compte rendu intégral
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
M. Pierre Cuypers,
Mme Patricia Schillinger.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Questions d’actualité au Gouvernement
M. le président. Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’ordre du jour appelle les questions d’actualité au Gouvernement.
Je rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.
Au nom du bureau du Sénat, j’appelle chacun de vous, mes chers collègues, à observer au cours de nos échanges l’une des valeurs essentielles du Sénat : le respect, qu’il s’agisse du respect des uns et des autres ou de celui du temps de parole.
Naturellement, vous n’oublierez pas les réflexes de protection sanitaire : les entrées et sorties de la salle des séances devront s’effectuer par les portes situées au pourtour de l’hémicycle, à l’exception de celles des membres du Gouvernement, lesquels entreront et sortiront par le devant, en étant attentifs aux gestes barrières.
Enfin, je remercie nos collègues qui ont accepté de s’installer dans les tribunes pour que nous puissions respecter la jauge de présence dans l’hémicycle.
aides à l’agriculture biologique
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
M. Joël Labbé. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Ce mardi, la Fondation Nicolas Hulot a présenté une étude faisant état du manque de cohérence entre les financements publics agricoles et les objectifs affichés de réduction des pesticides. Ces résultats ont déjà suscité une polémique. Or ma question, qui ne se veut pas polémique, n’appelle pas non plus une réponse polémique.
L’impression de manque de cohérence recoupe d’autres constats dressés dans plusieurs rapports récents, comme celui de la Cour des comptes, qui jugeait en 2020 la PAC inégalitaire et source d’effets pervers, notamment pour ce qui concerne la consommation de pesticides, ou encore celui de France Stratégie, qui propose de réformer la PAC, afin de diminuer l’utilisation d’intrants, et de procéder à un réel ajustement entre aides publiques et efforts consentis par les agriculteurs pratiquant l’agroécologie.
Ce constat d’un véritable déficit d’accompagnement est ressenti par un nombre croissant d’agriculteurs, qui seraient prêts à changer leurs pratiques, mais qui se sentent insuffisamment soutenus financièrement, dans un contexte de course aux prix bas imposée par le secteur agroalimentaire et la grande distribution, mais aussi de concurrence déloyale de produits importés ne respectant pas les normes européennes et françaises.
Monsieur le ministre, je souhaite vous poser trois questions.
Tout d’abord, prévoyez-vous, dans le futur plan national stratégique, d’augmenter le budget destiné à rémunérer l’agriculture biologique, dont la performance économique, sociale et environnementale est avérée ?
Ensuite, en ce qui concerne les dotations jeunes agriculteurs, comment profiter de ce moment de renouvellement des générations pour accélérer la transition vers l’agroécologie ?
Enfin, allez-vous intégrer dans le plan stratégique la question des importations scandaleuses ne respectant pas nos normes ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Monsieur le sénateur Labbé, il est impératif de cesser d’opposer agriculture et environnement, car c’est à la fois injuste et totalement aberrant. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, RDSE et Les Républicains.)
Les agriculteurs vivent de l’environnement. Ils chérissent la terre et protègent le sol. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Les agriculteurs, contrairement à l’image que certains cherchent à véhiculer, réalisent cette transition : sur la totalité de la période, les ventes de ces produits ont baissé globalement de 36 %, et de 70 % pour les plus dangereux. Telle est la réalité, monsieur le sénateur !
Je le rappelle, après les océans, c’est le sol qui capte le plus de carbone sur notre planète, davantage encore que la forêt. Ceux qui agissent aujourd’hui pour lutter avec efficacité contre le changement climatique, ce sont nos agriculteurs. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes INDEP, UC et Les Républicains.) Mais cela, personne ne le dit.
Cessons d’opposer agriculteurs et environnement. Cessons aussi d’être dans l’injonction, qui plus est à l’égard de personnes travaillant en moyenne 55 heures par semaine – ce n’est pas moi qui l’affirme, mais l’Insee –, pour accomplir la noble mission de nourrir le peuple français. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes RDPI, RDSE, UC et Les Républicains.) Voilà la réalité, monsieur le sénateur !
