Mme la présidente. La parole est à M. Denis Bouad, auteur de la question n° 1366, adressée à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
M. Denis Bouad. Monsieur le secrétaire d’État chargé des affaires européennes, je souhaite attirer votre attention sur la mise en œuvre concrète du plan de relance, plus particulièrement sur les possibilités de financer des projets structurants dans le département du Gard.
La crise sanitaire que nous traversons aura d’importantes répercussions sur notre économie. Dans beaucoup de secteurs, ces conséquences économiques se font déjà ressentir.
Dans ce contexte, l’annonce d’un plan de relance doté de 100 milliards d’euros est une bonne nouvelle pour l’activité des entreprises et pour l’emploi.
Dans de nombreux départements, il existe des projets structurants, fortement espérés par les habitants. Certains d’entre eux sont évoqués et attendus avec impatience depuis maintenant plusieurs décennies.
Soulignons également que, compte tenu de l’impossibilité pour les collectivités territoriales de les financer, un cercle vicieux de sous-investissement s’est installé, avec les conséquences économiques et sociales que nous connaissons.
Alors même que le Gard est le deuxième département le plus industrialisé de la grande région Occitanie, avec quelques fleurons comme SNR, Merlin Gerin, Royal Canin ou encore Melox, il reste le quatrième plus pauvre de France. Ce n’est pas une fatalité !
Nous avons besoin d’infrastructures modernes, durables et efficaces.
Songez que la mise à deux fois deux voies de la route nationale 106 entre Nîmes et Alès – ces deux grandes villes, une préfecture et une sous-préfecture, distantes d’une quarantaine de kilomètres, forment deux bassins d’emplois industriels et tertiaires –, entamée par la mise en place d’un premier tronçon en 1998, n’est toujours pas achevée !
Heureusement, monsieur le secrétaire d’État, nous avons pu bénéficier à l’époque de fonds structurels européens pour financer ces projets. Le Gard a d’ailleurs toujours été l’un des départements les plus performants pour obtenir des subventions de l’Europe. Je profite de votre présence pour émettre le souhait que, dans le cadre du nouveau budget européen pluriannuel 2021-2027, le Gard continue à en bénéficier.
Huit petits kilomètres sont donc nécessaires pour achever la liaison entre Nîmes et Alès, préalable au contournement ouest de Nîmes.
La maîtrise d’ouvrage est portée par l’État, et je ne doute pas que le Gouvernement aura à cœur d’en faire l’une des priorités du plan de relance, pour que ce contournement et son barreau voient enfin le jour très prochainement.
Je reviendrai également vers vous pour évoquer d’autres projets, notamment la rocade nord de Nîmes, portée par le conseil départemental du Gard, dont j’ai été le président pendant plus de cinq ans, qui permettrait un accès direct à la gare TGV Nîmes-Pont du Gard.
Les Gardois et Gardoises sont prêts, monsieur le secrétaire d’État, et je souhaite donc que vous puissiez inscrire aujourd’hui ces projets dans le cadre du plan de relance, non seulement pour permettre à ce département de rebondir rapidement à la sortie de la crise sanitaire, mais également pour envisager un futur développement économique durable au service de notre population.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Clément Beaune, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé des affaires européennes. Monsieur le sénateur, vous interrogez le Gouvernement, particulièrement ma collègue ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, au sujet de la mise en œuvre du plan de relance et de ses répercussions sur le projet de contournement ouest de Nîmes.
Il convient de rappeler que le plan de relance français, financé à 40 % par le plan de relance européen, s’articule autour de trois axes : l’écologie, la compétitivité et la cohésion des territoires. Dans ce cadre, plusieurs opérations relatives au réseau routier national, inscrites aux contrats de plan État-région, pourraient bénéficier d’un financement permettant une accélération de leur mise en œuvre. L’effort de relance, qui s’étale sur la période 2021-2022, conduit toutefois à privilégier les opérations pouvant être engagées d’ici à 2022.
Le contournement ouest de Nîmes bénéficie d’ores et déjà d’une inscription de 8,3 millions d’euros au contrat de plan État-région 2015-2020, afin de mener les études et de procéder aux acquisitions foncières. Le financement des travaux n’est pas encore bouclé à ce jour et le déroulement des études et des procédures ne permettent pas d’envisager un début des travaux avant l’année 2022. L’opération ne nous paraît donc pas éligible à ce stade au plan de relance.
