M. le président. La parole est à Mme la ministre de la culture.
Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture. Monsieur le sénateur, vous avez raison : il y a une aspiration à la visibilité dans cette pandémie. Toutefois, cette visibilité ne nous est pas acquise.
Il n’y a pas si longtemps, nous partions de 50 000 contaminations par jour et nous avions espéré atteindre 5 000 cas pour permettre la réouverture des lieux de culture. On l’a un peu oublié, mais le ministre de la santé, qui vient de démontrer qu’il est un homme de culture, vous l’expliquerait mieux que moi.
Or nous enregistrons aujourd’hui un plateau à 12 000 cas, après être restés une semaine à 15 000 cas. Raisonnablement, le ministre de la santé et le Premier ministre ont indiqué que la réouverture n’était pas encore possible…
M. François Bonhomme. Vous nous rassurez !
Mme Roselyne Bachelot, ministre. … et qu’elle devait donc être retardée.
Cette visibilité, que demande à juste titre le monde de la culture, nous allons l’atteindre, nous y travaillons, parce que nous devons bâtir, avec les professionnels de la culture, un modèle résilient qui puisse s’adapter aux à-coups de la pandémie. Ces rebonds se reproduiront, c’est inévitable : les conditions climatiques, l’influence des pays étrangers et la façon dont ceux-ci traitent cette pandémie sont en cause.
Nous bâtissons donc, avec les professionnels de la culture, ce modèle résilient qui nous permettra d’envisager une réouverture durable. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
solutions apportées aux étudiants pour faire face à la crise de la covid-19
M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
Mme Colette Mélot. Madame la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, l’année 2020 aura été, pour de nombreux étudiants, synonyme d’enseignement à distance, d’isolement social et de fins de mois difficiles. À l’âge de tous les possibles, l’horizon semble, pour certains, s’être réduit aux murs d’une chambre d’étudiant et aux appels téléphoniques de la famille et des amis, parfois aussi aux files de distribution d’aide alimentaire.
Les universités sont parmi les derniers lieux à rester fermés lors de cette deuxième vague, avec les salles de théâtre, les cafés et restaurants, les cinémas et les salles de sport. Aussi saluons-nous l’annonce par le Gouvernement d’une reprise progressive, dès le 4 janvier, des cours en présentiel dans les universités.
La vie étudiante devrait reprendre son cours, mais de nombreuses incertitudes subsistent. Nous disposons encore de peu de recul pour évaluer les conséquences de la scolarité à distance sur les résultats scolaires et le niveau des futurs diplômés, alors que tous les étudiants n’ont pas accès à une connexion internet stable ou au matériel informatique nécessaire pour suivre les cours. Par ailleurs, le manque d’interactions sociales pèse sur leur quotidien, et peu d’étudiants bénéficient d’un accompagnement psychologique, la France ne disposant que d’un psychologue universitaire pour 30 000 étudiants. Enfin, de nombreux jeunes s’interrogent sur la reconnaissance de leur diplôme par les professionnels, compte tenu des conditions actuelles d’apprentissage et des difficultés à accéder à un stage ou à une expérience à l’étranger.
Madame la ministre, cette séance de questions d’actualité vient clore une année bien particulière pour les 2,7 millions d’étudiants de France, parmi lesquels les risques de décrochages pédagogiques massifs sont réels, plus particulièrement pour les néobacheliers. Face à ce constat alarmant, quel bilan dressez-vous et quelles perspectives pouvez-vous offrir aux étudiants à l’issue de ce deuxième confinement ?
Par ailleurs, vous êtes favorable à la création de milliers d’emplois étudiants, à titre d’accompagnement durant cette période difficile. De fait, le besoin de soutien est urgent ! Pouvez-vous nous fournir des éléments de calendrier pour la mise en place de ce dispositif ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Madame la sénatrice Colette Mélot, je vous remercie de votre question, qui me permet d’adresser à l’ensemble des étudiants un message de soutien. De soutien, nous le savons tous, ils ont grand besoin. C’est pourquoi nous avons entendu leurs demandes, certaines étant relayées par cette assemblée.
