Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Pour ce qui concerne les amendements identiques nos 169 rectifié quater, 842 rectifié ter, 1111 rectifié bis, 1380 rectifié quater et 1637 rectifié, je tiens à rappeler que les dispositions prévues le sont au titre de la simplification.
À partir du moment où une collectivité ou un EPCI a fait confiance à un établissement public pour gérer sa compétence eau, elle doit avoir la possibilité – il ne s’agit pas d’une obligation ! – de déléguer son droit de préemption. Il s’agit d’éviter les allers-retours incessants entre ceux qui siègent formellement et ceux qui agissent concrètement.
Le Gouvernement demande donc le retrait de ces amendements ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Nous avons émis un avis favorable sur l’amendement rédactionnel n° 1722.
S’agissant des amendements identiques relatifs aux Safer, Mme la rapporteure l’a dit, l’obligation de coopération me semble aller trop loin puisque la loi prévoit d’ores et déjà une consultation. Les Safer sont évidemment partie prenante de toute la gestion du foncier agricole et des enjeux de préservation de ce patrimoine, dont découlent les questions de l’eau.
Par conséquent, le Gouvernement a émis un avis défavorable sur ces amendements.
Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 169 rectifié quater, 842 rectifié ter, 1111 rectifié bis, 1380 rectifié quater et 1637 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 173 rectifié quater, 832 rectifié ter et 1114 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme le président. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 171 rectifié ter est présenté par MM. Cuypers, Duplomb et Burgoa, Mme Lassarade, M. Joyandet, Mme Deromedi, MM. Bouchet, Bazin et Mouiller, Mme Belrhiti, MM. Brisson, Guerriau et Cambon, Mme Drexler, MM. Mizzon, Piednoir, Laménie, Chatillon et Lefèvre, Mme Gosselin, MM. J.M. Boyer et Bas, Mmes Garriaud-Maylam et Joseph, M. Le Gleut, Mme Dumas, MM. Chasseing et Belin, Mmes Chain-Larché, Thomas et Saint-Pé et MM. D. Laurent, B. Fournier, Sautarel, Charon, Favreau, Levi, Chauvet et Genet.
L’amendement n° 1381 rectifié ter est présenté par MM. S. Demilly, Klinger, Le Nay, P. Martin, Folliot, Lafon et L. Hervé, Mme Morin-Desailly, MM. Duffourg et Louault, Mme Demas et MM. Cigolotti, Milon, Bonneau, Anglars, Henno, Moga et Longeot.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 17, dernière phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
Elles sont introduites, après concertation avec les chambres d’agriculture, et au plus tard, lors du renouvellement du bail.
La parole est à Mme Jacky Deromedi, pour présenter l’amendement n° 171 rectifié ter.
Mme Jacky Deromedi. Si la protection de la ressource en eau doit, dans certains secteurs, s’accompagner de changements de pratiques agricoles via des clauses environnementales proposées au preneur en place, il est essentiel que la nature de ces clauses et leur objet puissent être appréhendés au regard des impacts qu’elles engendrent sur l’exploitation agricole de l’occupant des parcelles concernées.
Un accompagnement par une chambre d’agriculture susceptible d’apporter des conseils pédologiques, technico-économiques et agronomiques serait de nature à garantir les résultats attendus en matière de qualité de l’eau, tout en préservant un équilibre économique pour le locataire en place.
Mme le président. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour présenter l’amendement n° 1381 rectifié ter.
M. Jean-François Longeot. Défendu.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Ces amendements visent à imposer la consultation des chambres d’agriculture sur les clauses environnementales qui pourront être insérées dans un contrat de bail portant sur un terrain agricole préempté.
Ils sont contraires au principe de liberté contractuelle, y compris des collectivités territoriales. Faisons confiance aux élus sur ce sujet extrêmement important : ils savent prendre en compte les enjeux agricoles, très présents pour l’avenir de leur territoire.
