M. Claude Bérit-Débat. Ce n’est pas la question !

Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire dÉtat. Dans ce contexte, il était logique de remettre à plat les dispositifs spécifiques. C’est pourquoi le régime TODE a été concerné : dans le cadre du renforcement opéré au titre du régime général, ce régime gagne en attractivité, et les dispositifs spécifiques deviennent moins justifiés.

L’impact global de la réforme générale est positif en année pleine, avec un gain de 60 millions d’euros nets pour l’agriculture, les coopératives et les industries agroalimentaires françaises. Cet impact global recouvre des réalités différentes : un gain important pour la coopération et la transformation affiliées au régime agricole, mais, dans certains secteurs, en particulier le maraîchage, l’arboriculture et la viticulture, la suppression du dispositif TODE aura – et nous ne l’ignorons pas – des conséquences.

Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire dÉtat. C’est pourquoi, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019, nous proposerons de mettre en œuvre, dès le 1er janvier, l’allégement supplémentaire de charges de 4 points pour l’ensemble de la production agricole ; cet allégement ne bénéficiera aux autres entreprises qu’à partir du mois d’octobre.

L’analyse d’ensemble doit tenir compte des gains induits par les autres mesures annoncées la semaine dernière : la réforme de la fiscalité agricole ; la mesure relative à l’épargne de précaution, permettant de mieux appréhender la variabilité du revenu des agriculteurs ; l’exemption des agriculteurs de la hausse de la TICPE, la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, appliquée au gazole. C’est dans le cadre de cette analyse d’ensemble que nous recevrons les représentants des organisations professionnelles, afin d’envisager des mesures spécifiques pour répondre aux inquiétudes qui subsistent. (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour la réplique.

M. Didier Guillaume. Quand je vois un ministre de Bercy répondre à une question sur l’agriculture, je m’inquiète terriblement… (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe socialiste et républicain, du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.) Je m’inquiète d’autant plus que, j’ai le regret de vous le dire, madame la secrétaire d’État, vous n’avez pas répondu à la question que je vous ai posée.

Les coopératives et autres, pour vous, tout va bien ! Vous m’avez parlé de millions ; je vous ai parlé, moi, de femmes et d’hommes en détresse, de la fin du maraîchage, de la viticulture ou encore de l’arboriculture.

Monsieur le Premier ministre, l’erreur est facile à corriger. Il faut se remettre autour d’une table avec les organisations professionnelles agricoles, qui y sont prêtes. Vous le savez très bien : vous n’êtes pas loin d’un accord avec elles.

Répondre macroéconomie à une question sur les territoires ruraux, c’est ne pas répondre à la question. Aujourd’hui, il y a quelques mois à tenir. Le CICE et le TODE, c’est la double peine ! Monsieur le Premier ministre, je crois possible que votre écoute pour les agriculteurs soit positive. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)

projet de loi de finances pour 2019

M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

M. Éric Bocquet. Au lendemain de la présentation du projet de budget pour 2019, alors que la mousse abondante de la communication est retombée, nous jugeons utile d’interroger le Gouvernement sur ses choix budgétaires pour l’an prochain.

Notre société est minée par des inégalités croissantes – les rapports successifs de nombreux observateurs le démontrent régulièrement. Du côté de la distribution de dividendes, les groupes français – les plus généreux au monde – ont versé 47 milliards d’euros au deuxième trimestre de cette année. (M. David Assouline opine.) Sur 100 euros de bénéfices, 67 vont aux actionnaires, 5 seulement aux salariés !

Vous avez annoncé hier vouloir redistribuer du pouvoir d’achat aux salariés et retraités de ce pays, mais, dans le même temps, vous annoncez 4 100 suppressions de postes de fonctionnaires, dont 1 800 dans la seule éducation nationale. En matière d’éducation, on ne dépense pas : on investit pour l’avenir et pour la productivité ! Quant aux 2 227 suppressions de postes annoncées dans l’administration fiscale, ce seront autant de moyens de contrôle en moins pour lutter efficacement contre l’évasion fiscale.

M. le ministre de l’économie a dit hier en commission : on ne peut pas distribuer la richesse que l’on n’a pas. Le constat est fait que la richesse, nous l’avons. Ce qui manque, c’est la redistribution !

Gel du point d’indice des fonctionnaires, hausse des retraites bloquée à 0,3 %, qui entraînera d’office une baisse du pouvoir d’achat, déjà amputé cette année par la hausse de la CSG, et hausse des prix du tabac et du carburant – cette liste n’est pas exhaustive.

Redonner du pouvoir d’achat passe d’abord par une augmentation sensible du SMIC, une revalorisation des pensions et une mise à contribution des dividendes en croissance forte. La suppression de l’ISF et la création de la flat tax à 30 % n’ont, à l’évidence, pas permis de s’attaquer frontalement aux inégalités.

La théorie du ruissellement, à laquelle vous semblez croire encore, n’a jamais fait, nulle part, la preuve de son efficacité : Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ?