Ainsi, le Premier ministre a décidé de doubler le nombre de psychologues dans les établissements universitaires et de mettre à la disposition des étudiants 60 assistantes sociales supplémentaires. De même, les fonds d’aide d’urgence destinés à les accompagner vont être doublés.
Vous avez raison : la question du vivre ensemble se pose également, à l’issue d’une année 2020 aux conséquences terribles sur les projets de vie étudiante. C’est la raison pour laquelle nous recrutons dans les Crous 1 600 étudiants référents, chargés de maintenir le lien social avec ceux qui sont le plus en difficulté ; nous avons fait diligence, tant et si bien que presque tous sont déjà recrutés.
Par ailleurs, 20 000 tuteurs sont en cours de recrutement dans l’enseignement supérieur. Nous travaillons avec les établissements pour simplifier encore les procédures en la matière, afin que les tuteurs soient sur le terrain dès janvier. Car, oui, nous devons faire revenir les étudiants les plus fragiles au contact de leurs enseignants dans les universités.
Je rappelle toutefois que les universités, pendant ce deuxième confinement, n’ont pas fermé ; au contraire, elles sont restées ouvertes pour les travaux pratiques et toutes les activités nécessairement présentielles, mais aussi pour continuer d’offrir aux étudiants le plus en difficulté ou en fracture numérique, sur réservation, l’accès aux salles de ressources et aux bibliothèques.
Le Gouvernement est à l’écoute sur ces questions et très attentif à l’éducation et au futur emploi de nos jeunes ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
conclusions de la commission d’enquête sur la gestion de la crise sanitaire (i)
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour le groupe Les Républicains. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Pierre Sueur. Puisqu’il est là !
M. René-Paul Savary. Monsieur le ministre de la santé, la commission d’enquête du Sénat sur la gestion de la crise sanitaire vient de publier un rapport fourni : 47 propositions, fruit de 101 heures d’auditions.
À la faveur de ce travail particulièrement fouillé, nous avons mis le doigt sur un certain nombre de dysfonctionnements, qui appellent de votre part des explications, en toute transparence – c’est, en tout cas, ce que nous attendons de vous.
Monsieur le ministre, qu’avez-vous tiré de ce rapport et que comptez-vous en faire ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et SER.)
M. Jean-Pierre Sueur. Il ne l’a pas lu !
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur Savary, je vous félicite pour votre désignation à la tête de la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss), qui assure un travail important ; je me réjouis de travailler avec vous dans les mois et les années à venir.
Le Sénat a donc publié un rapport de commission d’enquête, après que l’Assemblée nationale a fait de même. C’est tout à l’honneur des deux chambres de notre Parlement de s’emparer des sujets qui préoccupent le plus – et de manière tout à fait normale – les Français, en menant un travail d’inspection indépendant.
Je vais être franc avec vous : je n’ai pas lu la totalité des 480 pages de ce rapport… (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Mais si j’en connais le nombre de pages, c’est bien que je l’ai feuilleté ! J’en ai, en tout cas, consulté la synthèse, ainsi que les bonnes feuilles découvertes dans la presse la veille au soir, sans oublier les interventions des uns et des autres à la radio dans les jours qui ont suivi.
Monsieur le sénateur, le travail indépendant d’audit que vous avez mené avec vos collègues jette des éclairages intéressants sur plusieurs aspects de la gestion de la crise sanitaire. Vous comprendrez que je laisse de côté les éléments de nature purement politique qui l’émaillent – ce n’est d’ailleurs pas une critique de constater qu’il s’agit d’un rapport adopté par la majorité sénatoriale. (Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.)
Au reste, j’ai moi-même participé à ce rapport, puisque je me suis présenté à votre convocation, ai prêté serment devant vous et vous ai répondu. Je n’ai d’ailleurs pas trouvé dans le rapport un seul élément qui aurait contredit les propos que j’ai tenus en réponse à vos interrogations fournies.
