M. Alain Richard. Ah !
Mme Éliane Assassi. … au lieu de considérer ce problème avant tout comme une question de santé publique.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, sur l’article.
Mme Catherine Conconne. Je sais qu’il est compliqué d’avoir une échelle de peines performante pour un usage qui est aujourd’hui devenu un effet de société, un fait de société, parfois une mode, voire un snobisme entre copains, une façon de se prouver, lorsque l’on est adolescent, que l’on est un homme, fort, costaud, et que l’on peut ainsi entrer dans le monde des adultes.
Personnellement, sur le sujet de la consommation de drogue, je ne céderai ni à la candeur ni à l’angélisme. Une drogue reste une drogue. Aujourd’hui, il n’est plus question de catégoriser les effets de ces consommations. J’invite tous ceux qui continueraient de croire qu’il s’agit de substances que l’on pourrait légaliser et que l’on pourrait tendre vers une certaine permissivité à rencontrer des parents d’enfants consommateurs et à visiter les hôpitaux psychiatriques.
Mme Éliane Assassi. Ah !
Mme Catherine Conconne. Ces établissements regorgent d’enfants, de jeunes, d’adolescents qui ont sombré dans la schizophrénie après une consommation de cannabis dont le caractère toxique a été prouvé.
Certes, l’échelle des peines est difficile à mettre en place. On pourrait parler de contraventions, de stages, comme vient de le proposer mon collègue, ou de pédagogie. Aujourd’hui, notre devoir est aussi, pourquoi pas, de taper au porte-monnaie, pour faire comprendre que le cannabis n’est pas une substance neutre, qui ne ferait pas de dégât : le cannabis est une drogue qui fait des dégâts dans le cerveau de tous, notamment des jeunes, et provoque, chez nombre d’entre eux, une kyrielle d’effets dont il est aujourd’hui difficile de guérir.
Aussi, faites de votre mieux, tous ici. L’État doit mettre en place toutes les panoplies possibles et imaginables pour permettre une prise de conscience de la toxicité et des effets indésirables causés par un fait qui s’est banalisé, mais qui est hautement dommageable, en particulier chez les jeunes. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Bigot, sur l’article.
M. Jacques Bigot. Mes chers collègues, je vous ai tous écoutés avec attention ; vous abordez, à juste titre, le débat sous l’angle du code de la santé publique, puisque c’est là que sont prévues les amendes forfaitaires.
Ce n’est pas ce que fait Mme le garde des sceaux, dont la démarche vise à soulager l’organisation judiciaire. Elle propose donc, pour des raisons de surcharge de travail et face à l’impossibilité des parquets d’appliquer la législation, la mise en place de l’amende forfaitaire. Ce n’est pas forcément la bonne solution, mais ce n’est pas forcément non plus la plus mauvaise. Ce qui est gênant, c’est d’aborder cette question sans une réflexion stratégique, qui s’inscrive dans le code de la santé publique.
Comment faire pour prévenir la consommation des jeunes ? Certains pensent que la libéralisation serait une solution.
Mme Esther Benbassa. Une légalisation contrôlée !
M. Jacques Bigot. Personnellement, je n’en suis pas sûr.
Notre collègue Maurice Antiste considère, à juste titre, qu’il vaudrait mieux imposer aux jeunes un stage qu’une amende forfaitaire, puisque ce sont leurs parents qui paieront cette dernière et que la famille en souffrira encore davantage.
Cet article aborde le problème sous un seul angle, en considérant que les amendes forfaitaires permettront au procureur de mieux poursuivre et que cela crée une stratégie. Pour autant, je ne suis pas sûr que ce texte soit le bon véhicule pour aborder ces questions, dans la mesure où il n’a pour objectif que d’arriver à équilibrer le programme financier de l’organisation judiciaire. C’est le cas de tous les sujets convoqués dans ce texte.
Selon moi, il n’y a pas suffisamment de poursuites et elles seraient de toute façon trop lourdes. Ce n’est donc sans doute pas la solution. Reste que décider que l’on ne fait plus rien du tout serait dramatique.
