M. le président. La parole est à M. Laurent Lafon. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Laurent Lafon. Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission de la culture, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, depuis plusieurs semaines, le consentement à l’impôt est sérieusement remis en cause : dans cette période de fortes tensions sociales, la discussion générale sur le troisième poste budgétaire de la Nation est évidemment un moment particulier de l’examen de ce projet de loi de finances.
Le budget 2019 a un mérite qu’il faut saluer : il tient compte de la très forte pression démographique sur le système universitaire français. Vous le savez, d’ici à 2025, la population étudiante aura augmenté de 21 % en l’espace de dix ans seulement. Pourtant, pendant des années, les moyens alloués à l’enseignement supérieur avaient été décorrélés du flux de nouveaux étudiants.
Après une progression de 2,7 % l’an passé, l’évolution globale des crédits de paiement à hauteur de 166 millions d’euros cette année va donc dans le bon sens. La pérennisation des financements alloués au titre de l’indemnité compensatrice de la CSG constitue, à ce titre, une bonne nouvelle.
L’augmentation des crédits ne règle pas tous les problèmes pour autant. Pour le groupe Union Centriste, la priorité des années à venir doit être la lutte contre l’échec universitaire. Parcoursup a le mérite d’apporter des premières réponses dans la lutte contre l’allongement du temps écoulé entre l’obtention du bac et celle de la licence. La France reste malheureusement l’un des rares pays de l’Union européenne où moins de 50 % des étudiants valident leur licence au bout de quatre ans, contre plus de 75 % en Allemagne ou aux Pays-Bas.
Les dizaines de milliers d’années d’étude perdues chaque année par les jeunes dans le supérieur sont évidemment un gâchis humain, mais aussi un gâchis d’argent public. En raccourcissant la durée d’obtention des licences à trois ans et demi, notre pays pourrait accueillir les futures générations d’étudiants à moyens constants, sans dépenser un seul centime de plus. Les dispositifs d’accompagnement « oui, si » doivent ainsi être fortement encouragés, notamment sur le plan budgétaire : nous y veillerons attentivement. Les expérimentations menées par certaines universités – je pense en particulier à Paris-Descartes – sur les années propédeutiques méritent également d’être soutenues.
Ce raisonnement nous rappelle que la hausse des crédits de paiement n’est pas une fin en soin. La tentation d’évaluer le budget de l’enseignement supérieur par un prisme purement comptable nous a fait oublier qu’un budget en hausse n’est pas nécessairement un bon budget. Méfions-nous de l’« effet cliquet » qui nous pousse à saluer la croissance perpétuelle des nouvelles dépenses sans jamais nous interroger sur la nature des dépenses passées reconduites.
La légitimité du financement, essentiellement public, de l’enseignement supérieur français est une exception occidentale qui dépendra directement des performances et des réponses que cet enseignement apporte à la société française. Un euro dépensé pour l’enseignement supérieur est-il un euro systématiquement utile ? Quelle insertion professionnelle garantit-il pour les jeunes ? Permet-il de répondre aux besoins de l’économie et aux qualifications d’avenir ? Voilà les vraies questions que le Gouvernement doit se poser.
À ce titre, le Sénat interpelle l’État depuis plusieurs années sur la permanence de nombreux archaïsmes, comme la procédure de qualification du Conseil national des universités, le CNU, coûteuse et chronophage. Surtout, l’État ne peut plus éluder aucune réflexion majeure comme l’est celle de l’offre de formation.
Notre groupe partage les interrogations du rapporteur pour avis de la commission de la culture sur la pérennité des filières dans lesquelles sont constatées des places vacantes. De plus, vous l’avez reconnu en commission, madame la ministre, la demande insuffisante des jeunes générations pour les filières scientifiques nous fait défaut : il y a une révolution culturelle à opérer et à construire avec le ministère de l’éducation nationale.
Cette nécessité de réfléchir très attentivement aux filières que la puissance publique privilégie et soutient est rendue d’autant plus nécessaire que les besoins de l’enseignement supérieur seront exponentiels dans les années à venir. Le comité pour la stratégie nationale de l’enseignement supérieur a évalué le besoin de financement à 1 milliard d’euros supplémentaires chaque année d’ici à 2020 ! Ailleurs dans le monde, des moyens colossaux sont mobilisés. À quelques kilomètres de notre frontière, à l’École polytechnique fédérale de Lausanne, les post-doctorants bénéficient d’un crédit d’installation dépassant parfois le million d’euros.
