compte rendu intégral
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
Mme Jacqueline Eustache-Brinio,
Mme Patricia Schillinger.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Modification de l’ordre du jour
M. le président. Par lettre en date de ce jour, M. le Premier ministre m’a informé que le Gouvernement fera une déclaration, en application de l’article 50-1 de la Constitution, relative à l’évolution de la situation sanitaire et aux mesures nécessaires pour y répondre, suivie d’un débat et d’un vote, demain à quinze heures.
Acte est donné de cette demande.
En conséquence, le Gouvernement demande que le Sénat siège ce vendredi 2 avril, matin, après-midi et soir pour poursuivre l’examen du projet de loi confortant le respect des principes de la République.
Par ailleurs, par lettre en date de ce jour, le Gouvernement demande l’inscription à l’ordre du jour du mercredi 7 avril après-midi, après les questions d’actualité au Gouvernement, des conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi pour une sécurité globale préservant les libertés.
Acte est donné de ces demandes.
Nous pourrions prévoir pour ce texte une discussion générale de 45 minutes.
Y a-t-il des observations ?…
Il en est ainsi décidé.
3
Questions d’actualité au Gouvernement
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.
Chacun de vous, mes chers collègues, veillera au respect des uns et des autres, ainsi que du temps de parole. Il sera également attentif aux gestes prophylactiques, qui sont très importants.
crise sanitaire
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Bernard Jomier. Monsieur le Premier ministre, l’heure du choix entre les patients est arrivée dans les premiers hôpitaux. Je ne citerai que les propos du chef du service de réanimation du centre hospitalier universitaire (CHU) de Nancy, qui annonçait hier plusieurs décès de patients dont les interventions avaient été déprogrammées.
Le tri va s’accélérer, et pour la première fois dans l’histoire récente de notre pays, cette situation n’est pas la conséquence d’un événement imprévu, mais celle de la décision d’un homme prise avec une volonté de concentration à l’excès de ses prérogatives constitutionnelles : le chef de l’État. Votre gouvernement, monsieur le Premier ministre, l’applique en laissant le virus circuler à un niveau élevé depuis deux mois.
Monsieur le Premier ministre, avez-vous des regrets, des remords ou des excuses à présenter aux Français et à leurs proches victimes de cette obstination ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Alain Houpert applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’autonomie. (Protestations sur diverses travées.)
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie. Monsieur le sénateur Bernard Jomier, permettez-moi tout d’abord de vous dire qu’il n’y a pas de tri, et que ce mot devrait être banni de notre vocabulaire à ce stade de la crise.
Mme Éliane Assassi. Dites-le aux familles de disparus !
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. La crise sanitaire mondiale que nous traversons nous mobilise maintenant depuis un an et demi, en France comme ailleurs. Nous avons eu à développer des réponses mesurées et évolutives face à la situation que nous connaissons, mais nous avons aussi un devoir de transparence vis-à-vis des Français.
La réalité, monsieur le sénateur, c’est que la mobilisation des Français, leur résilience, l’action publique mobilisée, nous permettent d’entrevoir le bout du tunnel, comme c’est le cas dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), où la vaccination ouvre le chemin des retrouvailles.
La réalité, c’est aussi que la situation sanitaire demeure plus que préoccupante : plus de 29 000 Français sont hospitalisés en raison du covid et les patients atteints du virus occupent 89 % des lits de réanimation, malgré toute notre action visant, comme dans les autres pays, à repousser les murs de nos hôpitaux.
M. Philippe Pemezec. Il fallait commander des vaccins !
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Pour y faire face, nous sommes dans l’action, sans relâche. Cette action, vous la connaissez, elle s’appuie sur la gestion quotidienne de l’ensemble des ressources dont nous disposons au regard de l’évolution de la situation sanitaire.
Concrètement, elle permet de déployer des outils – masques, gels, vaccins – dont nous avons besoin, de nous assurer que ceux-ci aillent où il faut, quand il le faut, grâce à une logistique d’ampleur. Notre réponse est territorialisée, concertée, en fonction de la situation vécue dans chaque région.
