compte rendu intégral

Présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires :

Mme Jacqueline Eustache-Brinio,

M. Loïc Hervé.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Jeux Olympiques et Paralympiques

M. le président. Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, je salue M. Tony Estanguet, président du Comité d’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, présent en tribune. (Applaudissements.)

Le 23 juin 1894, le baron Pierre de Coubertin réunit à la Sorbonne les acteurs du sport mondial avec pour objectif de faire renaître les jeux Olympiques.

En 1948, le Comité international olympique choisit de commémorer cet acte fondateur en organisant le 23 juin la Journée Olympique, qui est, depuis lors, célébrée chaque année.

À cette occasion, et à un mois, jour pour jour, de l’ouverture des jeux de Tokyo, je veux apporter, au nom du Sénat, notre soutien aux 1 400 athlètes et accompagnateurs de la délégation française.

Je veux adresser à l’équipe de France, à nos athlètes Olympiques et Paralympiques, un message d’encouragement, eux qui ont vu leur période de préparation aux Jeux perturbée par la crise que nous traversons.

Le public français sera, comme lors de chaque olympiade, uni derrière ses champions, notamment au travers des nombreuses manifestations qui auront lieu sur l’ensemble du territoire.

À l’issue de ces Jeux, le 8 août, la flamme passera de Tokyo à Paris pour la tenue, en 2024, du plus grand événement jamais organisé en France, qui est aussi une véritable chance pour notre pays. Monsieur le Premier ministre, cela vous rappellera une mission que vous avez conduite ! (Sourires.)

Au-delà de nos athlètes, je veux adresser ici un message de sympathie à l’ensemble de la filière sportive, touchée par de longs mois de restrictions. J’ai à l’esprit notamment les associations, le sport amateur comme le sport professionnel.

Tel est le message que je souhaitais vous adresser, mes chers collègues, ainsi qu’à tous ceux qui nous regardent sur Public Sénat, à l’ouverture de notre séance de questions d’actualité au Gouvernement. (Applaudissements.)

3

Demande par une commission des prérogatives d’une commission d’enquête

M. le président. Mes chers collègues, par lettre en date de ce jour, la commission des lois demande au Sénat, en application de l’article 5 ter de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, de lui conférer les prérogatives attribuées aux commissions d’enquête, pour une durée de six mois, afin de mener une mission d’information sur les dysfonctionnements constatés dans l’organisation des élections départementales et régionales de juin 2021.

La conférence des présidents a fixé à demain, dix heures trente, l’examen en séance publique de cette demande.

Acte est donné de cette communication.

4

Questions d’actualité au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Chacun sera attentif aux valeurs essentielles du Sénat : le respect des uns et des autres, et celui du temps de parole.

organisation des événements culturels

M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Thomas Dossus. Cette question s’adressait initialement à Mme la ministre de la culture, Roselyne Bachelot.

Ce week-end, un jeune rennais de 22 ans avait décidé d’aller danser. Après des mois de couvre-feu et de confinement, c’est à Redon, avec quelques centaines de jeunes, qu’il devait renouer avec la fête. Il y perdra une main, victime de la répression phénoménale de cette rave ; victime, une nouvelle fois, d’une grenade tirée de façon indéterminée dans la foule ; victime de méthodes de maintien de l’ordre placées sous le régime de l’escalade de la violence. (Protestations sur les travées des groupes RDPI, UC et Les Républicains.)

En plus des atteintes aux personnes, les forces de l’ordre ont procédé à la destruction de 100 000 euros de matériel musical à coups de hache. Dans quel autre pays voit-on les forces de l’ordre détruire du matériel musical, avec autant d’acharnement, en dehors de toute procédure et s’en réjouir sur les réseaux sociaux ? (Murmures prononcés sur les travées des groupes RDPI, UC et Les Républicains.)

L’absence de réaction du ministère de la culture démontre une nouvelle fois le mépris dans lequel celui-ci tient cette scène et la jeunesse.

Il y a quelques semaines, lors de la présentation des protocoles sanitaires de déconfinement du monde de la culture, face à l’absence de perspectives pour les musiques actuelles et les concerts debout, je posais la question à Roselyne Bachelot : allons-nous passer un été culturel sous le signe de la répression ? (Exclamations sur les travées des groupes RDPI, UC et Les Républicains.)

