Mme Catherine Troendlé. Très bien !
M. Patrick Kanner. L’extension de l’application de cette jurisprudence aux sapeurs-pompiers français tendrait à remettre totalement en cause notre modèle de secours territorial.
Mme Catherine Troendlé. Absolument !
M. Guy-Dominique Kennel. Effectivement !
M. Patrick Kanner. Quelles initiatives prendrez-vous pour préserver ce modèle ?
Il ne s’agit pas de nous recroqueviller sur un particularisme local. Nous n’agissons pas par conservatisme. Bien au contraire, protéger la notion d’engagement, c’est promouvoir une valeur qui est consubstantielle à la République.
Vous ne serez pas surpris que de tels propos soient tenus par un ancien ministre de la vie associative et de l’engagement. À ce titre, j’avais promu au sein de la loi de janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté, si chère au cœur de Mme Gatel (Mmes Catherine Troendlé et Françoise Gatel sourient.), la possibilité d’effectuer une mission de service civique auprès d’un service d’incendie et de secours, et de bénéficier de la formation de sapeur-pompier volontaire. Cela a été voté à l’unanimité par la Haute Assemblée.
Mme Catherine Troendlé. Et cela fonctionne bien !
M. Patrick Kanner. Préserver notre modèle de volontariat, c’est conforter l’engagement civique, une valeur essentielle pour une citoyenneté active et responsable.
Enfin, il faut également lever les freins potentiels à ce don de soi et protéger ceux qui nous protègent.
Mme Josiane Costes. Oui !
M. Patrick Kanner. À cette fin, je viens de déposer au nom de mon groupe une proposition de loi relative au renforcement de la sécurité des sapeurs-pompiers. Elle vise, selon quelques conditions, à la mise en place d’un anonymat dans le cadre d’une procédure pénale pour inciter les sapeurs-pompiers à déposer plainte lorsqu’ils sont victimes d’agression durant leurs missions. Nous le devons à ces personnes qui nous protègent. Pardon, mes chers collègues, pour la diversité de mes propos, mais tous ces éléments convergent : il faut protéger nos protecteurs !
Mme Françoise Gatel. Absolument !
M. Patrick Kanner. Aujourd’hui, nous sommes heureux de soutenir la pierre ajoutée à l’édifice par Mme Catherine Troendlé. Le groupe socialiste et républicain votera donc cette proposition de loi, et continuera à travailler au développement de notre modèle si particulier de secours. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste. – Mme Josiane Costes, ainsi que MM. Pierre-Yves Collombat et M. Dany Wattebled applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme Josiane Costes, pour explication de vote.
Mme Josiane Costes. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je me félicite du fait que cette proposition de loi, enrichie par le rapporteur, ait reçu un bon accueil sur le terrain, où elle apparaît comme utile au bon fonctionnement du service.
Eu égard à l’importance de ces personnels, aussi bien en effectifs qu’au regard de leur mission de maintien du matériel qui est centrale, notre groupe a considéré qu’il était indispensable qu’ils puissent être représentés au sein du conseil d’administration des SDIS.
Dès lors, il nous paraît pertinent que ces personnels soient également présents au sein des commissions administratives et techniques des services d’incendie et de secours, puisqu’ils ont à connaître, au quotidien, des enjeux techniques du service.
Plus globalement, notre débat doit aussi être l’occasion d’affirmer nos convictions sur l’organisation de nos SDIS. Il nous semble tout d’abord vital et urgent de faire évoluer l’architecture du système de lutte contre les incendies et du secours à la personne dans son ensemble, comme le préconisaient déjà nos collègues Pierre-Yves Collombat et Catherine Troendlé en 2016.
Représentante du conseil départemental au sein du SDIS depuis 2015, je fais le même constat depuis plusieurs années, alors que les SDIS sont parfois, malheureusement, le dernier service public dans certaines communes. C’est particulièrement vrai dans le Cantal.
