M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge.
M. Dominique de Legge. Madame la ministre, je souhaite vous interroger sur le dispositif Ville-vie-vacances, dans son volet de stage à caractère éducatif, plus communément appelé « dispositif Argent de poche ».
De nombreuses communes rurales ont mis en place ce dispositif permettant à des jeunes de travailler dans les collectivités territoriales ou dans des associations, jusqu’à ce que des préfets – comme cela a été le cas en Bretagne –, se réveillent et fassent valoir que ce dispositif n’était applicable que dans les quartiers dits « politique de la ville ». (Mme la ministre acquiesce.)
Je trouve cela fâcheux. Je sais que vous avez déjà été alertée sur ce sujet et que vous avez laissé espérer un réexamen de cette question, considérant qu’il n’y avait pas de raison que les jeunes ruraux ne puissent pas bénéficier de ce dispositif, d’autant qu’il semble fonctionner davantage en milieu rural qu’en milieu urbain.
Madame la ministre, où en êtes-vous de vos réflexions sur le sujet ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, vous avez raison : le dispositif Argent de poche, dont la dénomination technique est « chantiers et stages à caractère éducatif », est un mécanisme propre à la politique de la ville.
Il a été créé dans les années 1980 et adossé au programme Ville-vie-vacances. En 2015, les sommes versées aux jeunes âgés de 14 ans à moins de 26 ans, au titre de leur activité dans le cadre de ce programme, sont devenues assimilables à des gratifications versées aux stagiaires en entreprise. Elles sont par conséquent exclues de l’assiette des cotisations et contributions sociales dans les mêmes conditions.
Si ce dispositif était initialement et est encore conçu seulement pour la politique de la ville, je sais que certains territoires, notamment en Bretagne, en particulier en Ille-et-Vilaine, ont mis en place des dispositifs dérogatoires permettant d’en faire bénéficier les jeunes ruraux. Aujourd’hui, il s’agit donc d’un système dérogatoire pour la ruralité.
Cependant, si cela existe dans certains territoires, ce n’est pas le cas à l’échelon national et l’Association des maires ruraux de France (AMRF) a d’ailleurs récemment interpellé mes équipes à ce sujet. Dans ce cadre, j’ai souhaité solliciter ma collègue ministre de la santé, pour étudier les conditions d’une extension de ce dispositif aux territoires ruraux.
Des échanges sont en cours. Je ne manquerai pas de vous tenir informé, tout comme l’AMRF d’ailleurs, de la suite que nous pourrons réserver à cette demande, qui me semble tout à fait légitime.
M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge, pour la réplique.
M. Dominique de Legge. Madame la ministre, je vous remercie de souligner qu’il s’agit d’une demande légitime.
Maintenant, il y a urgence ! Voilà une mesure qui ne coûte pas un centime à l’État et qui est bien utile pour nos jeunes. Je compte donc plus que jamais sur vous pour convaincre vos collègues du Gouvernement de lever cet obstacle. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Hervé Gillé.
M. Hervé Gillé. Madame la ministre, un plan d’action et un agenda rural en faveur des territoires ruraux, oui, c’est incontournable : plus de 22 millions de Français vivent dans ces territoires, où s’additionnent les difficultés de mobilité et d’accès à l’emploi, aux services, à la santé.
Dans le même temps, 22 métropoles capitalisent l’essentiel des richesses, des créations d’emploi, de l’accès aux mobilités, à la culture, à la santé… Ces dynamiques métropolitaines s’accélèrent, et leur développement devrait bénéficier aussi aux villes moyennes, aux zones périurbaines et rurales. Ces métropoles fournissent des emplois, des services et des équipements qui profitent à la plupart, mais est-ce suffisant quand persistent autant d’inégalités territoriales ?
L’opposition permanente entre métropoles et territoires ruraux ne peut être une fatalité ou une instrumentalisation politique. Nous voulons construire une alliance en complémentarité, mais il faut de nouvelles solidarités territoriales, des moyens concrets, un partage des richesses plus juste, un devoir vis-à-vis de territoires souvent déshérités, mais indispensables à nos équilibres.
Ces territoires sont également des acteurs incontournables de la mise en œuvre des politiques liées aux défis environnementaux ; ils constituent souvent les espaces de compensation nécessaires à l’activité urbaine, insuffisamment valorisés.