Ces chiffres donnent le vertige : alors que l’argent public se fait rare, que les prélèvements obligatoires sont déjà excessifs, que le Gouvernement actuel n’a aucune stratégie efficace pour réduire notre niveau de dépenses publiques, comment allons-nous financer un modèle universitaire français à la hauteur du rang que notre pays est en droit d’ambitionner ?
Le Gouvernement a décidé de baisser de 8 % les droits de scolarité en licence cette année, après trois années de gel : pouvons-nous vraiment, madame la ministre, laisser nos universités se développer sans ressources propres significatives ? Ces questions imposent des choix forts, bousculant les équilibres établis. De ce point de vue, nous ne sommes pas opposés, par principe, à une augmentation des tarifs des étudiants étrangers, à condition, bien entendu, qu’elle s’accompagne d’une politique ambitieuse pour l’octroi de bourses.
En matière de recherche, nous nous réjouissons que ses crédits augmentent de 330 millions d’euros par rapport à 2018, et de près de 830 millions par rapport à 2017.
Pour le groupe Union Centriste, la revalorisation des chercheurs est une question essentielle. En plus d’assurer la formation de nos étudiants, les chercheurs sont ceux qui permettent, par les avancées scientifiques sur lesquelles ils travaillent, de trouver des solutions aux enjeux écologiques, économiques, sociaux, technologiques de demain. Il est donc essentiel pour notre pays que cette matière grise puisse exercer en France dans de bonnes conditions, et ce sur le long terme. Nous ne le répéterons jamais assez : un pays attractif pour les chercheurs, notamment internationaux, est un gage d’attractivité global pour l’avenir.
Le prix Nobel de médecine, François Jacob, soulignait très justement : « Longtemps, la puissance d’une nation s’est mesurée à celle de son armée. Aujourd’hui, elle s’évalue plutôt à son potentiel scientifique. » Garantir et développer le potentiel scientifique français, voilà le défi à relever pour les années à venir.
Nous voterons donc les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », car le groupe Union Centriste considère que ce budget est une première étape pour y parvenir, à condition d’assumer les choix courageux qui nous font face désormais. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Procaccia. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes réunis aujourd’hui pour nous prononcer sur le budget alloué à la recherche en 2019.
Pour ma part, je préfère commencer mon propos par des félicitations : félicitations à l’égard des chercheurs français, qui font partie des meilleurs du monde et sont reconnus au travers de nos 36 prix Nobel, dont notre lauréat en physique cette année, Gérard Mourou.
Il y a juste une semaine, six ans après Curiosity, la sonde InSight s’est posée avec succès sur Mars : exploit de la NASA, mais aussi des organismes et chercheurs français, puisque l’instrument principal qui va étudier la structure interne de la planète, le sismographe SEIS, est français, et même val-de-marnais.
C’est dire l’excellence de nos chercheurs, puisque la France consacre seulement 2,2 % du produit intérieur brut à la recherche et au développement, très en deçà de l’objectif de 3 % de la stratégie de Lisbonne.
En période de coupes budgétaires, le groupe Les Républicains ne fera pas partie de ceux qui voient la coupe à moitié vide, et nous nous réjouissons que ce budget soit en hausse même si, pour être plus exacts, le chiffre annoncé devrait tenir compte de l’inflation.
Mon propos se concentrera sur trois programmes principaux : le spatial, l’Agence nationale de la recherche, l’ANR, et l’énergie.
Vous avez décidé, madame la ministre, de respecter les engagements budgétaires internationaux de la France à l’égard de l’Agence spatiale européenne, l’ESA. Il me paraît difficile de faire autrement. Notre accès à l’espace, les lanceurs, les satellites ne peuvent se concevoir et se développer que dans cette configuration. Je ne peux que vous demander une nouvelle fois, comme nous l’avions déjà fait avec Bruno Sido en 2012 dans notre rapport sur la politique spatiale européenne, que soit mise en place, dans les faits, une réelle préférence communautaire. L’Europe est la seule puissance spatiale au monde assez masochiste pour ne pas confier ses lanceurs et ses lancements aux entreprises qu’elle finance. Compte tenu de l’importance de la contribution de la France au budget de l’Agence spatiale européenne, je souhaite, madame la ministre, que vous arriviez à faire évoluer les choses.