Face à la croissance continuelle de leurs charges et à la baisse de leurs recettes, compte tenu du désengagement de l’État et des contraintes budgétaires des départements, les marges de manœuvre des SDIS se tarissent. Ces derniers ont bien essayé, depuis plusieurs années, d’optimiser leurs moyens, mais cela ne peut suffire ! Le vieillissement démographique et la désertification médicale, avec la fermeture progressive de certains services dans les hôpitaux de proximité, impactent considérablement l’activité des SDIS. Pour illustration, toujours dans le Cantal, le nombre total d’interventions du SDIS a crû de 7 %, tandis que la proportion des secours à la personne a explosé, représentant 79 % des interventions, entre 2016 et 2017.
L’appel à l’engagement citoyen de pompiers bénévoles apparaît comme la pierre angulaire d’un système dont le coup d’arrêt pourrait néanmoins bientôt tomber.
En France, 79 % des sapeurs-pompiers sont volontaires. Leur présence est au cœur même de notre organisation. Sur les 37 centres de secours du Cantal, les 760 pompiers volontaires permettent d’assurer une bonne partie des interventions dans le département, en complément des 100 pompiers professionnels.
Le modèle de secours français, fondé sur le volontariat, est pourtant menacé par la Cour de justice de l’Union européenne qui a estimé, dans un arrêt en date du 21 février dernier, que la directive de 2003 sur le temps de travail devait s’appliquer aux sapeurs-pompiers volontaires belges. Bien sûr, cette décision est théoriquement circonscrite au cas belge et ne s’applique pas de plein droit en France. Toutefois, nous sommes à la merci d’un recours (M. Guy-Dominique Kennel opine.)…
Mme Catherine Troendlé. Absolument !
Mme Josiane Costes. … devant une juridiction française, qui viendrait totalement remettre en cause notre modèle de secours.
Or l’alternative de la professionnalisation à temps partiel du volontariat manque encore de crédibilité, notamment en cas de crise, comme le souligne le rapport de la mission pour la relance du volontariat remis au ministre de l’intérieur le 23 mai 2018.
Par conséquent, l’ensemble des membres du groupe du RDSE ont cosigné la motion de nos collègues Catherine Troendlé et Olivier Cigolotti demandant la mise en chantier d’une directive préservant l’engagement volontaire des forces de sécurité et de secours d’urgence. Je veux réaffirmer ici notre soutien plein et entier à cette initiative.
Peut-être pourrez-vous nous en dire plus, monsieur le secrétaire d’État, sur l’appréciation que porte le Gouvernement sur cette situation critique pour notre modèle français des secours.
Mme Catherine Troendlé. Très bien !
Mme Josiane Costes. Vous l’aurez compris, le groupe du RDSE, attentif au bon fonctionnement du service public de lutte contre les incendies et de secours, votera ce texte, dans sa très grande majorité. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains. – MM. Jean-Pierre Sueur et Yannick Vaugrenard applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
Mme Françoise Gatel. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi de Mme Catherine Troendlé a donné au Sénat l’occasion d’utiliser une nouvelle fois avec succès la procédure de législation en commission. L’objet du texte s’y prêtait parfaitement.
Le groupe Union Centriste affirme son intérêt pour cette procédure moderne et efficace, qui valorise la qualité du travail de commission. N’oublions pas qu’il s’agit là d’une spécificité du Sénat. Elle montre la voie de la modernité et de l’efficacité et pourrait inspirer d’autres assemblées… (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Troendlé. Très bien !
Mme Françoise Gatel. La proposition de loi permet de réaffirmer la qualité de nos services départementaux d’incendie et de secours, mobilisés sans relâche, avec dévouement et professionnalisme, pour venir en aide, tout au long de l’année, à nos concitoyens, comme nous l’avons encore vu très récemment, dans des circonstances difficiles. Gardons à l’esprit qu’ils effectuent, en moyenne, une intervention toutes les sept secondes !
L’examen de ce texte nous donne aussi l’occasion de réaffirmer l’originalité et la très grande valeur du modèle français qui repose sur des sapeurs-pompiers volontaires. Le dernier congrès national des sapeurs-pompiers a d’ailleurs fourni au Gouvernement l’occasion de présenter son plan d’action pour le volontariat, visant à consolider ce modèle altruiste et citoyen et à diversifier le recrutement des sapeurs-pompiers volontaires. C’est une excellente chose.