La France est un pays formidable – je le dis sans ironie – puisque, en pleine gestion de la crise sanitaire, nous faisons preuve de la plus grande transparence : l’Assemblée nationale a constitué une commission d’enquête, le Sénat de même, la Cour de justice de la République a été saisie et diverses commissions travaillent à évaluer ce que nous faisons à mesure que nous le faisons…
Comme vous l’aurez constaté, la totalité des membres de mon administration, au niveau central comme au niveau territorial, se sont prêtés à cet exercice avec beaucoup d’attention ainsi que, je crois, de professionnalisme et de transparence, alors même que toutes ces équipes sont, soir, après-midi et matin, week-end compris, à la tâche au service des Français, pour essayer de gérer cette crise sanitaire et de sauver le plus grand nombre possible de vies. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est au président de la Mecss, pour la réplique.
M. René-Paul Savary. Merci, monsieur le ministre, pour la précision de votre réponse, et aussi pour sa sincérité : vous n’avez pas lu le rapport !
Vous gagneriez à le faire, car nous avons mis en lumière certains dysfonctionnements dont il vous appartient de tirer les conséquences, pour qu’ils ne se reproduisent pas. Notre commission d’enquête avait pour mission d’analyser ce qui s’est passé, car nous devons la vérité aux Français ! Nous avons également formulé un certain nombre de préconisations, auxquelles je vous invite à vous référer.
Je vous ai demandé ce que vous comptiez faire de ce rapport. À cet égard, je suis assez inquiet… Je pense que vous allez le mettre sur l’étagère !
Lorsque, donc, vous le mettrez sur l’étagère – après l’avoir lu… –, vous le placerez à côté du rapport de la commission d’enquête sénatoriale de 2009 sur la gestion de la grippe H1N1, dont notre collègue Alain Milon était le rapporteur. Ce rapport fort intéressant aurait peut-être permis, si vous vous en étiez inspiré, d’avoir moins de retard dans la gestion de la crise.
Parfois, monsieur le ministre, un peu d’autocritique ne nuit pas – quoi qu’il vous en coûte ! (Bravo ! et applaudissements prolongés sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
mathématiques à l’école
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Max Brisson. Monsieur le ministre de l’éducation nationale, les résultats de l’enquête Timss (Trends in International Mathematics and Science Study) sont tombés : les élèves français de CM1 sont les derniers en mathématiques dans l’Union européenne et les avant-derniers parmi les pays de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) ; nos collégiens de quatrième ont en mathématiques le niveau de cinquième de leurs aînés de 1995 ; 15 % des élèves de CM1 n’atteignent même pas le niveau dit « bas », contre 6 % de leurs camarades de l’Union européenne…
Monsieur le ministre, vous occupez le fauteuil de Jules Ferry depuis trois ans et sept mois : vous êtes comptable, au moins pour partie, de ces résultats. Comment expliquez-vous que se poursuive et s’amplifie cette trajectoire plongeante, qui inquiète les Français et fait mal à tous ceux qui aiment l’école de la République ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Monsieur le sénateur Max Brisson, vous savez très bien que je suis le premier préoccupé par ce type de résultats.
Je rappelle que les résultats fournis par les enquêtes internationales arrivent toujours en retard par rapport aux observations faites. En l’occurrence, les élèves ont été testés pendant l’année scolaire 2018-2019. S’agissant d’élèves de quatrième, l’honnêteté conduit à reconnaître que l’action que nous avons menée n’a pas pu porter pleinement ses fruits pour eux. (Mme Sylvie Robert s’exclame.)
Vous savez fort bien, monsieur le sénateur, car nous avons de longs débats sur ces sujets, que nous avons pris la mesure de la situation dès 2017 : nous avons lancé le plan Villani-Torossian, qui comporte vingt et une mesures, dont dix-sept sont déjà appliquées. Évidemment, elles porteront leurs fruits dans la durée, puisqu’elles ont trait à la formation initiale des professeurs, à leur formation continue et aux ressources pédagogiques. Chacun peut en consulter les détails sur le site internet du ministère.