Grâce à une forte concentration d’entreprises, les métropoles capitalisent des recettes fiscales, qui pourraient être des outils au service de contrats de coopération, dont la réciprocité financière n’est pas toujours assurée.
Des propositions ont été formulées pour de nouvelles coopérations financières par des dispositifs de solidarité fiscale. Ainsi, le 1 % métropole, construit à partir des recettes de la contribution économique territoriale, n’aurait pas d’impact à l’échelle des métropoles, tout en offrant des perspectives.
La taxe transport, ou versement transport – Didier Mandelli et vous-même avez évoqué ce sujet –, essentiellement captée par ces territoires métropolitains, pourrait être mise en partie à profit en faveur du désenclavement des zones rurales.
Madame la ministre, je vous ai écoutée avec beaucoup d’attention sur une éventuelle redistribution en ce sens. La mesure de votre plan consistant à augmenter les ressources des autorités organisatrices des mobilités par une fraction de la TVA est insuffisante et, surtout, trop conjoncturelle.
M. le président. Il faudrait songer à poser une question, mon cher collègue.
M. Hervé Gillé. Ces péréquations financières sont indispensables. Madame la ministre, quelles sont vos propositions en la matière ? Comment souhaitez-vous développer les coopérations entre la région et les départements ? Enfin, comment rendrez-vous compte du comité interministériel de suivi du plan ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, votre question s’inscrira de façon opportune dans le cadre de la réflexion que nous mènerons lors de l’examen de la loi 3D – déconcentration, différenciation et décentralisation : je varie l’ordre, car, selon les circonstances, le terme le plus important vient à la fin.
En effet, aujourd’hui, nous avons besoin de renforcer la coopération entre les différents échelons de collectivités territoriales, et même entre les territoires.
Nous ne pouvons qu’encourager ces dispositifs qui commencent à exister, mais qu’il faut améliorer, et que l’on appelle les contrats de réciprocité.
Il en existe déjà. On peut citer le contrat de réciprocité entre l’Eurométropole de Strasbourg et le territoire de Saint-Dié dans les Vosges, celui entre Toulouse et l’arrière-pays de Comminges, celui de Brest où a eu lieu l’expérimentation de ce dispositif. (M. Pierre Louault s’exclame.) Et je ne saurais oublier Tours, car je vois s’agiter Pierre Louault, sénateur d’Indre-et-Loire. (Sourires.) Lui aussi a mis en place des contrats de réciprocité.
Aujourd’hui, ces contrats de réciprocité sont à la main entière des collectivités territoriales, sans cadre et sans incitation au partage de la ressource.
Je le répète : il serait intéressant d’encourager ce dispositif de contrats de réciprocité et d’y réfléchir dans le cadre de la loi 3D.
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Émorine.
M. Jean-Paul Émorine. Madame la ministre, au moment où nous parlons de la ruralité et où est mis en place un plan d’action en faveur des territoires ruraux, il est bon de rappeler que la ruralité représente 80 % de la superficie de notre territoire et qu’y habitent à peu près 20 % de la population. (Mme la ministre acquiesce.)
La loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux était la première loi en direction de la ruralité, vous vous en souvenez, madame la ministre.
En milieu rural, les zones de revitalisation rurale (ZRR) souffrent de handicaps majeurs. Or ces zones représentent 50 % de la superficie de notre territoire et 10 % de la population, soit 14 250 communes et 6,25 millions d’habitants. La loi relative au développement des territoires ruraux a prévu des exonérations fiscales pour les professionnels de santé, les vétérinaires, les entreprises s’installant dans ces zones, pour une durée de cinq ans.
La loi de finances rectificative de 2015 a revu les critères de classification en ZRR, lesquels sont entrés en vigueur en 2017, pour prendre en compte les nouveaux EPCI.
Désormais, sont classés en ZRR les territoires dont la densité de population est inférieure ou égale à 63 habitants par kilomètre carré, soit la moyenne nationale, contre 35 habitants précédemment, et dont le revenu médian est inférieur ou égal à 19 111 euros. Or, aujourd’hui, on voit bien que ces dispositions ne sont pas suffisantes pour animer la ruralité.
