M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, pour la réplique.
M. Jean-Michel Arnaud. Monsieur le ministre, je vous remercie de ces précisions. Je vous invite dans mon département, dans la vallée de la Durance et le Buëch, afin que vous puissiez vous rendre compte de la situation, même si je sais que vous en êtes conscient. Nous pourrons à l’occasion aussi parler de pastoralisme. Après votre déplacement dans la vallée Auvergne-Rhône-Alpes, je vous convie en région Sud Provence-Alpes-Côte d’Azur, dès que possible, pour soutenir le moral de nos agriculteurs et de nos arboriculteurs.
nouvelles réglementations sur les boues d’épuration urbaines
M. le président. La parole est à M. Bernard Fournier, auteur de la question n° 1512, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.
M. Bernard Fournier. Madame la secrétaire d’État, je souhaite attirer votre attention et celle du Gouvernement sur les conséquences importantes, pour le service public d’assainissement des eaux usées de l’agglomération de Roanne, que risquent d’entraîner les nouvelles réglementations relatives aux conditions de retour au sol des boues d’épuration urbaines.
En effet, les 10 000 tonnes produites chaque année par les 35 stations d’épuration de ce territoire font l’objet d’une valorisation agricole dans le cadre de plans d’épandage, pour 50 %, et sous la forme de compost, pour 50 %. Or le projet de décret relatif aux critères de qualité agronomique et d’innocuité selon les conditions d’usage pour les matières fertilisantes et les supports de culture prévoit l’interdiction, à compter du 1er juillet 2021, de tout épandage de boues urbaines non hygiénisées.
Par ailleurs, ce même projet de décret, ainsi que celui qui est relatif au compostage des boues d’épuration et digestats de boues d’épuration avec des structurants vont également imposer de très fortes contraintes sur la fabrication et la distribution des composts.
Toutes ces dispositions vont entraîner d’importants surcoûts pour leurs services d’assainissement. Soit ces surcoûts seront répercutés sur les redevances d’assainissement payées par les usagers, soit ils seront amortis par une baisse drastique des programmes d’investissement.
Au-delà de cette question financière cruciale, l’agglomération de Roanne et son prestataire de compostage ne pourront pas répondre à ces nouvelles exigences dans les délais prévus, car ils ne possèdent ni les équipements ni les infrastructures nécessaires pour ce faire.
En outre, l’entrée en vigueur des nouveaux seuils envisagés notamment pour le cuivre ou le nickel, dès le 1er juillet 2021, va imposer à l’agglomération et à ses prestataires de réexaminer dans les mêmes délais les conditions de déversement des eaux de plusieurs industriels, voire d’interdire ces déversements.
En conséquence, madame la secrétaire d’État, je vous demande de bien vouloir prendre en compte toutes les difficultés que posent ces nouvelles réglementations, de les limiter aux exigences strictement nécessaires et de prévoir des délais compatibles avec la mise en œuvre de solutions permettant de les respecter.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Fournier, l’instauration de nouvelles normes applicables aux épandages de boues ou de composts élaborés à base de boues a pour objectif d’assurer un niveau de protection homogène des sols agricoles à l’égard des contaminations, et ce quel que soit le type de fertilisation.
Ces normes trouvent leur fondement dans l’article 86 de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, qui est de fait assez exigeante quant au niveau d’innocuité à atteindre pour permettre le retour au sol de ces boues.
Le ministre de l’agriculture et de l’alimentation, responsable de l’élaboration des normes de qualité des matières destinées à l’épandage et des procédures d’épandage, a soumis à la consultation un premier projet de décret à la fin de 2020.
L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a rendu son avis sur le sujet le 28 janvier dernier ; il est assorti de certaines recommandations dont la faisabilité devra être évaluée par le ministère chargé de l’agriculture, qui sera sans doute amené à proposer un projet amendé de décret.