Nous rendons compte en toute transparence, en temps réel, chaque semaine, nous échangeons dans cet hémicycle ; quand la situation l’exige, M. le Président de la République s’adresse à nos concitoyens, ce qu’il entend faire ce soir.
Vous comprendrez qu’il ne m’appartient pas de préjuger de ses propos ; néanmoins, en complément des temps dédiés, le Premier ministre a fait le choix d’ouvrir un débat parlementaire dès demain pour que nous puissions échanger plus largement, en toute transparence, sur la réponse la plus adaptée à la situation que nous connaissons.
Monsieur le sénateur, les Français attendent mieux que de vaines polémiques. Hissons-nous à la hauteur de l’enjeu pour sortir collectivement plus forts de cette crise.
Mme Éliane Assassi. Pas un mot sur les personnes décédées !
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour la réplique.
M. Bernard Jomier. Madame la ministre, vous pouvez bannir un mot du vocabulaire, mais vous ne le bannirez pas de la réalité !
En déprogrammant plus de 80 % des interventions dans les hôpitaux, à quoi contraignez-vous les soignants, sinon à choisir, à prendre certains patients et non d’autres ?
Voyez-vous, ce qui m’inquiète dans vos propos, c’est ce déni persistant de la réalité, auquel vous ajoutez une gestion de la crise par un homme seul, fût-il chef de l’État, qui, encore une fois, ne consultera pas le Parlement avant ses décisions, lesquelles nous seront soumises comme si nous étions une chambre d’enregistrement. C’est scandaleux ! (Vifs applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
report des élections départementales et régionales
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
M. Jean-Yves Roux. Monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, nous savons que la troisième vague est très grave et nous sommes une nouvelle fois, en élus responsables, aux côtés de tous nos soignants, soucieux de continuer à appliquer les gestes barrières.
Pourtant, la situation sanitaire n’interdit pas d’envisager l’avenir, même proche, non plus que de faire des projets collectifs, comme les prochaines élections.
Depuis plus d’un an, les élus et les candidats aux élections départementales et régionales vont, comme Ulysse, de report en report, de faux départ en faux espoirs. Ils ne sont pas, à ce titre, pleinement mobilisables sur la durée pour appuyer les plans de relance et pour être aux côtés de celles et de ceux qui vivent la crise sanitaire et sociale que nous traversons.
Les exécutifs attendent. Lundi, le conseil scientifique, comme la loi du 23 février 2021 le prévoit, a émis un avis concernant un possible nouveau report des élections départementales et régionales, dont nous venons pourtant d’adopter le report en juin.
Les élus, mes chers collègues, ressentent encore l’amertume des conditions de préparation si incertaines des élections municipales de mars 2020. Nous ne pourrons pas forcément réitérer un tel exploit.
Comme n’hésitait pas à le dire François Mitterrand, l’action politique à certaines heures est comme le scalpel du chirurgien : elle ne laisse pas de place à l’incertitude.
Aussi, monsieur le Premier ministre, nous vous demandons de nous proposer très vite une date fixe, un projet de loi, un calendrier, un débat parlementaire, ainsi qu’une promulgation rapide. Nous souhaitons sacraliser le moment de la campagne électorale et de la confrontation des projets, qui est, mes chers collègues, le sel de notre démocratie, tout en assurant la sécurisation sanitaire et juridique des candidats, électeurs et personnels.
Pour le moment, une campagne électorale sans contact, ce n’est pas ce qui se fait de mieux.
Nous vous demandons également de prévoir dès à présent des conditions permettant de nous adapter à toutes les situations de crise. Mes chers collègues, les élus départementaux et régionaux sont indispensables pour affronter ensemble et rapidement les moments très difficiles qui s’annoncent.
Monsieur le Premier ministre, dedans avec les miens, certes (Sourires.), mais serons-nous en juin citoyens ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté.
