides. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
hausse des coûts d’assurance pour les collectivités
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. Jean-Yves Roux. Ma question s’adresse à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Des collectivités locales, mairies, communautés de communes et départements, sont en train de négocier des contrats d’assurance « Dommages aux biens » et « Responsabilité civile » pour l’année 2022. Comme à l’accoutumée, elles procèdent à des mises en concurrence.
Or, cette année, des élus, notamment du Sud-Est et de l’Occitanie, sont confrontés à des situations inédites : des compagnies d’assurance renommées, tenantes du risque ou non, refusent de candidater sur ces appels d’offres. La raison, nous la connaissons, malheureusement : c’est le risque climatique !
Ces assureurs locaux ont ainsi pour mot d’ordre de se désengager des collectivités du Sud, du bassin méditerranéen notamment, ayant subi des inondations dans les dix dernières années ou disposant de biens immobiliers considérés comme étant à grands risques, tels des campings, des abattoirs ou des pépinières d’entreprises.
Lorsque de très rares compagnies candidatent, leur politique tarifaire explose et n’est pas négociable. À une commune ardéchoise de 10 000 habitants, l’unique candidat assureur impose généreusement une augmentation de 180 %. Une communauté d’agglomération de l’Hérault se voit proposer un tarif passant de 25 000 euros à 167 000 euros en un an. De la même manière, les tarifs des franchises, désormais compris entre 50 000 et 150 000 euros, s’envolent.
Dans ce contexte, certaines collectivités se retrouvent nues et envisagent sérieusement de devenir leur propre assureur, espérant que les catastrophes naturelles futures préserveront leurs bâtiments classés et leur capacité à agir, y compris pour prévenir les risques climatiques.
Comment comptez-vous accompagner ces nombreuses collectivités devant l’abandon silencieux qu’elles subissent de la part des compagnies d’assurances face au risque climatique ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de la ruralité.
M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité. Monsieur le sénateur, cher Jean-Yves Roux, je partage votre préoccupation concernant les collectivités qui indiquent éprouver des difficultés dans la négociation de leurs contrats d’assurance.
Je voudrais tout d’abord vous donner quelques éléments de contexte pour comprendre cette situation, puisque, dans les années récentes, un grand nombre d’assureurs se sont intéressés aux risques subis par les collectivités. Il n’était pas rare qu’une dizaine d’entreprises répondent aux appels d’offres formulés par les collectivités. Il en découlait logiquement une pression à la baisse sur les tarifs des polices d’assurance.
Depuis quelques années, les collectivités locales font face à une sinistralité croissante. Je pense bien sûr aux incendies, mais également aux événements climatiques graves que vous citez, notamment dans les régions montagneuses, ou encore aux sinistres sur les véhicules.
L’augmentation du coût des risques assurables a conduit certains acteurs à se retirer du marché. Parallèlement, les assureurs restant sur le marché ont augmenté leurs tarifs, par exemple en relevant les franchises. À terme, cette situation pourrait présenter des risques. Le premier et le plus important de ces risques est le suivant : certaines collectivités pourraient tout simplement renoncer à souscrire une police d’assurance. Le cas échéant, le moindre événement imprévu pourrait leur causer des difficultés financières absolument insurmontables.
Je précise que ce problème reste pour le moment très localisé. Toutefois, même en l’absence d’alerte au niveau national, nous devons examiner ce sujet de préoccupation de manière très précise. Je vous propose donc qu’avec le ministère de l’économie et des finances nous étudiions la situation afin d’identifier les leviers qui permettraient aux élus de s’assurer correctement.
J’esquisserai une première piste : une partie de la réponse se trouve peut-être dans l’idée d’accompagner les collectivités dans leurs travaux de protection contre les risques – je pense aux mises aux normes incendie ou à la prévention des inondations. Des financements existent déjà : subventions d’investissement, crédits des agences de l’eau, mobilisation de la taxe de gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (Gemapi), sujet que vous connaissez très bien puisque nous y travaillons déjà ensemble. (Encore des taxes ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
En tout état de cause, nous reviendrons vers vous sur cette question, qui est extrêmement importante pour les collectivités. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)
plan social de ferropem
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Guillaume Gontard. Monsieur le Premier ministre, depuis deux ans, le groupe Ferroglobe, spécialisé dans le silicium et les ferroalliages, a engagé une restructuration massive de ses sites français. Fin mars, le groupe annonce l’arrêt de la production de deux de ses principaux sites : Château-Feuillet en Savoie et l’usine des Clavaux en Isère. Ce sont 357 emplois qui sont menacés, 357 familles qui depuis plusieurs mois vivent dans l’incertitude du lendemain, la peur et la colère au ventre.