Enfin, il faut non pas opposer agriculture et environnement, mais tenir une ligne de conduite claire, celle de la création de valeur pour protéger l’environnement et nos agriculteurs.
M. Pierre Cuypers. Très juste !
M. Julien Denormandie, ministre. Il faut oser dire que le compte de résultat de nos agriculteurs est important. On ne fera pas de transition agroécologique sans agriculteurs ; on n’aura pas d’agriculture sans agriculteurs.
M. Bruno Sido. Exact !
M. Julien Denormandie, ministre. Il n’existe au monde aucune nation forte sans agriculture forte, monsieur le sénateur. Préservons-la, accompagnons-la et soyons-en fiers ! (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes INDEP, RDSE, UC et Les Républicains.)
crise sanitaire
M. le président. La parole est à M. Alain Marc, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Alain Marc. Ma question s’adresse à M. le ministre des solidarités et de la santé.
La France a adopté une attitude modulée de lutte contre la pandémie, au lieu d’un confinement brutal. Cette décision a été bien accueillie, mais elle pose un certain nombre de questions que j’aimerais vous présenter sous la forme d’un QCM. Cela vous rappellera peut-être, monsieur le ministre, l’heureux temps de vos études de médecine sans covid. (Sourires.)
Premièrement, avez-vous réfléchi à une stratégie vaccinale pour les personnes âgées de 65 à 74 ans, sachant que la Haute Autorité de santé ne recommande pas de vacciner cette population avec le vaccin d’AstraZeneca ?
Deuxièmement, la Bavière impose désormais l’usage des masques FFP2 dans les transports en commun.
La plupart des scientifiques semblent penser que c’est une précaution superfétatoire. Toutefois, à la suite de la recommandation du Haut Conseil de la santé publique d’abandonner les masques en tissu de mauvaise qualité et de leur prohibition dans les écoles, envisagez-vous de généraliser l’interdiction des masques en tissu de catégorie 2, au profit des masques chirurgicaux ?
Troisièmement, le Gouvernement a annoncé le déploiement prochain de tests salivaires en milieu scolaire, au retour des vacances d’hiver.
Prévoyez-vous de rendre ces tests accessibles à l’ensemble de la population, notamment sous la forme d’autotests ? En effet, des start-up françaises – j’ai rencontré quelques-uns de leurs responsables ce matin – ont développé des tests salivaires, validés par la Haute Autorité de santé, qui doivent être lus par un professionnel de santé. Certaines de ces start-up seraient rapidement capables de développer des autotests salivaires, qui permettraient de tester massivement la population française à domicile.
Le Gouvernement est-il prêt à soutenir cette démarche française de tests salivaires et d’autotests ? Dans quelles conditions ces derniers pourraient-ils être généralisés et pris en charge par la sécurité sociale ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur Alain Marc, vous m’avez posé des questions précises, auxquelles je vais m’efforcer de répondre le plus précisément possible.
Pour les personnes âgées de 65 à 74 ans, ce sont plutôt les vaccins à ARN messager de Pfizer, Moderna et CureVac, quand ce dernier aura été validé, qui seront proposés. Comme vous l’avez souligné, le vaccin d’AstraZeneca n’est pas recommandé à ce stade. Toutefois, si les données scientifiques devaient évoluer dans le bon sens, la donne pourrait évidemment changer.
Logiquement, d’ici à la fin mars ou tout au début du mois d’avril, la totalité de la population cible âgée de 75 ans et plus aura été vaccinée. Nous pourrons alors ouvrir la vaccination aux personnes de la tranche d’âge suivante, par ordre décroissant, c’est-à-dire les 65-74 ans.
Votre deuxième question portait sur les masques. Vous l’avez dit, le Haut Conseil de la santé publique demande que l’on n’utilise plus les masques faits maison, non parce qu’ils sont de mauvaise qualité, mais parce que les Français les ont généralement fabriqués eux-mêmes, en essayant de suivre les normes Afnor, dont le degré de filtration ne dépasse pas 90 %.