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté. Monsieur le sénateur Jean-Yves Roux, le conseil scientifique, vous l’avez rappelé, a reçu mandat d’émettre un avis sur le déroulement du scrutin démocratique en période d’épidémie. Il a mené un travail difficile et remarquable que je veux ici saluer, malgré les différentes incertitudes persistantes quant à l’évolution de la crise sanitaire. Ce rapport était prévu dans la loi dont nous avons débattu ensemble et que vous avez votée, portant report, de mars à juin 2021, du renouvellement général des conseils départementaux et régionaux.
Ces élections, vous l’avez dit, sont un moment démocratique fondamental de notre pays, où chacun peut exercer son droit – son devoir, dirais-je même – de citoyen et venir voter. C’est un temps d’expression déterminant pour notre démocratie.
Après un an de crise sanitaire, nous comprenons la lassitude et, parfois, l’incompréhension des Français à l’égard de ces questions. La responsabilité du Gouvernement est de prendre des décisions souvent difficiles, mais toujours nécessaires pour la santé des Français. Le report ou le maintien des élections est une décision lourde de conséquences.
Le Premier ministre, Jean Castex, va lancer des consultations afin d’aboutir à une solution compatible avec la protection de chacun contre l’épidémie, mais aussi avec les impératifs démocratiques. Pour cela, nous rechercherons le consensus politique le plus large possible avec l’ensemble des partis et des groupes représentés.
Le Gouvernement sera d’ailleurs dès demain présent en séance publique à l’appel du Parlement pour un débat sur ce sujet. En tout état de cause, le Parlement exerce et exercera pleinement son rôle en la matière.
Quelle que soit la solution retenue après les consultations et l’obtention du consensus que j’appelle de mes vœux, le Gouvernement mettra tout en œuvre pour assurer à la fois la sécurité sanitaire et la sincérité de ce scrutin, ce qui est fondamental, vous êtes nombreux à l’avoir appelé au cours de nos débats. Ce débat aura lieu, comme il a eu lieu s’agissant du report en juin du deuxième tour des élections municipales. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
filière photovoltaïque
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Guillaume Gontard. Monsieur le Premier ministre, lundi dernier, le fabricant de silicium Ferropem annonçait la suppression de 360 emplois en Savoie et en Isère. C’est un savoir-faire centenaire qui est menacé. Le silicium est un produit essentiel pour de nombreuses activités industrielles, notamment pour la fabrication de panneaux photovoltaïques.
En Isère toujours, c’est l’entreprise Photowatt, l’un des rares producteurs français de panneaux solaires, ses 215 salariés et leur immense savoir-faire, qui sont également menacés. Après avoir acheté ses panneaux solaires en Chine pendant des années, sa maison mère, EDF, se désengage. On marche sur la tête !
Sur l’autel de la rentabilité capitaliste, c’est toute la filière photovoltaïque française, voire européenne, qui est sacrifiée.
L’énergie solaire est pourtant indispensable, tant pour la transition énergétique que pour la souveraineté de la France. Ne plus produire de panneaux photovoltaïques en France, c’est aggraver notre bilan carbone et notre dépendance à la Chine. Un comble en pleine discussion du projet de loi Climat !
Cela témoigne de l’absence totale de stratégie en matière de transition énergétique de la France. L’ombre colossale d’Hercule plane sur cette triste affaire. Alors que l’on s’apprête à nationaliser et à financer à fonds perdu la filière nucléaire, qui ne sera jamais rentable, on continue à confier au privé tout l’effort de transition énergétique. Sacrée réussite : nous sommes déjà en retard sur les objectifs 2020 !
Monsieur le Premier ministre, allez-vous agir pour sauver le panneau solaire français ?
Allez-vous enfin déployer une stratégie publique de développement des énergies renouvelables et respecter les objectifs de votre propre programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) ?
Allez-vous consulter le Parlement et le peuple avant d’engager, avec le projet Hercule, l’avenir énergétique de la France pour les trente prochaines années ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean Castex, Premier ministre. Monsieur le président Gontard, merci de votre question qui me donne l’occasion de m’exprimer sur un sujet majeur : la production d’électricité photovoltaïque et ses conséquences industrielles pour notre pays et pour l’Europe.