Production industrielle indispensable à la souveraineté de la France, le silicium équipe les panneaux solaires comme les microprocesseurs. Il y va aussi d’un savoir-faire industriel d’excellence. Tout cela est menacé par la cupidité d’un groupe qui n’a plus grand-chose d’industriel.
Monsieur le Premier ministre, vous nous avez promis, ici même, que vous feriez tout pour éviter de nouvelles délocalisations d’industries indispensables à notre souveraineté.
Vous nous avez signifié, ici même, que « ce gouvernement est pleinement mobilisé pour la construction d’une filière photovoltaïque souveraine et durable. »
Vous avez d’ailleurs annoncé, et je tiens à saluer cette annonce, 18 milliards d’euros d’appels d’offres pour la fabrication de panneaux photovoltaïques. Mais, si nous renonçons à toute intervention publique, alors ces 18 milliards d’euros financeront l’industrie chinoise, avec un bilan humain et environnemental désastreux.
Pourtant, à Ferropem plus qu’ailleurs, les solutions sont sur la table. Les salariés et les organisations syndicales ont élaboré un contre-projet ambitieux et réaliste. Son adoption permettrait de maintenir l’activité sur tous les sites du groupe, de répondre ainsi aux nombreuses commandes qui ont été passées au titre des prochains mois et d’engager la modernisation nécessaire des installations.
Monsieur le Premier ministre, la France a et aura besoin de silicium. Après deux ans d’absence sur ce dossier, vous ne pouvez pas laisser Ferroglobe fermer ne serait-ce qu’un seul site. Nous vous demandons de suspendre le PSE, le plan de sauvegarde de l’emploi, d’investir dans Ferropem et, au besoin, de recourir à la nationalisation temporaire des sites. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean Castex, Premier ministre. Monsieur le sénateur Guillaume Gontard, je vous confirme les propos que j’ai tenus dans cette enceinte et ailleurs : le Gouvernement vise un objectif de relocalisation des activités dans notre pays et de reconquête de notre souveraineté industrielle, pendant trop d’années délaissée. Le dossier qui fait l’objet de votre question est en effet symbolique.
À la suite de ce que vous avez dit, je rappelle qu’il s’agit d’un groupe international appelé Ferroglobe, qui est un grand producteur de silicium et d’alliages de silicium et de manganèse. Ce groupe a racheté en 2005, si mes informations sont exactes, la branche électrométallurgie de Péchiney, Ferropem. Il dispose de six sites en France, dont les deux que vous avez cités, et possède notamment une usine de production de manganèse située à Dunkerque.
Vous l’avez rappelé, ce groupe a annoncé en mars dernier une vaste restructuration au plan international, prévoyant la fermeture de deux de ses sites français, à savoir Château-Feuillet en Savoie et Les Clavaux dans votre beau département de l’Isère, ainsi que la suppression de 357 postes de travail.
Je confirme au Sénat et à vous-même, monsieur le sénateur, la pleine mobilisation de l’État pour obtenir une inflexion forte dans les décisions annoncées par ce groupe. Il nous faut en effet, comme vous l’avez dit, préserver, dans le cadre d’une stratégie globale, non seulement industrielle mais aussi photovoltaïque, la filière du silicium en France. Cette filière est stratégique à plusieurs titres, dès lors qu’il s’agit de métaux clés pour la transition énergétique, l’électronique et, plus généralement, la résilience de nos approvisionnements, sans compter, ai-je besoin de le dire devant le Sénat, les enjeux posés en matière d’emplois dans les territoires que vous avez cités.