Ce lundi 21 juin, premier jour de l’été, nous avons enfin eu la réponse : plusieurs rassemblements festifs ont été dispersés sous des pluies de grenades lacrymogènes et de désencerclement.

Après un an et demi de confinement, la jeunesse de ce pays veut faire la fête, elle veut communier, mais n’a pas de perspectives claires. (Exclamations redoublées sur les travées des groupes RDPI, UC et Les Républicains.)

À l’Élysée, lundi, sous les dorures, on a pu danser avec Jean-Michel Jarre ; dans la rue, en revanche, on a matraqué et dispersé. (Brouhaha.)

Madame la ministre, ma question est la suivante : la politique culturelle pour la jeunesse est-elle sous-traitée à un ministre de l’intérieur, dont l’incompétence à organiser des élections n’a d’égale que son incompétence en matière de maintien de l’ordre ?

M. Thomas Dossus. Son approche répressive des rassemblements festifs, qui met en danger notre jeunesse, va-t-elle être revue ? Quelles sont les perspectives culturelles pour notre jeunesse cet été ? (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER, ainsi que sur des travées du groupe CRCE.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la jeunesse et de l’engagement.

Mme Sarah El Haïry, secrétaire dÉtat auprès du ministre de léducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de la jeunesse et de lengagement. Monsieur le sénateur Dossus, la jeunesse mérite mieux que des caricatures. Depuis plus de dix ans, les services de l’État chargés de la jeunesse, de l’intérieur, de la culture, de la santé mettent en œuvre des médiations interministérielles avec les organisateurs de fêtes et de rassemblements festifs.

Ce réseau de médiateurs est aujourd’hui déployé sur l’ensemble de nos territoires, et ces acteurs permettent à notre jeunesse de sortir et de vivre pleinement. Le dialogue est de qualité entre l’État et les représentants d’associations, comme Freedom.

Nous sommes pleinement mobilisés pour que la jeunesse profite, cet été, de l’extérieur et du retour à la fête, mais en respectant notre État de droit.

Monsieur le sénateur, la ministre de la culture aurait pu répondre à votre question, mais elle est retenue à l’Assemblée nationale pour défendre le projet de loi relatif à la régulation et à la protection de l’accès à la culture.

S’agissant de la rave party que vous évoquez, on peut comprendre l’envie de faire la fête, mais les règles sanitaires persistent, les lois de notre pays persistent et doivent être respectées.

Samedi 19 juin, l’évacuation du Teknival interdit de Redon – car il était interdit, je le rappelle – par les forces de l’ordre a été réalisée grâce à des manœuvres complexes, avec l’objectif d’agir vite. J’en profite pour saluer le calme et l’organisation de l’intervention des forces de l’ordre. (Mme Marie-Pierre de La Gontrie et M. David Assouline protestent.) Certains individus ont d’ailleurs été secourus par des unités nautiques engagées dans ce dispositif, parce qu’il y avait, d’un côté, de l’eau, et, de l’autre, des habitants.

Mme Laurence Rossignol. Heureusement !

Mme Sarah El Haïry, secrétaire dÉtat. Le matériel de sonorisation devait être saisi très rapidement pour mettre fin à cette infraction et pour permettre l’évacuation des lieux dans le calme.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Le matériel a été détruit !

Mme Sarah El Haïry, secrétaire dÉtat. Dans le cadre de la procédure judiciaire de saisie, s’il y a eu des dégradations, les faits seront établis sous l’autorité du procureur de la République en fonction des éventuels contentieux.

Monsieur le sénateur, la reprise et les réouvertures doivent se dérouler dans le cadre de la loi et des règles. C’est la raison pour laquelle la ministre de la culture a reçu l’ensemble des festivaliers et des acteurs de la culture, afin de permettre un retour à la normale le plus vite possible avec des jauges à 100 % à l’extérieur, dès le 21 juin, selon le souhait du Président de la République et du Premier ministre, partagé par les acteurs des concerts et des festivals. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP.)

M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour la réplique.

