PRÉSIDENCE DE M. Roger Karoutchi
vice-président
M. le président. L’amendement n° 6 rectifié, présenté par Mmes Noël, Joseph, Garriaud-Maylam, Muller-Bronn et Bonfanti-Dossat, MM. Houpert et Savin, Mmes Dumont et Thomas et MM. Bouchet, Duplomb et J.M. Boyer, est ainsi libellé :
Alinéas 6 à 20
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Sylviane Noël.
Mme Sylviane Noël. Nous en débattons maintenant depuis près de trois heures : l’extension du passe sanitaire bafoue la plupart des valeurs de notre pays. C’est une véritable remise en cause de notre modèle de société puisque, pour la première fois dans notre pays, les espaces publics, les actes du quotidien, les établissements recevant du public, les événements sportifs et culturels seront accessibles de manière différenciée aux citoyens français selon leur état de santé.
Il s’agit d’un très grave recul de nos libertés publiques et de l’égalité de tous les citoyens devant la loi. Une crise sanitaire ne peut devenir le prétexte à une remise en cause de nos principes fondamentaux, tels que l’égalité de tous les citoyens devant la loi et la liberté. Ces principes fondamentaux sont essentiels pour garantir notre État de droit, y compris et surtout dans les moments de crise : il s’agit de garde-fous auxquels on ne doit pouvoir déroger.
Il convient par ailleurs de souligner que les termes de ces textes sont particulièrement extensifs, laissant une grande marge d’interprétation au Gouvernement, avec des qualifications comme « activités de loisir » et « transport public de grande distance ».
Voilà pourquoi je vous propose de supprimer ces dispositions, mes chers collègues.
M. le président. L’amendement n° 166 rectifié, présenté par M. Patient et Mme Phinera-Horth, est ainsi libellé :
Alinéas 45 à 47
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Georges Patient.
M. Georges Patient. Le présent projet de loi entend placer les territoires de la Réunion, de la Martinique et de la Guadeloupe en état d’urgence sanitaire, ces derniers rejoignant ainsi la Guyane.
Ce dernier est ainsi le seul territoire français soumis à un régime d’exception. Entre l’instauration de l’état d’urgence sanitaire le 23 mars 2020 et sa sortie prévue, pour l’heure, au 30 septembre 2021, dix-huit mois ininterrompus se seront écoulés.
La Guyane se distingue également par une mesure unique qui cristallise aujourd’hui le ressentiment de la population et qui ne se justifie plus depuis bien longtemps : l’instauration de frontières intérieures. Entre Cayenne et Saint-Laurent-du-Maroni vers l’ouest, ou entre Cayenne et Saint-Georges-de-l’Oyapock à l’est, vous devez franchir un barrage de police permanent, quel que soit le sens de circulation, et justifier votre passage par un motif impérieux. Imaginez la même mesure prise à Paris : on vous demanderait un motif impérieux pour traverser la Seine, au risque d’être refoulé…
La prolongation de cette mesure est excessive, et elle n’aura pas empêché la survenue de trois vagues épidémiques. Le constat est sévère car, lors de l’instauration de l’état d’urgence sanitaire, la Guyane n’était quasiment pas touchée, contrairement au reste du pays qui connaissait sa première vague. Celle-ci n’a atteint la Guyane que trois mois plus tard.
Cet amendement vise donc à adapter l’instauration de l’état d’urgence sanitaire dans les territoires d’outre-mer pour tenir compte, dans la concertation, de leurs caractéristiques particulières, du mode de vie des populations locales, du système de santé lacunaire et de l’offre de services à mettre en place pour garantir le dépistage de tous les citoyens ne souhaitant pas recourir pour l’heure à la vaccination.
Monsieur le secrétaire d’État, il est urgent de prendre en considération les contraintes particulières de ces collectivités, dans la logique de différenciation que le Président de la République avait revendiquée pour les territoires français. (MM. Victorin Lurel et Jean-Yves Leconte applaudissent.)