Vous l’avez rappelé, nous avons des ambitions fortes, décrites dans la programmation pluriannuelle de l’énergie qui a été adoptée, dans le cadre de la loi relative à l’énergie et au climat, le 21 avril 2020 par décret et que nous essayons de mettre en œuvre. L’électricité d’origine photovoltaïque progresse sans cesse, année après année, à un rythme soutenu et nous devons poursuivre dans cette voie.
Votre question renvoie à un autre sujet, celui de l’origine des panneaux, des tuiles et des cellules photovoltaïques qui génèrent cette électricité, lesquels, nous le savons comme vous, sont depuis très longtemps importés de très loin, souvent d’Extrême-Orient, avec un bilan carbone extrêmement défavorable. Nous devons changer cela.
Vous vous souvenez que, pour encourager la consommation d’électricité d’origine photovoltaïque, plusieurs gouvernements successifs avaient augmenté les tarifs d’achat, qu’ils ont ensuite été obligés de baisser à nouveau, précisément parce que cela faisait surtout l’affaire de producteurs étrangers. Cela suppose donc une vraie stratégie industrielle.
C’est sur ce point que je me démarquerai des observations que vous avez faites. Cette stratégie industrielle, qui a longtemps manqué, nous la mettons progressivement en place.
D’abord, nous veillons à ce que tous les appels d’offres pour l’achat de ces matériels comportent des critères en matière de contenu carbone, afin de favoriser les panneaux les plus performants, c’est-à-dire produits avec l’impact climatique le plus réduit, ce qui conduira, vous le savez, à écarter un certain nombre de ces produits importés qui ne répondent pas à ses conditions.
Ensuite, cette stratégie industrielle doit aussi être menée dans un cadre européen et nous travaillons avec la Commission sur la possibilité d’introduire des critères de contenu de production locale dans tous les appels d’offres pour le solaire conduits à l’échelle du territoire communautaire.
La France est également positionnée comme un État moteur pour le lancement d’une alliance européenne pour le photovoltaïque, qui entre exactement dans les objectifs que vous avez appelés de vos vœux, alliance européenne qui a été annoncée par la ministre déléguée chargée de l’industrie le 22 février dernier, aux côtés du commissaire chargé de l’énergie.
Enfin, la France elle-même consacre des moyens pour avoir la capacité de développer et de promouvoir cette filière. Nous soutenons ainsi beaucoup de petites et moyennes entreprises (PME) et d’entreprises de taille intermédiaire (ETI), comme le projet Akuo, le projet Bélénos ou encore le projet Photowatt, que nous avons sauvé.
Lorsque j’ai pris mes fonctions de chef du Gouvernement, vous avez raison de le rappeler, EDF voulait fermer Photowatt, nous l’en avons empêché, je le dis devant le Sénat, et Photowatt vit toujours. Nous allons soutenir le projet REC Solar à Sarreguemines, pour lequel le Gouvernement est pleinement mobilisé et qui va exiger beaucoup d’argent public.
Bref, mesdames, messieurs les sénateurs, ce gouvernement est pleinement mobilisé pour la construction d’une filière photovoltaïque souveraine et durable. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour la réplique.
M. Guillaume Gontard. Merci, monsieur le Premier ministre, mais vous ne m’avez pas répondu, notamment, sur Hercule et sur la place d’EDF.
Oui, EDF a repris Photowatt en 2012, mais aujourd’hui, allez-vous faire pression sur EDF pour qu’il conserve cette filiale à 100 % et lui achète ses panneaux ? Vous ne m’avez pas répondu à ce sujet.
lisibilité des réformes de la fiscalité locale
M. le président. La parole est à M. Pierre-Jean Verzelen, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Pierre-Jean Verzelen. Ma question s’adresse au ministre délégué chargé des comptes publics.
Monsieur le ministre, les quelque 35 000 maires de France viennent de recevoir, comme chaque année, les fameux états 1259.
