compte rendu intégral

Présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires :

Mme Agnès Canayer,

Mme Patricia Schillinger.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Questions d’actualité au Gouvernement

M. le président. Mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de M. le Premier ministre, occupé par quelques rendez-vous de dialogue… (Sourires.)

Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.

J’appelle chacun à être attentif à son temps de parole et au respect des uns et des autres. Ce n’est pas qu’une formule !

réforme des retraites (i)

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Laurence Cohen. Madame la ministre, après deux semaines de grèves et de manifestations, notamment celle d’hier, à l’appel de toutes les organisations syndicales, après les scandales qui ont éclaboussé votre ancien et éphémère secrétaire d’État, vous continuez à défendre l’indéfendable, en répétant que tout le monde sera gagnant avec votre projet de réforme des retraites. En réalité, dans tous les pays où le système de retraite par points a été mis en œuvre, l’ensemble du monde du travail a dû travailler plus longtemps pour gagner moins.

Vous essayez de monter les Françaises et les Français les uns contre les autres – régimes spéciaux contre régime général, jeunes contre vieux –, mais tout le monde a bien compris que votre pseudo-régime universel était une machine à fabriquer précarité et misère sociale.

Les manifestantes et manifestants d’hier sont autant de porte-voix pour démonter votre entreprise d’intox et d’enfumage, tout comme les associations féministes et les syndicalistes réunis lundi soir à la Maison des métallos pour s’élever contre votre argumentaire, selon lequel les femmes seront les grandes gagnantes, quand elles sont les premières perdantes.

Madame la ministre, la France est dans la rue, personne ne veut de votre néfaste projet, à part vos amis du Medef et de la haute finance.

Ma question est simple : quand allez-vous retirer votre réforme ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur des travées du groupe SOCR.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice Laurence Cohen, permettez-moi tout d’abord d’excuser l’absence d’Agnès Buzyn et du nouveau secrétaire d’État chargé des retraites, Laurent Pietraszewski, dont je me permets de saluer la nomination. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM.)

Pour commencer, le Gouvernement a bien conscience des conséquences pénibles de la grève sur notre territoire au quotidien. (Mme Éliane Assassi sesclaffe.) Nous savons que beaucoup de nos compatriotes doivent se lever tôt le matin pour aller travailler et qu’ils doivent faire face, en Île-de-France comme ailleurs, à des transports saturés. Soyez également convaincue que le Gouvernement s’attelle à ce que, à l’approche des fêtes de fin d’année, chacun puisse aller retrouver ses proches.

Mme Éliane Assassi. Éléments de langage !

M. Claude Raynal. La réponse !

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Le Premier ministre, la ministre des solidarités et de la santé et le secrétaire d’État en charge de la réforme des retraites rencontrent, en ce moment même, les partenaires sociaux. Demain, une réunion multilatérale, associant l’ensemble des organisations syndicales, se tiendra à Matignon.

Madame la sénatrice, nous avons engagé une réforme du système français de retraites pour le rendre universel.

Mme Éliane Assassi. Ça, on sait !

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Cela implique effectivement, sans dresser un seul Français contre un autre, la disparition des régimes spéciaux. Nous réformons parce que chaque régime a ses propres règles et parce que les Français n’ont pas tous les mêmes droits lorsqu’ils partent à la retraite.

Vous avez évoqué la situation des femmes. Comme vous le savez, une femme salariée du privé a droit à huit trimestres par enfant, quand une femme travaillant dans la fonction publique n’a droit qu’à deux trimestres.

Nous réformons aussi parce que nous voulons redonner de la confiance dans notre système de retraite. À cet égard, il nous faut redonner de la confiance dans le principe de solidarité intergénérationnelle. (Exclamations sur les travées des groupes SOCR et CRCE.)

Le système n’est plus adapté aux changements de métier. Il pénalise les personnes qui passent d’un statut à un autre. C’est un système fondé sur les statuts, et non sur les trajectoires individuelles de chacun de nos compatriotes.