Madame la ministre, de nombreux rapports ont été réalisés sur la ruralité. Pour ma part, ce sont les zones de revitalisation rurale qui me préoccupent. Votre plan d’action offre-t-il des perspectives crédibles ? Pour quelle durée les dispositifs seront-ils prévus : cinq, dix, quinze ou vingt ans ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Sylvie Vermeillet et M. Pierre Louault applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, comme vous le savez, il était prévu de mettre fin à un certain nombre de zones de revitalisation rurale au mois de juillet de l’année prochaine, mais nous avons prorogé ce dispositif jusqu’à la fin du mois de décembre 2020 dans la loi de finances.
Je rappelle qu’environ la moitié des communes françaises sont classées en ZRR. Il s’agit donc là d’une politique très importante. Si nous avons prolongé ce dispositif, c’est parce que les élus qui ont réfléchi à cette question dans le cadre de la mission « Agenda rural » nous ont demandé de définir une géographie prioritaire de la ruralité. Nous allons donc consacrer l’année 2020 à travailler sur ce sujet, y compris sur les critères que vous venez d’évoquer.
Il est toujours difficile de changer de système. Lorsque l’on propose un dispositif nouveau, il y a ceux qui en sortent – ceux-là, on les entend immédiatement – et ceux qui y entrent – ceux-là sont contents. C’est toujours ainsi que cela se passe.
Il nous faut trouver un système adapté à la ruralité d’aujourd’hui. Pour ma part, je suis ouverte à toute proposition. Soit on ne trouve pas de meilleure solution que les ZRR, auquel cas, on les conservera, soit on invente une géographie prioritaire des ruralités, avec de nouveaux critères, sachant, je le répète, que certains territoires sortiront de ce système, c’est sûr. Même si c’est difficile, je pense que cela en vaut la peine. Tel est en tout cas le souhait de ceux qui ont rédigé l’agenda rural.
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Émorine, pour la réplique.
M. Jean-Paul Émorine. Madame la ministre, je pense que vous allez mettre en place de nouveaux dispositifs. Ce qu’il faut, c’est les inscrire dans la durée.
Offrir des perspectives à cinq ans n’est pas suffisant. On l’a bien vu s’agissant des médecins en milieu rural : il faut leur donner des perspectives de carrière sur dix, quinze ou vingt ans. Il en va de même pour les entreprises qui s’installent dans ces territoires.
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je ne puis que souscrire à votre plan d’action en faveur des territoires ruraux. Les intentions sont belles et devront se traduire par des mesures concrètes.
Rappelons nos atouts et les enjeux. Nos territoires constituent un véritable capital et représentent une formidable richesse. Nos campagnes doivent donc être un moteur du modèle écologique.
La France, qui compte 30 000 millions d’hectares de surfaces agricoles, reste la première puissance agricole de l’Union européenne.
L’agriculture est au cœur de la lutte contre le changement climatique. Elle en est l’une des principales causes, car le secteur agricole émet trop de gaz à effet de serre, mais elle en subit également les conséquences : sécheresses, inondations. À cela s’ajoutent les effets délétères du recours aux produits phytosanitaires sur les espèces et sur notre santé.
L’agroécologie est la réponse à la crise agricole et écologique actuelle. Oui, il faut soutenir les nouvelles pratiques agricoles. Oui, l’agriculture conventionnelle doit évoluer et se diversifier, car la préservation de la biodiversité n’est plus une option. Il est donc urgent de soutenir nos agriculteurs et de leur apporter de véritables garanties financières, afin de leur permettre de modifier leurs pratiques.
Nos systèmes de production doivent, plus que jamais, s’appuyer sur les potentialités offertes par les écosystèmes, c’est-à-dire la nature, en somme. Les circuits courts et bios sont un levier vertueux pour revitaliser nos territoires et sortir de la crise.
De belles initiatives sont d’ores et déjà prises dans nos territoires, qu’il faudrait pouvoir généraliser, mais de trop nombreux obstacles demeurent : terres trop chères, indisponibles, frais d’investissement bien trop élevés. Développer l’économie locale et miser sur le bio sont des paris sur l’avenir. Il s’agit non seulement de produire une alimentation de qualité, mais également de réduire les coûts économiques et écologiques.