M. Thomas Dossus. Il fut un temps où les autorités françaises savaient dialoguer avec les organisateurs ; aujourd’hui, vous privilégiez la matraque, c’est totalement irresponsable ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE.)

abstention électorale

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

M. Jean-Pierre Decool. Monsieur le ministre de l’intérieur, le spectre d’une abstention massive nous menaçait. Pour une fois, les sondages ne se sont pas trompés et l’ensemble de la classe politique a reçu une douche froide. L’abstention a atteint un niveau historique : deux Français sur trois ne se sont pas exprimés.

N’est-il pas urgent d’éclaircir les origines de ce phénomène et d’esquisser des pistes de réflexion, au-delà des satisfactions et des déceptions politiques des uns et des autres ?

Le covid a sa part de responsabilité, certes, et le chemin vers les isoloirs n’était peut-être pas la priorité des Français.

Si la grande gagnante est l’abstention, j’aimerais connaître la ou les sources de cet étrange paradoxe : il est très souvent reproché à notre classe politique nationale d’être éloignée du terrain ; mais quand vient le temps des élections locales, les électeurs sont aux abonnés absents.

On a vu les « gilets jaunes » se plaindre du manque de représentativité ; on entend les jeunes se lamenter du manque de rendez-vous démocratiques, mais quand ces rendez-vous sont fixés, cela fait « pschitt ! », il n’y a plus personne pour les honorer.

Comment expliquer cette désaffection démocratique ?

Je n’ai pas d’explications satisfaisantes et les ratés de livraison des professions de foi ne justifient pas tout. Alors que nous disposons de moyens de communication vertigineux, je m’interroge sur les modalités de l’exercice démocratique.

Aussi n’est-il pas temps de se poser officiellement certaines questions ? La concomitance de deux élections le même jour est-elle heureuse ? Ne serait-il pas opportun de recourir à des solutions technologiques face à un certain archaïsme démocratique, en admettant le vote par correspondance ou le vote par internet, même si beaucoup y sont réticents ? Ne faudrait-il pas se poser la question du vote obligatoire voire du vote blanc, même si cela ne s’inscrit pas forcément dans la démarche constitutionnelle ? Qui compose cette majorité silencieuse ?

Après quarante ans de vie politique locale comme ancien maire d’une commune rurale et vingt années de vie parlementaire, je suis, comme nous tous, abasourdi par cette désaffection des électeurs. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et RDPI, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Gérald Darmanin, ministre de lintérieur. Monsieur le sénateur Jean-Pierre Decool, l’abstention nous choque tous, bien évidemment. Des questions doivent être posées puisque, comme vous l’avez dit, le silence et là, il veut dire quelque chose et il vient de loin.

Pour les premières élections régionales, à la fin des années 1980, 77 % de Français étaient allés voter. Lors des élections de 2015, qui n’étaient pas organisées en concomitance avec un autre scrutin, qui n’ont pas été reportées, à l’occasion de laquelle les professions de foi sont, pour la plupart, arrivées à l’heure, qui ne se sont pas déroulées durant une crise comme celle du covid, 50 % seulement des Français étaient allés voter.

En plus de vingt ans, l’abstention a donc augmenté de vingt points aux élections locales. Nous avons d’ailleurs constaté le même niveau d’abstention dans de très nombreuses grandes villes de France au premier tour des élections municipales de mars dernier 2020 comme au second, lorsque celui-ci a été nécessaire.

En revanche, pour l’élection présidentielle, même si elle connaît une participation en baisse, 75 % des Français vont aux urnes.

Nous pouvons bien sûr nous poser la question des modalités, qui peuvent très certainement être améliorées en conservant le secret du scrutin afin d’éviter les pressions communautaires, patriarcales ou familiales. Il faut évidemment réfléchir à la modernisation du vote.

Nous pouvons toutefois également considérer que l’abstention s’explique non pas simplement par ces modalités, mais aussi par les politiques plus profondes qui touchent l’Occident, dans la mesure où tous les pays sont touchés, et singulièrement la France.