M. David Assouline. Il ne vous reste que quelques secondes…

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Par exemple, je ne pense pas que vous soyez opposé au minimum contributif à 1 000 euros pour les Françaises et les Français qui n’ont jamais eu de droits – je pense notamment aux agriculteurs.

L’instauration du régime universel constituera un progrès vers plus de justice sociale.

Je vous le dis, madame la sénatrice, cette réforme des retraites est l’une des réformes du quinquennat qui porte le plus de progrès social ! (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM. – Huées et moqueries sur les travées des groupes SOCR et CRCE.)

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour la réplique.

Mme Laurence Cohen. Monsieur le secrétaire d’État, la nomination du nouveau « M. Retraites », qui a à son actif le licenciement d’une caissière d’Auchan pour quelques centimes d’euros, est loin d’apaiser l’inquiétude et la colère dans le pays.

Contrairement à ce que vous dites, les mobilisations sont largement soutenues par les Françaises et les Français, qui ne veulent sacrifier ni leurs vieux jours ni ceux de leurs enfants.

Quant à vos arguments comptables, ils sont nuls et non avenus. Le « pognon de dingue » existe : c’est l’explosion des revenus du capital, qui ne participe pas au financement des retraites. Qu’attendez-vous pour le taxer ? Qu’attendez-vous pour arrêter d’exonérer les cotisations patronales à hauteur de 66 milliards d’euros ? Qu’attendez-vous pour faire appliquer la loi en matière d’égalité salariale, ce qui rapporterait 11 millions d’euros à la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) ? Qu’attendez-vous pour faire sauter le verrou des 14 % du PIB…

M. le président. Il faut conclure !

Mme Laurence Cohen. … pour la part des dépenses consacrées aux retraites ?

Vous êtes responsable de la situation du pays. Il faut retirer ce projet, un point c’est tout ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur des travées du groupe SOCR.)

réforme des retraites (ii)

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour le groupe socialiste et républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.)

M. Jean-Louis Tourenne. Monsieur le secrétaire d’État Adrien Taquet, permettez-moi, pour commencer, une remarque incidente : ce n’est pas au Sénat qu’il faut venir plaider la cause des agriculteurs ! Voilà deux ans, nous avons voté ici, à l’unanimité, une augmentation de leur retraite, à 85 % du SMIC. (Applaudissements sur les travées des groupes SOCR, CRCE, Les Indépendants et Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

Nous avons un point d’accord : nous avons le meilleur système de retraites du monde. Il est encore perfectible, mais son financement serait assuré sur le long terme si vous cessiez d’y puiser.

Vous avez résolu de casser le système plutôt que de l’améliorer, avec pour conséquences inquiétudes, injustices et pauvreté, sans garantie réelle sur la valeur du point, sans précisions sur les 12 milliards d’euros pour les enseignants, sans correctifs pour les carrières erratiques des jeunes, les 900 000 chômeurs que vous allez fabriquer ou encore les carrières interrompues et des pensions de réversion à 62 ans au lieu de 55 – j’en oublie…

L’âge pivot, lui, sera lourd de conséquences, alors que la moyenne de vie en bonne santé est inférieure à cet âge. Au reste, il signifiera deux ans de galère de plus pour les 70 % d’inactifs.

Vous avez déclenché de la colère. Vous avez fait de la provocation. Vous avez choisi le mois de décembre, non sans arrière-pensée. Aussi porterez-vous la pleine responsabilité des désagréments qu’éprouveront nos concitoyens.

Vous exhortez à une trêve sans la souhaiter vraiment. En effet, quel geste faites-vous ? Il suffirait d’abandonner dès aujourd’hui la référence inopportune et punitive à l’âge pivot, de remettre sur le métier votre ouvrage, de le reprendre totalement, sans dogme sur le système, de parler vrai, d’associer les corps intermédiaires, d’écouter la population pour présenter un projet de justice et d’avenir, un projet digne de confiance – confiance que vous avez érodée et que bien peu vous accordent encore. Y êtes-vous prêts ? (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR et sur des travées du groupe CRCE.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Christelle Dubos, secrétaire dÉtat auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur Jean-Louis Tourenne, vous évoquez la solidarité. Depuis le début, c’est bien le ministère des solidarités et de la santé qui porte cette réforme de justice. (Marques dironie sur les travées des groupes SOCR et CRCE.)