En particulier, 1 200 référents mathématiques environ ont été désignés, un dans chaque circonspection de l’éducation nationale. Par ailleurs, chaque professeur des écoles de France bénéficiera d’une formation continue très poussée en mathématiques, alimentée aux meilleures pratiques mondiales.
D’ailleurs, notre plan a inspiré plusieurs pays dans le monde, à l’instar de celui de Singapour, un État avec lequel nous travaillons sur ces questions.
La pente à remonter est considérable ; je suis le premier à le dire. Il n’y a pas lieu de polémiquer sur le sujet, mais plutôt d’analyser notre stratégie pédagogique, inscrite dans la durée et dont je suis disposé à discuter de tous les détails, dans tous les cadres que vous souhaiterez. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour la réplique.
M. Max Brisson. Monsieur le ministre, vous m’avez répondu en fin connaisseur des rouages de votre ministère. C’est vrai, vous n’avez pas lésiné sur les réformes. Mais est-ce là vraiment le cœur du problème ?
Au-delà des enquêtes et de leurs limites, la Nation constate chaque jour la baisse généralisée du niveau des élèves ; elle s’interroge et s’inquiète.
Les mathématiques sont un révélateur implacable : elles ne font pas bon ménage avec une école qui freine les meilleurs pour que les autres suivent, une école qui a chassé de son vocabulaire les mots « effort », « notation », « mérite » et « excellence », une école en dilettante, celle que suggère le Premier ministre en rendant la classe facultative à la veille des vacances…
M. Olivier Paccaud. C’est un scandale !
M. Max Brisson. Pour renouer avec l’apprentissage réussi des mathématiques, ne faut-il pas que l’école retrouve les chemins du dépassement de soi et de l’excellence ?
Il fut un temps où un tiers des élèves de Polytechnique étaient d’origine populaire. Ils avaient rencontré des maîtres exigeants, qui ne leur parlaient pas d’inégalité de destin, mais d’effort et de travail.
M. Olivier Paccaud. Très bien !
M. Max Brisson. Monsieur le ministre, la méritocratie est, pour les classes populaires, la garantie d’une école de l’équité, fidèle à la promesse républicaine ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports se lève pour répondre à l’orateur.)
M. le président. Non, monsieur le ministre, ici, il n’y a pas de deuxième session ! (M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports se rassied.)
conclusions de la commission d’enquête sur la gestion de la crise sanitaire (ii)
M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Michelle Meunier. Parmi les constats de la commission d’enquête sénatoriale sur la gestion de la crise sanitaire, l’un est accablant et appelle une réponse : il apparaît que M. Jérôme Salomon, directeur général de la santé, a délibérément influencé la rédaction du rapport de Santé publique France préconisant un stock de masques suffisant pour faire face à une pandémie.
Monsieur le ministre, le fiasco des masques a profondément écorné la confiance de nos concitoyennes et concitoyens envers les décisions prises par votre ministère. Le fiasco des masques et la défiance qui s’en est ensuivie ont été le ferment de théories alternatives qui sapent le discours rationnel des décideurs. Le fiasco des masques a contribué à mettre en danger celles et ceux qui étaient en première ligne : les soignantes et les personnels de l’aide à domicile, par exemple, longtemps démunis, mal protégés, potentiellement vecteurs de propagation et parfois eux-mêmes malades du covid-19.
Ce fiasco des masques porte un nom : Jérôme Salomon.
Monsieur le ministre, votre responsabilité politique est immense. À quelques jours du début de la campagne de vaccination, vous devez rétablir la confiance des Françaises et des Français envers l’institution sanitaire. Quand donc M. Salomon sera-t-il remplacé à la direction générale de la santé ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice Michèle Meunier, lorsque j’ai pris connaissance du rapport sénatorial – car j’en ai bien pris connaissance, monsieur Savary… –, j’ai demandé à mon directeur général de la santé, le professeur Jérôme Salomon, de venir échanger avec moi sur ce qui lui était « reproché » – je le dis entre guillemets – dans le rapport sénatorial.