En revanche, les masques FFP2, les masques chirurgicaux et les masques grand public de catégorie 1 – soit près de 100 % des masques que l’on peut trouver dans le commerce – ont une filtration de 90 % ou plus. Il n’y a pas lieu d’imposer le port du masque FFP2. Du reste, une seule région allemande l’a fait ; ailleurs, cette solution n’a pas été retenue.
Votre troisième question portait sur les tests salivaires et leur accessibilité à la population, et j’y réponds par l’affirmative. J’attends ce soir les recommandations de la Haute Autorité de santé, avec des méthodes d’analyse en PCR particulières. Les laboratoires se préparent. Nous travaillons avec eux depuis des semaines.
Ces tests seront proposés en priorité aux enfants dans nos écoles, de manière à pouvoir identifier, sans désagrément pour eux, des cas positifs, donc protéger et préserver l’école dont nous souhaitons qu’elle puisse rester ouverte le plus longtemps possible. Les premiers tests salivaires seront menés demain par les hôpitaux de Paris. Dès la mi-février, nous en ferons de 200 000 à 300 000 par semaine.
Enfin, s’agissant des autotests, hélas, monsieur le sénateur, il y a un problème : leur sensibilité varie de 11 % à 40 % pour les meilleurs d’entre eux. Si vous jetez une pièce en l’air, vous avez donc plus de chance de savoir si vous êtes positif ou négatif… La recherche continue, en France et ailleurs. À ce jour, aucun pays européen n’utilise réellement ces autotests. Les Japonais déploient un certain nombre d’autotests. Nous travaillons avec eux.
M. le président. Il faut conclure.
M. Olivier Véran, ministre. Croyez-moi, dès que nous en aurons, nous les utiliserons. Cela changera les règles du jeu. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Alain Marc, pour la réplique.
M. Alain Marc. Des start-up françaises, notamment dans la région Occitanie, sont en train de travailler sur ces tests.
J’espère que vous serez attentifs, monsieur le ministre, non pas à leurs doléances, mais à leurs résultats,…
M. Alain Marc. … qui ne me semblent pas si mauvais.
modification de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Dallier. Ma question s’adresse à Mme la ministre du logement.
Les chiffres sont tombés, et ils sont très mauvais : le nombre de logements sociaux financés en 2020 connaît un recul historique. Certes, il y a eu la crise du covid et le rallongement de trois mois du cycle électoral des municipales, mais d’autres facteurs ont certainement joué aussi.
Thierry Repentin, le président de la Commission nationale SRU, pointe deux facteurs dans un rapport qu’il a rendu au Gouvernement, à la demande de ce dernier : la suppression, cette année, de la taxe d’habitation et l’exonération du foncier bâti dont bénéficient les bailleurs sociaux.
Il faut aussi compter avec le découragement des maires qui ont envie de construire – ils sont très majoritaires –, face aux objectifs actuels de la loi SRU, qui sont devenus inatteignables – tout le monde le sait ! (Marques d’assentiment sur les travées du groupe Les Républicains.)
Thierry Repentin a fait deux propositions au Gouvernement pour modifier cette loi SRU. Madame la ministre, j’aimerais savoir si le Gouvernement entend retenir l’une de ces solutions, et laquelle ? Surtout, dans quel calendrier parlementaire entendez-vous mettre en œuvre cette nouvelle solution ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Valérie Létard applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la transition écologique.
Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique. Monsieur le sénateur Dallier, je voudrais tout d’abord rappeler que 70 % à 80 % des Français sont éligibles au logement social. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)
Face à la crise que nous traversons, il est essentiel de faire mieux et de construire plus de logements sociaux. C’est l’objet de la loi SRU, qui a vingt ans cette année. Saluons la longévité et la pertinence de cette loi, ainsi que de son emblématique article 55 : plus de 1,8 million de logements ont ainsi été produits depuis 2001, dont près de 900 000 dans les communes déficitaires et soumises au rattrapage. C’est un acquis que nous pouvons tous saluer.