Par ailleurs, aux termes de l’article 86 de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, un décret doit préciser les conditions dans lesquelles les boues d’épuration peuvent être traitées par compostage, seules ou conjointement avec d’autres matières.
Un premier projet de décret a reçu un avis défavorable du Conseil national d’évaluation des normes le 4 février dernier, compte tenu des difficultés que les collectivités locales et les exploitants de station d’épuration éprouvent à atteindre un taux de siccité des boues suffisamment élevé pour permettre les rapports proposés entre boues et déchets verts, difficultés que vous avez évoquées dans votre question.
Un nouveau projet de décret précise que les déchets verts pourront être ajoutés, à parts égales avec les boues, à partir du 1er janvier 2022 ; à compter du 1er janvier 2024, ce rapport sera abaissé à 40 % de déchets verts. L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) examinera en 2026 la nécessité de réviser ces proportions en fonction des besoins de la filière de compostage des biodéchets, besoins qui auront pu alors être évalués.
Le Conseil national d’évaluation des normes a émis un avis favorable le 4 mars sur ce projet, qui a été transmis pour avis au Conseil d’État.
Je tiens enfin à vous signaler que des moyens ont été mis en place dans le cadre de France Relance : une enveloppe de 30 millions d’euros d’aide d’urgence vient aider les collectivités à prendre en charge les surcoûts liés à l’hygiénisation des boues avant épandage, nécessité rendue évidente par la crise sanitaire que nous connaissons. Cette aide doit notamment couvrir l’achat d’équipements, mais aussi de réactifs tels que la chaux. De manière plus pérenne, après la crise, les agences de l’eau pourront accompagner les collectivités dans leurs investissements.
M. le président. Je demande à chacun de bien vouloir respecter son temps de parole.
La parole est à M. Bernard Fournier, pour la réplique.
M. Bernard Fournier. Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, pour les précisions que vous avez bien voulu nous apporter. Nous serons très vigilants dans les mois à venir.
nouveau modèle de financement du « zéro artificialisation nette »
M. le président. La parole est à M. Christian Klinger, auteur de la question n° 1626, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.
M. Christian Klinger. Madame la secrétaire d’État, je souhaiterais vous interpeller sur le financement de l’objectif « zéro artificialisation nette », qui est l’une des grandes thématiques du projet de loi Climat et résilience.
L’article 47 de ce projet de loi dispose que le rythme de la consommation foncière doit être divisé par deux d’ici à 2030 ; son article 48 précise que l’action des collectivités doit limiter l’artificialisation des sols.
L’objectif est certes louable et les élus sont conscients de la nécessité de réduire le plus possible les consommations foncières et l’artificialisation ; toutefois, ils s’interrogent sur le modèle de financement et les modalités concrètes d’application de ces dispositions.
L’objectif est national, mais ce sont les élus locaux qui vont être à la manœuvre en matière d’urbanisme ; or les inquiétudes sont nombreuses.
Votre projet de loi invite principalement à modifier les documents d’urbanisme – plans locaux d’urbanisme (PLU), schémas de cohérence territoriale (SCoT) et schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet) –, mais cela n’est pas suffisant. Le projet de loi fixe la ligne directrice, mais il ne donne pas aux collectivités les outils et les moyens pour y parvenir. Sur le principe, la majorité des élus est d’accord, mais concrètement, on ne sait pas comment y arriver !
Par ailleurs, il faut considérer la problématique du foncier de manière globale. Les élus vont se retrouver face à des injonctions contradictoires, entre le « zéro artificialisation nette », d’un côté, et les dispositions de la loi SRU (loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains) sur la construction des logements sociaux, de l’autre.
Dans mon territoire, couvert par le SCoT Colmar Rhin Vosges, quatre communes sont en déficit de logements sociaux : comment vont faire leurs élus ? Devront-ils construire et, « en même temps », ne pas construire ?