M. le président. L’amendement n° 251, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 50
Remplacer la date :
31 octobre
par la date :
31 décembre
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. le président. L’amendement n° 204, présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 51
Après le mot :
République
Insérer les mots :
après que les personnes non vaccinées à la date de l’entrée en vigueur de la présente loi se sont vues proposer des rendez-vous liés aux vaccinations contre la covid-19
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Défendu !
M. le président. L’amendement n° 176, présenté par Mme Jasmin, est ainsi libellé :
Alinéa 52
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Des mesures d’accompagnement spécifiques sont fixées par décret pour la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane et la Réunion.
La parole est à Mme Victoire Jasmin.
Mme Victoire Jasmin. La situation actuelle est la résultante des carences de l’État, des incohérences successives et de la volonté manifeste de diviser le pays. Il faut désormais éviter les conséquences systémiques. C’est la raison pour laquelle je vous présente cet amendement, pour demander justement un régime différencié pour que les événements culturels, artistiques et sportifs puissent se tenir sur nos territoires.
Nous souhaitons un accompagnement particulier pour éviter les menaces de confinement et de couvre-feu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. La commission est défavorable à l’amendement n° 257 du Gouvernement, qui veut situer son action hors du cadre de l’état d’urgence sanitaire.
L’urgence, pourtant, est bien réelle – nous n’aurions sinon aucune raison d’être ici.
L’urgence, c’est aussi la seule façon de justifier l’adoption de mesures temporaires aussi gravement attentatoires aux libertés, qui ne peuvent s’expliquer que par la nécessité d’agir vite et efficacement, en imposant des disciplines nouvelles.
Enfin, l’état d’urgence n’implique évidemment pas de devoir recourir à d’autres moyens que ceux qui nous sont proposés. En particulier, si le Gouvernement devait décider le confinement ou des mesures de couvre-feu, il faudrait alors qu’au bout de trente jours, le Parlement les ait autorisés, selon le régime de droit commun prévu pendant la durée de l’application de la loi du 23 mars 2020.
Rétablir le régime de l’état d’urgence sanitaire, cela veut dire aussi sortir du régime de gestion de la sortie de l’état d’urgence sanitaire, dans lequel nous vivons au moment où je vous parle, mes chers collègues – on croit rêver par rapport à la situation que nous connaissons !
Si nous voulons que ces mesures, que nous pourrions adopter pour répondre à l’urgence, soient temporaires, et qu’elles soient réexaminées au plus tard au mois d’octobre prochain, il faut proclamer l’état d’urgence sanitaire. Nous devons, par souci de vérité, en finir avec une forme d’euphémisation.
Figurez-vous que le Gouvernement entendait initialement intituler son texte « projet de loi relatif à l’adaptation de nos outils de gestion de la crise sanitaire »… Nous n’en sommes plus là ! Nous sommes en train de prendre des mesures extrêmement graves. Il faut dire la vérité, ne pas dramatiser, certes, mais ne pas sombrer dans l’euphémisme non plus.
L’état d’urgence sanitaire, c’est l’exacte réalité dans laquelle nous nous trouvons.
Monsieur le secrétaire d’État, je suis au regret de vous dire qu’il faut que chacun assume ses responsabilités, à commencer par le Gouvernement.
Monsieur Ravier, pour les mêmes raisons, je recommande de rejeter votre amendement.
Madame Assassi, vous voulez supprimer le régime de la loi du 23 mars 2020 auquel j’ai fait allusion, celui-là même qui a permis de lutter contre la crise sanitaire, et qui est en vigueur jusqu’au 31 décembre de cette année. Je pense qu’il faut le conserver. Avis défavorable.