Par ailleurs, face à la moyenne d’âge des agriculteurs, il nous faut investir, nous appuyer sur la motivation de nos jeunes et répondre à leur quête de sens professionnel face aux enjeux environnementaux.
Ma question est très simple, madame la ministre : pensez-vous qu’il faille seulement « encourager » le développement des circuits courts, comme cela figure dans le plan ? Qu’entendez-vous par « promouvoir l’agroécologie » ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Madame la sénatrice, je vous ai déjà entendu parler de ces sujets, auxquels, je le sais, vous êtes particulièrement sensible.
L’agenda rural prévoit en effet la promotion de l’agroécologie et des nouvelles pratiques agricoles, en développant, par exemple, les projets alimentaires territoriaux et les programmes agricoles expérimentaux. Ces projets fédèrent les acteurs d’un territoire autour d’une ambition partagée pour développer l’agriculture durable et une alimentation de qualité.
L’agenda rural prévoit également d’encourager l’approvisionnement en circuits courts des collectivités territoriales et des services déconcentrés de l’État ; c’est très important. J’insiste beaucoup sur les produits issus de circuits courts, certains produits bios venant parfois de très loin.
Cet agenda prévoit aussi de soutenir les nouvelles pratiques agricoles, notamment l’agriculture biologique et l’exercice collectif. Les initiatives vertueuses en matière d’écologie, via les groupements d’intérêt économique et environnemental ou le volet agricole du grand plan d’investissement, ainsi que les associations qui interviennent dans ce domaine, bénéficieront d’un soutien renforcé.
Vous avez évoqué, madame la sénatrice, le nécessaire accompagnement des agriculteurs, afin de permettre la transformation de l’agriculture de notre pays. À cet égard, l’agenda rural prévoit de renouveler le plan « Enseigner et produire autrement ». L’enseignement agricole a un rôle très important à jouer, car c’est dans les lycées agricoles que sont formés les futurs agriculteurs et, d’une manière générale, ceux qui s’occupent de la terre, de la forêt, etc.
Enfin, les crédits du fonds de structuration Avenir bio, gérés par l’Agence Bio, ont été augmentés dans la loi de finances initiale pour 2020 et portés à 8 millions d’euros, même si c’est sûrement encore insuffisant. Quant au crédit d’impôt bio, il a été revalorisé et prolongé jusqu’en 2020.
M. le président. La parole est à Mme Christine Bonfanti-Dossat.
Mme Christine Bonfanti-Dossat. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nombreux sont les villages qui ont vu se fermer successivement commerces, écoles, cabinets médicaux, hôpitaux, services publics, et bien d’autres. Ces lieux sont pourtant essentiels au quotidien.
Les cris d’alarme du monde rural, qui représente 35 % de la population française, sont devenus assourdissants. L’intensité des manifestations des « gilets jaunes », particulièrement fortes dans le Lot-et-Garonne, nous oblige à agir.
Ayant été maire pendant vingt-cinq ans et infirmière libérale, je tenais à attirer votre attention sur les enjeux de démographie médicale et d’accès aux soins. Vous le savez, la situation s’est considérablement dégradée.
Les collectivités locales ont pourtant pris leurs responsabilités en créant des maisons de santé ou en salariant des médecins, afin que ce service public vital ne disparaisse pas totalement de leurs territoires.
Certes, la loi relative à l’organisation et à la transformation du système de santé a permis de donner un souffle nouveau, en encourageant l’installation des médecins dans les zones sous-denses. Pour sa part, le Sénat a soutenu la pratique des délégations de tâches entre professionnels de santé, afin de faciliter l’accès aux soins.
Toutefois, il est possible d’aller plus loin. En effet, le maillage dense des réseaux d’infirmiers et d’aides à domicile et leur proximité avec les patients pourraient être plus largement exploités. Chaque année, 120 000 infirmiers libéraux interviennent auprès de 11 millions de patients, soit 18 % de la population, dans 90 % des cas à domicile. De même, 1,5 million d’aides à domicile interviennent auprès de plus de 3 millions de Français.
Le plan d’action en faveur des territoires ruraux préconise d’augmenter de façon urgente les délégations de tâches au profit des infirmiers. De telles délégations pourraient également être envisagées pour les aides à domicile.