La moitié des 1 064 communes soumises à l’obligation SRU suivent une trajectoire vertueuse et pourraient atteindre leur objectif d’ici à 2025.
Cependant, c’est vrai, certaines communes n’y arrivent pas. Parfois, elles manquent aussi de volontarisme. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sophie Primas. Allez !
Mme Barbara Pompili, ministre. Ainsi, dans le cadre du bilan de la période triennale 2017-2019, le Gouvernement a donné des consignes de fermeté (Mêmes mouvements.) : plus de la moitié des 550 communes n’ayant pas atteint leur objectif ont été carencées, avec parfois des reprises de permis de construire.
Nous sommes attentifs à ce que les efforts se poursuivent, tout en nous mobilisant pour accompagner les communes concernées.
Enfin, nous avons effectivement engagé un travail sur l’avenir de la loi SRU, dont l’échéance est prévue à la fin de 2025, ce qui conduirait à fixer en 2022 les derniers objectifs de rattrapage.
Mme Sophie Primas. Vous ne répondez pas à la question !
Mme Barbara Pompili, ministre. Monsieur le sénateur, il est nécessaire de prolonger l’exigence de la loi SRU au-delà de 2025, pour poursuivre l’effort en matière de répartition du parc social.
Mme Marie Mercier. Répondez à la question !
Mme Barbara Pompili, ministre. Il faut le faire en tenant compte des situations locales, en fixant des objectifs ambitieux et atteignables et en restant fermes avec les communes qui ne jouent pas le jeu. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
La ministre du logement, Emmanuelle Wargon, a saisi la commission SRU, présidée par Thierry Repentin. Comme vous l’avez souligné, ce dernier a rendu un rapport et formulé des propositions en ce sens.
Le rapport, rendu public la semaine dernière, fait l’objet de consultations, et ses propositions pourraient trouver une traduction législative. (Ah bon ? sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sophie Primas. Laquelle ?
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour la réplique.
M. Philippe Dallier. Peut-être aurais-je dû m’adresser au ministre de l’agriculture pour avoir une réponse un peu plus précise… (Sourires et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Madame la ministre, si le Gouvernement n’agit pas rapidement, vous terminerez le quinquennat avec des résultats, en termes de construction de logements neufs, privés ou sociaux, qui seront catastrophiques (M. Jean-François Husson applaudit.), alors même que la seule loi que vous aurez fait adopter en la matière avait pour nom « Élan » !
Madame la ministre, le logement est un sujet fondamental pour tous nos concitoyens. Nous sommes dans une impasse.
Vous avez encore le temps de bouger sur les exonérations de la taxe foncière sur les propriétés bâties, la TFPB, mais également sur l’article 55 de la loi SRU. De nombreux maires sont prêts à construire, il faut les y aider. Plutôt que de leur donner des coups de bâton, accompagnez-les, de grâce ! (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – Mme Nathalie Delattre applaudit également.)
inondations dans le sud-ouest
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Moga, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Jean-Pierre Moga. Monsieur le ministre, les inondations affectent le Sud-Ouest, en particulier le département de Lot-et-Garonne. C’est une catastrophe pour les habitants.
Le 3 février dernier, la Garonne a atteint la cote de 9,52 mètres à Tonneins et de 10,2 mètres à Marmande. Le département a été placé en vigilance rouge. Il s’agit d’une crue exceptionnelle, comme a pu le constater le Premier ministre lors de son déplacement à Marmande. Je tiens d’ailleurs à le remercier : le temps qu’il a consacré à discuter avec les sinistrés, les élus et les services concernés a été apprécié.
Je salue également l’efficacité et la mobilisation des services départementaux d’incendie et de secours, les SDIS, des maires et de leurs équipes municipales, des sauveteurs et des services de l’État.
Face à cette situation, les élus ont unanimement demandé que les communes touchées soient déclarées en état de catastrophe naturelle et que le système de prévision des crues, lequel fonctionne globalement bien, anticipe bien au-delà de cinq heures – a minima douze heures, sinon vingt-quatre.