Ma question est donc simple : concrètement, quel est le mode d’emploi de l’objectif « zéro artificialisation nette » ? Comment financer cet objectif ? Quels sont les leviers, notamment fiscaux, prévus pour les collectivités ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Klinger, la France s’engage en faveur de la sobriété foncière, comme vous l’avez rappelé, en visant à atteindre cet objectif de zéro artificialisation nette des sols d’ici à 2050.
Dans le cadre du projet de loi Climat et résilience, si les parlementaires le veulent bien, nous fixerons une trajectoire de réduction de moitié de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers dans les dix prochaines années, conformément à la recommandation de la Convention citoyenne pour le climat.
Chaque année, entre 20 000 et 30 000 hectares d’espaces naturels, agricoles et forestiers sont artificialisés, avec des conséquences écologiques que personne ne nie, mais aussi des conséquences socioéconomiques, telles que la dévitalisation des petites centralités, l’éloignement de l’emploi et des surcoûts pour la mobilité.
Je partage donc votre analyse : l’un des principaux moteurs de l’artificialisation des sols est bien économique. En effet, il est parfois plus coûteux, plus complexe et plus long de reconstruire la ville sur la ville que de construire sur un terrain agricole en périphérie. C’est l’une des raisons qui conduit malheureusement les aménageurs à construire prioritairement en extension urbaine, ce qui a pour conséquence de favoriser l’étalement urbain.
Le différentiel de coûts est d’autant plus élevé lorsque les opérations se situent sur des friches et dans des secteurs détendus, qui ne permettent pas de générer des recettes pour équilibrer le bilan économique de l’aménagement.
Cependant, si construire en extension urbaine est moins cher pour l’aménageur, cette stratégie de déploiement a un coût pour la collectivité ; elle entraîne aussi des coûts, souvent cachés, pour les ménages.
Aussi, afin d’apporter des réponses en matière de financement du « zéro artificialisation nette », le ministère de la transition écologique envisage trois leviers principaux.
Le premier levier est le développement de l’ingénierie foncière et financière des établissements publics fonciers (EPF), qui acquièrent du foncier, le remettent en état et le gardiennent avant rachat à prix coûtant à la collectivité dans le cadre d’une convention. Leur modèle économique repose sur la recette fiscale de la taxe spéciale d’équipement. Cette taxe est votée dans les conseils d’administration des EPF, qui sont toujours présidés par un élu local : cela a son importance du point de vue de la gouvernance. Les EPF couvrent 80 % du territoire national et leur extension est encouragée.
Le deuxième levier est l’allocation de subventions pour absorber le déficit d’opérations ou encourager les opérations denses qui recyclent du foncier. Des aides sont accordées dans le cadre des contrats de projet partenarial d’aménagement et des programmes de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) ; je pense notamment aux programmes Action cœur de ville et Petites villes de demain.
Enfin, le troisième levier passe par une adaptation de la fiscalité visant à encourager le recyclage urbain. Il est d’ores et déjà possible de moduler certaines taxes à cette fin, qu’il s’agisse de la taxation des plus-values immobilières ou de la taxe sur les surfaces commerciales.
M. le président. Veuillez respecter votre temps de parole, madame la secrétaire d’État !
La parole est à M. Christian Klinger, pour la réplique.
M. Christian Klinger. Il est vrai qu’il s’agit d’un sujet nouveau et complexe ; il ne peut pas être résumé en deux minutes et demie, j’en suis conscient !
Merci pour votre réponse, madame la secrétaire d’État, mais vous n’ignorez pas que nous allons rencontrer de vrais problèmes, sur le terrain, pour appliquer l’objectif « zéro artificialisation nette ». Comme trop souvent, le Gouvernement se borne à fixer de grands principes et des objectifs, sans considérer leurs aspects opérationnels. En fonctionnant ainsi, l’État prend uniquement une position de contrôle ; cette défiance est mal perçue sur le terrain.
