M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Monsieur le ministre, un ministre des outre-mer doit défendre les intérêts des outre-mer. On le constate trop souvent – ici avec le ministère de l’agriculture, ailleurs avec d’autres ministères –, il y a visiblement insuffisamment de contacts entre les ministères.
Monsieur le ministre, je ne parle pas beaucoup, ce qui me permet d’observer. Or j’ai observé que vous sembliez vouloir prendre votre mission à bras-le-corps, en tant que nouveau ministre. En ce qui concerne l’alimentation et l’agriculture ultramarine, il s’agit véritablement d’organiser une révolution pacifique. (M. le ministre acquiesce.) Vous avez un rôle essentiel à jouer en la matière.
Je m’intéresse à la souveraineté alimentaire des territoires. Elle est importante outre-mer, car, en moyenne, les denrées alimentaires y sont importées à hauteur de 80 %. Il y a donc beaucoup à faire. Je me suis intéressé au Livre bleu des outre-mer du ministère de l’agriculture – il dépend du gouvernement auquel vous appartenez, monsieur le ministre… –, dont l’ambition est de faire de l’alimentation et de l’autonomie alimentaire un levier de développement économique des territoires.
Les constats sont les suivants : les surfaces agricoles utiles ne représentent plus aujourd’hui que 33 % de la superficie totale, contre 52 % en métropole ; quelque 34 % de la surface agricole utile ultramarine sont consacrés aux cultures d’exportation, qui sont extrêmement subventionnées.
De tels schémas doivent être remis en cause. Si nous voulons parvenir à la souveraineté alimentaire, dans le respect de la préservation de la biodiversité, il faut revenir à la polyculture et à l’élevage.
Monsieur le ministre, vous vous êtes engagé devant toute notre assemblée, car nous sommes les représentants de tous les territoires, y compris des outre-mer, ne l’oublions pas. Je soutiens donc avec force ces deux amendements.
Je veux bien être aux côtés du nouveau président de la délégation sénatoriale aux outre-mer, Stéphane Artano, pour une rencontre conjointe avec le ministère des outre-mer et le ministère de l’agriculture, afin que nous réfléchissions collectivement sur ces sujets. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER.)
M. le président. Mes chers collègues, je ne fais pas appliquer à la lettre le règlement, qui voudrait que l’on ne puisse intervenir en explication de vote que sur un amendement précis, et non de manière globale. Aussi, je vous remercie de respecter au moins vos temps de parole.
La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. J’ai entendu notre excellent rapporteur dire que l’on ne va pas créer un autre programme.
Nous examinons ici la mission « Outre-mer ». Nous avons examiné il y a quelques jours la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ». Le ministre nous a dit exactement la même chose : des engagements ont été pris par le ministère des outre-mer, moi j’ai pris sa part à hauteur de 3 millions. Il a pris devant nous l’engagement que, grâce à la fongibilité, dans le budget général de l’État, les 45 millions d’euros seraient bien attribués.
Or il y a une chose que je refuse, raison pour laquelle je maintiendrai mon amendement, c’est que ces crédits sont « en gestion ». J’aimerais plutôt qu’ils figurent « en inscription » !
Peut-être ferez-vous 47, 48 ou 50 millions d’euros, mais ces montants n’ont pas bougé depuis onze ans. Je demande à mes collègues de le comprendre : au-delà de la mécanique et de l’ésotérisme des transferts de crédits, nous sommes confrontés à onze années de stabilité, donc de pauvreté infligée. Il importe que nous votions ces amendements. Le Gouvernement fera ensuite son affaire !
Certes, il y a un gage, car il faut bien respecter les règles de la LOLF. Mais je demande à mes collègues d’aider l’agriculture des outre-mer et de voter ces 2 millions d’euros.
M. le président. L’amendement n° II-1039 rectifié bis, présenté par MM. Théophile, Patient et Mohamed Soilihi et Mme Phinera-Horth, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros)
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Emploi outre-mer dont titre 2 |
5 000 000 |
|
5 000 000 |
|
Conditions de vie outre-mer |
|
5 000 000 |
|
5 000 000 |
TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Dominique Théophile.