Les élus ont également insisté sur le financement, l’entretien et l’aménagement des digues, difficilement supportables pour les budgets de nos petites intercommunalités. La gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations, la Gemapi, et les programmes d’action de prévention des inondations, les PAPI, sont encore loin de tout régler.
Monsieur le ministre, vous avez confirmé un soutien de l’État pour les aides exceptionnelles après cette crue.
Comment assouplir les règles de curage des fossés en zone inondable afin de faciliter l’évacuation de l’eau lors de la décrue ? Des milliers de mètres cubes vont stagner des semaines dans les champs.
Comment aménager les territoires et prévenir les futurs risques climatiques ? Comment améliorer les systèmes de prévision ?
Comment stocker les milliers de mètres cubes d’eau déversés sur nos territoires et transformer la force cataclysmique de ces crues en énergie hydraulique exploitable ?
Enfin, que répondre à nos sinistrés inquiets, qui attendent une réponse dans les meilleurs délais ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. le président. J’ai exprimé, au nom du Sénat, notre solidarité à un certain nombre d’élus particulièrement touchés par ces inondations. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Bruno Sido. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur. Monsieur le sénateur, permettez-moi à mon tour, au nom du Gouvernement, d’exprimer notre solidarité envers les populations, les élus, les maires, qui ont été les premiers urgentistes de cette catastrophe, les services de l’État – pompiers, policiers, gendarmes, agents des préfectures – et tous ceux, dans les collectivités locales, qui ont permis cette mobilisation, pour éviter un maximum de drames.
Des drames se sont pourtant produits, qui ont touché les biens. Comme vous l’avez rappelé, M. le Premier ministre s’est rendu, comme le secrétaire d’État chargé de la ruralité, dans le Sud-Ouest et l’Ouest. À sa demande, les services du ministère de l’intérieur et ceux de Mme Barbara Pompili se sont mobilisés.
Dès hier, monsieur le sénateur, une première commission s’est réunie pour examiner 145 premiers dossiers. Aucune demande n’a été refusée ; seuls des compléments d’information ont parfois été demandés.
Vous le savez, il revient aux communes de déposer une demande individuelle. Je puis vous assurer que nous allons, Barbara Pompili et moi-même, continuer d’instruire les dossiers et de reconnaître l’état de catastrophe naturelle, singulièrement dans votre département, où 56 communes ont déjà reçu un avis favorable.
Au-delà du drame que constitue la tempête Justine, vous avez évoqué la prévention. Nous y travaillons – les services de Mme Pompili s’y emploient particulièrement. Un conseil de défense écologique, réuni en février 2020, a décidé d’intégrer un certain nombre de dispositions aux fameux PAPI. Des augmentations budgétaires extrêmement fortes, notamment du fonds Barnier, ont été décidées.
En outre – la ministre chargée de l’écologie pourra en parler –, un certain nombre d’améliorations très concrètes ont été apportées pour les habitations et les riverains dans les zones inondables.
À la suite de l’accident de Lubrizol, j’ai annoncé, au titre de la sécurité civile, la mise en place dès l’année prochaine d’un système d’alerte modernisé, qui permettra à la population, quelles que soient les difficultés rencontrées, et notamment en cas d’inondation, de recevoir sur ses téléphones les informations en temps réel. Ce dispositif permettra d’éviter les drames humains. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
évolution de la carte scolaire
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
Mme Céline Brulin. Monsieur le ministre, nous vous avions alerté sur les conséquences prévisibles de vos calculs budgétaires en matière scolaire. Eh bien, c’est pire !
Ici, ce sont des suppressions de classes au collège : celui de Blangy-sur-Bresle, par exemple, en Seine-Maritime, en perd 2 sur les 17 que compte l’établissement. Là, c’est une baisse considérable d’heures d’enseignement : au lycée de Lillebonne, par exemple, le résultat de la soustraction donne 110 heures de moins pour une réduction de seulement 22 élèves. Ce théorème vaut aussi en primaire et en maternelle, y compris en éducation prioritaire.