Je vous invite donc à ne pas vous précipiter et à travailler en concertation avec les collectivités et les élus locaux, afin d’aboutir à un véritable mode d’emploi pour la mise en œuvre de cet objectif.
manque de dessertes à la gare nîmes-pont-du-gard
M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa, auteur de la question n° 1488, adressée à M. le ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports.
M. Laurent Burgoa. Madame la secrétaire d’État, les voyageurs, qu’ils soient gardois, professionnels, ou touristes, bénéficient de la nouvelle gare TGV de Nîmes-Pont-du-Gard, mais constatent, avec regret et exaspération, qu’à peine 50 % des TER permettent une correspondance efficace avec la gare de Nîmes-Centre. À l’heure où la conscience écologique s’éveille chaque jour un peu plus, cette situation est de moins en moins compréhensible.
Il manque à la gare de Nîmes-Pont-du-Gard une troisième voie propre à assurer des correspondances adaptées aux cadencements des TGV. Pourtant, les moyens financiers sont quasiment réunis pour satisfaire à cette exigence.
En effet, attentif que je suis – comme vous, j’en suis sûr ! – à nos finances, je tiens à vous préciser, madame la secrétaire d’État, qu’un provisionnement de près de 12 millions d’euros, prévu dans le cadre de la convention de financement et de réalisation de la gare nouvelle et non consommé à la clôture de cette convention, assurerait le financement d’une troisième voie à quai et rendrait enfin opérationnel cet équipement.
En toute logique, la communauté d’agglomération Nîmes Métropole, suivie par les autres collectivités parties à la convention, propose que le comité de pilotage de la gare nouvelle acte au plus tôt ce fléchage financier.
Ainsi, sollicité par les collectivités partenaires – communauté d’agglomération, département du Gard et région Occitanie –, le préfet de région a saisi SNCF Réseau, il y a plusieurs mois, en vue de la préparation d’un ultime comité de pilotage. Or le représentant de l’État et les collectivités cofinanceuses s’entendent répondre par SNCF Réseau que ses services ne sont toujours pas en mesure de fournir le bilan comptable de l’opération, qui préciserait le montant exact du reliquat, ce qui repousse toute réunion du comité de pilotage.
Enfin, si le soutien de la région comme du conseil départemental au principe de l’affectation intégrale de cette somme à la troisième voie a été clairement exprimé, il n’en demeure pas moins que l’immobilisme de SNCF Réseau est préjudiciable au développement touristique et économique de notre territoire.
De fait, madame la secrétaire d’État, comme vous l’aurez compris, je vous demande de bien vouloir user de toute votre autorité pour que SNCF Réseau rende des comptes, au sens propre comme au sens figuré, dans les plus brefs délais !
Oui, cela s’impose, car il est aberrant de devoir compter sur le bus ou la voiture pour se rendre à cette gare.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Burgoa, vous nous interrogez à propos des dessertes ferroviaires de la gare de Nîmes-Pont-du-Gard.
Comme vous le rappelez, les élus nîmois ont exprimé le souhait que soit créée, sur la ligne classique, une troisième voie à quai permettant l’organisation de navettes TER entre la gare nouvelle et la gare centrale de Nîmes. Dans cette optique, ces navettes TER relieraient les deux gares en huit minutes, la troisième voie permettant à la navette de stationner en gare nouvelle dans l’attente du passage des TGV.
Cet investissement, de l’ordre de 12 millions d’euros, n’est pas prévu dans la convention de financement du contournement ferroviaire de Nîmes et Montpellier (CNM), mais il a été examiné dans le cadre des comités de pilotage de cette opération.
Rappelons que, sur le plan technique, une étude d’opportunité a été conduite par SNCF Réseau en 2018 dans le cadre du contrat de plan État-région. Cette étude a conclu à l’absence de nécessité d’un tel aménagement à court terme, compte tenu des perspectives du nombre de circulations TER sur la ligne classique.