Quel est votre avis, madame la ministre, sur ces propositions, qui permettraient d’améliorer l’accès aux soins dans les zones rurales sans dégrader leur qualité ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Madame la sénatrice, vous avez dressé un constat tout à fait juste de la situation de la ruralité dans le domaine de la santé. Les délégations que vous proposez me paraissent, à moi qui ne suis ni une spécialiste de la santé ni en charge de ce secteur, être de bon sens. J’en parlerai à ma collègue la ministre des solidarités et de la santé.
J’ai évoqué, en réponse à une question précédente, les vaccinations et un certain nombre de tests qui peuvent d’ores et déjà être pratiqués par les infirmières. Je pense que l’on peut également leur déléguer d’autres tâches, mais peut-être faut-il pour cela modifier ou accroître leur formation.
On le sait, il faut dix ans, au minimum, pour former un médecin. Un certain nombre de mesures qui viennent d’être prises seront efficaces très rapidement, mais d’autres nécessiteront d’attendre la fin de la formation des futurs médecins, afin qu’un vivier suffisant soit constitué.
Votre proposition me semble de bon sens ; je la transmettrai à la ministre des solidarités et de la santé.
M. le président. La parole est à M. Alain Dufaut.
M. Alain Dufaut. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, une fois de plus, j’évoquerai les différences notoires d’application d’une loi à caractère urbanistique, selon qu’elle est mise en œuvre en région parisienne, dans une grande agglomération ou simplement dans un petit village dans nos territoires ruraux.
La loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite « loi ALUR », avait été votée pour relancer la construction, en particulier pour limiter les zonages où les coefficients d’occupation des sols (COS) pénalisaient considérablement les constructions nouvelles. Force est de constater que son application stricte dans nos villages de Vaucluse nuit à la beauté de nos sites.
Comme le dit fort justement le président des maires du département de Vaucluse, il faut impérativement revoir la loi ALUR, qui risque de conduire au massacre des territoires ruraux, car elle privilégie la concentration de l’habitat plutôt que la qualité esthétique de nos villages.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. N’importe quoi !
M. Alain Dufaut. Par ailleurs, le maire d’un village me disait récemment que l’on pouvait désormais construire sur un confetti. Je pense que tous deux ont raison.
La multiplication des lotissements autour de nos beaux villages de Provence, ainsi que leur densification excessive, dénature leur authenticité et réduit leur attrait touristique. On ne peut plus tolérer aux abords des magnifiques villages du Lubéron ou du Ventoux la même densité de construction que dans les banlieues de nos villes, c’est une évidence.
Très sincèrement, il me paraît urgent, dans les départements ruraux à vocation touristique, de redonner la main et la maîtrise des règles d’urbanisme aux élus locaux et de revenir à des COS de 0,10 ou de 0,20, afin d’empêcher un bétonnage massif et anarchique, lequel enlaidit les villages exceptionnels de notre ruralité.
Madame le ministre, quel est votre avis, sur ce sujet ? Il est selon moi absolument nécessaire de revoir la loi ALUR. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Appliquons-la, plutôt !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Les avis contradictoires sur ce sujet prouvent bien que la différenciation est absolument nécessaire !
M. Genest a évoqué la Datar. Celle-ci est née lorsque j’avais 13 ans – aujourd’hui, j’ai les cheveux blancs… La Datar a été créée à une époque où la France était en phase de reconstruction. On avait alors besoin de mettre en œuvre un peu partout les mêmes solutions, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui.
L’intervention de M. Dufaut montre bien que les règles d’urbanisme ne peuvent être les mêmes, bien sûr, dans les villages de Vaucluse, que je connais bien d’ailleurs, afin de ne pas gâcher les paysages, et dans d’autres territoires. Dans d’autres territoires, votre intervention, monsieur le sénateur, susciterait une levée de boucliers. Cela signifie que la réglementation en matière d’urbanisme doit être aux mains des collectivités territoriales, qui doivent rédiger des documents d’urbanisme en relation avec leur territoire.
S’il y a un certain nombre de blocages à l’échelon national… (M. Jean-Raymond Hugonet proteste.) Attendez, monsieur le sénateur, je n’ai pas fini ! J’ai été maire pendant vingt-cinq ans, je sais ce que c’est qu’un plan d’occupation des sols ou un plan local d’urbanisme intercommunal, j’en ai fait plusieurs. Je sais qu’ils relèvent des collectivités territoriales. (M. Jean-Raymond Hugonet s’exclame.)