« Après avoir subi le traumatisme de deux confinements, l’éducation nationale va nous faire subir un troisième électrochoc », m’écrit le maire de Brachy, commune qui vient de réaliser un nouveau groupe scolaire.
Savez-vous pourquoi cette commune a agi ainsi ? Pour répondre à vos injonctions de regrouper les écoles – injonctions qui font si mal à nos territoires ruraux et qui se voient bien mal récompensées. Une classe devrait ainsi fermer dans cette commune.
Je pourrais multiplier les exemples dans toutes les académies de France. Partout, émerge la demande d’une carte scolaire qui prenne en compte la situation sanitaire et le besoin d’accompagnement renforcé des élèves, à l’image des plus de 200 élus normands qui vous lancent un appel en ce sens.
La crise sanitaire n’est pas derrière nous ; les inégalités scolaires et sociales encore moins.
Monsieur le ministre, allez-vous abandonner l’arithmétique de choix comptables, déconnectés de la réalité, pour faire une équation positive de la carte scolaire ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Madame la sénatrice, nous continuons de créer des postes à l’école primaire, alors même qu’il y a moins d’élèves.
Votre département comptera un millier d’élèves en moins l’année prochaine, et nous y créons près de vingt postes. À la rentrée prochaine, le taux d’encadrement va battre un record historique en Seine-Maritime : il n’y aura jamais eu autant de professeurs par rapport au nombre d’élèves à l’école primaire.
M. Laurent Duplomb. Et il n’y aura jamais eu autant de professeurs qui ne sont pas devant les élèves !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. C’est vrai pour chaque département de France.
Vous me demandez, madame la sénatrice, si nous tenons compte de la crise sanitaire. La réponse est oui ! Lors de la dernière rentrée, nous avons appliqué le principe « ni fermeture de classes ni fermeture d’écoles sans autorisation du maire ».
Ce principe, comme nous l’avions dit, vaut toujours pour les fermetures d’écoles. Et même s’agissant des fermetures de classe, il y a de fortes consultations. En ce qui concerne les exemples que vous avez cités, les consultations continueront, et cela jusqu’à la veille de la rentrée, puisque nous tenons compte du nombre d’élèves.
Nous mettons en œuvre des mesures qualitatives, loin de l’esprit comptable que vous nous prêtez. (M. Jacques Grosperrin s’exclame.) Dans votre département, par exemple, le dédoublement des grandes sections de maternelle continue, avec douze élèves par classe, donc.
De même, comme dans bien d’autres départements, les classes de grande section, de CP et de CE1 ne compteront pas plus de vingt-quatre élèves. Ce sont des progrès considérables. Jamais l’école primaire n’avait fait l’objet d’une telle priorité budgétaire. (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.)
Ce n’est pas une opinion, mesdames, messieurs les sénateurs : c’est une réalité, que chacun peut vérifier dans le projet de loi de finances pour 2021.
Le taux d’encadrement à l’école primaire atteint un niveau historique. Bien évidemment, quelques classes peuvent fermer çà et là pour des raisons complexes de démographie rurale.
Par ailleurs, je n’encourage pas particulièrement le regroupement d’écoles. Chaque cas est particulier et doit être traité en liaison avec le maire. La consigne est le travail conjoint avec les maires, et toute exception doit m’être signalée, bien sûr dans la recherche du consensus et dans l’intérêt des élèves. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour la réplique.
Mme Céline Brulin. Monsieur le ministre, s’agissant des records historiques, je voudrais vous signaler, même si vous le savez mieux que moi, que la Seine-Maritime est encore en retard en matière de taux d’encadrement par rapport la moyenne nationale.
Vous n’avez absolument pas évoqué les collèges et les lycées. Nous assistons à un véritable carnage ! Entendez les demandes ! Accordez des postes, accordez des heures.
Cessez d’en appeler aux heures supplémentaires : douze millions d’heures supplémentaires n’ont pas été compensées ni assurées en 2019. Ce sont autant d’enseignements qui ont fait défaut à nos jeunes. C’est absolument intolérable dans cette période où les élèves alternent entre présentiel et distanciel. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER.)
apprentissage