M. Dominique Théophile. Cet amendement vise à mettre en place, sous la forme d’un fonds de dotation et à titre expérimental, un instrument financier qui permette au secteur de l’innovation de changer d’échelle.
Les territoires ultramarins souffrent en effet d’une exiguïté qui peut entraver le développement commercial de leurs entreprises. Ce fonds doit ainsi permettre aux entreprises ultramarines de prospecter et de s’installer dans d’autres territoires ultramarins du même bassin régional, mais aussi dans l’Hexagone.
Nous proposons ainsi d’abonder ce fonds de dotation en transférant 5 millions en autorisations d’engagement et en crédits de paiement de l’action Aménagement du territoire, du programme « Conditions de vie outre-mer », vers l’action Soutien aux entreprises, du programme « Emploi outre-mer ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Georges Patient, rapporteur spécial. La commission a émis un avis favorable sur cet amendement, mais les rapporteurs, en fonction d’autres éléments, sont revenus sur cet avis initial.
Je serai donc défavorable à cet amendement, car la mission « Outre-mer » comprend déjà des dispositifs visant à aider les entreprises innovantes dans les outre-mer.
L’action n° 01 du programme 138 prévoit, par exemple, une dotation à hauteur de 4 millions d’euros affectée à un dispositif d’appels à projets et d’appels à manifestation d’intérêt, afin de décliner une offre spécifique pour l’émergence en outre-mer de projets innovants et environnementaux-compatibles.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Sébastien Lecornu, ministre. Monsieur Labbé, je suis prêt à travailler avec vous sur le sujet évoqué précédemment. Le covid et les confinements ont modifié beaucoup d’habitudes ; ces changements méritent d’être observés, documentés et accélérés.
Monsieur Lurel, je vous répète que l’engagement relatif aux 45 millions d’euros sera tenu. Je tiens à ce que les choses soient claires.
Monsieur Théophile, vous avez tellement raison que l’aide que vous demandez est inscrite le plan de relance puisque 247 millions d’euros ont été votés pour apporter un soutien spécifique aux différentes entreprises outre-mer. Business France, dont vous connaissez l’ingénierie et les méthodes, aura la main sur ce dispositif. L’idée est évidemment d’arriver à territorialiser cette somme pour les différents territoires d’outre-mer.
Je m’engage donc à examiner les montants qui peuvent déjà être disponibles pour les différents territoires d’outre-mer sur les crédits prévus.
Je vous demande, par ailleurs, de bien vouloir retirer cet amendement, car il est gagé sur les crédits pour les collectivités territoriales. C’est certes le jeu du gage, mais la Constitution s’applique autant aux parlementaires qu’aux ministres.
Je vous propose donc de travailler plutôt sur la territorialisation de cette somme de 147 millions d’euros de Business France – vous avez sûrement des exemples concrets d’entreprises en Guadeloupe que vous souhaitez accompagner en la matière – et de veiller à ce que des instructions soient données aux préfets pour que les choses aillent dans le bon sens. J’espère ainsi avoir répondu à votre amendement d’appel.
Le Gouvernement sollicite donc le retrait de cet amendement.
M. le président. Monsieur Théophile, l’amendement n° II-1039 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Dominique Théophile. Non, je vais le retirer, monsieur le président, mais je me fais violence, car la demande est forte.
Une nouvelle génération entrepreneuriale est en train d’émerger outre-mer, et avec elle une nouvelle approche. Il serait souhaitable que ces entrepreneurs soient accompagnés, pour leur permettre d’exporter leur savoir-faire à l’extérieur.
Cela dit, je retire l’amendement.
M. le président. L’amendement n° II-1039 rectifié bis est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-1057, présenté par M. Antiste, Mmes Conconne et Jasmin, M. Lurel et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Fonds de lutte contre les violences conjugales
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros)
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Emploi outre-mer dont titre 2 |
|
5 000 000 |
|
5 000 000 |
Conditions de vie outre-mer |
|
|
|
|
Fonds de lutte contre les violences conjugales |
5 000 000 |
|
5 000 000 |
|
TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Maurice Antiste.