Madame de La Gontrie, même si vous avez pris beaucoup de précautions dans l’exposé des motifs de votre amendement, je comprends que, puisque vous voulez ramener du 31 octobre au 15 octobre la fin de l’application de l’état d’urgence sanitaire que nous avons adopté, c’est que vous y souscrivez…
M. Philippe Bas, rapporteur. Il n’y a pourtant pas d’autre possibilité. En ce qui me concerne, je ne souscris pas à cette proposition d’avancer la date au 15 octobre et j’émets donc un avis défavorable sur l’amendement n° 25.
L’amendement n° 72, défendu par Joël Labbé, vise à fixer encore plus précocement la fin de l’état d’urgence sanitaire. Je crois qu’il faut lui laisser le temps de produire ses effets avant que le Parlement ne se prononce de nouveau. L’avis est donc défavorable.
Madame Noël, j’aimerais que vous retiriez votre amendement, pour une raison très simple : nous avons déjà voté sur la question de principe que vous soulevez. Vous voulez supprimer le passe sanitaire. Or, précédemment, par 215 voix, le Sénat l’a adopté. Ne revenons pas sur le choix qui vient d’être fait. Si vous pouviez retirer cet amendement, j’apprécierais votre geste. Sinon, j’émettrai un avis défavorable.
Cher collègue Georges Patient, vous voulez exclure l’outre-mer de l’état d’urgence sanitaire inscrit à l’article 1er du texte. Toutefois, compte tenu de l’intensité de la circulation virale dans nos collectivités d’outre-mer, et du fait que la vaccination ne s’y propage qu’avec retard par rapport à l’Hexagone, il me semble nécessaire de protéger fortement nos populations ultramarines. C’est pourquoi, là encore, je suggère le retrait de votre amendement. À défaut, la commission émettra un avis défavorable, par cohérence avec les positions qu’elle a prises, et avec le souci de rétablir le plus vite possible une situation de sécurité sanitaire outre-mer.
L’amendement n° 251 a été défendu par le Gouvernement avec une argumentation tellement limpide et convaincante que je ne peux que m’y rallier. (Sourires.) L’avis est donc favorable !
J’espère que Mme Assassi ne m’en voudra pas, mais les membres de la commission dans leur ensemble ont refusé de subordonner le passe sanitaire à la délivrance préalable d’un rendez-vous de vaccination, la procédure leur apparaissant trop complexe. Avis défavorable sur l’amendement n° 204.
Mme Jasmin propose enfin des mesures d’accompagnement spécifiques pour la mise en œuvre du passe sanitaire outre-mer. J’avoue que l’idée ne m’est pas du tout désagréable, mais je me tourne vers le Gouvernement pour savoir quel genre de mesures il pourrait mettre en œuvre. Monsieur le secrétaire d’État, madame la ministre, êtes-vous prêt à arrêter de telles mesures ? Si la réponse du Gouvernement vous satisfait, ma chère collègue, vous pourriez peut-être retirer votre amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Cédric O, secrétaire d’État. Par cohérence avec notre amendement n° 257, nous serons défavorables à l’ensemble de ces amendements.
Sur les mesures spécifiques à l’outre-mer, je veux dire deux choses.
Pardonnez-moi, madame Jasmin, mais je vous ai entendue vous opposer à la vaccination obligatoire, au motif qu’il s’agissait d’un « vaccin « expérimental », selon vos propres termes.
J’étais en Guadeloupe il y a une semaine. Vous savez comme moi que la vaccination y est basse et qu’il faut inciter nos compatriotes guadeloupéens à se faire vacciner. Compte tenu du système hospitalier contraint existant dans les îles, il est difficile de réorienter les patients. Je vous invite donc, comme l’ensemble des élus – j’ai entendu le sénateur Lurel le faire – à exprimer clairement que vous êtes favorable à la vaccination du plus grand nombre de personnes, y compris en Guadeloupe. Cela ne ressortait pas très clairement de vos propos.