La commission demande le retrait de ces amendements ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Imposer une consultation sur des baux pouvant être librement signés entre des acteurs tout à fait capables d’intégrer des clauses environnementales ne me semble pas aller dans ce sens de la simplification que nous souhaitons. Au contraire, cela tendrait à rigidifier plus qu’à simplifier.
Le Gouvernement demande le retrait de ces amendements ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 171 rectifié ter et 1381 rectifié ter.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme le président. Je suis saisie de quatre amendements identiques.
L’amendement n° 172 rectifié quater est présenté par MM. Cuypers, Duplomb et Burgoa, Mme Lassarade, M. Joyandet, Mme Deromedi, MM. Bouchet, Bazin et Mouiller, Mme Belrhiti, MM. Brisson, Guerriau, Cambon, Mizzon, Piednoir, Laménie, Chatillon et Lefèvre, Mme Gosselin, MM. J.M. Boyer et Bas, Mmes Garriaud-Maylam et Joseph, M. Le Gleut, Mme Dumas, MM. Chasseing et Belin, Mmes Chain-Larché et Thomas et MM. D. Laurent, Sautarel, Charon, Favreau, Levi et Chauvet.
L’amendement n° 376 rectifié est présenté par Mme Férat, MM. Détraigne et Savary, Mme Vermeillet, MM. Kern et Henno, Mme Guidez, MM. Canévet, Le Nay et Hingray, Mme Perrot, MM. S. Demilly et P. Martin, Mme Morin-Desailly et MM. L. Hervé et Duffourg.
L’amendement n° 1113 rectifié bis est présenté par Mme Drexler, M. Bascher, Mme Muller-Bronn et MM. H. Leroy, Sido, Bonhomme, Rietmann, Perrin, Tabarot, Longuet et Klinger.
L’amendement n° 1639 rectifié est présenté par MM. Richard, Mohamed Soilihi, Haye, Patriat, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Iacovelli, Kulimoetoke, Lévrier, Marchand et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
I. - Alinéa 18, au début
Ajouter une phrase ainsi rédigée :
Les biens acquis doivent être conservés pendant au moins neuf ans à compter de leur acquisition.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
…. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du présent article est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts
La parole est à Mme Jacky Deromedi, pour présenter l’amendement n° 172 rectifié quater.
Mme Jacky Deromedi. Considérant qu’un droit de préemption constitue une limite à l’exercice du droit de propriété, il ne peut être envisagé que les titulaires du droit de préemption puissent rétrocéder sans délai les parcelles acquises. Il convient donc d’imposer un délai de conservation dont la durée équivaut à celui de la durée minimale d’un bail rural.
Mme le président. La parole est à M. Claude Kern, pour présenter l’amendement n° 376 rectifié.
M. Claude Kern. Il a été très bien défendu.
Mme le président. La parole est à M. Christian Klinger, pour présenter l’amendement n° 1113 rectifié bis.
M. Christian Klinger. Il est également défendu.
Mme le président. La parole est à M. Alain Richard, pour présenter l’amendement n° 1639 rectifié.
M. Alain Richard. La chronique des dernières années nous a montré que les ministres de l’agriculture successifs vivaient des moments parfois intenses liés au contrôle de constitutionnalité sur l’exercice du droit de préemption.
À plusieurs reprises, le Conseil constitutionnel a fixé une limite au droit de préemption en le définissant comme une atteinte substantielle au droit de propriété. Il ne peut donc pas être utilisé avec une complète liberté.
En l’occurrence, il s’agit de biens préemptés en vue de la préservation de la ressource en eau, c’est-à-dire d’une mission publique reconnue. Il paraît problématique, en tout cas quelque peu perturbateur du marché foncier agricole, qu’ils puissent être revendus huit jours après.
L’amendement vise à introduire une précaution juridique en relation avec leur objet d’intérêt public, en prévoyant que les propriétés restent dans le patrimoine de la collectivité ou de l’établissement qui les a acquises pendant au moins la durée d’un bail agricole.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Ces amendements me perturbent quelque peu.