Mme Éliane Assassi. C’est dit avec tellement de conviction…

Mme Christelle Dubos, secrétaire dÉtat. Le projet de réforme est solide et cohérent. Il a été nourri par un travail intense de concertation avec l’ensemble des organisations syndicales et patronales, mais aussi avec les citoyens.

M. Rachid Temal. Ils sont dans la rue !

Mme Christelle Dubos, secrétaire dÉtat. D’ailleurs, cette concertation se poursuit encore cette semaine. Elle a lieu en ce moment même.

Ce qui compte aujourd’hui, c’est la construction et le dialogue avec les partenaires sociaux,…

M. Rachid Temal. Vous ne dialoguez qu’avec le Medef !

Mme Christelle Dubos, secrétaire dÉtat. … puis la présentation du projet au Parlement et le travail avec les parlementaires.

Le Gouvernement ne réalise pas d’économies dans la réforme des retraites.

M. Rachid Temal. Et les enseignants ?

Mme Christelle Dubos, secrétaire dÉtat. Il n’y a aucune mesure budgétaire ni en 2020 ni en 2021. Les mesures de redistribution entreront en vigueur dès 2022.

Permettez-moi de revenir sur l’exemple de personnes que nous entendons peu, mais dont je m’occupe personnellement, en particulier dans le cadre de la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté : les près de 2 millions de bénéficiaires du RSA, dont la moitié sont entrés dans le dispositif voilà plus de quatre ans. Ces personnes ont arrêté de penser qu’elles auraient droit un jour à une retraite.

M. Martial Bourquin. C’était possible avec l’ancien système !

Mme Christelle Dubos, secrétaire dÉtat. C’est notre réforme qui leur permettra d’accéder à une retraite, parce que chaque point, chaque heure travaillée comptera. Que l’on soit en insertion professionnelle, en insertion par l’activité économique, que l’on reprenne un travail ou que l’on travaille à temps partiel, chaque temps travaillé correspondra à un droit à la retraite pour plus tard.

Nous travaillons avec ces personnes. Nous travaillons aussi pour une réforme de justice sociale.

Monsieur le sénateur, une maman qui a élevé seule deux enfants, qui a eu une carrière hachée, qui s’est arrêtée de travailler durant ses congés de maternité devra travailler jusqu’à l’âge de 67 ans. C’est le résultat du système de décote que vous avez mis en place. (Protestations sur les travées du groupe SOCR.)

Ce sont ces publics que nous prenons en compte dans la réforme. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM et sur des travées des groupes UC et RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour la réplique.

M. Jean-Louis Tourenne. « Ce serait assez hypocrite de décaler l’âge légal. » Ce n’est pas moi qui le dis, madame la secrétaire d’État : c’est le Président de la République ! (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.)

M. Martial Bourquin. Bravo !

systèmes d’alerte et d’information des populations

M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants et sur des travées du groupe LaREM.)

M. Joël Guerriau. Monsieur le ministre, que devons-nous faire lorsqu’une sirène d’urgence se déclenche dans nos rues ? En 2013, cette question a été posée aux Français : 78 % d’entre eux ne le savaient pas.

Or, le 26 septembre dernier, une alarme se déclenchait à Rouen et dans onze communes limitrophes à la suite de l’incendie de l’usine Lubrizol, que nous connaissons bien. Deux mois plus tard, c’est à Nice et à Cannes qu’une alarme s’est déclenchée, sans que nul sache quoi faire.

Une directive européenne définit la modernisation de nos systèmes d’alarme comme un objectif pour juin 2022.

Les technologies sont nombreuses en la matière. Le SMS géolocalisé permet notamment de toucher des personnes concernées dans des zones à risques, sur un périmètre prédéfini, en les alertant individuellement, non seulement sur le phénomène qui vient de se produire et dont elles doivent se préserver, mais également sur les mesures à prendre. C’est une excellente chose.