Je commence par l’emploi : nous veillons de très près à ce que les plans de sauvegarde soient les plus ambitieux possible, comme nous le faisons partout lorsqu’il y a des restructurations. Mais vous avez raison : cela ne suffit pas. Il faut trouver avec la direction de cette entreprise et son actionnaire, Ferroglobe, des mesures alternatives – je le dis très clairement – à l’arrêt de l’exploitation de ces deux usines. À cet égard, je me réjouis que les discussions aient pu prendre un tour nouveau depuis quelques semaines à peine, sous l’égide d’Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée à l’industrie. L’objectif du Gouvernement est clair : trouver avec l’entreprise des moyens permettant d’envisager le maintien de ces deux sites de production.
L’État a fait plusieurs propositions aux dirigeants de Ferropem afin de leur permettre, puisque telle était la finalité du plan de restructuration, de renforcer la compétitivité des sites en mobilisant différentes mesures de soutien, notamment celles, fort utiles et qui seront préservées en 2022 dans le cadre du projet de loi de finances qui vous sera proposé, relevant du plan de relance.
Ces propositions font actuellement l’objet d’échanges constants et très approfondis entre l’entreprise et les services de l’État. Le processus de recherche de repreneurs potentiels se poursuit – vous l’avez évoqué –, via la mobilisation d’un cabinet de consultants spécialisés ainsi que des services de Business France.
À ce stade, je le rappelle, huit manifestations d’intérêt sont en cours d’analyse. Ne doutez pas de notre détermination à enrayer ce qui, au mois de mars, apparaissait comme inéluctable. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Pierre Louault applaudit également.)
seuil minimum de paiement par carte bancaire dans les commerces
M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Joël Guerriau. Le Président de la République vient d’annoncer la défiscalisation des pourboires payés par carte bancaire. (Mme Laurence Rossignol ironise.)
En avril 2020, je vous avais adressé dans le même sens une question écrite sollicitant un relèvement du plafond des paiements sans contact à 50 euros. En faisant appliquer cette mesure, vous aviez acté que manipuler la monnaie engendrait un risque sanitaire.
De plus en plus de Français, d’ailleurs, utilisent désormais exclusivement la carte bancaire. Or, paradoxalement mais en toute légalité, certains commerçants refusent la carte bancaire en dessous d’un certain seuil.
Ainsi, un jeune désargenté peut avec sa carte bleue acheter un fruit dans un supermarché, mais il sera contraint, pour pouvoir utiliser ce mode de paiement, de prendre deux consommations dans un bar, d’acheter un paquet de cigarettes plus un jeu à gratter, ou deux paquets de cigarettes, dans un bureau de tabac, parce qu’un montant minimum, supérieur au prix d’un seul produit – comme par hasard ! –, est parfois exigé.
Il est clair qu’en pareil cas le seul objectif est de pousser à la consommation. Or il s’agit souvent de produits tels que le tabac, l’alcool ou les jeux, provoquant des addictions particulièrement nocives. Cela fait déjà plusieurs années que beaucoup plaident pour interdire par la loi cette pratique arbitraire consistant à fixer un montant minimum en dessous duquel le paiement par carte bancaire est refusé.
Ma question est simple, monsieur le ministre : envisagez-vous des mesures permettant de répondre à cette attente forte de notre jeunesse ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – M. Martin Lévrier applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises.
M. Alain Griset, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des petites et moyennes entreprises. Monsieur le sénateur Joël Guerriau, vous avez raison, de plus en plus de consommateurs utilisent la carte bancaire et, désormais, le paiement sans contact pour leurs achats.
Je trouve d’ailleurs tout à fait positif que le nombre de commerçants acceptant ces paiements par carte ait progressé, en quatre ans, de 60 %. Divers frais d’encaissement sont facturés au commerçant : la commission interbancaire de paiement, limitée à 0,23 %, rémunère les banques de l’émetteur et du récepteur, et une commission est prélevée par les intermédiaires, qui mettent parfois en œuvre, de surcroît, une facturation forfaitaire par opération. Cette situation conduit un certain nombre de commerçants à fixer un seuil minimal afin de limiter le volume de ces prélèvements.
Dans le cadre des Assises du commerce que nous lancerons au mois de novembre, nous allons traiter de ce sujet. Nous étudierons avec les opérateurs la possibilité de diminuer le taux du prélèvement perçu par les intermédiaires et travaillerons à ce que l’ensemble des consommateurs puissent utiliser leur carte bancaire y compris pour des achats modestes. Je rappelle que, pendant la crise sanitaire, la carte bancaire a contribué à éviter la transmission du virus par la manipulation de la monnaie.