Lors de l’acquisition d’un bien, au-delà des contraintes imposées dans les dispositions régissant l’acte de vente, le propriétaire dispose du bien qu’il a acquis. Or ces amendements prévoient qu’un EPCI ou une commune qui aurait acquis des terrains par droit de préemption les laisse pendant neuf ans non occupés ou non exploités.
La chose me semble assez compliquée puisqu’une commune ou un EPCI n’a pas vocation à exploiter directement des terres agricoles. On ne peut pas imposer à une collectivité de laisser des terrains en friche pendant neuf ans au prétexte qu’elle ne peut pas les confier à un exploitant.
En outre, je rappelle que ces acquisitions sont faites en vue de constituer des réserves pour l’eau potable.
Par conséquent, la commission demande le retrait de ces amendements ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Nous cherchons à simplifier ! Aussi, imposer à une collectivité de se retrouver propriétaire pour neuf ans d’un terrain sur lequel on n’est même pas certain, au moment où elle active le droit de préemption, qu’elle va effectivement y organiser un captage de l’eau me paraît aller dans le sens contraire de ce que nous visons au travers de ce projet de loi.
L’objectif est que toutes les précautions soient prises, c’est-à-dire que le droit propriété soit préservé et que les compensations éventuelles soient activées. Néanmoins – je commence à vous connaître, mesdames, messieurs les sénateurs ! –, ne nous mettons pas dans la situation de regretter dans quelques années d’avoir obligé les collectivités à devenir propriétaires pour neuf ans !
Le Gouvernement demande le retrait de ces amendements ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Mme le président. La parole est à M. Alain Richard, pour explication de vote.
M. Alain Richard. Permettez-moi de relever une petite confusion, tant dans l’argumentation de Mme la rapporteure que dans celle de Mme la ministre.
Il ne s’agit pas d’une acquisition ordinaire à l’amiable, mais d’une acquisition contrainte avec un objectif d’intérêt public. Aussi, logiquement, la collectivité ne s’est pas trompée en achetant ce terrain par voie de contrainte : c’est pour elle une nécessité.
Pardonnez-moi, madame la rapporteure, mais l’amendement ne tend aucunement à empêcher la collectivité de donner à bail ce bien et de le rendre inutile sur le plan agricole. C’est bien le transfert de propriété qui est problématique. Il me semble que la prudence constitutionnelle consisterait plutôt à ne pas trop se risquer sur ce sujet.
Mme le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Françoise Gatel, rapporteur. J’entends ce que dit notre collègue Richard mais, encore une fois, un droit de préemption ne s’exerce pas aisément et facilement.
Nous le savons, lorsque des collectivités ont besoin d’acquérir des terres agricoles, notamment en vue de constituer des réserves d’eau potable, cela induit tout un processus, un certain nombre de contrôles, d’autorisations et de conditions. Aussi l’acquisition par préemption constitue-t-elle un droit très précis et contraint.
Encore une fois, ces amendements tendent à bloquer la collectivité ou l’EPCI pour une durée de neuf ans. On touche un peu fortement, nous semble-t-il, au droit de propriété. En outre, rappelons que l’acquisition est faite en vue d’un intérêt général qui ne saurait être discuté, puisqu’il s’agit de constituer des réserves en eau potable.
Je maintiens donc la demande de retrait de la commission.
Mme le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. J’ai signé l’amendement n° 172 rectifié quater proposé par notre collègue Cuypers, qui est un défenseur et un grand connaisseur du monde rural et agricole.
Mme la ministre a axé ses explications sur la notion de simplification. Il est vrai que le monde agricole mérite largement d’être soutenu. Tout ici est d’ordre juridique : les baux ruraux complexes, le délai de neuf ans et la notion de droit de préemption.
Après réflexion, il me semble important de soutenir la ruralité. Aussi, au vu des arguments de Mme la ministre et de Mme le rapporteur, je me rallierai à leur avis.