S’agissant des mesures de soutien, je l’ai dit, le Gouvernement a toujours été au rendez-vous, en outre-mer comme dans l’Hexagone. Nous verrons dans les semaines qui viennent quelles seront les conséquences de la mise en œuvre du passe sanitaire. Nous avons déjà pris un certain nombre de mesures pour amortir ses effets et nous serons évidemment au rendez-vous si jamais il devait y avoir des conséquences économiques graves pour certains secteurs.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Piednoir, pour explication de vote.
M. Stéphane Piednoir. Plusieurs collègues ont souhaité obtenir de la part du Gouvernement une forme d’engagement sur le respect du travail des commissions sénatoriales concernant l’article 1er. Le président Retailleau, notamment, conditionnait à juste titre la conclusion de la future commission mixte paritaire sur ce texte au respect des modifications apportées par lesdites commissions.
Les ministres ne nous ont malheureusement pas répondu sur ce point, lors du vote sur les amendements de suppression de l’ensemble de l’article 1er – nous aurions pu alors, au passage, gagner un peu de temps.
J’observe en revanche que la présentation de l’amendement n° 257 est assez explicite sur les intentions du Gouvernement. La majorité présidentielle semble clairement avoir l’intention de balayer l’intégralité du travail réalisé par les commissions. Je regrette évidemment ce manque de considération. Une nouvelle fois, le Sénat ne sera pas entendu et le débat parlementaire se réduira aux injonctions jupitériennes.
Je ne voterai évidemment pas cet amendement du Gouvernement, mais c’est un indicateur que vous devriez avoir présent à l’esprit pour la suite, madame, monsieur les rapporteurs.
M. Loïc Hervé. C’est très inquiétant !
M. le président. La parole est à M. Georges Patient, pour explication de vote.
M. Georges Patient. Je maintiens mon amendement. Expression de la population guyanaise, il a été adopté à l’unanimité par les membres de la collectivité territoriale.
Je veux qu’une attention soit portée aux situations particulières que nous connaissons en Guyane, et certainement ailleurs en outre-mer. J’insiste sur ce point.
La Guyane est notamment composée de populations autochtones qui refuseront toujours de se faire vacciner, parce que ce n’est pas conforme à leurs croyances et leurs traditions. Comment ferons-nous ?
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. Avec votre permission, monsieur le président, j’aimerais brièvement souligner le problème constitutionnel que nous pose de nouveau l’examen de ce projet de loi.
Lorsqu’il a examiné le régime de l’état d’urgence créé par la loi du 23 mars 2020, le Conseil constitutionnel a considéré que « la Constitution n’exclut pas la possibilité pour le législateur de prévoir un régime d’état d’urgence sanitaire ».
Si rien dans la Constitution ne vient interdire un tel régime, il ne s’agit pas pour autant d’une autorisation constitutionnelle. La lecture de la décision montre par ailleurs la volonté du Conseil qu’un travail constitutionnel d’encadrement des pouvoirs exceptionnels conférés à l’exécutif par le biais du régime de l’état d’urgence soit mené.
Je remarque qu’il existe dans la Constitution, aux articles 16 et 36, deux régimes d’exception. Or le recours à l’article 16, qui donne des pouvoirs exceptionnels au Président de la République, est beaucoup plus encadré que ce que nous allons voter aujourd’hui.
Je vous rappelle par exemple que, dans le cadre de l’article 16 de la Constitution, le Parlement se réunit de plein droit. Par ailleurs, sénateurs et députés peuvent demander au Conseil constitutionnel d’examiner les conditions qui justifient la prolongation des pouvoirs de crise, ce dont nous ne disposerons pas avec ce texte. Il y a donc un travail constitutionnel à mener.
Je regrette vivement que le Gouvernement ait convoqué le Parlement pour une réforme constitutionnelle dont l’essentiel, de façon très artificielle, a porté sur un débat lexicographique autour de la valeur du verbe « garantir ». Il aurait mieux fait de nous occuper à une réflexion d’ensemble permettant d’encadrer, par la Constitution, les pouvoirs exorbitants que nous lui confions depuis deux ans. (MM. Loïc Hervé et Sébastien Meurant applaudissent.)