Je reviens sur l’une de mes anciennes préoccupations : les débris spatiaux. Depuis le premier Spoutnik, voilà plus de soixante ans, les missions spatiales se sont multipliées ainsi que les débris et les risques de collision avec des satellites devenus indispensables à la vie quotidienne de plus de 7 milliards d’êtres humains, même si ces derniers n’en sont pas toujours conscients. Je me félicite de ce que l’ESA ait enfin lancé un programme « Clean Space ». J’aimerais que vous me fassiez savoir si des chercheurs et entreprises français y participent.
Madame la ministre, eu égard à l’importance de la recherche spatiale, y compris sur le plan budgétaire, et à l’étendue de vos compétences, je réitère la demande formulée l’année dernière, même si elle vous avait fait sourire : que votre ministère accole enfin le terme « espace » à sa dénomination.
Passons, maintenant, à l’ANR, qui avait été bien malmenée dans le précédent gouvernement et envers laquelle vous tenez des engagements pris l’an passé. La revalorisation de ses crédits de 34 millions d’euros devrait permettre de faire remonter le taux de sélection des projets présentés par les équipes de chercheurs. Avec 14 % de projets en 2017, on est encore très loin des 20 % de 2012. Certains de mes collègues, dont le rapporteur spécial Jean-François Rapin, demandent que sa dotation soit un peu plus importante pour permettre le financement de plus de projets.
Pour ma part, je continue à recevoir des mails de chercheurs qui estiment que l’ANR constitue un échelon administratif inutile. En tous cas, il est certain que la procédure de sélection est lourde et complexe. J’ai lu, sur le site de l’ANR, que « des évolutions ont été apportées à l’appel à projets 2019 afin d’améliorer sa compréhension et optimiser les modalités de dépôts des dossiers et d’évaluation ».
Comptez-vous, madame la ministre, évaluer ce nouveau processus ? Seconde question : savez-vous si des projets portant sur le chlordécone ont été sélectionnés l’an passé ? Les Antilles ne pourront sortir de cette pollution que si les recherches aboutissent, et je suis persuadée que vous en êtes convaincue.
Compte tenu du temps qui m’est imparti, je dirai quelques mots seulement sur le programme 190 « Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables », qui devrait être le levier de la transition énergétique.
Ce programme est décevant : il est en baisse de 7 millions d’euros en crédits de paiement, alors que l’on sait bien que les opérations de démantèlement et d’assainissement des installations nucléaires à l’arrêt sont prioritaires, d’autant plus prioritaires que, voilà quelques jours, le Président de la République vient de décider de l’arrêt de nouveaux réacteurs, alors qu’il s’agit d’une production décarbonée. La recherche française doit pouvoir avancer sur les nouvelles technologies, comme celle de l’hydrogène.
Le groupe Les Républicains votera ce budget, d’autant qu’il se réjouit du fléchage des crédits sur la recherche contre les cancers pédiatriques, qui n’ont pas été évoqués jusqu’à présent. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe La République En Marche.)
M. le président. La parole est à M. Max Brisson.
M. Max Brisson. Je veux d’abord saluer, madame la ministre, le choix que vous avez fait de rompre avec la philosophie du précédent quinquennat. Qu’on se le rappelle : baisse des crédits affectés à la recherche, mise en place d’une sélection par tirage au sort, création d’allocations sans contreparties, à l’image de l’aide à la recherche du premier emploi ; c’étaient de mauvaises mesures, qui ternissaient l’image et l’efficacité de nos politiques en matière de recherche et d’enseignement supérieur. Assurément, ces choix questionnables et polémiques sont derrière nous.
L’augmentation des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » va donc dans le bon sens, avec, au total, plus de 500 millions d’euros supplémentaires, essentiellement au bénéfice de la recherche, comme l’a dit le rapporteur spécial Jean-François Rapin. L’enseignement supérieur continuera en effet de connaître, lui, une évolution inférieure à celle du budget général de l’État, et surtout à celle des effectifs d’étudiants.