M. Maurice Antiste. L’actuel projet de loi de finances fait l’impasse sur un problème majeur pour les outre-mer : les féminicides et les violences contre les femmes. Or ces faits prennent chez nous des proportions inquiétantes, voire très alarmantes.
Ces amendements visent donc à créer un fonds spécifique aux territoires ultramarins pour lutter contre les violences faites aux femmes.
Ce fonds serait doté de 5 millions d’euros et aurait pour vocation d’accompagner les femmes victimes de violences conjugales et leurs enfants à charge, en les aidant dans la poursuite de leurs activités scolaires et professionnelles, en leur rassurant un logement et en leur apportant une aide dans leurs démarches administratives et judiciaires.
Mme Catherine Conconne. Très bien !
M. le président. L’amendement n° II-1058, présenté par M. Antiste, Mmes Conconne et Jasmin, M. Lurel et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros)
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Emploi outre-mer dont titre 2 |
|
500 000 |
|
500 000 |
Conditions de vie outre-mer |
500 000 |
|
500 000 |
|
TOTAL |
500 000 |
500 000 |
500 000 |
500 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Maurice Antiste.
M. Maurice Antiste. Il s’agit d’un amendement de repli.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Georges Patient, rapporteur spécial. Nous souscrivons bien évidemment pleinement aux préoccupations des auteurs de ces deux amendements, mais nous émettrons un avis défavorable, car la mission « Outre-mer » comporte déjà des crédits destinés à la lutte contre ce phénomène.
L’action n° 04 du programme 123, qui ne porte pas de dispositifs en propre de lutte contre les inégalités, contribue à réduire les inégalités de traitement entre les femmes et les hommes au travers de subventions versées à des associations pour des projets – vingt-sept en 2019 – relatifs, notamment, aux violences faites aux femmes, à l’égalité entre les femmes et les hommes, ainsi qu’à la lutte contre les discriminations.
Il est à noter que le ministère des outre-mer, en lien avec le service des droits des femmes et de l’égalité, s’est mobilisé pour étendre l’enquête violences et rapports de genre, l’enquête Virage, en outre-mer, afin d’actualiser les connaissances scientifiques sur la prévalence des violences dans les territoires ultramarins et d’évaluer les conséquences des violences subies par les femmes.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Sébastien Lecornu, ministre. L’enveloppe du ministère pour soutenir les associations, toutes thématiques confondues, est de 3 millions d’euros par an. Nous n’avons peut-être pas suffisamment communiqué sur cette somme, mais, depuis 2017, quelque 1 million d’euros ont été consacrés aux violences faites aux femmes. Jamais nous n’avions consacré autant de moyens à cette question.
Par ailleurs, l’homophobie doit tout autant nous inquiéter et nous préoccuper que les violences faites aux femmes. Loin de moi l’idée de segmenter les problèmes, mais vous arpentez suffisamment le terrain pour savoir que c’est également un phénomène préoccupant, et qu’il mérite véritablement d’être traité.
Le député Raphaël Gérard, que vous connaissez bien, s’est beaucoup mobilisé sur ces sujets. Au-delà des sommes, et plutôt que de procéder chaque année au coup par coup, je vous propose de mettre en place une véritable trajectoire pluriannuelle. Il s’agit d’inscrire notre action dans le temps. De nombreuses associations se demandent si elles vont pouvoir reconduire d’année en année certains dispositifs.
Le moment est venu de nous doter d’un système d’actions plus coordonné entre les différents acteurs. Il serait utile également d’y associer les caisses centrales d’activités sociales, les CCAS, ainsi que les conseils départementaux ou les territoires quand ils ont la compétence sociale.
Certaines mesures ne coûtent pas forcément beaucoup d’argent. Il faut notamment s’adapter aux différents langages. J’ai reçu des demandes en la matière. Il serait intéressant, le moment venu, que je puisse entendre les parlementaires. Je pense, par exemple au dispositif « téléphone grave danger », pour lequel un accueil en langue créole n’est pas prévu. Des femmes sont donc en difficulté pour signaler leur niveau de détresse.
Bref, nous allons devoir travailler assez rapidement sur beaucoup de questions d’ordre pratique. Je tourne mon regard vers la sénatrice Nassimah Dindar, ancienne présidente du conseil départemental de La Réunion, avec qui l’État a beaucoup travaillé pour mettre en place un certain nombre d’actions dans cette collectivité.