La version 2021 est marquée par la réforme de la fiscalité locale avec, d’une part, la fin de l’encaissement de la taxe d’habitation par les communes et, d’autre part, le transfert aux communes de la part départementale de la taxe foncière sur le bâti.
Comme nombre de nos collègues, j’ai été sollicité par des maires, à la suite de la réception de cet état 1259, notamment à propos du savant calcul du coefficient correcteur, lequel « est égal à 1 plus la ressource à compenser moins la ressource de compensation divisée par la taxe foncière sur les propriétés bâties après réforme ». Je m’arrête là. (Applaudissements.)
Ce document est un véritable chef-d’œuvre de l’administration fiscale, aussi compliqué à comprendre qu’une attestation dérogatoire. (Sourires.)
Vous le savez, cette réforme suscite chez de nombreux élus des inquiétudes sur la compensation de la taxe d’habitation. C’est pourquoi un effort de clarification est nécessaire sur la détermination du coefficient correcteur.
Monsieur le ministre délégué, le Gouvernement doit prévoir un exercice de simplification et d’explication à destination des maires.
J’ajoute que, en fin d’année, les Français vont recevoir leur feuille d’impôts locaux de laquelle, pour 80 % d’entre eux, la taxe d’habitation disparaîtra. Il restera le foncier bâti, qui figurera sur une seule ligne avec un seul taux, résultant de l’addition du taux communal et du taux départemental.
Les maires, comme toujours, seront directement responsables devant les habitants. Par souci de transparence, il est indispensable qu’une clarification soit faite auprès du contribuable afin que celui-ci n’ait pas l’impression que la commune a augmenté massivement son taux d’impôt foncier en contrepartie de la suppression de la taxe d’habitation décidée par l’État.
Merci, monsieur le ministre, de nous apporter des précisions en la matière. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP, UC et Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Monsieur le sénateur, quelques mots pour répondre à votre question et, d’abord, pour vous rassurer : l’état 1259 n’a pas fondamentalement changé par rapport à l’année dernière et porte toujours, pour les communes, les informations les plus précises possible sur les recettes prévisionnelles en matière de fiscalité, afin de leur permettre de bâtir leur budget.
La direction générale des finances publiques est totalement mobilisée pour répondre à la crise, mais a veillé à adresser cet état avant le 31 mars, comme le prévoit le règlement. Si, d’aventure, une commune le recevait plus tard, elle bénéficierait automatiquement de quinze jours supplémentaires pour l’approbation de son budget, afin de tenir compte de ce délai.
Quelle est la principale différence ? Elle tient à la mise en œuvre de la réforme de la taxe d’habitation. Cela passe par deux canaux, dont le calcul du coefficient correcteur, dont vous avez rappelé la formule telle qu’elle est littéralement expliquée. Il s’agit, en réalité, d’une règle de trois : lorsque les ressources attribuées depuis le département sont égales à 100 et que la ressource précédente de la collectivité était égale à 80, alors ce coefficient est fixé à 0,8. On peut aussi rédiger cela de manière littérale, comme vous avez su le rappeler.
Nous avions transmis l’année dernière à l’ensemble des communes l’intégralité des simulations et nous avons demandé aux directions départementales des finances publiques de rééditer un exercice de pédagogie et d’explication auprès de chaque maire pour expliquer les différences.
Concernant la taxe foncière, il y a effectivement addition des taux, comme nous l’avions annoncé, mais le montant total de la taxe foncière sur les propriétés bâties reste strictement le même, nonobstant d’éventuelles évolutions de taux décidées par telle ou telle des collectivités désormais attributaires de cette taxe. À taux constant, le montant payé par le contribuable reste le même.
Enfin je voudrais corriger une légère imprécision dans votre propos : vous avez indiqué qu’en septembre prochain, 80 % des contribuables recevront une fiche d’impôts locaux de laquelle la taxe d’habitation aura disparu. En réalité, c’est en septembre dernier que 80 % des Français ont vu disparaître la taxe d’habitation. En septembre prochain, les 20 % de ménages continuant à la payer bénéficieront d’une première baisse d’un tiers. Il y a toujours deux feuilles d’imposition locale : une pour feu la taxe d’habitation et une pour la taxe foncière. Il n’y aura donc pas de confusion.