C’est la raison pour laquelle l’amende forfaitaire est peut-être la solution. Cela supposerait, madame la garde des sceaux, que vous nous expliquiez la stratégie du Gouvernement et celle de la ministre de la santé sur ce sujet.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 36 rectifié, présenté par Mmes Benbassa, Assassi et Apourceau-Poly, M. Bocquet, Mmes Brulin, Cohen et Cukierman, MM. Gay et Gontard, Mme Gréaume, MM. P. Laurent et Ouzoulias, Mme Prunaud et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Alinéas 2 et 3
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, cet article traite de l’application d’une procédure d’amende forfaitaire au délit d’usage illicite de stupéfiants.
Cette mesure a été présentée par le ministre de l’intérieur comme une réponse permettant de simplifier le travail des forces de l’ordre et de la justice et visant à automatiser les peines en la matière.
Or le principe d’individualisation de la peine est ici bafoué, et la mesure octroie un pouvoir arbitraire aux forces de l’ordre chargées d’appliquer la contravention. Celles-ci pourront de ce fait sanctionner sans limites, au plus grand mépris des droits des personnes suspectées. En plus d’augmenter les inégalités des citoyens devant la loi, une telle mesure est dénuée de toute réflexion sur les questions relatives à la santé publique, pour ce qui a trait à la prévention et au traitement de l’addiction.
Le seul effet de l’amende sera d’aggraver par une sanction pécuniaire une situation souvent déjà précaire : nous savons que les comportements de consommation sont diversifiés et divergent entre les milieux paupérisés et les milieux mondains.
Ce dispositif, en plus d’accroître le millefeuille législatif en matière de répression de l’usage des stupéfiants, semble inefficace, compte tenu de l’impossibilité juridique d’appliquer une amende forfaitaire délictuelle pour les mineurs, qui, pour certains d’entre eux, sont devenus des consommateurs réguliers – leur nombre augmente d’ailleurs sans cesse. Elle sera donc dénuée de tout effet dissuasif chez les populations les plus jeunes.
Cette mesure, mes chers collègues, est quelque peu rétrograde. C’est pourquoi nous demandons la suppression de l’alinéa 2 de cet article. Englobant tous les stupéfiants, il paraîtra répressif pour les uns et laxiste pour les autres. Ce sera en effet la même amende pour le cannabis, l’héroïne, la cocaïne, etc.
Il est temps d’ouvrir ce débat, d’abord pour changer la liste des stupéfiants et distinguer le cannabis des autres stupéfiants. En France, ce débat reste tabou. Or qui dit « tabou » dit « pas de prévention et pas d’accompagnement ».
M. le président. Mes chers collègues, je vous invite à ne pas dépasser le temps qui vous est imparti.
L’amendement n° 81 rectifié bis, présenté par M. Grand, Mmes Eustache-Brinio et Micouleau, MM. Pellevat, Courtial, Savary et Bascher, Mmes Berthet et Imbert, MM. Milon, Laménie, Cuypers, Dallier, H. Leroy et Lefèvre, Mme Lherbier et M. Revet, est ainsi libellé :
Alinéas 3, 5 et 7, premières phrases
Supprimer les mots :
y compris en cas de récidive,
La parole est à Mme Brigitte Micouleau.
Mme Brigitte Micouleau. Cet article prévoit l’extension de la procédure de l’amende forfaitaire à de nouveaux délits : vente d’alcool à des mineurs, usage de stupéfiants. Il s’agit du même principe que les amendes forfaitaires délictuelles pour la conduite sans permis ou sans assurance voté dans la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle. Or il est prévu ici d’éteindre l’action publique par le paiement d’une amende forfaitaire, y compris en cas de récidive.
Cet amendement vise donc à supprimer la procédure de l’amende forfaitaire en cas de récidive, afin de ne pas affaiblir la fermeté de la réponse pénale et de ne pas donner un sentiment d’impunité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, corapporteur. La mise en place de ce dispositif d’amende forfaitaire n’est qu’une réponse parmi d’autres en fonction de la situation – ici, l’usage de stupéfiants –, qui peut faire l’objet de poursuites.