Monsieur le sénateur, nous devons y réfléchir collectivement, après le second tour des élections régionales et départementales. Avec un peu de recul, la concomitance des deux scrutins, souhaitée en 2015, n’était peut-être pas la meilleure des solutions pour favoriser la bonne compréhension de nos concitoyens. Nous pourrions également modifier les lois pour nous permettre de faire un seul bureau de vote, par exemple, et de rendre plus clairs un certain nombre d’exercices de vote.

Il nous faut réfléchir aux modalités du scrutin, et je suis évidemment à la disposition du Parlement, et singulièrement du Sénat, pour cela. (M. Frédéric Marchand applaudit.)

élections départementales et régionales (i)

M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour le groupe Les Républicains. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Olivier Cigolotti applaudit également.)

M. Laurent Duplomb. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.

Des enveloppes de professions de foi dans les fossés et dans les poubelles, des enveloppes de professions de foi empilées sur les boîtes aux lettres des mairies, des enveloppes de professions de foi brûlées au coin des chemins, voilà la triste réalité d’une distribution chaotique et inadmissible des documents de propagande partout en France.

Des millions d’électeurs n’ont reçu aucun des documents, pourtant indispensables pour les informer de la tenue des élections et pour éclairer leur choix.

Alors que la crise sanitaire a privé les candidats des moyens habituels de mener campagne, vous n’aviez aucun droit à l’erreur !

Dès lors que l’on fait du « quoi qu’il en coûte » son credo, on ne lésine pas sur les moyens.

Après avoir affaibli le Parlement et ignoré les corps intermédiaires, après avoir favorisé le tirage au sort des concitoyens et l’établissement de conventions citoyennes, après avoir professé le « en même temps », qui contribue à donner le sentiment que, même si on élit quelqu’un, ce sont d’autres qui sont légitimes pour s’occuper de la question qui a motivé le vote, votre fiasco dans la distribution a abouti dimanche à une abstention record.

Monsieur le ministre de l’intérieur, comment comptez-vous mettre un terme à votre hold-up de la démocratie ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Gérald Darmanin, ministre de lintérieur. Monsieur le sénateur Duplomb, j’ai entendu M. le président du Sénat évoquer la commission d’enquête que vous allez sans doute créer. De par les pouvoirs dont est investie l’Assemblée sénatoriale et avec l’assentiment de notre volonté politique, tout document utile sera fourni et nous répondrons à toute demande d’éclaircissement.

Je crois l’avoir d’ailleurs fait ce matin, alors que j’étais convoqué par le président Buffet dès potron-minet devant votre commission des lois. J’ai expliqué qu’il y a eu des dysfonctionnements graves dans la distribution de la propagande électorale. À notre connaissance, cela a concerné 9 % de plis non distribués par les deux sociétés, La Poste et Adrexo, qui se partagent le marché à parts égales. Tous les documents seront fournis dès aujourd’hui à la commission des lois.

Je rappelle que ce sont deux directives européennes de 1997 et 2002 qui ont libéralisé le service postal et notamment, c’est explicitement prévu, la distribution de propagande électorale ; et que c’est une loi de 2005 qui a obligé le Gouvernement à mettre en concurrence deux sociétés seulement.

M. Pierre Laurent. Vous n’étiez pas obligés de les choisir !

M. Gérald Darmanin, ministre. Car seules deux sociétés sont aujourd’hui validées par l’autorité administrative indépendante qu’est l’Arcep (Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse) : Adrexo et La Poste.

Vous évoquez les moyens consacrés à la distribution de propagande ; ceux-ci ont été multipliés par deux en dix ans : de 150 millions d’euros en 2010, ils sont passés à 328 millions d’euros dans le budget pour cette année.

Bien évidemment, il y a eu des dysfonctionnements inacceptables. À plusieurs reprises, nous l’avons rappelé aux deux sociétés, et singulièrement à Adrexo. Le président de La Poste lui-même a fait remarquer que des dysfonctionnements s’étaient produits de son côté, mais cela concerne principalement Adrexo.

Des plis n’ont pas été distribués : cela peut tenir à une défaillance dans la distribution elle-même, entièrement imputable à la société elle-même, ou à la mauvaise tenue des listes électorales, laquelle relève du ministère de l’intérieur. J’en prends donc ma part. En outre, de la propagande électorale a été détruite, ce qui est absolument inacceptable.

Il est évident que je répondrai à toutes les questions que posera votre commission.