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je vais reprendre, pour les compléter, les propos de notre collègue Stéphane Piednoir. Nous vous avons expliqué durant deux heures et demie ce matin que nous étions très attentifs à ce que le Gouvernement prenne en considération la position du Sénat. Or, dès la première seconde de la première minute, vous déposez un amendement visant à annuler ce qui a été décidé et voté par notre commission, pour en revenir à la rédaction du Gouvernement. Et cela va se reproduire un certain nombre de fois lors du débat cet après-midi…
Je souhaiterais que le Gouvernement profite de la suspension du déjeuner pour réfléchir un peu et éviter ce type de situation, de sorte que nous puissions avoir un débat serein. En effet, nous aurons l’impression de discuter pour rien si le Gouvernement campe sur une position ferme pour revenir à sa rédaction initiale. Je pense que c’est un très mauvais signal donné à la Haute Assemblée, et je le regrette. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. André Reichardt applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Pour être très clair, je voterai contre l’amendement présenté par le Gouvernement, mais je soutiendrai les amendements présentés par le président Patient et par ma collègue Victoire Jasmin.
C’est vrai, j’ai entendu de très beaux engagements. J’ai notamment entendu la majorité sénatoriale demander au Gouvernement d’écouter un peu le Sénat, dans le cadre d’un dialogue entretenu et constructif. Tel n’est pas le cas. Donc, je le répète, je voterai contre cet amendement du Gouvernement, parce que j’estime qu’il y a là un manque de respect du Sénat, quelles que soient les différences idéologiques qui peuvent nous opposer.
J’espère que vous avez tous bien pris conscience de ce qu’a dit le président Patient lorsqu’il est venu exposer son amendement sur ce qui se passe en Guyane depuis dix-huit mois. Ce n’est plus de l’urgence : il s’agit d’un état permanent, pérenne !
À l’intérieur de son territoire, il existe un véritable apartheid territorial – pardonnez-moi si le terme est fort. Pour aller d’un côté à l’autre du territoire, ou dans l’île de Cayenne, il faut des motifs impérieux et il y a des barrages. Comment peut-on encore, au début de la quatrième vague, pérenniser cette situation ? J’avoue que je suis assez étonné.
D’ailleurs, il y a un vrai sujet relatif à l’outre-mer, au-delà du taux de couverture vaccinale. La Nouvelle-Calédonie est à part, car elle peut se protéger grâce à son statut. Mais je ne comprends pas, par exemple, que l’état d’urgence sanitaire ait été décrété en Guadeloupe : la veille, nous étions réunis au sein du comité de suivi avec le préfet, qui nous disait que les indicateurs étaient certes en train de se dégrader, mais que la dynamique d’évolution et de circulation du virus ne commandait pas d’imposer tout de suite l’état d’urgence.
Le président Patient vient de dire que l’on avait anticipé de trois mois cet état d’urgence sanitaire en Guyane, après dix-huit mois de crise. Et c’est ce qui est en train de se passer pour la Guadeloupe.
Ma collègue Victoire Jasmin réclame des mesures spécifiques. Par exemple, pourquoi ne fait-on pas du porte-à-porte pour aller vers les gens ? Pourquoi n’y a-t-il pas de vaccinobus ? Pourquoi n’y a-t-il pas, à Marie-Galante et dans les îles, des centres permanents de vaccination ? Bref, on pourrait imaginer un certain nombre de dispositifs…
En conclusion – j’y insiste, monsieur le secrétaire d’État –, je souhaite que l’on m’explique quelle est la nécessité de décréter immédiatement l’état d’urgence sanitaire en Guadeloupe, compte tenu des indicateurs et de leur dynamique qui, à mon sens, restent aujourd’hui encore bons. (Applaudissements sur des travées du groupe SER. – Mme Laurence Cohen applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote.