Néanmoins, l’État travaille à la finalisation des études préalables du contournement ouest de Nîmes, dans la perspective de soumettre le projet à l’enquête publique préalable à sa déclaration d’utilité publique au premier semestre de l’année prochaine. En particulier, la possibilité d’intégrer une liaison entre le contournement ouest de Nîmes et la RN 113 – une demande forte des collectivités locales – est en cours d’étude.
L’année 2021 devrait donc être consacrée à la consultation des services de l’État et des collectivités territoriales concernées sur le projet modifié, afin de prendre en compte les remarques émises lors de la concertation publique de 2017, préalablement à la saisine de l’Autorité environnementale pour avis sur l’évaluation environnementale du projet.
En tout état de cause, la question du financement des travaux du contournement ouest de Nîmes trouvera naturellement sa place lors des négociations à venir concernant l’élaboration de la prochaine contractualisation État-région en vigueur à partir de 2023. Le volontarisme financier de l’État et des collectivités locales sera alors déterminant pour la poursuite de ce projet.
D’autres projets d’infrastructures modernes et sûres, notamment la rocade nord, seront également pris en compte. Je m’engage, si vous le souhaitez, monsieur le sénateur, à travailler avec vous sur les financements européens additionnels qui pourraient faciliter la réalisation de ces équipements.
violences et saccages de l’espace public dans l’agglomération de montbéliard
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Longeot, auteur de la question n° 1395, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
M. Jean-François Longeot. Madame la ministre, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur la situation dans le département du Doubs, plus particulièrement dans l’agglomération de Montbéliard, où les habitants, les services de police et de secours subissent régulièrement des violences, des incendies et des saccages de l’espace public.
Malgré des échanges avec la préfecture et la venue ponctuelle de renforts de compagnies républicaines de sécurité (CRS), aucune amélioration n’apparaît. Bien au contraire, la situation se dégrade.
L’escalade de la violence est bien réelle, montrant l’inefficacité de la politique de sécurité publique menée sur les territoires.
Aujourd’hui, les services de secours et de sécurité ne peuvent intervenir sereinement par manque de directives courageuses d’intervention et de rétablissement de l’État de droit dans chacun de ces quartiers.
Les habitants sont en danger ; ils subissent chaque jour des dégradations et des violences.
Aussi, dans ces conditions, je tenais tout d’abord à remercier le ministre pour son écoute lors d’une rencontre organisée au ministère de l’intérieur en décembre dernier, et souhaitais de surcroît connaître les intentions du Gouvernement pour rétablir l’ordre public et la sécurité sur ce territoire Nord-Franche-Comté.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté. Monsieur le sénateur, en matière de sécurité, les attentes des Français sont fortes et le Gouvernement est pleinement mobilisé pour y répondre. Cette mobilisation est d’abord celle des policiers et des gendarmes sur le terrain. C’est pourquoi nous renforçons leurs moyens.
Le plan de relance se traduit par une augmentation du budget de 325 millions d’euros pour la police nationale. Ce sont également plus de 10 000 policiers et gendarmes supplémentaires qui seront recrutés d’ici à la fin du quinquennat, pour renforcer les effectifs là où les besoins sont identifiés.
Après les pistes ambitieuses tracées par le Livre blanc de la sécurité intérieure, dont certaines se concrétisent – je pense, par exemple, à l’expérimentation de directions départementales de la police nationale –, le « Beauvau de la sécurité », annoncé par le Président de la République en décembre, et qui sera lancé le 25 janvier, va constituer une nouvelle étape. Avec les forces de l’ordre, des maires et des parlementaires, nous allons identifier les nouveaux moyens dont il nous faut doter, à court terme, les policiers et les gendarmes. À plus long terme, nous allons bâtir, ensemble, les bases d’une nouvelle loi de programmation, que nos forces méritent et que vous avez appelée de vos vœux.
J’en viens maintenant à votre département, monsieur le sénateur. Nous connaissons vos préoccupations, et les cabinets du ministère de l’intérieur ont eu l’occasion de recevoir les élus locaux début décembre.