Il faut garder cet outil, qui est utile et qui a une autre vertu, celle de – passez-moi l’expression – taper là où ça fait mal. En prenant de l’argent, on agit : c’est un moyen d’action tout à fait intéressant et efficace.
Depuis qu’elle a commencé à examiner ce texte, notamment le volet d’exécution des peines, la commission considère qu’il faut trouver la peine adaptée et efficace, c’est-à-dire dissuasive pour celui qui va la subir.
Dans certaines hypothèses, sans doute majoritaires en matière d’usage de stupéfiants, l’action sur la capacité à acheter peut être regardée avec beaucoup d’intérêt.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Lorsque le Président de la République, en tant que candidat, a évoqué au cours de la campagne électorale les questions liées à la consommation d’un certain nombre de stupéfiants, il ne s’est jamais prononcé pour une dépénalisation. Le débat qui a lieu sur cette question dans la société est tout à fait respectable, mais cela ne correspond pas à l’engagement du Président de la République, que le Gouvernement suit.
Sur la politique pénale que je mènerai en matière de consommation de stupéfiants, j’ai eu l’occasion de m’exprimer au mois d’avril dernier à l’Assemblée nationale, qui avait organisé un débat spécialement sur ces questions. La forfaitisation que nous proposons est un outil supplémentaire : ce n’est pas l’outil qui remplacera l’ensemble des autres mesures de politique pénale.
Je souhaite insister sur trois points : c’est un outil efficace ; c’est un outil qui n’empêche en aucun cas de conduire une politique de santé publique ; c’est un outil qui préserve une réponse individualisée dans un certain nombre de cas.
Premièrement, c’est un outil efficace. Notre idée est de faire reculer le sentiment d’impunité par une poursuite plus systématique des consommateurs qui, aujourd’hui, fument dans les lieux publics. La forfaitisation est précisément destinée à cela : dans les rues, aux sorties des écoles, cette procédure d’amende forfaitaire délictuelle nous permettra de résoudre ce problème.
Évidemment, cette amende forfaitaire donnera lieu à une instruction générale des procureurs locaux pour sanctionner efficacement les consommateurs qui, aujourd’hui, font l’objet de simples rappels à la loi. Par conséquent, nous aurons une gamme supplémentaire, qui sera sans doute beaucoup plus dissuasive. Je crois que c’est ce que nous avons souhaité faire.
Deuxièmement, c’est un outil qui n’empêche évidemment pas la conduite d’une politique publique en matière de santé. La forfaitisation n’empêche en aucune manière les réponses pédagogiques et sanitaires pour les toxicomanes habituels ou pour des drogues un peu plus dures.
La direction des affaires criminelles et des grâces, dont le directeur se trouve à mes côtés, rappellera en effet au parquet qu’il leur appartiendra de diffuser des instructions spécifiques, qui viendront encadrer la mise en œuvre de cette procédure et qui leur permettront de contrôler ce type de profil, afin que, au lieu d’une amende forfaitaire, soit mise en place une réponse sanitaire, sociale, pédagogique correspondant à un certain type de consommateurs.
Mme Esther Benbassa. Et d’accompagnement !
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Bien sûr, madame la sénatrice.
Troisièmement, nous voulons que l’amende forfaitaire soit un outil supplémentaire dans une gamme de réponses. Cette diversité nous permettra d’individualiser les réponses face aux différents types d’infractions auxquelles nous aurons affaire.
Au fond, et je terminerai par là, nous suivons une logique à la fois d’efficacité et de fermeté. Ce n’est pas du tout une logique d’économies. Je ne suis d’ailleurs pas sûre que cela en entraîne, quand bien même cela soulagera peut-être dans un premier temps un certain nombre de magistrats par des procédures différentes.