Je le répète, l’ensemble des maires recevront une explication plus détaillée, peut-être plus littéraire, de l’état 1259, qu’ils ont reçu récemment. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
situation sanitaire et stratégie vaccinale
M. le président. La parole est à M. Vincent Segouin, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Vincent Segouin. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
« Je viens d’avoir 32 ans et je me suis fait vacciner. La logique aurait voulu que mes parents le soient avant moi, mais ils n’ont pas la chance de vivre aux États-Unis. » Tels sont les messages que nous recevons. C’est ainsi, monsieur le Premier ministre, qu’est vue la France, cinquième puissance mondiale.
Depuis un an, nous vivons au rythme des confinements et des déconfinements, de la fermeture des écoles et des commerces et du triste décompte des entrées en réanimation et des morts.
Un an plus tard, nous avons le sentiment que rien n’a changé, que rien n’a évolué et que, malgré votre assurance et volonté de tout faire seuls, sans concertation, vous n’avez tiré aucun enseignement de vos erreurs.
L’année dernière, vous nous promettiez 14 500 lits de réanimation. La vérité est qu’il n’y en a que 6 733. L’association entre le public et le privé ne se fait toujours pas.
Un an plus tard, la solution vaccinale existe, mais, en France, seulement 3,9 % population est vaccinée contre 50 % aux États-Unis, 60 % en Grande-Bretagne, et même 85 % en Israël.
Si nous nous comparons à d’autres pays, ce que vous aimez faire quand cela vous est flatteur, nous voyons donc que nous pouvons mieux faire.
Monsieur le Premier ministre, pendant combien de temps allez-vous nous faire vivre au rythme de ces annonces toujours plus pessimistes les unes que les autres ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’autonomie.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie. Monsieur le sénateur Vincent Segouin, puisque vous commencez en parlant des États-Unis, permettez-moi de ne pas rappeler le nombre de morts qu’il y a eu dans ce pays, dont tout le monde parlait récemment (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.), ou de relever que la moitié des élèves, soit 55 millions d’enfants, n’ont pas eu cours depuis un an. En France, nous avons préservé nos élèves de ce danger.
Les propos que j’ai entendus sont blessants. Permettez-moi de vous dire que personne, ici, n’est insensible aux victimes du covid. Quel que soit notre statut, que nous soyons ministre ou parlementaire, nous avons des familles et nous avons parfois connu des drames personnels.
Face à l’urgence, il nous a fallu nous adapter, évaluer et faire évoluer les protocoles, les doctrines, parfois en poussant les murs, parfois en transformant les industries pour créer des masques, du gel hydroalcoolique, maintenant des vaccins, avec une logistique considérable. Il nous a fallu agir avec méthode et avec transparence, ce qui nous a permis d’obtenir des résultats que nul ne croyait possibles il y a encore quelques semaines.
Concrètement, plus de 8,2 millions de personnes ont bénéficié d’au moins une injection et 2,8 millions de deux. Peut-être pourrions-nous nous féliciter ensemble de ce que 92 % des résidents en Ehpad aient reçu au moins une dose et que plus de la moitié des personnes âgées de plus de 75 ans aient également été vaccinées ?
C’est un effort collectif dont nous devrions nous réjouir et qui nous place en tête des pays européens sur la vaccination des personnes les plus âgées. C’est un tour de force, rendu possible par la mobilisation de tous les acteurs et par l’accélération de notre campagne vaccinale.
Au cours de la seule semaine dernière, 1,8 million d’injections ont été faites, dont une sur trois avec le vaccin AstraZeneca, parce que nous avons misé sur la confiance.
Nous accélérons la campagne et notre objectif de 10 millions sera tenu mi-avril, en priorisant les publics les plus fragiles et les plus exposés, en démultipliant les canaux avec l’ouverture de mégacentres dédiés, avec le concours des forces armées, en montant en puissance avec les centres de vaccination existants sur les territoires,…
M. le président. Il faut conclure.