Mais il faudra sans doute aller plus loin pour assurer la pérennité de notre modèle. Tous mes collègues l’ont rappelé : nos sapeurs-pompiers volontaires sont visés, voire menacés par une directive européenne relative au temps de travail, dont l’éventuelle transposition en droit interne pourrait remettre en cause notre modèle de secours français.
Comme notre collègue Olivier Cigolotti l’a rappelé à la fin du mois de septembre dernier, une initiative forte auprès des instances de l’Union européenne – vous l’avez évoquée, monsieur le secrétaire d’État – est urgente et indispensable pour exempter le volontariat de cette directive ou obtenir des dérogations. Le Président de la République avait d’ailleurs pris l’engagement de « défendre farouchement le modèle reposant sur le volontariat des sapeurs-pompiers qui n’est ni du salariat ni du bénévolat ».
Le Sénat s’est mobilisé, en cosignant à la très grande majorité de ses membres une motion adressée à Jean-Claude Juncker, président de la Commission européenne.
S’il faut, bien sûr, saluer l’engagement de nos sapeurs-pompiers, la proposition de loi de notre collègue Catherine Troendlé permet d’évoquer ceux qui sont dans l’ombre, mais sans qui les missions ne pourraient pas être assurées : les personnels administratifs, techniques et spécialisés. Reconnaissons que l’on en parle moins ! Certaines de leurs missions sont très techniques. Or de la fiabilité des matériels qu’ils entretiennent dépend parfois directement la vie des sapeurs-pompiers. Leur rôle est donc essentiel. Dès lors, qu’ils puissent être représentés au sein du conseil d’administration paraît légitime.
Cependant, la présente proposition de loi est aussi l’occasion de s’interroger sur l’évolution très importante des SDIS.
En effet, le secours à la personne représente aujourd’hui plus de 85 % de l’activité de sapeur-pompier. Cette mission de santé doit être connectée à l’organisation territoriale des soins. La réflexion menée par la ministre des solidarités et de la santé sur la présence médicale dans les territoires ne pourra pas faire abstraction d’une nécessaire articulation entre les services de santé et d’urgence et les missions des SDIS.
Plus globalement, le sujet des SDIS pose aussi la question du rapport « dominant », si je puis dire, entre l’État et les collectivités, autrement dit du rapport entre celui qui décide, l’État, et celui qui paie, le département. J’ai évoqué ce point en commission des lois, à la suite des propos du président Kanner, qui allait même plus loin, évoquant la possibilité que l’État récupère cette compétence régalienne. Je ne sais si nous devons aller jusque-là. Pour autant, monsieur le secrétaire d’État, nous sommes encore fort éloignés de l’excellent principe du décideur-payeur, et cela pose problème.
Pour revenir plus directement à la proposition de loi, et en guise de conclusion, les membres du groupe Union Centriste remercient très sincèrement et très chaleureusement notre collègue Catherine Troendlé de son excellente initiative. Nous remercions également notre rapporteur, Loïc Hervé, qui a contribué à l’excellence du travail réalisé sur ce texte.
Mes chers collègues, vous l’aurez compris, notre groupe apportera son soutien au texte ainsi proposé par la commission des lois. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et sur des travées du groupe Les Républicains. – MM. Arnaud de Belenet, Patrick Kanner et Christian Manable applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Dany Wattebled, pour explication de vote.
M. Dany Wattebled. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, en juin dernier, nous avons examiné, dans cet hémicycle, une proposition de loi visant à étendre l’utilisation des caméras mobiles à deux nouvelles catégories d’agents publics, dont les sapeurs-pompiers.
Le débat de ce jour concerne la filière administrative et technique des services d’incendie et de secours.
Une nouvelle fois, le Parlement se met à l’écoute attentive de ces hommes et de ces femmes qui, au péril de la leur, sauvent, chaque jour, des vies humaines. Il se met aussi au chevet de tous ces sauveteurs, professionnels ou volontaires, personnels administratifs, techniques et spécialisés, qui contribuent à rendre notre société plus sûre, sans toujours en recueillir les lauriers.