Nos voisins belges ont pris l’initiative de mettre en place un système intelligent, qui permet de répondre à cette exigence et qui fonctionne réellement. Ce système permet de savoir très exactement combien de personnes ont été informées, combien doivent l’être encore et de les relancer si besoin.

Demain, que ferions-nous en cas d’attaques terroristes, monsieur le ministre ? Quelles sont vos intentions pour moderniser notre réseau d’alerte nationale ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants et sur des travées des groupes RDSE et LaREM.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur.

M. Laurent Nunez, secrétaire dÉtat auprès du ministre de lintérieur. Monsieur le sénateur Joël Guerriau, vous posez une question extrêmement importante, qui est celle des systèmes d’alerte dans notre pays.

Comme vous le savez, il existe actuellement plusieurs modes d’alerte.

Près de 2 000 sirènes sont déployées sur l’ensemble du territoire – il y en aura 2 500 à compter de 2021. D’autres modes d’alerte utilisent les réseaux sociaux et les voies médiatiques, radio et télévision. Nous utilisons plusieurs canaux, de manière à pouvoir toucher le plus grand nombre de populations, ce qui nous permet de rester réactifs en cas de défaillance.

Effectivement, la directive européenne sur les communications électroniques que vous évoquez prévoit, à l’article 110, la possibilité de développer des alertes par SMS. Pour faire simple, il s’agit de SMS ciblés en fonction des zones de danger, afin de pouvoir contacter les bonnes populations.

Nous travaillons bien évidemment à la transposition de cette directive. Au début de l’année 2020, nous pourrons donner de premières orientations sur le déploiement de ce nouveau mode d’alerte par message électronique. Les pouvoirs publics pourront s’adresser aux opérateurs de téléphonie mobile pour diffuser ces messages.

Mais le plus important, comme vous l’avez souligné, monsieur le sénateur, est la conduite à tenir en cas d’alerte. Il est désormais démontré que le système d’alerte n’est pas suffisant pour déterminer cette conduite en amont : il faut en passer par des actions de sensibilisation et d’information en direction de nos citoyens, qui doivent connaître la conduite à tenir en fonction de l’endroit où ils se trouvent et de la nature du danger, qui peut être naturel ou technologique. Nous y travaillons. Les récentes catastrophes naturelles ont montré que nous devions faire plus et mieux.

Bien évidemment, dans le cadre des travaux que nous avons engagés sur le déploiement du nouveau système d’alerte, nous travaillerons sur ces actions de sensibilisation et d’information et, surtout, j’y insiste, sur les exercices à conduire, qui sont absolument fondamentaux et auxquels s’attachent l’ensemble des préfets de ce pays. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM et sur des travées du groupe RDSE.)

situation du logement en france

M. le président. La parole est à M. Marc-Philippe Daubresse, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Marc-Philippe Daubresse. Monsieur le ministre chargé de la ville et du logement, lors de son examen devant le Parlement, je vous ai interpellé sur de nombreuses dispositions de la loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ÉLAN) qui allaient conduire à une grave crise du logement et du bâtiment en 2021. Je ne m’étais pas trompé, monsieur le ministre : en cette fin d’année, le marché du logement neuf est durablement affecté. Le nombre de logements offerts à la vente baisse de 14 %. Le stock est inférieur à neuf mois. La délivrance des permis de construire dans le logement collectif chute de 25 %. En conséquence, les prix augmentent de 4,7 %. La Fédération des promoteurs immobiliers parle d’un immense gâchis.

Plus grave, pour les logements sociaux, la baisse des APL et l’injuste réduction de loyer de solidarité ont fait chuter de 12 % la consommation des agréments de financement, qui sont les permis de construire de demain et les ouvertures de chantiers d’après-demain, par rapport aux chiffres de 2016.

Pour ce qui concerne l’accession à la propriété, la fin programmée du prêt à taux zéro (PTZ) sous sa forme actuelle, provisoirement sauvé par la majorité sénatoriale, entraînera une nouvelle baisse de la construction.