En premier lieu, je tiens à vous assurer, au nom du ministre de l’intérieur, que nous ne laissons rien passer. Nous intervenons chaque fois que l’ordre public est contesté. Les violences et les désordres, à Montbéliard comme ailleurs, les attaques contre les policiers et contre tous les représentants d’institutions publiques, sont particulièrement inadmissibles.
À Montbéliard comme ailleurs, vous le savez, nos policiers sont pleinement mobilisés. Je note d’ailleurs, même si cela ne saurait minimiser les problèmes qui existent, que plusieurs indicateurs témoignent de l’efficacité de leur travail dans ce département. On note ainsi une baisse de 13 % des violences aux personnes et de près de 18 % des atteintes aux biens en 2020 dans la circonscription interdépartementale de sécurité publique (CISP) de Montbéliard-Héricourt. La prochaine arrivée de huit nouveaux gardiens de la paix supplémentaires permettra de poursuivre cet effort.
Les violences de novembre ont légitimement choqué les habitants. Mais la réaction des forces de l’ordre, appuyées par les CRS, qui sont intervenues en renfort durant plusieurs semaines, ne s’est pas fait attendre.
Les forces locales ont fait avancer l’enquête. Le 2 décembre, soit dix jours après les faits, deux individus ont été interpellés. Depuis, les violences urbaines ont baissé d’intensité et sont même devenues quasi inexistantes dans le quartier de la Petite-Hollande où s’étaient déroulés les événements de novembre : 16 faits de violences urbaines, dont 4 dans ce quartier, ont été enregistrés dans la circonscription en décembre ; 4 faits « seulement », si je puis dire, et aucun dans la zone de sécurité prioritaire (ZSP), ont été relevés en janvier. Pour mémoire, en novembre, on recensait 29 faits de violences urbaines dans la CISP Montbéliard-Héricourt, dont 9 en ZSP.
À Montbéliard, comme partout ailleurs, monsieur le sénateur, je veux vous assurer du soutien total de l’État, du ministre de l’intérieur et de moi-même. Nous sommes aux côtés des élus locaux et je salue à cet égard l’engagement de la municipalité en faveur de la sécurité. C’est seulement ensemble que nous pouvons garantir aux Français la sécurité et la tranquillité qu’ils attendent légitimement dans leur vie quotidienne. Ce travail partenarial mérite d’être souligné.
Mme la présidente. Je rappelle que votre temps de parole est limité à deux minutes trente par question, madame la ministre déléguée.
La parole est à M. Jean-François Longeot, pour la réplique.
M. Jean-François Longeot. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre, et de l’entretien que vous avez accordé aux élus locaux en décembre – j’y étais accompagné notamment de ma collègue Annick Jacquemet.
La Petite-Hollande est un quartier de Montbéliard où il fait bon vivre, mais, aujourd’hui, la vie de ses habitants devient très compliquée. Ils aspirent à un peu de tranquillité.
Une vraie relation doit se nouer entre votre ministère et celui de la justice. Il y a trop de laxisme à l’égard des auteurs de ces violences. Il est inadmissible qu’avec un engin de chantier on aille faire tomber des candélabres sur lesquels la municipalité, trois jours auparavant, avait installé des caméras de surveillance !
Il faut non seulement condamner ces actes, mais aussi les punir.
application des règlements départementaux de défense incendie et secours dans les territoires ruraux
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Laurent, auteur de la question n° 1436, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
M. Daniel Laurent. Madame la ministre, ma question porte sur la défense extérieure contre l’incendie, qui, depuis la réforme de 2015, ne répond plus à une norme nationale, mais relève d’un règlement départemental élaboré par le préfet, en concertation avec les collectivités territoriales.
Si la sécurité des habitants est une priorité pour les élus, l’interprétation souvent très stricte des dispositions des règlements départementaux conduit à des contraintes disproportionnées sur certains territoires et à des coûts de mise aux normes très importants pour les budgets communaux.
En Charente-Maritime, grâce à la mobilisation des élus, la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) est priorisée pour les dossiers de mise en conformité. Le département apporte également sa contribution, dans la limite des plafonds d’intervention légaux.
Ce sont des décisions importantes pour alléger la facture des communes. Toutefois, celles qui sont très déficitaires devront étaler la mise en conformité sur plusieurs années, dans le cadre des schémas communaux de défense extérieure contre l’incendie, obérant ainsi le développement d’autres projets et la dynamique de nos territoires.