En effet, la justice restera évidemment saisie de nombreuses procédures, lorsqu’il y aura soit d’autres réponses que la forfaitisation soit des procédures sur opposition qui apparaîtront. C’est donc véritablement une logique à la fois de dissuasion et de santé publique que nous suivons.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. L’amendement n° 77, présenté par M. Antiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le stage de sensibilisation aux dangers de l’usage de produits stupéfiants prévu à l’article 131-35-1 du code pénal peut être proposé en lieu et place du paiement de l’amende forfaitaire minorée. »
La parole est à M. Maurice Antiste.
M. Maurice Antiste. Cet article maintient la pénalisation de l’usage de stupéfiants, mais ouvre la possibilité d’éteindre l’action publique, y compris en cas de récidive, par le versement d’une amende forfaitaire d’un montant de 300 euros. Ces modifications ne marquent pas un changement fondamental d’approche, pourtant nécessaire, mais ouvrent des risques de discrimination sociale entre ceux qui auront les moyens de payer les amendes et les plus démunis, qui ne le pourront pas.
De plus, le maintien au sein du code de procédure pénale d’un stage de sensibilisation donnerait la possibilité de responsabiliser et sensibiliser les consommateurs de produits stupéfiants aux risques sanitaires et sociaux, en leur proposant une réponse éducative, en lieu et place, ou en plus, du paiement d’une amende minorée.
La seule création de l’amende forfaitaire aboutit à un véritable permis de consommer sans amener à une réflexion en termes de santé publique, alors que le stage de sensibilisation aux dangers de l’usage de produits stupéfiants permet d’engager une réflexion sur les dangers de la consommation et crée des passerelles vers la démarche de soins.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, corapporteur. Cet amendement est en réalité satisfait par l’article 43 du projet de loi, qui prévoit que toute possibilité de stage peut être ouverte.
La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Antiste, l’amendement n° 77 est-il maintenu ?
M. Maurice Antiste. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 77 est retiré.
L’amendement n° 83 rectifié bis, présenté par M. Grand, Mmes Eustache-Brinio et Micouleau, MM. Pellevat, Courtial, Savary et Bascher, Mmes Berthet et Imbert, MM. Milon, Laménie, Cuypers, Bonhomme, Duplomb, Dallier, H. Leroy et Lefèvre, Mme Lherbier et M. Revet, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 7
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – L’article L. 126-3 du code de la construction et de l’habitation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour le délit prévu au premier alinéa, l’action publique peut être éteinte, dans les conditions prévues aux articles 495-17 et suivants du code de procédure pénale, par le versement d’une amende forfaitaire d’un montant de 300 €. Le montant de l’amende forfaitaire minorée est de 250 € et le montant de l’amende forfaitaire majorée de 600 €. »
La parole est à Mme Brigitte Micouleau.
Mme Brigitte Micouleau. Cet article prévoit l’extension de la procédure de l’amende forfaitaire à de nouveaux délits : vente d’alcool à des mineurs et usage de stupéfiants. Il s’agit là de l’une des propositions du rapport Beaume et Natali, qui évoque aussi les délits d’occupation des halls d’immeuble.
Il est donc proposé de fixer le montant de l’amende forfaitaire délictuelle pour l’occupation des halls d’immeuble selon le barème suivant : 300 euros, minorés à 250 euros et majorés à 600 euros.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, corapporteur. On comprend parfaitement le sens de cet amendement. En revanche, le véhicule juridique qui est proposé est moins bien adapté que l’ordonnance pénale. La commission des lois préfère, dans les conditions que vous avez décrites, ma chère collègue, que l’ordonnance pénale soit utilisée. Celle-ci constitue en effet une véritable sanction et ouvre un champ de possibilités un peu plus grand, en permettant notamment des saisies.
C’est la raison pour laquelle la commission demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. La procédure de forfaitisation ne paraît pas du tout adaptée à ce type de situation. La forfaitisation n’est adaptée que pour les délits dont la constatation relève d’une forme d’évidence.
C’est par exemple le cas pour le délit de vente d’alcool aux mineurs, où, au fond, il suffit d’établir que l’acheteur est mineur et que le produit vendu est de l’alcool. Ce n’est pas le cas pour le délit d’occupation illicite d’un hall d’immeuble, qui nécessite que soit établi le trouble causé à autrui, et ce n’est possible qu’à la suite d’investigations complémentaires, telles que des auditions.