Rappelons-nous les événements dramatiques de ces derniers mois : ils ont mis en exergue, si besoin était, le rôle éminent des acteurs de la sécurité et du secours, qu’ils soient sapeurs-pompiers professionnels ou qu’ils relèvent de la filière des personnels administratifs, techniques et spécialisés. Tous font vivre quotidiennement les mots « mobilisation », « engagement », « entraide », « solidarité ».
Les médias nous rapportent régulièrement le récit d’agressions de pompiers. Oui, du nord au sud et de l’est à l’ouest, nos pompiers sont agressés, caillassés et quelquefois pris à partie par des personnes violentes.
En tant qu’élus de la République, nous avons un devoir envers ces personnels. Ce devoir commence par la reconnaissance de tous, y compris des personnels administratifs, techniques et spécialisés, qui représentent un maillon essentiel de la chaîne d’action des soldats du feu. Aujourd’hui, ils sont un élément indispensable des services de lutte contre le feu. En 2016, ils étaient 11 200, pour 40 600 sapeurs-pompiers professionnels. Ils occupent des tâches centrales dans la gestion des ressources humaines ou dans le suivi des affaires juridiques. Ils sont aux pompiers ce que les fondations sont à une maison (Mme Catherine Troendlé opine.) : l’élément solide sur lequel repose tout un édifice, toute une institution.
Pourtant, ils ne sont pas reconnus. Au sein des services départements d’incendie et de secours, ils n’ont pas voix au chapitre, alors que les sapeurs-pompiers, volontaires comme professionnels, disposent de deux représentants, avec voix consultative.
Le dialogue social doit prendre une nouvelle dimension au sein des commissions administratives et des conseils d’administration des SDIS, permettant de lever les éventuelles incompréhensions et de prévenir les conflits.
Sur l’initiative de notre collègue Catherine Troendlé, nous entendons aujourd’hui répondre à l’injustice qui touche les personnels administratifs, techniques et spécialisés et reconnaître leur rôle stratégique, en leur accordant une place au sein des conseils d’administration des services départementaux d’incendie et de secours.
Plus qu’une reconnaissance professionnelle, il s’agit d’une reconnaissance de leur rôle technique. Leur connaissance du terrain – connaissance des capacités opérationnelles, maîtrise technique du matériel radio et d’intervention – serait un véritable atout pour le fonctionnement des SDIS.
Au sein des instances de ces services départementaux et des commissions administratives et techniques des services d’incendie et de secours, ils pourront alors faire entendre la voix de ces milliers d’hommes et de femmes ayant des missions d’appui dans le cadre de la sureté de notre pays à qui nous devons tant, notamment l’assurance d’être protégés en cas de danger.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le groupe Les Indépendants s’associe pleinement et sans réserve, comme vous tous, à une telle évolution législative. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains. – Mmes Josiane Costes et Martine Filleul applaudissent également.)
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Nous voilà réconfortés !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Laurent Nunez, secrétaire d’État. Monsieur le président, si vous le permettez, je souhaite apporter quelques éléments de réponse complémentaires.
D’abord, je veux rappeler l’attachement du Gouvernement à notre système de sécurité civile, qui démontre chaque jour sa solidité et sa robustesse – je salue, à cet égard, les hommes et les femmes qui le composent. Loin de nous l’idée de nous départir de ce modèle ! Nous allons, au contraire, tout faire pour le consolider.
Je veux faire trois brèves remarques. Concernant le secours aux personnes, qui représente 84 % des interventions des SDIS, monsieur le sénateur Pierre-Yves Collombat, je puis vous assurer que nous allons veiller à ce que le rapport de l’Inspection générale de l’administration, l’IGA, et de l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, n’accouche pas de souriceaux et à ce que les propositions qu’il contient débouchent sur des solutions extrêmement concrètes, dans la mesure où, comme vous le savez, ce pourcentage va croissant. Soyez assuré que nous y serons très attentifs.