Ainsi, de nombreux permis de construire sont refusés en raison de l’appréciation de la distance entre le point d’eau et l’habitation.
Dans une décision du 30 octobre 2019, le tribunal administratif de Poitiers fait état que le règlement départemental de défense contre l’incendie, qui relève d’une législation distincte de celle de l’urbanisme, ne saurait être opposable aux demandes d’autorisation d’urbanisme.
Cette jurisprudence a permis de débloquer des dossiers, quand bien même les communes ne se seraient pas mises en conformité avec le règlement départemental.
Toutefois, il convient de lever toute insécurité juridique, comme nous le demandent les élus.
À ce jour, aucune compagnie d’assurance ne s’est retournée contre un maire ou une commune, mais il convient de prévenir ce risque.
En cas d’incendie d’une construction située dans une zone ne répondant pas aux critères du règlement départemental, la responsabilité du maire pourrait-elle être engagée ?
L’engagement d’une commune à réaliser la mise en œuvre dans le cadre du schéma communal suffit-il à protéger les élus ?
Madame la ministre, lors de la campagne sénatoriale, cette problématique a été soulevée par une très grande majorité des élus.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté. Monsieur le sénateur, la défense extérieure contre l’incendie (DECI) est placée sous l’autorité du maire ou du président de l’établissement public de coopération intercommunale chargé d’un pouvoir de police administrative spéciale.
Cette défense a pour objet d’assurer, en fonction des besoins résultant des risques à couvrir, l’alimentation en eau des moyens des services d’incendie et de secours, par l’intermédiaire de points d’eau identifiés à cette fin. Elle permet aux sapeurs-pompiers d’intervenir rapidement, efficacement et dans des conditions optimales de sécurité.
La réforme de la DECI, conduite en 2015, a instauré une approche novatrice : celle-ci ne répond plus à une norme nationale, mais relève d’un règlement départemental élaboré par le préfet.
Cette réglementation répond à un double objectif : un renforcement de la concertation avec les collectivités territoriales et une plus grande souplesse dans la définition et l’application des mesures, adaptées à la réalité et à la diversité des risques incendie propres à chaque territoire.
La distance maximale séparant les points d’eau et les risques à couvrir est déterminée au regard des enjeux en matière de protection et des techniques opérationnelles des sapeurs-pompiers. La fixation de ces distances est déterminée par l’analyse du risque d’incendie ; elle conditionne les délais de mise en œuvre des dispositifs d’extinction.
Nous avons parfaitement conscience que cette réglementation, nécessaire pour garantir une lutte efficace et rapide contre les incendies, peut parfois être contraignante dans certaines communes, notamment rurales. Ce règlement peut évoluer par le biais de nouveaux échanges avec les partenaires, selon les procédures applicables. Pour avoir moi-même participé à des commissions sécurité incendie quand j’étais élue locale, je sais à quel point les retours de terrain, notamment des élus locaux, sont fondamentaux.
En ce qui concerne la coexistence des règles d’urbanisme et des règles de DECI, comme vous l’avez évoqué, et comme l’a confirmé la juridiction administrative, la DECI et l’urbanisme relèvent de deux régimes juridiques distincts. Il ne nous semble pas souhaitable d’établir une automaticité entre la présence ou le projet d’une construction et la présence obligatoire d’un point d’eau incendie à proximité. La nécessité d’une DECI est liée à l’analyse des risques que je viens d’évoquer, et non à la seule existence d’une construction.
Pour répondre à votre souci, que nous partageons, de protection des élus quant à un éventuel engagement de leur responsabilité en matière de DECI, je rappelle que la réforme de 2015 incite à la mise en place de schémas communaux ou intercommunaux permettant de développer l’analyse du risque, d’identifier des priorités et de les planifier sur plusieurs années.
Cette optimisation du déploiement de la DECI et de son financement peut aussi être obtenue en transférant le domaine aux établissements publics de coopération intercommunale. C’est le choix qui a été fait à plusieurs endroits. Enfin, dans certains cas strictement encadrés par la réglementation nationale, un financement de la DECI par des tiers peut être envisagé.