Plutôt que d’augmenter les crédits de la mission en tant que tels, je vous propose de réexaminer ce que l’on peut faire avec cette somme, mais de manière plus coordonnée et en y incluant davantage la lutte contre l’homophobie. Il importe de définir surtout une vraie trajectoire pluriannuelle, qui permette d’ouvrir quelques perspectives.
Il s’agit d’un sujet délicat, qui concerne également le garde des sceaux et le ministre de l’intérieur. Il y a le volet prévention, mais il y a aussi le volet répression. La question des violences faites aux femmes est éminemment préoccupante. C’est aussi un point commun redoutablement délicat entre les différents territoires d’outre- mer. J’ai véritablement envie d’avancer sur ces sujets, en lien avec les différents acteurs.
Je sollicite donc le retrait de ces deux amendements.
M. le président. Monsieur Antiste, les amendements nos II-1057 et II-1058 sont-ils maintenus ?
M. Maurice Antiste. Monsieur le ministre, j’aimerais que nous soyons sollicités pour cette réflexion que vous proposez. Votre idée n’est pas mauvaise. Il faudrait qu’elle voie le jour, afin que les nombreuses femmes battues et les foyers démembrés chez nous puissent croire en l’action solidaire.
Je retire donc ces amendements, monsieur le président.
M. le président. Les amendements nos II-1057 et II-1058 sont retirés.
L’amendement n° II-1102, présenté par M. Antiste, Mme Jasmin, MM. Lurel, P. Joly, Bourgi et Montaugé et Mmes Monier et G. Jourda, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros)
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Emploi outre-mer dont titre 2 |
|
2 500 000 |
|
2 500 000 |
Conditions de vie outre-mer |
2 500 000 |
|
2 500 000 |
|
TOTAL |
2 500 000 |
2 500 000 |
2 500 000 |
2 500 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Maurice Antiste.
M. Maurice Antiste. Dans les territoires ultramarins, les établissements de santé doivent faire face à des déficits d’équipement ou à l’inexistence de spécialités.
Le recours aux évacuations sanitaires, qui permettent aux patients en situation d’urgence ou nécessitant une prise en charge par un spécialiste absent du territoire de se faire soigner dans un autre territoire français ou à l’étranger, est donc nécessaire.
À titre d’exemple, la Martinique ne dispose pas d’un cyclotron pour le diagnostic et le suivi des cancers. Pour Mayotte, ceux-ci sont effectués à La Réunion. C’est aussi le cas à Wallis-et-Futuna, etc. L’insularité et l’absence de certaines spécialités médicales ou chirurgicales outre-mer suscitent dès lors un nombre élevé d’évacuations sanitaires, généralement par voie aérienne.
Dans le cadre de la continuité territoriale, une possibilité de prise en charge totale a été instituée, afin de permettre l’accompagnement des personnes malades devant se faire soigner. Cependant, pour les patients et leurs proches, l’éloignement lors des prises en charge, parfois longues et effectuées en dehors de leur terre d’attache, entraîne de lourdes conséquences.
Afin de pallier cette difficulté et d’améliorer le système, il est proposé d’augmenter les moyens de l’action n° 03 du programme 123, en ponctionnant l’action n° 04, Financement de l’économie, du programme 138, « Emploi outre-mer ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Teva Rohfritsch, rapporteur spécial. Nous sommes tous sensibles à ce sujet. Néanmoins, la commission a émis un avis défavorable, car l’extension de l’aide à la continuité territoriale aux proches des personnes bénéficiant d’une évacuation sanitaire nécessiterait une modification du code des transports.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Sébastien Lecornu, ministre. Il s’agit encore une fois d’une vraie difficulté. Je remercie d’ailleurs l’ensemble des parlementaires des deux chambres, toutes sensibilités politiques confondues. Le texte comprend un certain nombre d’avancées pour la continuité funéraire, qui est un sujet redoutablement délicat dans les différents territoires d’outre-mer.