Mme le président. La parole est à M. François Patriat, pour explication de vote.
M. François Patriat. Je ne suis pas de l’avis de Mme le rapporteur.
Pour préempter, il faut invoquer des raisons essentielles, ce qui est difficile. Si la collectivité acquiert ce type de bien, elle le fait dans le but précis de protéger ses sources de captage, notamment. Si elle veut ensuite céder ce bien, cela signifie qu’elle s’est trompée et n’en a pas besoin.
Elle peut très bien louer ce bien, mais, après avoir été confrontée à toutes les difficultés et contraintes imaginables pour l’obtenir, qu’elle assume au moins sa responsabilité ! La terre ne sera ni inculte ni en friche ; la collectivité pourra donc la cultiver, la louer, tout en conservant pour l’avenir les possibilités de captage d’eau.
Mme le président. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.
M. André Reichardt. Je comprends les arguments de M. Richard. Il me semble évident que le droit de préemption porte atteinte au droit de propriété. Nous devons donc faire attention…
La solution ne se trouverait-elle pas, beaucoup plus simplement, dans l’explicitation du motif de la préemption ? Dès lors que la collectivité a expliqué clairement pourquoi elle préemptait, le fait qu’elle revende les terres ainsi acquises, conformément au processus indiqué dans le motif de la préemption, ne me semble pas gênant.
Me dérange, en revanche, le fait que la commune puisse se défaire du bien préempté pour un motif différent de celui invoqué pour la préemption. Voilà, me semble-t-il, le problème soulevé par les auteurs des amendements.
La rédaction de ces amendements ne permet pas de répondre à cette problématique puisqu’il s’agit, en l’occurrence, exclusivement d’une thématique temporelle. Il est vrai que la durée du bail rural peut poser problème. C’est la raison pour laquelle je voterai contre ces amendements.
La volonté originelle des auteurs de ces amendements était d’éviter que le droit de préemption ne soit détourné par une cession ipso facto, au lendemain de la préemption.
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Certainement !
M. André Reichardt. Ce risque subsiste, mes chers collègues.
Mme le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Mes collègues ont raison, ce sont des sujets très importants à la fois pour les collectivités et les agriculteurs.
Je comprends quelles précautions les auteurs des amendements souhaitent prévoir. Mais l’article 60 du présent projet de loi définit très précisément les obligations de l’acquéreur éventuel : nous avons sécurisé le dispositif. Par ailleurs, nous avons voté une disposition en ce sens en 2019, dans la loi Engagement et proximité.
Mme le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Soyons clairs : dans le meilleur des cas, après préemption, le droit de propriété est transféré de manière durable, bien au-delà de neuf ans.
Obtenir un titre de propriété pour un terrain dont on ne sait plus que faire durant neuf ans, cela crée de la rigidité. Dans ce cas de figure, votre argument est le bon. Néanmoins, le droit de préemption doit être manié avec beaucoup de précautions, le transfert de propriété se faisant dans des conditions très complexes.
Il nous semble utile de conserver un minimum de souplesse pour les collectivités qui voudraient rétrocéder ce droit avant une durée fixe de neuf ans. Je me range donc totalement à l’avis émis par la commission.
Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 172 rectifié quater, 376 rectifié, 1113 rectifié bis et 1639 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme le président. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 545 est présenté par MM. Houllegatte, Gillé et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert et Devinaz, Mme M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, MM. Kerrouche, Marie, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 1525 est présenté par MM. Labbé, Benarroche et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 18, seconde phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
Les clauses de ce cahier des charges constituent des obligations réelles comme celles prévues par l’article L. 132-3 du code de l’environnement.
II. – Alinéa 19
Rédiger ainsi cet alinéa :
b) Au dernier alinéa, les mots : « , locations ou concessions temporaires » sont remplacés par les mots : « ou locations ».
III. – Alinéas 20 à 33
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour présenter l’amendement n° 545.