La DECI repose sur un équilibre entre les impératifs de la sécurité des populations, sa constante amélioration et un coût financier supportable, notamment pour les communes rurales, le tout étant apprécié à l’échelon local.
Cette réforme est déployée sur le terrain depuis six ans, après avoir fait l’objet d’une expérimentation positive dans les Deux-Sèvres et en Ille-et-Vilaine bien avant 2015.
Mme la présidente. Il faut conclure, madame la ministre déléguée !
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. Comme vous le suggérez, monsieur le sénateur, le ministère de l’intérieur envisage de réaliser une évaluation de cette réforme courant 2021.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Laurent, pour la réplique.
M. Daniel Laurent. Je vous remercie, madame la ministre. Il est en effet très important de procéder à une évaluation de la réforme pour tenir compte des difficultés rencontrées par les élus des communes rurales.
futur décret relatif à l’engagement des sapeurs-pompiers volontaires
Mme la présidente. La parole est à M. Cyril Pellevat, auteur de la question n° 1376, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
M. Cyril Pellevat. Madame la ministre, le ministère de l’intérieur a récemment annoncé qu’un décret venant réformer l’activité des sapeurs-pompiers volontaires était en cours de préparation, pour une publication durant l’année 2021. Ce décret aurait pour objectif de rendre le modèle français conforme au droit européen, notamment à la directive européenne sur le temps de travail, et de prendre en compte l’arrêt Matzak de la Cour de justice de l’Union européenne, qui assimile les sapeurs-pompiers volontaires à des salariés.
Toutefois, cette réforme de l’activité des sapeurs-pompiers volontaires viendrait totalement bouleverser le modèle français de la sécurité civile, basé sur l’engagement et le volontariat. Elle aurait pour conséquence de soumettre les sapeurs-pompiers volontaires à des limitations en termes de cumul de temps de travail et empêcherait l’engagement de ces derniers, en ce qu’elle ne permettrait pas de dépasser quarante-huit heures de travail hebdomadaires, temps passé en astreinte compris.
Cela viendrait donc limiter considérablement le nombre de personnes pouvant s’engager et ferait passer le nombre de volontaires de 195 000 à 48 000. Cette baisse drastique du nombre de pompiers viendrait faire peser un risque accru sur les administrés, tout particulièrement en période de crise exceptionnelle telle que la crise sanitaire que nous connaissons actuellement.
Par ailleurs, la mise en œuvre de cette politique européenne obligerait à embaucher des sapeurs-pompiers professionnels supplémentaires, ce qui représenterait un coût estimé à 2,5 milliards d’euros. Les finances publiques étant déjà extrêmement mises à mal par des années de mauvaise gestion et par la crise sanitaire, il serait plus que malvenu que la France ait à supporter ces dépenses supplémentaires.
En outre, le Gouvernement s’est engagé à travailler sur l’élaboration d’une nouvelle directive européenne qui permettrait de protéger le volontariat en matière de sécurité civile, solution qui sera bien plus adaptée à la situation française que ce décret.
Aussi, madame la ministre, pouvez-vous m’indiquer pourquoi votre ministère a commencé la préparation de ce décret, alors même que le Gouvernement s’était engagé à ne pas le faire et à privilégier des négociations au niveau européen ? Avez-vous engagé ces négociations et, si oui, vont-elles dans le sens de l’élaboration d’une nouvelle directive relative aux sapeurs-pompiers volontaires, qui ne bouleverserait pas le modèle français ? Vous engagez-vous à ne pas remettre en cause le fonctionnement français de la sécurité civile, en ne le faisant pas basculer vers un modèle basé sur le salariat des sapeurs-pompiers ? Pouvez-vous enfin nous donner davantage d’informations sur le décret ? Le plafond de 800 heures est-il toujours d’actualité ? Les événements exceptionnels tels que les feux de forêt et les astreintes seront-ils comptabilisés ?
Voilà autant de questions qui attendent vos réponses !
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté. Monsieur le sénateur, je crains de ne pouvoir répondre à toutes vos questions dans le temps qui m’est imparti, mais je me tiens à votre disposition pour vous donner plus de précisions ultérieurement.
Il existe aujourd’hui un consensus partagé par une très grande majorité des acteurs sur la nécessité d’adapter notre modèle actuel de volontariat, non pas pour remettre en cause l’intégralité de son fonctionnement, alors qu’il a largement fait ses preuves, tant au quotidien que dans les crises, mais pour mieux encadrer certains points de ce modèle que nous défendons collectivement.