En ce qui concerne les évacuations sanitaires, il existe déjà des dispositions, même si l’on peut déplorer parfois un enchevêtrement complexe des dispositifs. La prise en charge de l’évacuation sanitaire, l’Évasan, se fait bien évidemment par la sécurité sociale.
La particularité est que la sécurité sociale prend également en charge un accompagnateur : une personne de la famille ou un ami. Depuis peu, l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité, Ladom, établissement public qui dépend de mon ministère, prend également en charge un deuxième accompagnateur. On arrive donc ainsi à un niveau de solidarité et d’accompagnement qui commence à être humainement soutenable.
En ce qui concerne les frais sur place de ces accompagnateurs, il me paraît très difficile de les faire prendre en charge par le budget de l’État ou de la sécurité sociale ; pourtant Dieu sait que je suis humainement sensible à toutes ces questions ! En revanche, cela me gêne de me tourner de nouveau vers Nassimah Dindar, mais j’ai été également président de département : c’est aussi la compétence des conseils départementaux et des CCAS que d’accompagner les familles.
En tout état de cause, dans la loi de la République, l’accompagnement des familles dans ce genre de circonstances revient aux collectivités territoriales, notamment à la collectivité territoriale chef de file, le conseil départemental ou, le cas échéant, au conseil territorial en cas de fusion des deux collectivités.
Je demande donc le retrait de cet amendement, en insistant sur la continuité des mesures entre Ladom et l’assurance maladie. Il n’est pas question de remettre en cause ce qui a été acquis par les parlementaires dans le passé. Quant à la prise en charge des frais sur place, et c’est un ancien président de département qui vous le dit, elle incombe selon moi aux collectivités territoriales.
M. le président. Monsieur Antiste, l’amendement n° II-1102 est-il maintenu ?
M. Maurice Antiste. Je vais le maintenir, car je ne suis pas sûr d’avoir été parfaitement compris.
Des actions existent au niveau de la continuité territoriale, mais cela reste encore la croix et la bannière pour les familles. Des proches sont même obligés de les soutenir financièrement pour qu’elles puissent partir tellement les démarches sont longues et lourdes. Je demande simplement une augmentation des moyens de l’action et non la création d’une nouvelle ligne budgétaire.
Je maintiens donc mon amendement, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Nassimah Dindar, pour explication de vote.
Mme Nassimah Dindar. M. le ministre a raison de rappeler que des départements se mobilisent également.
Je signale à mon collègue Antiste que nous avons mis en place un dispositif à La Réunion : la caisse générale de la sécurité sociale prend en charge le billet d’avion du malade et du médecin accompagnant. Quand nous n’avons pas besoin du médecin, la caisse peut effectivement prendre en charge, lorsqu’il s’agit des mineurs, le billet du parent accompagnateur. Voilà ce que la loi autorise.
Ce qui pose véritablement problème, c’est souvent l’accompagnement par le deuxième parent, quand il s’agit d’un enfant, mais surtout la prise en charge sur le territoire hexagonal du logement des parents accompagnateurs.
Par exemple, il existe à La Réunion des conventions avec le Rosier Rouge, selon les hôpitaux, pour pouvoir prendre en charge – c’est le département qui s’en charge – pendant une période de quatre semaines ou de deux mois, selon les cas, l’hébergement des parents, la mise à disposition d’un numéro de téléphone, etc. Des conventions existent, et la caisse générale de sécurité sociale travaille le plus souvent en lien avec les départements, voire avec les CCAS.
La difficulté n’est pas, selon moi, les billets d’avion. Il y a en effet Ladom, mais aussi les cagnottes parfois mises en place. Le plus important, c’est bien l’accompagnement nécessaire sur le territoire national des familles. Celles-ci ont besoin de débourser de l’argent, de prendre des taxis, d’aller à l’hôpital, d’être logées, etc.
Pour finir, je dirai un mot des violences faites aux femmes. C’est un problème très important dans les territoires ultramarins, mais qui coûte cher à l’État. En effet, les familles démantelées – mon collègue a eu raison d’y insister –, les enfants pris en charge par les foyers, ce sont autant de dépenses sociales que l’État et la République assument. Il convient de travailler en étroite collaboration avec les différents ministères pour mettre en place de vrais moyens.