Vous avez raison, monsieur le sénateur, et j’espère que nous pourrons très rapidement satisfaire votre demande. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau, pour la réplique.
M. Joël Guerriau. Je vous remercie, monsieur le ministre, de me rassurer quant à votre détermination à trouver des solutions.
Je le rappelle, 20 % de nos étudiants vivent sous le seuil de pauvreté et 75 % d’entre eux se plaignent d’avoir des fins de mois extrêmement difficiles. Le prix du logement, surtout à Paris, est si élevé qu’une fois soustrait il reste souvent très peu de marge. Après qu’un étudiant a payé son logement, qui est bien souvent minuscule, il faut bien qu’il ait de quoi retrouver ses amis à la terrasse d’un café !
Cette question ô combien importante a été soulevée à plusieurs reprises par des étudiants. J’aimerais que nous trouvions une solution une fois pour toutes.
M. le président. Il faut conclure !
M. Joël Guerriau. Il n’est pas normal qu’en matière de paiement par carte bancaire les commerces n’appliquent pas tous la même règle. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
situation militaire au mali
M. le président. La parole est à M. Alain Joyandet, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Alain Joyandet. En ce moment même, aux Invalides, se prépare la cérémonie en hommage au caporal-chef Maxime Blasco. Comment ne pas être, par la pensée, auprès de tous ces soldats et de toutes ces familles qui ont perdu un frère d’armes ou un être cher ? Comment ne pas être aux côtés de tous ceux qui se sont engagés au service de la France et de la paix, sur notre territoire ou à l’extérieur ?
Dans ce contexte, madame la ministre des armées, l’annonce de la réorganisation de la force Barkhane est perçue comme un désengagement de la France au Sahel. Le Président de la République a dit lui-même que nous n’avions pas vocation à rester au Sahel. Le Mali est en train de négocier avec des forces russes privées, dites groupe Wagner, pour assurer à l’avenir sa sécurité.
Je vous poserai deux questions, madame la ministre.
Tout d’abord, si les négociations entre les Russes et le Mali aboutissent, que fera la France en réaction à un tel accord ?
Ensuite, quel enseignement tirez-vous de notre départ précipité d’Afghanistan, ainsi que de celui de nos alliés des États-Unis d’Amérique ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre des armées.
Mme Florence Parly, ministre des armées. Monsieur le sénateur, permettez-moi de m’associer à l’hommage que le Sénat vient de rendre au sergent Maxime Blasco, mort pour la France. Vous l’avez rappelé, un hommage national lui sera rendu par la Nation tout entière cet après-midi.
Je me suis récemment rendue au Mali. Au cours de ce voyage, j’ai pu non seulement rencontrer nos militaires engagés sur le terrain et leur dire toute ma reconnaissance et toute ma fierté, mais aussi rencontrer le ministre de la défense du gouvernement de transition malien, dans un contexte où en effet circulent des rumeurs, voire des informations, selon lesquelles ledit gouvernement de transition aurait l’intention de contracter avec une société de mercenaires.
J’ai eu l’occasion de dire très clairement et très directement au ministre malien ce que la France pensait de Wagner et, d’une manière générale, des mercenaires. Je lui ai dit aussi ce que la communauté internationale en pensait. Je le répète ici, devant la représentation nationale : si le Mali engage un partenariat avec des mercenaires, il s’isolera.
Il perdra le soutien de la communauté internationale, qui est pourtant très engagée au Mali. Il abandonnera des pans entiers de sa souveraineté – il suffit pour s’en convaincre de regarder ce qui se passe en République centrafricaine aujourd’hui. Loin de diversifier ses partenariats, le Mali s’enfermera au contraire dans un tête-à-tête avec une société de mercenaires.
Pour nous, les choses sont claires : il n’est pas possible de cohabiter avec des mercenaires.
Dans ce contexte, les propos tenus par le Premier ministre du gouvernement malien devant l’Assemblée générale de l’ONU, samedi dernier, sont inacceptables. Accuser la France d’abandonner le Mali au lendemain de la mort d’un de nos soldats, c’est proprement indécent ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes UC, Les Républicains et INDEP. – M. Jean-Pierre Sueur applaudit également.)