Il nous faut étudier ce qui, dans le règlement national d’urbanisme – c’est de cela que vous parlez –, bloque son application dans les territoires.
Je comprends tout à fait vos propos, monsieur le sénateur, et je vous répète ce que j’ai dit au début de mon intervention : il faut pouvoir adapter les règles aux territoires et accorder des dérogations. (M. Jean-Marie Janssens et Mme Michèle Vullien applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Michel Savin.
M. Michel Savin. Madame la ministre, le plan d’action en faveur des territoires ruraux propose deux mesures afin de développer la pratique sportive. C’est une ambition que nous ne pouvons que saluer, même si elle est loin d’être suffisante.
Toutefois, le diable se cache souvent dans les détails. Vous proposez de permettre le recrutement mutualisé d’éducateurs sportifs polyvalents entre une commune ou une intercommunalité rurale et les acteurs de l’économie sociale et solidaire. Vous proposez également de renforcer le soutien aux clubs sportifs en milieu rural, notamment via le soutien aux équipements sportifs et aux associations en milieu rural.
Madame la ministre, vous souhaitez donc encourager les communes rurales à recruter du personnel qualifié. Malheureusement, nous savons tous que nombre d’entre elles connaissent de graves difficultés budgétaires, qui empêchent toute nouvelle dépense de fonctionnement. Quel soutien financier l’État compte-t-il apporter à ces communes afin qu’elles puissent créer de tels postes ?
Par ailleurs, je vous rappelle, madame la ministre, que le financement des équipements sportifs des territoires par l’Agence nationale du sport, l’ancien Centre national pour le développement du sport (CNDS), est en baisse cette année de 10 millions d’euros. Comment croire à vos paroles quand les actes du gouvernement auquel vous appartenez vont à leur encontre ?
M. Pierre Ouzoulias. Très bien !
M. Michel Savin. Enfin, les dispositifs en matière d’emploi sont trop souvent méconnus et inadaptés aux besoins des territoires.
Madame la ministre, le développement de la pratique sportive dans nos territoires est une nécessité, alors que la sédentarité est une problématique très lourde pour les générations futures.
D’autres propositions ont été formulées par les parlementaires, notamment ici au Sénat : soutien au mécénat, 1 % artistique et sportif, simplification des réglementations, développement de la pratique du sport à l’école. Quand le Gouvernement reprendra-t-il ces propositions ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, sachant que vous alliez m’interroger sur ce sujet, j’ai demandé à la ministre des sports de me donner quelques chiffres.
Le soutien à la rénovation et à la construction d’équipements sportifs au service des habitants des zones rurales est bien entendu une priorité.
Lors de son conseil d’administration du 9 décembre dernier, au cours duquel elle a entériné son budget pour l’année 2020, l’Agence du sport, malgré les contraintes budgétaires que vous avez évoquées, a souhaité maintenir son soutien aux équipements sportifs, à hauteur de 20 millions d’euros pour les équipements sportifs de niveau local, dont 5 millions d’euros pour les territoires. Il s’agit de permettre des investissements là où ils sont nécessaires. Le mouvement sportif et les collectivités territoriales ont souhaité mettre en place une co-gouvernance, afin de mettre en œuvre une déclinaison territoriale.
En 2019, 172 dossiers ont été traités par l’Agence nationale du sport. Au total, 133 projets ont été retenus dans les zones rurales, c’est-à-dire dans des communes classées en ZRR ou ayant signé un contrat de ruralité, pour un montant de 12 millions d’euros. Ces sommes viennent en complément des fonds d’intervention généralistes, que tout le monde connaît, c’est-à-dire la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR), et la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL).
Enfin, 49 millions d’euros seront affectés au soutien de 4 151 emplois d’éducateurs sportifs au sein des clubs. Il a été demandé aux délégués territoriaux de l’Agence de veiller à accompagner le recrutement des emplois prioritairement dans les territoires ruraux classés en ZRR et dans les quartiers relevant de la politique de la ville.
Tels sont les éléments précis que je tenais à vous apporter.