L’ambition de montée en puissance de l’enseignement supérieur ne se retrouve donc pas suffisamment dans ce budget ; le plafonnement de la CVEC à 95 millions d’euros en est l’illustration. Pour l’instant, vous n’avez répondu que très partiellement, madame la ministre, à la demande pourtant insistante du rapporteur pour avis de notre commission de la culture, Stéphane Piednoir.
Je suis donc au regret de constater que, en matière d’enseignement supérieur, la hausse des crédits vient plutôt donner de l’air à des programmes asphyxiés, colmater des brèches déjà béantes et renforcer certains axes, sans que se dégage une politique globale.
Deux chantiers me semblent pourtant essentiels.
Le premier est de savoir comment rendre la recherche plus attractive. Comme l’a souligné la rapporteur pour avis de notre commission, Laure Darcos, la rémunération nette d’un jeune chercheur correspond à peine à 1,8 fois le SMIC, et elle atteint péniblement 2 800 euros au bout de dix ans de carrière. Nous serons donc tous d’accord, je pense, pour dire que cela porte préjudice à l’attrait et au dynamisme de la recherche dans notre pays.
Vous nous proposez, certes, d’inscrire 130 millions d’euros de crédits supplémentaires : ils permettront essentiellement d’améliorer le déroulement des carrières, de déployer le protocole PPCR, de financer le glissement vieillesse-technicité, mais ils ne s’attaqueront pas à la mise à plat du régime indemnitaire des enseignants-chercheurs.
Le second chantier est, bien entendu, la lutte contre l’échec massif des étudiants dans les premières années de leur parcours universitaire. C’est le cancer de l’enseignement supérieur et de notre société ; il prouve que l’université peine à répondre à la massification continue et à préserver cette belle spécificité française du faible coût de l’enseignement supérieur.
Notre collègue Stéphane Piednoir a rappelé que le taux de réussite en licence n’était que de 28 % et que le Gouvernement envisageait d’atteindre péniblement 30 % en 2020. Je me demande si ces maigres objectifs n’avouent pas un manque de volonté politique. Il en est de même avec le plan Étudiants : 206 millions d’euros ont été annoncés, mais moins de la moitié seront effectivement affectés au plan, puisqu’une partie servira à payer le GVT et à compenser la hausse de la CSG.
Madame la ministre, votre budget devrait porter l’ambition de renvoyer aux limbes de l’histoire ces taux d’échecs massifs qui caractérisent de nombreuses filières de l’université française et de l’enseignement supérieur. Pour cela, il faut allouer des moyens importants à la réussite des étudiants, diversifier les modes de financement de l’université, affiner le dispositif Parcoursup, donner toute sa place aux établissements privés d’enseignement supérieur, mais surtout travailler – et je crois que c’est la clé – à l’articulation entre le lycée et la licence, entre le lycée et l’enseignement supérieur.
Or, depuis deux ans, nous constatons au contraire que les deux ministères travaillent en parallèle plutôt qu’en partenariat. Ainsi, la loi ORE a été lancée avant la réforme du baccalauréat, dans un calendrier où l’aval se désintéresse de l’amont et où l’amont ne cherche pas à comprendre l’aval. Le défi est bien, et vous ne l’abordez pas de manière frontale : c’est celui du « bac-3/bac+3 ».
Certes, comme les membres du groupe Les Républicains, je voterai les crédits de cette mission, enrichis des amendements de nos commissions. Toutefois, je crois qu’il est urgent de se retrousser les manches et de s’attaquer aux problèmes structurels de l’échec et du décrochage qui marquent l’enseignement supérieur, et de travailler pleinement aux liens entre le lycée et la licence, entre le secondaire et l’enseignement supérieur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Lherbier. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)
Mme Brigitte Lherbier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, voilà plus d’un siècle déjà, le Premier ministre anglais Benjamin Disraeli affirmait : « De l’éducation de son peuple dépend le destin d’un pays. »
Universitaire, j’ai pu, pendant toute ma vie professionnelle, constater combien notre jeunesse a du potentiel dès qu’on lui fait confiance, dès qu’on lui donne les moyens de ses ambitions.
J’aime à imaginer que de grandes figures comme Curie, Lavoisier, Buffon, Pasteur, Pascal, Ampère, Poincaré et tant d’autres nous regardent ce soir, en espérant que la France puisse retrouver son rang de pionnier dans l’éducation et la recherche scientifique : par le truchement de coupes budgétaires, son rôle en la matière s’est inexorablement terni.