M. Jean-Michel Houllegatte. Il s’agit de revenir sur l’amendement des rapporteurs, adopté en commission, qui vise à supprimer le régime des obligations réelles environnementales.
Ces obligations ont été créées par la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, dite loi Biodiversité. Elles permettent à un propriétaire immobilier de mettre en place une protection de l’environnement attachée à son bien pour une durée pouvant aller jusqu’à quatre-vingt-dix-neuf ans. Elles se traduisent par l’inscription dans un contrat d’obligations ayant pour finalité le maintien, la conservation, la gestion ou la restauration d’éléments de la biodiversité ou de fonctions écologiques.
Ce régime est donc totalement en phase avec l’esprit des objectifs environnementaux et climatiques que la France se fixe. Or les rapporteurs ont supprimé ce régime, au motif qu’il était « extrêmement lacunaire ». Les auteurs de cet amendement ne partagent pas la volonté de supprimer cet outil. Ils estiment qu’une telle réforme nécessiterait une étude d’impact et un débat à part entière.
Dans un rapport du Gouvernement rendu au Parlement en janvier 2021 sur ces obligations, aucune remise en cause de ce dispositif n’a été mise en avant.
Si le Gouvernement y reconnaissait que « l’absence de mécanisme de suivi de la signature de ces contrats rend difficile l’existence d’une vision nationale de la mise en œuvre » de ces obligations, il n’en remettait nullement en cause l’existence et la pertinence. Il précisait même, en conclusion, que si des évolutions du mécanisme des obligations peuvent être envisageables, une telle décision « semble en tout état de cause prématurée compte tenu du manque de recul sur l’utilisation de cet outil dont elle serait de nature à changer la philosophie ».
Nous proposons tout simplement de ne pas supprimer ce régime.
Mme le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 1525.
M. Joël Labbé. Je tiens à citer, pour compléter l’explication de mon collègue Houllegatte, le rapport coécrit par Frédérique Tuffnell, députée de Charente-Maritime, et notre excellent ancien collègue Jérôme Bignon, qui était un véritable défenseur des zones humides et de la qualité de l’eau.
Ce rapport préconisait de développer des exonérations fiscales appropriées pour le développement des obligations réelles environnementales afin de préserver les zones humides.
J’évoquerai aussi l’avis du Comité national de la biodiversité sur la « Stratégie nationale pour les aires protégées 2030 », ou encore une récente note de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité, laquelle plébiscite également cet outil.
Il n’est pas pertinent de déstabiliser ledit outil au moment où il commence à s’inscrire sur le terrain. C’est pourquoi cet amendement vise à revenir à la rédaction initiale de l’article 60.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Je ne plaiderai pas coupable à propos du travail de la commission.
Je rappelle qu’ici, nul ne remet en cause l’enjeu de la transition écologique et de l’environnement. Il arrive toutefois qu’au sein de la commission des lois, et au Sénat en général, nous fassions aussi du droit. Or il se trouve que l’obligation réelle environnementale répond à une définition quelque peu baroque sur le plan juridique et qu’elle n’a pas vraiment d’existence.
Dans son rapport sur ce texte, la commission a écrit une dizaine de pages motivant sa position. Le Gouvernement, je crois, a dû en écrire quelques autres. Il nous semble que les obligations réelles environnementales relèvent davantage – je le dis sans mépris – de la littérature et de la bonne intention que du droit.
Ces obligations étant difficiles à définir, il n’y a aucune matière pour évaluer les choses et les faire respecter. D’ailleurs, le ministère de la justice n’a même pas été associé à cette réflexion. Je souhaite donc en rester à la version de la commission qui, juridiquement, est plus robuste.
La commission demande le retrait de ces amendements ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Le dispositif des obligations réelles environnementales a été introduit par la loi Biodiversité. Il est au cœur du désormais fameux article 2 de la Charte de l’environnement, lequel dispose que toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement.