M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour la réplique.

M. Laurent Duplomb. Monsieur le ministre de l’intérieur, à vous écouter, vous n’êtes jamais en faute.

Pourtant, à mon sens, la vérité est que votre gouvernement est coupable.

Coupable de ne pas avoir réagi en temps et en heure à un problème sur lequel vous étiez alertés depuis des semaines.

Coupable d’avoir misé sur un coup de poker en choisissant une entreprise au bord de la faillite, pensant que l’abstention vous servirait, alors que celle-ci n’a finalement qu’amplifié votre élimination du second tour dans plusieurs régions.

Coupable de jouer un jeu dangereux, en voulant réduire le débat démocratique à un affrontement entre saint Macron et le diable Le Pen.

Alors que votre score aux régionales vous rappelle vos pires cauchemars, la droite républicaine, qui vous a mis au monde, n’est pas morte ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

défense, évolution de la menace, questions posées à la france par la situation iranienne

M. le président. La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Philippe Bonnecarrère. Ma question portera sur la position française à l’égard de l’Iran.

Je voudrais la mettre en perspective : tout à l’heure, nos collègues de la commission de la défense et des affaires étrangères, et son président, Christian Cambon, débattront avec vous, monsieur le Premier ministre, sur les conditions de la souveraineté française, sur sa remontée en puissance, sur la révision de la loi de programmation militaire et l’association du Parlement à celle-ci.

Ils exprimeront probablement leur préoccupation quant à l’évolution des menaces et, en particulier, quant aux risques de conflits dits de haute intensité.

Or une source majeure de conflits de haute intensité se situe au Moyen-Orient, avec l’interférence de plusieurs « États puissances ». La relation entre l’Occident et l’Iran est donc un sujet important. Négociations de Vienne et JCPoA (Joint Comprehensive Plan of Action – plan d’action global commun), changement politique aux États-Unis et en Israël, élection, le 18 juin, du président Raïssi, nucléaire balistique : toutes ces questions sont interconnectées.

Où en est, monsieur le ministre, la position française à l’égard de l’Iran ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – Mme Marie-Pierre Richer applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du commerce extérieur et de l’attractivité.

M. Franck Riester, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur et de lattractivité. Monsieur le sénateur Bonnecarrère, la France a pris acte de l’élection de M. Ebrahim Raïssi à la présidence de la République d’Iran, le vendredi 18 juin. Le nouveau président iranien prendra ses fonctions fin août, à la suite du président Rohani.

La France maintiendra bien évidemment, à l’égard du futur président iranien, les attentes fortes et les positions claires qu’elle faisait valoir auprès de son prédécesseur. Cela concerne, d’abord, les préoccupations que nous avons régulièrement exprimées à titre national, mais aussi avec nos partenaires européens, quant à la situation des droits de l’homme en Iran.

Concernant la situation de nos ressortissants détenus en Iran, nous continuerons à la suivre avec beaucoup de force dans les semaines à venir.

Bien évidemment, nous conserverons également des attentes fortes en matière nucléaire, puisque les négociations sont engagées depuis plusieurs années sur la perspective d’un retour à la pleine mise en œuvre de l’accord de Vienne sur le nucléaire. Cela concerne les États-Unis, qui en sont sortis mais dont le changement d’administration change la donne et, bien sûr, l’Iran, qui ne respecte plus une partie importante de ces dispositions.

La diplomatie française est donc pleinement mobilisée dans le cadre de ces négociations avec nos partenaires allemands et britanniques, ainsi qu’avec la Russie et la Chine et en lien étroit avec les États-Unis.

Jean-Yves Le Drian rencontrera très prochainement à Paris son homologue américain, Antony Blinken, pour évoquer notamment la question des négociations sur le nucléaire. Nous souhaitons que celles-ci puissent aboutir rapidement, car le temps ne joue pour personne dans cette crise.

Des décisions difficiles devront être prises dans les prochains jours ou dans les prochaines semaines si elles ne devaient pas avancer.

Au-delà de ces négociations sur le nucléaire, nous avons des discussions sur le retour des efforts de paix au Moyen-Orient, dans lesquelles la France est très impliquée.