Sur le plan financier, un bilan de la convention de financement du CNM est en cours. Il permettra d’identifier un éventuel reliquat, dont l’utilisation devra être convenue entre les cofinanceurs de cette opération.
À ce stade, le conseil régional d’Occitanie, en tant qu’autorité organisatrice de la mobilité, s’est plutôt engagé dans le cadre de la nouvelle convention TER en faveur de l’arrêt systématique de 44 TER en gare nouvelle, plutôt que de la réalisation d’une navette ferroviaire dédiée en dehors du réseau.
Ce sujet recevra en tout cas une attention particulière du Gouvernement dans les mois à venir et sera évoqué de nouveau après le bilan d’exécution financière de la convention en cours.
M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa, pour la réplique.
M. Laurent Burgoa. Madame la secrétaire d’État, merci pour vos propos, mais ils ne sont pas très rassurants : cette troisième voie était prévue dans le projet initial ! Pour une fois que l’ensemble des collectivités sont favorables à un projet, ainsi que l’État, il serait bon que SNCF Réseau le soit aussi !
risques pesant sur une réouverture rapide de la ligne de la rive droite du rhône
M. le président. La parole est à M. Denis Bouad, auteur de la question n° 1514, adressée à M. le ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports.
M. Denis Bouad. Madame la secrétaire d’État, la réouverture aux passagers de la ligne ferroviaire dite « de la rive droite du Rhône », considérée comme une priorité dans le cadre des États généraux du rail et de l’intermodalité, représente une opportunité considérable pour le Gard.
À terme, en desservant dix gares entre Pont-Saint-Esprit et Nîmes, cette ligne traversera un bassin de vie de 700 000 habitants et de 300 000 emplois. Devant ces chiffres, vous imaginez aisément l’attente légitime que cette réouverture suscite au sein de la population.
Porté et financé par la région Occitanie, ce projet devait initialement aboutir à une mise en service en décembre 2021. Cela avait été acté lors des différents échanges entre la région et SNCF Réseau.
Malheureusement, ce calendrier est aujourd’hui largement remis en cause par le positionnement de l’Établissement public de sécurité ferroviaire (EPSF). En effet, avant de délivrer une autorisation de mise en service, cet organisme placé sous la tutelle du ministère des transports requiert que soit engagé tout un arsenal de procédures, ce qui ne permettrait pas d’envisager une réouverture de la ligne aux passagers avant 2023.
Ces procédures complémentaires sont pertinentes et logiquement prévues dans le cadre d’une ouverture de ligne. Pour autant, au moment où je parle, la ligne de la rive droite du Rhône voit déjà circuler quotidiennement des trains de fret et même occasionnellement des TGV, qui l’utilisent comme itinéraire de substitution.
Face à cette situation, les administrés et les élus locaux, déjà impatients, ressentent encore de l’incompréhension et du mécontentement.
Madame la secrétaire d’État, à l’heure où la relance économique est au cœur de nos préoccupations et de nos réponses à la crise, à l’heure où la transition énergétique est à la fois un impératif et une urgence, pouvons-nous nous permettre de retarder un tel projet ?
Aussi, compte tenu de ces éléments, le Gouvernement compte-t-il intervenir afin de lever les obstacles qui s’opposent encore à une réouverture rapide de la ligne de la rive droite du Rhône aux passagers ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Bouad, vous nous interrogez à propos de la ligne ferroviaire dite « de la rive droite du Rhône ».
Cette ligne, qui reliait initialement Givors à Nîmes, n’est plus desservie par des trains de voyageurs depuis 1973. Cependant, des TER circulent sur la section Avignon-Nîmes, sans arrêts intermédiaires ; la voie sert également d’itinéraire de détournement pour la ligne de la rive gauche. Elle reste parcourue par environ vingt trains de fret par jour et fait partie d’un corridor européen.