Si vous ne changez rien, nous aurons mécaniquement perdu 50 000 constructions en trois ans. Et les nuages s’accumulent : le crédit immobilier va devenir de plus en plus rare, conformément au souhait de la Banque de France, et les prescriptions environnementales, de plus en plus drastiques, aboutissent à des plans locaux d’urbanisme (PLU) qui suppriment des centaines d’hectares de construction.

Bref, les années 2020 à 2022 vont marquer un décrochage de la construction. On n’attend pas plus de 385 000 mises en chantier en 2021. Du temps du plan Borloo, que j’ai eu l’honneur de mettre en œuvre, il y en avait 490 000 ! Or 100 000 constructions de moins, c’est 250 000 emplois de moins dans le bâtiment.

Monsieur le ministre, ma question est simple : envisagez-vous un plan de relance pour faire face à ce problème, comme nous l’avons fait avec succès en 2008 ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre chargé de la ville et du logement.

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement. Monsieur le sénateur Marc-Philippe Daubresse, les chiffres que vous venez d’évoquer ne sont évidemment pas satisfaisants. Aujourd’hui, il faut accroître les efforts pour relancer la construction.

En 2018, on dénombrait environ 420 000 logements commencés. En 2017, il y en avait 429 000. Nous ne disposons pas encore des chiffres de 2019 : comme vous le savez, nous les connaîtrons d’ici à la fin du mois de janvier prochain.

M. Philippe Dallier. Ils ne seront pas bons !

M. Julien Denormandie, ministre. Je veux insister sur plusieurs points.

D’abord, la construction reste forte malgré tout, avec, en moyenne, plus de 35 000 logements commencés supplémentaires chaque année par rapport aux cinq dernières années.

Ensuite, non seulement le nombre de logements s’est stabilisé, mais il a commencé à augmenter au troisième trimestre de 2019 par rapport au trimestre précédent. Je parle bien là des logements commencés, et non des autorisations – je tiens à être parfaitement transparent.

Dans ce contexte, que devons-nous faire ? Au moins trois points me paraissent essentiels.

Premièrement, il faut une stabilité fiscale, conformément au souhait des parlementaires. Cela répond à la question que vous avez posée.

Deuxièmement, nous devons mettre en œuvre le plan de relance du logement social dont nous sommes convenus avec l’ensemble des bailleurs sociaux et qui a été signé sous l’égide du Premier ministre en avril dernier. Ce plan se couple avec le plan de relance de 9 milliards d’euros qui a été négocié avec les partenaires sociaux d’Action Logement.

Troisièmement, enfin, il faut une mise en œuvre accélérée de la loi ÉLAN, dont je souhaite citer quelques dispositions.

Sur le sujet des recours, sur lequel vous avez travaillé, monsieur le sénateur, nous avons permis des avancées notables.

S’agissant de la réécriture du code de la construction et de l’habitation, j’aurai l’honneur d’en présenter la nouvelle rédaction devant le conseil des ministres au cours des prochaines semaines. Ce travail équivaudra à arracher une page du code sur cinq, de manière à libérer la construction.

Enfin, la politique du logement sera caractérisée par une plus grande territorialisation, ce qui permettra sa relance. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM.)

M. le président. La parole est à M. Marc-Philippe Daubresse, pour la réplique.

M. Marc-Philippe Daubresse. Monsieur le ministre, vous ne m’avez pas rassuré. Vous engagez une série d’actions. C’est très bien ! Toutefois, il ne faut plus toucher au PTZ. Si vous continuez sur cette voie, vous allez dans le mur.

Le plan d’Action Logement est une bonne mesure, mais il est insuffisant pour faire face aux réalités dans nos agglomérations. Il faudra aller plus loin.

M. le président. Veuillez conclure.

M. Marc-Philippe Daubresse. Les aides à la construction sont elles aussi insuffisantes…

M. le président. Il faut conclure !

M. Marc-Philippe Daubresse. Si vous n’en faites pas plus, nous klaxonnerons, parce que vous irez dans le mur ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

menaces de nouvelles coupures électriques sauvages

M. le président. La parole est à M. Alain Cazabonne, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Alain Cazabonne. Ma question s’adressait à Mme Élisabeth Borne, ministre de la transition écologique et solidaire.