Il est d’ailleurs utile de rappeler à ce stade la position de la Commission européenne, qui a confirmé qu’elle n’envisageait pas de faire évoluer la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail (DETT), ni de proposer une nouvelle directive consacrée aux volontaires dans les services de sécurité civile, excluant de fait toute possibilité d’exclure formellement les sapeurs-pompiers volontaires du champ de la DETT, tel que cela fut envisagé un temps, notamment par certains parlementaires.
C’est donc bien pour répondre à ce besoin de consolider notre modèle de volontariat que le ministère de l’intérieur a récemment engagé des travaux de concertation, qui doivent permettre, à la suite des échanges avec la Commission européenne, de tirer les conséquences des problématiques soulevées par certaines situations et de limiter les possibilités de qualification des sapeurs-pompiers volontaires comme travailleurs au sens de la DETT.
Nous sommes loin d’une quelconque transposition aux sapeurs-pompiers volontaires de cette directive et nous sommes convaincus que, une fois ces ajustements réalisés, le volontariat se trouvera de fait exclu du champ d’application de la DETT. Soyez assuré, monsieur le sénateur, que les impacts que vous évoquez ne constituent en rien les éléments de la concertation qui débute.
La réflexion qui s’engage doit au contraire permettre, en liaison étroite avec les services d’incendie et de secours et l’ensemble de leurs acteurs et partenaires, de disposer d’une analyse des possibles écueils et de propositions qui permettront d’alimenter, par la suite, les travaux de consolidation de notre réglementation. Vos suggestions seront aussi les bienvenues, mesdames, messieurs les sénateurs.
Mme la présidente. La parole est à M. Cyril Pellevat, pour la réplique.
M. Cyril Pellevat. Je vous remercie de ces éléments de réponse, madame la ministre. Nous sommes régulièrement sollicités par les réseaux sociaux, les professionnels et les volontaires et nous pourrons faire part de cette réalité du terrain si nous sommes associés à la réflexion.
sécurité routière
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Paccaud, auteur de la question n° 1441, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
M. Olivier Paccaud. Madame la ministre, depuis de nombreuses années, la sécurité routière est devenue une cause nationale. Même si le bilan annuel reste toujours dramatiquement élevé, avec plus de 3 000 morts, nous sommes désormais loin des hécatombes des années 1970, lorsque plus de 16 000 de nos compatriotes perdaient la vie sur les routes tous les ans.
Nos voitures sont devenues plus sûres, les routes sont aussi plus sécurisées. La ceinture de sécurité, le permis à point, les limitations de vitesse, les campagnes de prévention et la pédagogie ont porté leurs fruits ; la sanction aussi, probablement, par l’installation de radars.
Cependant, depuis quelques années, un plancher semble atteint et le nombre de décès liés à la circulation ne baisse plus. Par ailleurs, la multiplication des radars ne fait pas consensus et est ressentie par les Français non plus uniquement comme un instrument de sécurité routière, mais plutôt comme une arme fiscale déguisée. C’est ainsi que les radars sont devenus la cible prioritaire des « gilets jaunes » voilà deux ans.
Aussi, alors que de nouveaux radars « tourelles » sont en cours d’installation, ne serait-il pas judicieux d’orienter une part minime – 10 %, par exemple – des crédits consacrés à ces équipements vers la mise en place de radars pédagogiques, bien moins coûteux, mais tout aussi utiles ? Certes, ils ne rapportent pas un centime à l’État, mais ils font ralentir la plupart des automobilistes raisonnables. N’est-ce pas là le but ?
Quand on sait qu’un radar pédagogique coûte en moyenne 2 000 euros, alors que la plantation d’un radar « tourelle » est de plus de 32 000 euros, quand on sait aussi que de nombreux élus de petites communes souhaitent sécuriser la traversée de leur commune via ces machines, ne pourrait-on pas envisager la création d’enveloppes départementales spécifiquement dédiées à ces outils, par l’intermédiaire des préfectures ? Ne serait-ce pas là un bon moyen de démontrer à nos concitoyens que le Gouvernement s’intéresse plus à leur sécurité qu’à leur portefeuille ?