La région Occitanie porte un projet de reprise des TER entre Nîmes et Pont-Saint-Esprit ; on desservirait ainsi dix gares, dont huit doivent être remises en exploitation, pour huit allers-retours quotidiens. La mise en service complète de cette desserte était prévue pour le service annuel 2026, mais la région a souhaité prévoir une première phase dès la fin de l’année 2021.
Cette échéance avancée est néanmoins apparue difficile à tenir, compte tenu d’un certain nombre de règles de sécurité ferroviaire dont personne ne souhaite, à l’évidence, s’affranchir trop rapidement ; il convient de les respecter dès qu’il y a renouvellement ou réaménagement d’une ligne. La sécurité des passages à niveau fait notamment l’objet d’une forte attention.
L’ampleur du projet et le nombre de passages à niveau ont conduit l’Établissement public de sécurité ferroviaire à demander en décembre 2020, comme vous l’avez rappelé, la production d’un certain nombre d’études nécessaires pour délivrer les autorisations réglementaires. Il s’agit de procédures habituelles, connues de tous les porteurs de projets.
Pour éviter un décalage majeur des délais, le ministre délégué chargé des transports a demandé à ses services d’évaluer toutes les possibilités avec SNCF Réseau et l’EPSF, sans toutefois remettre en cause le processus garantissant la sécurité du projet.
Nous sommes aujourd’hui en mesure de vous assurer que toutes les pistes d’optimisation, notamment en matière de délais, sont étudiées par SNCF Réseau, en lien avec l’EPSF, l’État et la région Occitanie, dont je tiens à souligner le partenariat exemplaire et le volontarisme. Les réflexions se poursuivent pour rapprocher au maximum la mise en service de cette desserte de l’objectif souhaité par la région.
Comme vous pouvez le constater, monsieur le sénateur, l’engagement de l’État est très concret ; nous menons une évaluation complète. Nous sommes, comme vous, très attachés à ce que la ligne de la rive droite du Rhône retrouve rapidement toute sa vitalité.
M. le président. La parole est à M. Denis Bouad, pour la réplique.
M. Denis Bouad. Madame la secrétaire d’État, le seul passage à niveau qui pose problème est celui de Pont-Saint-Esprit, qui est en bout de ligne. Ce n’est donc pas un problème majeur. En revanche, nous avons la certitude, dans notre territoire gardois, que la route nationale est tous les jours largement saturée, avec toutes les problématiques qui en découlent.
évaluation des nuisances sonores des transports ferroviaires
M. le président. La parole est à M. Louis-Jean de Nicolaÿ, auteur de la question n° 1627, adressée à M. le ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports.
M. Louis-Jean de Nicolaÿ. Madame la secrétaire d’État, je souhaite interroger le Gouvernement, une nouvelle fois, sur l’impact des nuisances provoquées par les infrastructures ferroviaires des lignes à grande vitesse (LGV) et sur les solutions à envisager pour les riverains.
Je tiens à remercier M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué chargé des transports, pour le courrier qu’il nous a adressé tout récemment, au sein duquel il nous donne des précisions sur les arrêtés qu’il lui incombe de prendre aux termes des dispositions introduites dans le code de l’environnement par la loi d’orientation des mobilités (LOM) sur la prise en compte des pics événementiels et des vibrations dans le calcul des nuisances.
Cela dit, vous comprendrez, madame la secrétaire d’État, que les échéances que vous envisagez, à savoir la fin de 2022, suscitent chez nous des interrogations quant à leur acceptabilité pour le vécu des riverains.
Par ailleurs, de nombreux points sur lesquels il me semble particulièrement important de revenir restent en suspens aujourd’hui, alors qu’ils mériteraient d’être précisés, comme l’expose clairement le courrier que nous vous avons adressé avec plusieurs collègues parlementaires.