Mme Victoire Jasmin. Je voudrais apporter des précisions concernant les sujets évoqués par M. le secrétaire d’État.
Au préalable, je tiens à dire que je soutiens très fermement l’amendement de notre collègue Patient. J’étais en Guyane en janvier dernier et je sais ce que vivent les Guyanais.
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez en partie répondu sur l’accompagnement, mais sachez que depuis les confinements successifs, les associations et les entreprises de l’événementiel, que ce soit dans la culture ou le sport, sont à la peine à tous les niveaux, et ce malgré les aides que vous avez prévues, car ces acteurs n’étaient pas forcément tous éligibles. Aussi, je demande un accompagnement pour ces secteurs.
Vous avez évoqué une situation particulière. C’est juste, mais on peut aussi proposer un accompagnement pour l’événementiel en dehors de ce que vous préconisez. Sur nos territoires, il y a encore la menace de confinements et de couvre-feux, alors que l’intensification des mesures que nous avions prises au mois de mai et le renforcement des gestes barrières pourraient peut-être suffire.
L’événementiel est nécessaire, et la culture est essentielle, tout comme le sport. J’étais à Avignon voilà quelques jours. Un débat s’est tenu à la mairie, qui portait justement sur les enjeux de la culture, surtout dans des situations telles que celle nous connaissons aujourd’hui. C’est très important, monsieur le secrétaire d’État !
Vous avez également interrogé mon positionnement, qui, selon vous, n’était pas suffisamment clair. Je tiens à vous dire qu’en application du principe de précaution, je suis favorable à la vaccination. En revanche, je suis contre l’obligation, au stade où nous en sommes. J’ai également précisé que le vaccin était encore expérimental.
Tel est mon positionnement. Est-ce assez clair pour vous, monsieur le secrétaire d’État ?
M. le président. La parole est à Mme Nassimah Dindar, pour explication de vote.
Mme Nassimah Dindar. J’abonde dans le sens du président Patient sur la situation des outre-mer. Il faut en effet avoir une approche différenciée du fait de l’existence de particularités.
Il conviendra également, dans la suite du débat, de tenir compte de la situation des salariés dans les outre-mer : majoritairement, ils ont un contrat de travail à durée déterminée (CDD), et non un contrat à durée indéterminée (CDI). Or la commission a conservé dans le projet de loi des sanctions prévues à l’encontre des travailleurs en CDD.
Je le répète, les particularismes des outre-mer doivent être pris en compte au regard de l’état d’urgence que, pour ma part, je souhaiterais voir prolongé au plan national, pour rester en cohérence avec les obligations, notamment vaccinales, découlant du passe sanitaire.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Cédric O, secrétaire d’État. Mme la sénatrice Goulet nous reproche de redéposer nos amendements. Je tiens à rappeler qu’il est classique pour le Gouvernement, dès lors que son texte a été modifié, de souhaiter en revenir aux dispositions initiales.
Par le passé, vous avez la plupart du temps réussi à trouver des conciliations avec la majorité gouvernementale dans le cadre des commissions mixtes paritaires. Nous continuerons à défendre la position du Gouvernement, et j’imagine que la Haute Assemblée continuera à s’y montrer défavorable, même s’il arrive que nous trouvions des accords en séance.
En tout état de cause, cela ne préjuge évidemment pas de la discussion que vous pourrez avoir avec les représentants de l’Assemblée nationale au sein de la commission mixte paritaires.
M. le président. Madame Noël, l’amendement n° 6 rectifié est-il maintenu ?
Mme Sylviane Noël. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 6 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 166 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 176.
(L’amendement n’est pas adopté.)
(M. Georges Patient remplace M. Roger Karoutchi au fauteuil de la présidence.)