Nous sommes tout aussi vigilants sur la question de la sécurité des interventions des sapeurs-pompiers, lesquels sont effectivement victimes d’agressions assez violentes dans certains départements, au-delà des violences urbaines. Le ministre de l’intérieur a rappelé à tous les préfets la nécessité d’appliquer les dispositifs de convention opérationnelle existants, qui visent à renforcer l’échange d’informations, à permettre des interventions conjointes avec les forces de l’ordre dans les secteurs les plus sensibles et à faciliter le dépôt de plainte en cas d’agressions. Cet élément est extrêmement important.
Pour ce qui concerne les caméras mobiles ou caméras-piétons, un texte a effectivement été voté à l’été 2018. L’utilisation de ces caméras sera expérimentée dès le début de l’année 2019 dans une quinzaine de départements, en vue, sans doute, d’une généralisation.
Pour terminer sur la question des agressions des sapeurs-pompiers, je répète que les dispositions de la loi de février 2017, qui ont renforcé les sanctions pénales, sont très régulièrement appliquées. Les auteurs des agressions sont très souvent condamnés à des peines de prison ferme.
Monsieur Kanner, comme je l’ai déjà dit en commission, je ne peux pour le moment répondre avec exactitude à la question des conséquences de la directive. Nous sommes en train d’y travailler, en lien avec la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises et le secrétariat général des affaires européennes, le SGAE. Cependant, je puis vous confirmer que nous prendrons bien évidemment une initiative à l’échelle européenne pour éviter que cette directive ne remette en cause le système du volontariat chez les sapeurs-pompiers.
M. le président. Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous voici parvenus à la fin d’une procédure moderne et efficace, pour paraphraser l’une de nos intervenantes.
Je mets donc aux voix l’article unique constituant l’ensemble de la proposition de loi, dans le texte de la commission.
(La proposition de loi est adoptée.) – (Applaudissements.)
M. le président. Je constate que ce texte a été adopté à l’unanimité des présents.
Nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quinze heures quinze, est reprise à seize heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)
PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher
M. le président. La séance est reprise.
4
Questions d’actualité au Gouvernement
M. le président. Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’ordre du jour appelle les questions d’actualité au Gouvernement.
Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat, sur le site internet du Sénat et sur Facebook.
J’appelle chacun à respecter le temps de parole – et je ne veux pas que ce soit un vœu pieux ! – et à faire preuve de courtoisie.
conséquences de la sécheresse
M. le président. La parole est à Mme Josiane Costes, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
Mme Josiane Costes. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Si l’épisode de grande sécheresse qui sévit sur notre territoire depuis le printemps dernier commence tout juste à se clore, nous savons en revanche que ses conséquences risquent, hélas, de fragiliser encore nos agriculteurs dans les mois qui viennent. En effet, cet événement climatique a été d’une telle ampleur qu’il a rapidement plongé de nombreuses exploitations dans la difficulté, avec, en particulier, un effet domino pour les producteurs de fromages.
Dans le Cantal, la sécheresse a eu pour premier effet d’obliger les éleveurs à acheter prématurément du foin, dont le coût pèse très lourdement sur les trésoreries. Malgré cette charge, la plupart des exploitants se sont approvisionnés en fourrages pour faire face à leurs besoins. Néanmoins, beaucoup d’entre eux doivent maintenant renoncer à leur niveau habituel de production de fromages, faute d’un bon pâturage au cours de l’été. Je pense au Salers, notamment, dont le cahier des charges impose une herbe de qualité pour la nourriture des vaches.
Monsieur le ministre, je salue les annonces que vous avez faites la semaine dernière ici, au Sénat, sur les aides nationales qui viendront en complément des dispositifs européens destinés à alléger les charges des exploitants.
Nos exploitants ont vraiment besoin d’un soutien rapide et efficace.
Je souhaitais toutefois vous interroger sur ce qui pourrait être fait en amont pour limiter les effets de ces sécheresses, qui, on le sait, risquent d’être récurrentes en raison du réchauffement climatique. Je pense, en particulier, à la question du développement des retenues d’eau, que certains agriculteurs aimeraient voir encouragées. Quel regard portez-vous sur ces dispositifs ? (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – MM. Bernard Cazeau et Arnaud de Belenet applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Didier Guillaume, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Madame la sénatrice, je voudrais tout d’abord vous remercier pour le travail que vous effectuez au sein de la Haute Assemblée sur ces sujets.