M. le président. La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, pour la réplique.

M. Philippe Bonnecarrère. Avec l’Iran, les choses sont rarement blanches ou noires, mais souvent blanches et noires.

Pour le volet noir, pensons à nos concitoyens Fariba Adelkhah et Benjamin Brière, qui sont retenus dans des conditions insupportables.

Pour le volet blanc, car il existe bel et bien, pensons au rôle décisif joué par les Iraniens pour arrêter Daech à Erbil, au côté des Kurdes.

Pensons aussi à l’espace de sécurité qu’ils pourraient être demain pour nous, eu égard au regard très particulier que portent sur notre pays deux de leurs voisins : l’Afghanistan et le Pakistan. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

allocation aux adultes handicapés (i)

M. le président. La parole est à M. Gérard Lahellec, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

M. Gérard Lahellec. Ma question s’adresse à Mme la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées.

Madame la secrétaire d’État, jeudi dernier, vous vous êtes déshonorée en ayant recours à la réserve de vote puis au vote bloqué pour tordre le bras des députés de votre majorité.

Cette manœuvre procédurale est d’autant plus scandaleuse qu’il s’agissait d’une journée réservée à l’initiative parlementaire et que la proposition de loi émanait du droit de pétition exercé par nos concitoyens.

Sur le fond, vous avez surtout refusé de reconnaître l’autonomie des personnes en situation de handicap.

En refusant d’individualiser le calcul de l’allocation aux adultes handicapés (AAH), vous avez préféré renvoyer chaque personne dépendante du fait d’un handicap à une autre forme de dépendance, économique, vis-à-vis de sa compagne ou de son compagnon de vie.

Cette humiliation pour la personne dépendante est pourtant dénoncée par l’ensemble des associations.

Au nom de la responsabilité budgétaire, le Gouvernement s’enferme dans une posture bien éloignée des valeurs de progrès et d’humanité.

Ma question est la suivante : allez-vous inscrire à l’ordre du jour de la session extraordinaire la proposition de loi qui reconnaît l’autonomie des personnes handicapées ou préférez-vous botter en touche en prétextant l’examen du budget pour voter un abattement fiscal sans rapport avec l’individualisation de l’AAH ? (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. – Mmes Annick Billon, Élisabeth Doineau et M. Christian Bilhac applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées.

Mme Sophie Cluzel, secrétaire dÉtat auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Monsieur le sénateur, quel dommage de voir tout le travail que le Gouvernement a mené depuis le début du quinquennat en commun avec le Parlement, avec les députés, avec les sénateurs, en matière de handicap remis en cause au nom de l’opportunisme politique ! (Protestations sur lensemble des travées, à lexception de celles du RDPI. – Huées sur les travées des groupes CRCE, SER et Les Républicains.)

Vous dites que le Gouvernement fait preuve de frilosité budgétaire, mais il a consacré 2 milliards d’euros d’investissements sur ce quinquennat pour l’allocation aux adultes handicapés : 2 milliards ! (Mme Patricia Schillinger et M. François Patriat applaudissent.)

Vous vous êtes indignés d’une baisse de 5 euros des aides personnalisées au logement (APL), mais vous méprisez, de l’autre côté, une augmentation de 100 euros par mois de l’AAH : 100 euros de plus, car elle a été portée à 900 euros par mois pour plus de 1,2 million de bénéficiaires.

Non, monsieur le sénateur, notre approche n’est pas guidée par la seule volonté budgétaire. Elle est guidée par le fait d’assurer un système social fondé sur les principes de solidarité et de redistribution, par la conviction que les personnes en situation de handicap ont des compétences et sont des citoyens à part entière.

Au contraire de vos propos, un abattement fiscal est une avancée majeure pour les personnes, qui a tout à voir avec l’autonomie, puisque cela représente 110 euros de plus par mois en moyenne pour les bénéficiaires qui sont en couple et plus de 180 euros de gain pour les couples dont le revenu du conjoint est situé autour du SMIC.

Au nom des valeurs que porte votre groupe, vous devriez vous réjouir que l’on flèche l’argent vers ceux qui en ont le plus besoin et non vers les plus aisés, comme c’est le cas avec la déconjugalisation.