Mesdames, messieurs les ministres, quand allez-vous enfin tourner le dos aux politiques d’austérité ? (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le sénateur Bocquet, vous m’interrogez sur le budget que le Gouvernement a l’honneur de proposer au Parlement et qui sera bientôt discuté. Vous indiquez que, d’emblée, ce budget ne vous paraît pas aller dans le bon sens. Je n’en suis pas surpris. J’assume pourtant le texte qui vous sera présenté, car il correspond exactement aux engagements pris par le Président de la République au moment de la campagne présidentielle, puis par les candidats aux élections législatives.

Le budget que nous présentons traduit les priorités que nous fixons pour l’action de l’État et les défis que nous devons relever.

Le premier bloc à connaître une augmentation réelle des moyens qui lui sont affectés est celui qui concerne la sécurité des Français. La défense nationale, les armées bénéficieront ainsi d’une augmentation considérable l’année prochaine, comme cette année. Cet effort se poursuivra en 2020 et au-delà, parce que nous vivons dans un monde dangereux.

L’intérieur et la justice sont aussi concernés. En effet, comme chacun ici en a bien conscience – certaines questions précédentes l’ont montré –, les enjeux de sécurité publique, de protection contre le terrorisme et d’amélioration de notre système judiciaire sont au cœur de notre pacte républicain. Je crois, monsieur le sénateur, que, sur ce point, vous êtes d’accord avec nous.

Le deuxième grand bloc de mesures qui vont voir leurs moyens augmenter, ce sont les investissements pour l’avenir.

L’éducation nationale, dont le budget s’élève à 50 milliards d’euros, aura à sa disposition l’année prochaine 850 millions d’euros en plus. (Mme Marie-Noëlle Lienemann sexclame.)

Oui, madame la sénatrice : 850 millions d’euros en plus ! Parce que nous savons que le sujet est essentiel et parce que nous voulons mettre le paquet – pardonnez-moi cette expression triviale – sur l’école primaire et la rémunération des enseignants. Vous verrez dans le budget, monsieur le sénateur, que nous tenons sur 2018, 2019 et 2020 notre engagement d’augmenter de 1 000 euros chaque professeur enseignant en zone REP ou REP+ ; je pense que vous mesurez ce que représente cette augmentation considérable et nécessaire, que nous assumons parfaitement.

Outre l’éducation nationale, il y a aussi l’enseignement supérieur, la recherche et l’innovation. Sans oublier les infrastructures de transport, essentiellement, d’ailleurs, dans l’aspect rénovation du réseau existant, qui est un investissement pour l’avenir, ni la transition écologique, dont les moyens sont aussi en augmentation.

Je pense, monsieur le sénateur, que, sur ces sujets-là, vous n’êtes pas en désaccord avec nous.

Dans d’autres domaines, il est vrai, nous faisons des choix. Parce que nous ne croyons pas que, pour tenir nos finances publiques et respecter les engagements pris par la France, nous pourrions indifféremment augmenter l’ensemble des budgets. Parce que gouverner, c’est choisir, nous faisons des choix et nous les assumons.

Pour plusieurs politiques publiques, les résultats ne sont pas au rendez-vous ; nous en transformons donc les instruments.

Ainsi, en matière de politique du logement, la décision que nous avons prise de passer à la juste prestation, c’est-à-dire à la « contemporanéisation » du versement des APL, nous permettra d’économiser sur la dépense, sans revenir sur les droits. C’est un choix, et nous l’assumons.

En matière de politique du travail, nous nous reposions jusqu’à présent sur une utilisation massive – et souvent indexée sur le cours des consultations électorales – des contrats aidés. Nous réduisons ces contrats, nous les avons transformés et nous faisons en sorte qu’ils puissent effectivement permettre un retour à l’activité durable.

Monsieur le sénateur, ce budget traduit des choix, des choix cohérents avec ceux que nous avons faits l’année dernière et avec ceux que nous ferons l’année prochaine, des choix cohérents avec les priorités qui ont été présentées aux Français. Cette cohérence, vous pouvez la saluer.

Je tiens à insister sur un élément que, je le crains, seuls les spécialistes des finances publiques comprendront – mais ils sont nombreux au Sénat – : l’importance que nous avons accordée à l’estimation des sommes, à ce qu’on appelle la « sincérisation », à laquelle la Cour des comptes nous avait vivement encouragés, après, peut-être, des relâchements trop prononcés dans le passé – remarquez que je le dis avec mesure. (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)

Monsieur le sénateur, nous aurons l’occasion de débattre de ce budget, et vous verrez qu’il respecte les engagements que nous avons pris devant les Français et ceux que la France a pris, que le déficit diminue et que la dépense publique est modérée. Je me réjouis que nous puissions bientôt débattre de ce budget que nous assumons ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

sport

M. le président. La parole est à M. Michel Savin, pour le groupe Les Républicains.

M. Michel Savin. Madame la ministre des sports, le gouvernement auquel vous appartenez est le champion du monde : champion du monde de la communication dans beaucoup de domaines !