Par ailleurs, cette infraction fait déjà l’objet de modifications dans le cadre du projet de loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dit « ÉLAN », puisque l’article 40 bis du texte de la CMP a augmenté la peine d’emprisonnement encourue de six mois à un an. Par conséquent, le législateur ne peut pas vouloir à la fois augmenter la peine d’emprisonnement encourue pour ce délit et prévoir la possibilité d’éteindre l’action publique par le paiement d’une amende forfaitaire. Il y aurait là une contradiction.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le corapporteur.
M. François-Noël Buffet, corapporteur. La commission des lois préfère l’ordonnance pénale, car, à l’article 40 du projet de loi, le champ de l’ordonnance pénale est élargi. C’est bien l’outil pertinent en la circonstance. Je confirme donc que cet amendement est satisfait.
M. le président. Madame Micouleau, l’amendement n° 83 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Brigitte Micouleau. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 83 rectifié bis est retiré.
Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 84 rectifié bis, présenté par M. Grand, Mmes Eustache-Brinio et Micouleau, MM. Pellevat, Courtial, Savary et Bascher, Mmes Berthet et Imbert et MM. Milon, Laménie, Cuypers, Bonhomme, Duplomb, Dallier, H. Leroy, Lefèvre et Revet, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 7
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – L’article 446-1 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour le délit prévu au premier alinéa, l’action publique peut être éteinte, dans les conditions prévues aux articles 495-17 et suivants du code de procédure pénale, par le versement d’une amende forfaitaire d’un montant de 300 €. Le montant de l’amende forfaitaire minorée est de 250 € et le montant de l’amende forfaitaire majorée de 600 €. »
La parole est à Mme Brigitte Micouleau.
Mme Brigitte Micouleau. Je retire également cet amendement, monsieur le président, relatif à la vente à la sauvette.
M. le président. L’amendement n° 84 rectifié bis est retiré.
M. Alain Richard. Je modifie l’amendement n° 244 aux mêmes fins, monsieur le président, et retire son II, qui vise l’article 446-1 du code pénal.
M. le président. Les deux amendements suivants sont donc désormais identiques.
L’amendement n° 244 rectifié est présenté par MM. Yung, Mohamed Soilihi, de Belenet et les membres du groupe La République En Marche.
L’amendement n° 173 est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 9 à 13
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
1° Au premier alinéa de l’article 495-17, après le mot : « délictuelle » sont insérés les mots : « fixée par la loi, qui ne peut excéder le montant prévu au premier alinéa de l’article 131-13 du code pénal, » ;
La parole est à M. Alain Richard, pour présenter l’amendement n° 244 rectifié.
M. Alain Richard. Par cet amendement, nous souhaitons marquer une limite à la position prise par la majorité de la commission, qui va beaucoup plus loin dans la généralisation de l’usage de l’amende forfaitaire pénale, et qui le fait sans transition.
Le dispositif proposé par le Gouvernement porte, cela a été rappelé, sur un point très important, à savoir la consommation de stupéfiants comme la vente d’alcool aux mineurs. Il complète la réforme sur la répression de la conduite sans permis menée l’année dernière, après de longues discussions. Cela constitue une bonne avancée dans la pratique de l’amende pénale dans des domaines où, comme l’a rappelé Mme le garde des sceaux, la constatation peut se résumer à une évidence ; il n’y a pas véritablement de sujet d’investigation.
Il nous semble que la commission va trop vite en proposant une généralisation sans évaluation approfondie des cas dans lesquels pourrait se pratiquer l’amende forfaitaire.
J’ai retiré le II de cet amendement, qui s’en est trouvé donc modifié, car, comme cela vient d’être évoqué, la répression de la vente à la sauvette, qui constitue un cas supplémentaire un peu particulier, ne paraît pas prioritaire.