Je me suis déjà exprimé la semaine dernière. Comme je l’avais dit, l’État est au rendez-vous de la sécheresse que subissent les agriculteurs. Des mesures ont été annoncées, notamment l’exonération de la taxe foncière. Des aides seront accordées et trois comités de calamités agricoles se réuniront, l’un en décembre, l’autre en janvier, le troisième en février, afin de répondre aux situations de détresse de toutes les exploitations.
Cette sécheresse est en effet terrible. Mais votre question portait aussi, plus largement, sur l’eau.
Nous ne pouvons pas continuer à regarder l’eau tomber pendant six mois, et à chercher de l’eau pendant les six mois suivants. Lors d’un déplacement dans la Meuse et dans les Vosges, la semaine dernière, nous avons pu observer la situation. Avec M. le ministre de la transition écologique et solidaire, François de Rugy, et Mme la secrétaire d’État Emmanuelle Wargon, nous travaillons de concert sur les projets de territoire.
Dès janvier 2019, des études très précises seront faites, territoire par territoire, afin de savoir où en est la ressource en eau et quelles réserves il convient de constituer.
Lors des prochains mois, dans le cadre de la deuxième phase des Assises de l’eau, nous mènerons une large concertation réunissant nos deux ministères, mais aussi le Gouvernement dans son ensemble et les territoires, durant laquelle nous étudierons, avec l’aide des agences de l’eau, le moyen de répondre à ce défi qui est aujourd’hui majeur pour notre agriculture.
Le réchauffement climatique et la dérégulation du climat sont là ; il nous faut donc nous soucier de la ressource en eau.
Vous avez eu raison, madame la sénatrice, de poser cette question. Nous allons essayer d’apporter une réponse concrète et pragmatique, territoire par territoire, microterritoire par microterritoire. L’ère des grandes retenues d’eau est terminée : il n’y en aura plus. Il est possible, en revanche, de voir quelles sont les solutions au niveau des exploitations. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Josiane Costes, pour la réplique, en dix-sept secondes.
Mme Josiane Costes. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre. Vous le savez, les agriculteurs souffrent. Ils ont déjà subi la crise des prix en 2015. Il ne faudrait pas que la sécheresse entraîne la destruction de centaines de fermes, et donc de productions qui sont le fleuron de notre gastronomie. (Applaudissements sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe Les Républicains. – Mme Michèle Vullien applaudit également.)
réforme de l’état
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste, qui a malgré tout réussi à rejoindre le Sénat ce matin.
Mme Cécile Cukierman. Monsieur le Premier ministre, vous venez de présenter un vaste plan de destruction de la fonction publique (MM. Roger Karoutchi et Christian Cambon sourient.) par la baisse des effectifs et la fragilisation du statut.
Ce plan poursuit le vieux rêve d’un État faible face au jeu des intérêts privés. Que proposez-vous ? Cinquante mille fonctionnaires d’État en moins, après une baisse de 11 % depuis vingt ans, une casse du statut avec un appel massif aux contractuels.
Monsieur le Premier ministre, la France ne peut se gérer comme une start-up, les règles du service public et le sens de l’intérêt général ne sont pas compatibles avec l’objectif de rentabilité.
Votre plan impose aussi une réduction de 70 000 postes dans la fonction publique territoriale. C’est un non-sens : chacun sait que la défaillance du service public d’État est prise en charge par les collectivités locales. D’ailleurs, les points de contact que vous annoncez existent déjà, ce sont les mairies !
Monsieur le Premier ministre, votre plan libéral est en totale contradiction avec les besoins de notre société. Quand admettrez-vous que la casse du service public, de ce qui ne se marchandise pas, brise le trait d’union, la solidarité sociale territoriale au sein de notre République ?
Monsieur le Premier ministre, la voie que vous avez choisie est sans issue, et elle interroge sur l’avenir de notre pays et de l’Europe. Nous attendons de votre part un sursaut républicain pour stopper la saignée que vous imposez aux services publics nationaux et locaux. Allez-vous y mettre fin ? (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et sur des travées du groupe socialiste et républicain.)