Nous avons notamment des appréciations divergentes quant au temps de transport additionnel qu’entraînerait une diminution de la vitesse des trains ; notre expert le quantifie à sept minutes pour le trajet Le Mans-Rennes, ce qui est loin des vingt minutes que vous annoncez.
Nous avons également une appréciation différente de la manière dont vous envisagez la mise en œuvre concrète de la séquence dite « ERC » – éviter, réduire, compenser –, qui est au cœur du processus d’évaluation environnementale de tout projet, depuis sa conception et pendant toute sa durée de vie. Les mesures compensatoires ne sont actuellement pas garanties, alors qu’elles font l’objet d’une obligation de résultat dont les maîtres d’ouvrage sont débiteurs.
Pour toutes ces raisons, je regrette les atermoiements récurrents autour de ce dossier que nous portons auprès du Gouvernement depuis 2018. À ce titre, je réitère ma volonté d’être reçu, ainsi que mes collègues parlementaires cosignataires de ce courrier, par M. Djebbari ou ses services.
Des solutions existent, notamment en matière de protection phonique. Nous nous devons de les faire émerger le plus rapidement possible pour l’ensemble des riverains de ces lignes, qui sont quotidiennement confrontés à des nuisances sonores.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur de Nicolaÿ, vous nous interrogez sur l’évaluation des nuisances sonores des transports ferroviaires.
Je tiens à vous réaffirmer que le Gouvernement a pleinement conscience des impacts relatifs à ces nuisances sonores pour les riverains ; nous nous employons à répondre à leurs attentes et à les réduire activement.
Ces problématiques sont souvent évoquées pour les LGV Bretagne-Pays de la Loire et Sud Europe Atlantique, qui ont été mises en service en juillet 2017 et dont je crois qu’elles vous sont chères.
Le Gouvernement agit avec détermination, d’abord en réalisant des travaux qui permettront de réduire ces nuisances aux abords des deux LGV. Ces travaux sont en cours. Pour la LGV Bretagne-Pays de la Loire, 11 millions d’euros sont déjà prévus. Pour la LGV Sud Europe Atlantique, une réflexion est menée ; une convergence doit être trouvée avec les conseils régionaux de Nouvelle-Aquitaine et Centre-Val de Loire.
Ensuite, nous travaillons sur les normes et la qualification du bruit. Quand ces nuisances sont avérées, en dépit du respect global de la réglementation, elles seraient liées non pas à un niveau de bruit régulier, mais à des pics de bruit élevé lors du passage des trains.
Sur ce deuxième point, les travaux se poursuivent, en lien notamment avec l’arrêté du 8 novembre 1999 relatif au bruit des infrastructures ferroviaires et sur la base des recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Grâce à la loi d’orientation des mobilités, deux avancées vont permettre de mieux prendre en compte ces pics de bruit, au travers de l’arrêté prévu à l’article 90 de cette loi, et de mieux intégrer également les vibrations des infrastructures de transport ferroviaire, au travers de l’arrêté prévu à son article 91.
Ces arrêtés devraient être pris courant 2022. Vous souhaiteriez, comme nous, qu’ils soient pris plus rapidement ; néanmoins, malgré tout l’intérêt de cette entreprise, les indicateurs et les méthodes doivent être affinés.
Toutes les solutions existantes doivent également être étudiées. Plusieurs consultations obligatoires, dont celle de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), doivent être menées et un consensus final doit être recherché. Ces travaux permettront d’enrichir les connaissances et d’améliorer les pratiques en matière d’évitement, de réduction et de compensation des impacts, la fameuse séquence ERC que vous avez évoquée à juste titre et à laquelle je suis également très attachée.
Enfin, si la réduction de vitesse a bien été envisagée, des études rigoureuses ont été menées à ce sujet et nous pouvons, me semble-t-il, retenir les conclusions du rapport du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) sur ce point : cette approche ne paraît pas pertinente.
Soyez donc assuré, monsieur le sénateur, que nous sommes pleinement mobilisés aux côtés des riverains.