Madame la ministre, hier, le mouvement de grève a franchi un cap. En effet, la CGT de Réseau de transport d’électricité (RTE) a revendiqué des coupures d’électricité à travers toute la France et a menacé de récidiver durant les fêtes. Une telle attitude est inacceptable et nous la condamnons vivement.

Près de 170 000 foyers, des quartiers entiers, ont été impactés dans toute la France : 40 000 à Lyon, 40 000 à Orléans et à Nantes et près de 50 000 dans mon département de la Gironde. Au-delà des particuliers, ce sont aussi des services publics indispensables qui ont parfois été bloqués, comme des crèches, des hôpitaux ou des services administratifs. Je pense aussi aux commerçants, qui subissent une double peine, après les manifestations des « gilets jaunes ».

Madame la ministre, outre la gêne qu’elles occasionnent, ces coupures sont manifestement illégales. La direction de RTE a annoncé que des plaintes avaient été déposées et que des sanctions disciplinaires seraient mises en œuvre.

Pour autant, le syndicat semble indiquer qu’il n’hésiterait pas à reconduire des actions du même type, en agitant la menace de coupures plus importantes.

Madame la ministre, mes questions sont très simples : quelles actions le Gouvernement compte-t-il entreprendre afin que ces actes soient non seulement condamnés, mais également empêchés ? Quel discours de responsabilité adressez-vous aux soi-disant défenseurs du service public de l’électricité ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées des groupes Les Indépendants et LaREM.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur Alain Cazabonne, plusieurs coupures d’électricité ont effectivement été signalées à la suite d’agissements volontaires de la part de personnes cagoulées qui se sont introduites dans des postes électriques.

Comme vous l’avez dit, ces coupures ont eu lieu essentiellement à Nantes, à Nice, à Bordeaux, à Lyon et à Orléans. Elles ont affecté plusieurs dizaines de milliers de personnes et de nombreux établissements, dont cinq cliniques et une caserne de pompiers à Lyon. Elles ont aussi provoqué des dégâts dans des entreprises locales – je pense, par exemple, à l’intoxication d’employés liée à la coupure électrique d’un four industriel, à Béziers – et une mise hors service du réseau des feux tricolores à Perpignan, ce qui a évidemment mis en danger la population.

Si l’électricité n’a été coupée que quelques secondes dans la plupart des installations et des habitations, grâce à la redondance de notre réseau, plusieurs milliers de personnes ont subi des coupures d’une durée plus longue, de plusieurs minutes à plusieurs heures. Les conséquences de ces actes pourraient être dramatiques. Ce n’est pas admissible. Je condamne donc avec la plus grande fermeté les coupures d’électricité volontaires survenues ces dernières heures sur le réseau électrique.

Si, bien évidemment, à l’instar de l’ensemble des membres du Gouvernement, je respecte le droit de grève, constitutionnellement garanti, celui-ci ne saurait justifier de telles actions. Ces agissements sont heureusement le fait d’une petite minorité de grévistes, qui ne sont pas toujours salariés des opérateurs eux-mêmes et que je ne confonds pas avec l’immense majorité des agents du service public, qui sont attachés à leur mission. Ils ne peuvent pas rester sans suite et appellent la plus grande sévérité.

La ministre Élisabeth Borne a d’ailleurs demandé à Enedis et à RTE que chacun de ces actes fasse l’objet d’une plainte systématique et enclenche les procédures disciplinaires nécessaires. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM.)

M. le président. La parole est à M. Alain Cazabonne, pour la réplique.

M. Alain Cazabonne. J’y insiste, au nom du groupe Union Centriste, il ne s’agit pas de contester le droit de grève. Il s’agit de dénoncer l’utilisation du matériel par des personnes qui portent atteinte à la sécurité des citoyens.

Je veux vraiment attirer votre attention sur ce point, madame la secrétaire d’État : les événements qui sont survenus sont graves. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

accompagnement des ménages dans leurs travaux de rénovation énergétique

M. le président. La parole est à M. André Gattolin, pour le groupe La République En Marche. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM.)