Il faut concentrer le développement de l’amende forfaitaire sur ces délits prioritaires qui, au fond, font l’objet de ce que j’appellerais le pénal de tous les jours. Pour ceux-ci, le procès pénal est lourd, complexe et ne produit pas de valeur ajoutée, comme le répète souvent la garde des sceaux. Ce mécanisme est une répression nécessaire et plus efficace, même si nous préconisons de ne pas le généraliser trop vite.
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, pour présenter l’amendement n° 173.
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Cet amendement vise à supprimer l’ajout de la commission des lois permettant de recourir à la procédure de l’amende forfaitaire délictuelle pour tous les délits punis d’une peine d’amende, afin de rétablir le texte dans sa version initiale.
La proposition adoptée par la commission des lois paraît un peu excessive, en ce que, comme vient de le rappeler Alain Richard, la catégorie des délits punis d’une peine d’amende recouvre des infractions très diverses pour lesquelles la procédure de forfaitisation n’est pas toujours souhaitable, dans la mesure où elle n’est pas toujours très simple à appliquer.
À titre d’exemple, si la proposition adoptée par la commission était maintenue, il serait permis de forfaitiser des faits d’outrage à une personne chargée d’une mission de service public ou encore le délit de dégradations légères par inscriptions sur les façades, véhicules, les voies publiques ou le mobilier urbain, ce qui ne semble pas opportun. Je crois qu’une telle extension va trop loin.
Comme l’a rappelé Alain Richard, la forfaitisation s’est adaptée aux délits dont la constatation est en pratique simple à opérer ; pour les autres infractions, c’est plus compliqué, parce qu’il faut recueillir des preuves et procéder à des constatations, ce qui n’est pas toujours adapté.
Par ailleurs, il me semblerait judicieux d’attendre un retour d’expérience sur la forfaitisation de certains délits avant d’envisager une généralisation aussi importante que celle à laquelle la commission souhaite procéder.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement vous propose, mesdames, messieurs les sénateurs, de rétablir le texte dans sa version initiale.
M. le président. Les deux amendements suivants sont également identiques.
L’amendement n° 78 est présenté par M. Antiste.
L’amendement n° 295 rectifié est présenté par Mme Costes, MM. Arnell et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Collin, Gabouty, Guérini et Guillaume, Mmes Jouve et Laborde et MM. Requier, Roux, Vall et Dantec.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 11 à 13
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Maurice Antiste, pour présenter l’amendement n° 78.
M. Maurice Antiste. La création d’un recours systématique à l’amende forfaitaire minorée pour tout type d’infraction ne permet pas d’engager une responsabilisation de l’auteur d’une infraction.
Cette logique d’amende forfaitaire est en contradiction avec le principe d’individualisation de la peine, puisque chaque personne paye l’amende sans qu’il soit tenu compte de la situation.
Enfin, le paiement d’une amende ne permet en aucun cas de mettre en place un mécanisme de prévention de la récidive à travers la compréhension de la portée de l’acte commis.
M. le président. La parole est à Mme Josiane Costes, pour présenter l’amendement n° 295 rectifié.
Mme Josiane Costes. Nous sommes opposés à la généralisation de l’amende forfaitaire. Nous souhaitons réserver celle-ci aux délits du quotidien punis d’une amende.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, corapporteur. Ces quatre amendements sont en réalité presque identiques. Ils tendent tous à revenir sur la volonté de la commission des lois d’élargir l’application de l’amende forfaitaire.
Je précise d’ailleurs que seuls les délits reconnus par leur auteur, la victime étant informée, et pour lesquels une peine d’amende peut être prononcée sont concernés. Les délits poursuivables par des peines de prison sont évidemment exclus. Il s’agit souvent de cas peu réprimés, les poursuites n’étant pas engagées du fait de la longueur des procédures devant les tribunaux.
C’est donc un outil supplémentaire en la matière, que nous pensons utile. Il figure d’ailleurs dans la proposition de loi tendant à renforcer l’efficacité de la justice pénale adoptée par le Sénat en janvier 2017.
C’est la raison pour laquelle la commission des lois a émis un avis défavorable sur les quatre amendements restant en discussion commune.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?