L’enquête Virage est une enquête nationale. Fort heureusement, mon cher collègue, tous les territoires ultramarins en ont bénéficié. En revanche, quand nous signons des conventions sur le dispositif téléphone grave danger, nous nous rendons compte que les territoires d’outre-mer ont été les oubliés.
M. le président. Il faut conclure !
Mme Nassimah Dindar. Il en est de même pour les bracelets électroniques.
M. le président. Il faut vraiment conclure !
Mme Nassimah Dindar. C’est un sujet sur lequel il est important que nous puissions travailler.
M. le président. Mes chers collègues, je n’autoriserai plus de dépassements de temps de parole ! Je ne voudrais pas que le Sénat soit contraint de siéger dimanche prochain pour examiner une mission reportée.
La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote. Et je vous prie de bien vouloir intervenir sur l’amendement, mon cher collègue.
M. Joël Labbé. Certainement, monsieur le président. J’étendrai quelque peu le sujet, mais tout en respectant le temps de parole qui m’est imparti…
Madame Dindar, la question se pose de la prise en charge des accompagnants sur le territoire, et cela justifie de notre part un geste de soutien.
Puisque nous parlons de la santé, je voudrais évoquer en deux mots le sujet des plantes médicinales, dont 80 % de nos ressources se trouvent dans les outre-mer. Le développement économique et sanitaire extraordinaire que représente cette ressource doit prendre son essor dans ces territoires, dans l’intérêt de nos compatriotes ultramarins et de leur santé.
Aussi allons-nous relancer au Sénat le groupe de travail informel sur les plantes médicinales. J’invite tous nos collègues d’outre-mer à le rejoindre, car c’est un secteur très intéressant, j’y insiste, pour le développement de leurs territoires.
M. le président. La prochaine campagne de promotion se fera en dehors des explications de vote sur les amendements, si vous le voulez bien ! (Sourires.)
La parole est à Mme Lana Tetuanui, pour explication de vote.
Mme Lana Tetuanui. Je souscris tout à fait aux propos de mes collègues sénateurs des outre-mer. Je souhaite, en revanche, préciser un point évoqué par notre honorable ministre.
Lorsqu’il y a des évacuations sanitaires, ou Évasan, en métropole, la sécurité sociale prend en charge les frais pour les fonctionnaires d’État. Lorsque de telles évacuations ont lieu en Polynésie, pour les salariés et les fonctionnaires territoriaux, c’est la caisse de prévoyance sociale qui assure la prise en charge des malades et de l’accompagnateur. Je tenais à clarifier ce point.
M. le président. L’amendement n° II-1060, présenté par Mme Jasmin, M. Antiste, Mme Conconne, M. Lurel et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Fonds d’urgence pour un tourisme raisonné en outre-mer
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros)
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Emploi outre-mer dont titre 2 |
|
2 000 000 |
|
2 000 000 |
Conditions de vie outre-mer |
|
|
|
|
Fonds d’urgence pour un tourisme raisonné en outre-mer |
2 000 000 |
|
2 000 000 |
|
TOTAL |
2 000 000 |
2 000 000 |
2 000 000 |
2 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Victoire Jasmin.
Mme Victoire Jasmin. Cet amendement vise à créer un fonds d’urgence pour un tourisme raisonné.
Il y a dans nos territoires de nombreuses TPE et PME, et le tourisme représente une part importante du PIB. Au travers de cet amendement d’appel, je propose de mettre en conformité la volonté, réelle, d’encourager le tourisme écologique et celle de changer de modèle économique.
Nos territoires offrent diverses formes de tourisme, chacun d’entre eux ayant ses propres atouts. Nous voulons véritablement faire travailler les TPE et les PME, parce que des emplois directs et indirects sont en jeu.
Il est vrai, monsieur le ministre, qu’un certain nombre de gestes ont été faits dans le cadre du plan de relance. Mais je souhaite vraiment, pour la pérennité de la vocation environnementale de nos territoires, lesquels, encore une fois, ont beaucoup d’atouts, qu’une réflexion soit menée sur la diversité des territoires et des modes de tourisme, en particulier sur le tourisme environnemental.