D’abord, comme le directeur général de la santé l’a lui-même expliqué par communiqué, les e-mails dont il est question dans le rapport sénatorial ont été envoyés par lui-même au Sénat, en toute transparence.
M. François Patriat. Ce n’est pas dit dans le rapport !
M. Olivier Véran, ministre. Au reste, madame la sénatrice, certains de ces mails me semblent éclairer la question que vous soulevez.
Ainsi, dans celui du mois de février dernier envoyé par le directeur général de la santé à Santé publique France, il était question d’un certain nombre d’éléments figurant dans un rapport remis par cette agence à la direction générale de la santé, à la suite d’une saisine par le directeur général, sur les antiviraux. Santé publique France a sollicité un comité d’experts, qui a répondu non seulement sur les antiviraux, mais aussi sur les antibiotiques, les masques, les respirateurs et d’autres produits.
À cela, le directeur général de la santé a répondu, dans un mail de janvier également transmis aux sénateurs, mais non publié dans le rapport de la commission d’enquête, qu’il avait sollicité un avis sur les antiviraux, et que le comité avait répondu au-delà du périmètre de la saisine, étant entendu que des travaux étaient en cours par ailleurs sur d’autres sujets, comme les antibiotiques, les masques et les respirateurs. C’est sur cette question-là que le directeur général a interpellé Santé publique France.
Force est de constater – je l’ai lu moi-même dans le rapport sénatorial (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) – que, en définitive, le rapport d’experts commandé par Santé publique France a été publié en l’état ; son auteur, le professeur Stahl, un éminent infectiologue – grenoblois, ce qui ne gâte rien… –, a reconnu lui-même qu’il n’avait pas changé un traître mot à son rapport et qu’il ne savait même pas de quoi il était question.
Madame la sénatrice, je vous ai fait part d’éléments dont je n’ai pas eu à connaître, n’étant pas encore ministre ; je me fais l’écho du directeur général de la santé, dont je tiens à souligner l’engagement constant au service de notre pays, année après année, gouvernement après gouvernement, dans des fonctions qui ne sont pas politiques et qui sont éminemment difficiles. Être directeur général de la santé, en temps normal, c’est déjà très compliqué ; en période de pandémie, ça l’est plus encore. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Salomon est un grand serviteur de l’État et un grand professeur de médecine, apprécié de ses pairs. Madame la sénatrice, je ne pouvais donc pas laisser dire ce que vous avez dit sans réagir ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour la réplique.
Mme Michelle Meunier. Monsieur le ministre, la direction générale de la santé va jouer un rôle pivot dans la campagne de vaccination : celle-ci ne pourra pas résister aux doutes sur son pilotage. Si vous voulez garder le cap de la réussite pour la campagne vaccinale, il est encore temps de changer de capitaine ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe Les Républicains.)
situation de la police
M. le président. La parole est à M. Michel Savin, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Michel Savin. Monsieur le ministre de l’intérieur, 132 agents sur 523 : ce chiffre effarant correspond au nombre de policiers de la circonscription de Grenoble qui ont adressé en début de semaine une demande de rupture conventionnelle de leur contrat de travail au préfet de l’Isère – 25 % des effectifs ! À l’échelle du département, ils sont 180.
Ce n’est pas tout : depuis lors, les policiers grenoblois assurent uniquement les interventions urgentes et nécessaires ; ils ont cessé toute patrouille, toute action d’initiative, tout contrôle.
Cette situation n’est pas seulement inquiétante pour Grenoble, ville connue pour son haut niveau de délinquance et d’insécurité. Elle est inquiétante, car elle traduit un malaise profond et un véritable écœurement de nos forces de l’ordre à l’échelle de tout le pays.
Monsieur le ministre, les déclarations du Président de la République ont mis le feu aux poudres, lorsqu’il a validé l’expression « violences policières », parlé de « contrôles au faciès » quasi généralisés et annoncé la création d’une plateforme de dénonciation et de signalement. Avec ces propos, les policiers ont le sentiment d’être lâchés par le Président de la République !