Je tiens donc à saluer le fait que la mission « Recherche et enseignement supérieur » est la troisième mission du budget général de l’État, avec 28,1 milliards d’euros, somme en augmentation de 1,8 %.
Pour ce qui concerne la recherche, le programme 193, « Recherche spatiale », voit son budget en hausse de 205 millions d’euros. Le programme 172, « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires », est quant à lui rehaussé de 171 millions d’euros. Je salue l’effort fait par le Gouvernement. Mais je dois aussi relever certaines urgences qui n’ont pas été prises en compte par l’exécutif.
Ainsi, lors de son recrutement, un jeune chercheur perçoit une rémunération nette mensuelle de 2 191 euros, soit environ 1,8 fois le SMIC. Après dix ans, cette rémunération s’élève à 2 885 euros. Il faut savoir que, aux États-Unis, chimistes, biologistes et physiciens gagnent en moyenne 136 000 dollars par an ! Si des salaires plus bas existent évidemment, ce montant est tout de même bien au-dessus ce que nous offrons actuellement à nos chercheurs.
Dans un tout autre domaine, je me dois d’appeler l’attention sur le lancement de la ligne 18 du métro pour désenclaver Saclay. Je rappelle que ce site représente 14 établissements, 63 000 étudiants, 9 000 chercheurs et enseignants-chercheurs, 135 000 publications par an et près de 15 % de la recherche en France. Sachant que la population du campus devrait passer de 31 000 à 46 000 jeunes d’ici à 2022, ce désenclavement devient urgent, non seulement pour les conditions de travail et d’études sur place, mais surtout pour le rayonnement de ce pôle d’excellence scientifique tricolore.
Pour finir, je souligne que le déroulement de Parcoursup, s’il a été moins chaotique que prévu, reste à améliorer sur plusieurs points. Je pense à l’amélioration des informations données aux candidats, au raccourcissement du calendrier, ou encore à la mise en place d’un répondeur automatique pour les élèves et parents en quête d’informations. Cela étant, si un point doit réellement être amélioré de toute urgence, c’est la transparence des critères de classement des dossiers reçus. En effet, le risque principal que nous devons éviter, c’est une fracture, tant géographique que sociale, dans les établissements d’enseignement supérieur. Une telle situation irait à l’encontre des principes mêmes de notre République.
M. Pierre Ouzoulias. Tout à fait !
Mme Brigitte Lherbier. Madame la ministre, mes chers collègues, la commission a fait un excellent travail, et il convient de le souligner. Suivant son avis, les élus de notre groupe ont décidé de voter pour le budget de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».
C’est du bon sens que de mettre en avant la recherche et l’enseignement de notre pays. Mais le Gouvernement devra prendre en compte nos recommandations et nos réserves ; nous les avons formulées, non pas pour le plaisir de critiquer, mais bien pour garantir à notre pays un rayonnement éducatif et scientifique à la hauteur de son histoire et de ses ambitions. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre. (M. François Patriat applaudit.)
Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, madame la présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, messieurs les rapporteurs spéciaux, mesdames, messieurs les rapporteurs pour avis, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, tenir notre rang dans la compétition internationale, jouer un rôle déterminant dans l’élucidation des grandes questions scientifiques, favoriser l’innovation, mieux former et mieux diplômer nos étudiants sont les piliers de mon engagement en tant que ministre.
Les crédits de la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur », ou MIRES, pour 2019 sont la traduction budgétaire de cet engagement, défendu par l’ensemble du Gouvernement depuis plus de dix-huit mois. L’objectif, affiché dans la loi de programmation des finances publiques, d’une MIRES dépassant les 28 milliards d’euros à l’horizon 2020 est pour l’heure respecté.
Le budget que j’ai l’honneur de vous présenter a vu ses crédits augmenter de 5,3 % en deux ans, soit 1,3 milliard d’euros supplémentaires, dans un contexte financier que chacun mesure dans cet hémicycle.
L’année prochaine, le budget du ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation atteindra près de 25,1 milliards d’euros, soit 549 millions d’euros d’augmentation. Sur le périmètre complet de la MIRES, la hausse sera de 500 millions d’euros, portant les crédits de l’ensemble de la mission à 27,9 milliards d’euros. Ces montants ne prennent en compte ni les crédits du programme d’investissements d’avenir, ou PIA, qui abondent les universités et les centres de recherche, ni l’effort consenti par les collectivités territoriales et les entreprises au financement de la recherche, de l’enseignement supérieur et de nos politiques en faveur de l’innovation.