Ce dispositif, souple, n’a jamais entraîné, à notre connaissance, de fragilité juridique depuis 2016 : aucune décision de justice n’est venue contester cette obligation.
Le Gouvernement, par cohérence, avait proposé une rédaction initiale de l’article 60 qu’il juge toujours appropriée. Au contraire, celle de la commission ferait évoluer très significativement ce dispositif juridique et, à bien des égards, le rendrait assez complexe à mettre en œuvre.
Une fois n’est pas coutume, je suis favorable aux amendements présentés du côté gauche de l’hémicycle.
Mme le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. L’avis de Mme la ministre était excellent, jusqu’à ce qu’elle ajoute : « une fois n’est pas coutume ». Vous auriez pu l’éviter !
Notre amendement n’a rien de baroque juridiquement, et l’article de la loi Biodiversité auquel il est fait référence n’a pas été remis en question…
Vous avez raison de le souligner, le sujet de la biodiversité constitue un enjeu majeur. Et parce que l’on examine un texte n’en traitant pas directement, on rayerait la biodiversité d’un coup de gomme ?
Nous maintenons avec force notre amendement, en souhaitant qu’il réunisse une majorité de voix dans cette assemblée.
Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 545 et 1525.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme le président. Je mets aux voix l’article 60, modifié.
(L’article 60 est adopté.)
Article 61
La dernière phrase du quatrième alinéa de l’article L. 122-4 du code de la voirie routière est ainsi rédigée : « Le cas échéant, l’État, les collectivités territoriales concernées et les personnes publiques ou privées intéressées peuvent, à titre exceptionnel, apporter des concours. »
Mme le président. L’amendement n° 248, présenté par M. Lahellec, Mmes Varaillas, Cukierman, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. Par cet amendement, nous nous opposons à ce que toute personne publique ou privée puisse apporter un concours financier aux ouvrages et aménagements de contrat de concessions autoroutières. En effet, puisque ces contrats existent, les concessionnaires doivent se rémunérer sur les péages et ne pas attendre des subsides des collectivités de l’État ou des opérateurs privés.
Actuellement, les conditions de concessions sont telles que la rentabilité pour les actionnaires justifie de refuser tout concours public ou privé au financement des ouvrages.
Pour autant, nous restons sur une position de principe : nous souhaitons que l’État stratège prenne enfin ses responsabilités, et engage une renationalisation des concessions autoroutières et la création d’un établissement public « Autoroutes de France » 100 % public, afin de garantir le respect du patrimoine payé par l’argent des contribuables publics et pour l’intérêt général.
Le présent article permet à des personnes privées de concourir au financement des aménagements dans le cadre des concessions autoroutières. Ainsi, vous permettez à une société comme Disney de financer, demain, des autoroutes pour rejoindre son parc d’attractions, à Marne-la-Vallée. Je pourrais prendre d’autres exemples…
Ce mélange des genres entre intérêt public et intérêts privés ne nous semble pas souhaitable. Il crée une confusion préjudiciable à l’action publique et encourage une forme de privatisation de l’aménagement, qui ne répondrait pas aux besoins exprimés par la population, mais aux intérêts économiques et financiers du territoire. Nous nous opposons à de telles pratiques et souhaitons, à l’inverse, remettre de l’intérêt général et de la morale dans la gestion des infrastructures nationales, notamment autoroutières.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission de l’aménagement du territoire ?
M. Daniel Gueret, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. L’article 61 permettra aux acteurs privés et publics de concourir directement au financement d’ouvrages autoroutiers.
Cette possibilité, qui existait déjà dans la pratique jusqu’à l’interprétation restrictive de l’article L. 122-4 du code de la voirie routière donnée par le Conseil d’État en juillet 2020, permet d’alléger le coût supporté par les usagers et les collectivités territoriales. De plus, je rappelle que cette participation demeurera exceptionnelle et facultative
Pour ces raisons, j’émets un avis défavorable.