Il est certain que des actes minoritaires, comme l’affaire Zecler, doivent être dénoncés et sévèrement punis. Mais, nous le savons tous, la quasi-totalité des membres des forces de l’ordre accomplissent un travail de très grande qualité. Pourtant, ces policiers qui assurent notre sécurité se sentent abandonnés. Pire, alors que leur mission est chaque jour plus complexe, ils subissent au quotidien des violences toujours plus nombreuses : des centaines de policiers ont été blessés lors des dernières manifestations, deux ont été récemment agressés à Valenciennes et, selon vos propres chiffres, une vingtaine de policiers en moyenne sont agressés par jour.
Dès lors, monsieur le ministre, que pensez-vous des propos du Président de la République et les partagez-vous ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur. Monsieur le sénateur, je suis très honoré d’être le ministre de l’intérieur d’un Président de la République qui a créé 10 000 postes dans la police nationale et la gendarmerie. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Nous pourrions tous partager ce constat. Quand on aime la police et la gendarmerie, on peut aussi avouer les erreurs commises… (M. Bruno Retailleau s’exclame.) Comme l’a répondu à M. Véran un orateur de votre groupe, monsieur Retailleau, un peu d’autocritique ! (Vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Cela permettrait sans doute à la droite classique de s’améliorer, la prochaine fois qu’elle arrivera aux responsabilités. (Mêmes mouvements.)
Quand on joue au tennis, monsieur Retailleau, il faut accepter qu’on vous renvoie la balle. Ne vous énervez donc pas, même si, sans doute, le bureau politique s’est mal passé… (Huées sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Monsieur le ministre, veuillez répondre à la question qui vous est posée, et non sur le deuxième set… (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Gérald Darmanin, ministre. J’y répondrai bien volontiers, monsieur le président, en vous disant que, après-demain, je recevrai l’intégralité des syndicats de police, pour des entretiens bilatéraux qui nous permettront d’évoquer un certain nombre de sujets. À cette occasion, je ferai des annonces, avec l’autorisation de M. le Premier ministre et de M. le Président de la République.
Je compte bien que, à partir de janvier, non seulement les syndicats de police, mais aussi les représentants de la gendarmerie et tous les élus territoriaux, y compris le maire de Grenoble – parce que les maires sont les premiers responsables –, feront le nécessaire, avec les moyens législatifs que, je l’espère, le Parlement accordera, pour que les forces de l’ordre de la République puissent travailler.
Monsieur le sénateur, vous avez évoqué les deux policiers roués de coups à Valenciennes. Je leur ai téléphoné et, en déplacement la semaine prochaine dans le département du Nord, je les décorerai au nom de la République. Ils sont intervenus dans le cadre d’un rodéo urbain. Pendant longtemps, on a laissé faire… Je leur donne les moyens d’intervenir et de se protéger ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
souveraineté numérique et gestion des prêts garantis par l’état
M. le président. La parole est à M. Michel Canevet, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Michel Canevet. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre, dans la mesure où elle porte sur une question de souveraineté et d’intelligence économique.
Bpifrance est l’un des bras armés de l’État pour l’action en direction des entreprises. Je dois préciser que, depuis 2017, je siège au nom du Sénat au conseil national d’orientation de cet établissement, une structure qui ne s’est jamais réunie.
Bpifrance aurait décidé de recourir à un opérateur extérieur – en l’occurrence, Amazon – pour assurer l’hébergement des données relatives à l’accompagnement des entreprises dans le cadre de la crise sanitaire. Monsieur le Premier ministre, est-il logique qu’une administration d’État ou dépendant de l’État s’adresse à un opérateur extérieur pour des données aussi sensibles ? D’autant que la société Amazon est domiciliée au Luxembourg – ma collègue Nathalie Goulet pourrait nous parler des questions d’évasion fiscale.
Plus généralement, monsieur le Premier ministre, l’État a-t-il la volonté de développer une économie numérique dans notre pays, compte tenu de l’importance qu’a prise le numérique dans la vie quotidienne de chacun de nos concitoyens et de l’ensemble des entreprises ? Le Gouvernement entend-il agir dans ce domaine ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)