En matière d’enseignement supérieur, l’année 2019 sera prioritairement consacrée à la poursuite de la réforme du premier cycle, pour laquelle les équipes des lycées et des universités se sont formées, au service de l’orientation des jeunes, dans un continuum du bac-3 au bac+3 que chacun appelle de ses vœux.
C’est un peu plus de 123 millions d’euros qui financeront, au travers du programme 150, des parcours personnalisés de réussite, ainsi que les mesures indemnitaires qui permettront de soutenir et de valoriser l’engagement des équipes, tant dans la mise en œuvre de Parcoursup que dans l’innovation pédagogique.
À ce propos, la question de l’aide au mérite a été explicitement posée. Il s’agit d’une aide constatée, et non d’une aide plafonnée. Ainsi, la réduction que connaît ce budget est le résultat de décisions prises par le précédent gouvernement.
Le financement du plan Étudiants est une réalité. En tout, 33 millions d’euros seront consacrés aux « oui, si », à savoir 23 millions d’euros pour l’année universitaire 2018-2019 et 10 millions d’euros pour la rentrée universitaire 2019. Toujours afin de mieux accueillir nos étudiants, 55 millions d’euros seront dédiés non seulement à l’ouverture de places supplémentaires, mais aussi au développement de formations courtes à fort potentiel d’insertion professionnelle. De plus, 33 millions d’euros permettront de financer les places créées pour l’année en cours et 22 millions d’euros sont d’ores et déjà prévus pour ouvrir de nouvelles places à la rentrée prochaine.
Au-delà, le PIA continuera à soutenir la rénovation des cursus universitaires ; au total, 325 millions d’euros ont été affectés aux établissements qui se sont saisis du nouvel arrêté de licence pour repenser le contenu du premier cycle. La réforme des études de santé obéira au même esprit.
Vous l’avez compris, mesdames, messieurs les sénateurs, l’État prendra toutes ses responsabilités afin de couvrir au mieux les besoins exprimés par les universités. Ainsi, à titre d’exemple, nous venons de débloquer 3 millions d’euros en fin de gestion à destination des personnels des bibliothèques, ingénieurs, administratifs, personnels techniques, sociaux et de santé, ou BIATSS, notamment ceux des services de scolarité qui se sont engagés pleinement dans la réforme. Cet engagement supplémentaire mérite d’être souligné devant le Parlement.
Pour ce qui concerne l’enseignement privé, je pense notamment aux établissements d’enseignement supérieur privé d’intérêt général, les EESPIG, et je salue la constance de l’engagement du Sénat sur ce sujet.
La Haute Assemblée m’a alertée dès 2017. Nous avons pris la mesure des problèmes dont il s’agissait et, comme l’a relevé M. Stéphane Piednoir dans son rapport pour avis, nous avons mis un terme à la baisse ininterrompue des subventions versées à l’enseignement privé. Près de 2 millions d’euros ont été abondés en gestion l’année dernière et « soclés » dans le budget de cette année. Nous tâcherons de réaliser en gestion un nouvel effort de 2 millions d’euros.
Parce que la réussite académique est indissociable des conditions de vie concrètes des étudiants, la question de l’accueil et du financement de la vie étudiante est au cœur des politiques qui seront conduites par mon ministère pendant l’année à venir.
Pour la première fois cette année, les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires, les CROUS, ont pu collecter la contribution vie étudiante et de campus, la CVEC, sans se voir imposer aucun plafond – je tiens à le rappeler. Ainsi, la totalité des financements reçus à ce titre en 2018 seront bien affectés à la vie universitaire et à la vie étudiante. Il en sera de même pour les montants perçus à la rentrée 2019. Un plafond prévisionnel, fixé en loi de finances à 95 millions d’euros, a été établi sur le fondement des prévisions réalisées par les services du ministère. Comme nous nous y sommes engagés, ce plafond sera révisé à la fin de 2019, à l’occasion du projet de loi de finances rectificative : dès lors, le montant effectivement perçu par les écoles et les universités à la rentrée prochaine pourra leur être totalement affecté.