M. Michel Savin. Pour le sport, vous ambitionnez quatre-vingts médailles pour 2024, trois millions de nouveaux pratiquants, une nouvelle gouvernance et un budget préservé. Nous partageons ces ambitions, mais nous faisons face aussi à vos contradictions : le budget des sports représente moins de 0,2 % du budget national et diminue fortement, de 510 millions d’euros en 2017, 481 millions d’euros en 2018 et 451 millions d’euros en 2019. Sans oublier la suppression de la réserve parlementaire, qui finançait nombre de manifestations et équipements sportifs sur notre territoire. (Marques dapprobation sur plusieurs travées.) Telle est aujourd’hui la triste réalité de votre politique sportive !

Madame la ministre, vous avez demandé au mouvement sportif de vous faire confiance, mais, face à vos annonces, ce sont désormais des milliers de bénévoles et de clubs, soutenus, je le rappelle, à hauteur de 12 milliards d’euros par an par les collectivités territoriales, qui se retrouvent dans l’incertitude.

Les solutions existent ; le Sénat les a déjà proposées voilà un an. Il s’agit que le sport finance le sport et que les taxes affectées soient enfin déplafonnées, contrairement aux choix que vous nous proposez. L’ensemble des groupes politiques du Sénat, hormis bien sûr les sénateurs du groupe En Marche, ont voté ces propositions l’année dernière, et nous sommes prêts à les soutenir à nouveau.

Aussi ma question est-elle simple : accepterez-vous de déplafonner les taxes sur les jeux et la taxe Buffet, afin que le budget des sports retrouve son niveau de 2017 ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des sports, à qui je souhaite la bienvenue au Sénat.

Mme Roxana Maracineanu, ministre des sports. Monsieur le sénateur Savin, je vous remercie de votre question et de l’intérêt que vous portez au budget du ministère des sports.

Je vous rejoins sur un point : les enjeux de la politique sportive sont nombreux. Je porte, moi aussi, cette ambition, tant pour le rayonnement du haut niveau que pour l’accès aux pratiques sportives pour tous les publics et sur tout le territoire.

Je ne vous rejoins pas, en revanche, quand vous affirmez que le budget du ministère des sports est en baisse. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Je l’ai annoncé, et je le répète devant vous : le budget des sports sera préservé en 2019, et nous conserverons les mêmes moyens d’intervention qu’en 2018, une capacité d’action intacte et la même volonté d’agir en faveur du sport français.

Monsieur Savin, vous savez, j’en suis sûre, que, dans le budget pour 2018, le poste relatif à la compensation de l’exonération des cotisations salariales des arbitres a été surévalué de 40 millions d’euros. Dans le projet de loi de finances, dont la première caractéristique, que vient de rappeler M. le Premier ministre, est d’être sincère, 30 millions d’euros apparaissent en effet en différentiel, et je l’assume. Nous conservons 10 millions d’euros de crédits, qui seront consacrés à des mesures nouvelles. À ces 10 millions d’euros s’ajoutent 30 millions d’euros supplémentaires issus de redéploiements divers, notamment du lissage des dépenses sur les grands événements sportifs et de la fin des programmes d’investissement, par exemple pour la restructuration de l’INSEP.

Cette enveloppe globale de 40 millions d’euros – 10 millions, plus 30 millions – sera dirigée, d’une part, vers la haute performance et, d’autre part et surtout, vers le développement des pratiques : 25 millions d’euros pour la haute performance et 15 millions d’euros supplémentaires alloués à la réduction des inégalités d’accès à la pratique sportive sur les territoires carencés, notamment à travers le renforcement du savoir nager, un sujet qui, vous le savez, me tient à cœur.

À ce propos, mesdames, messieurs les sénateurs, j’attire votre attention sur le fait que nous poursuivons les discussions afin d’obtenir des financements supplémentaires pour réduire encore les inégalités territoriales.

M. le président. Il va falloir penser à conclure !

M. Roger Karoutchi. Et à répondre à la question !

Mme Roxana Maracineanu, ministre. J’accompagnerai mon collègue Gérald Darmanin au banc du Gouvernement de l’Assemblée nationale lors du vote du budget. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. Michel Savin, pour la réplique.

M. Michel Savin. Madame la ministre, premièrement, vous n’avez pas répondu à ma question.

Deuxièmement, les faits sont terribles, et les chiffres restent des chiffres : votre budget baisse de 30 millions d’euros. Une nouvelle fois, ce sont les arbitrages de Bercy qui ont eu gain de cause, et non le budget du sport.

M. Michel Savin. Le Sénat fera donc son travail, en réaffectant les crédits nécessaires pour qu’une politique sportive sur l’ensemble des territoires puisse perdurer : c’est ce qu’attendent le milieu sportif et l’ensemble de ses bénévoles ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe socialiste et républicain.)

assises de l’eau

M. le président. La parole est à M. Frédéric Marchand, pour le groupe La République En Marche.

M. Frédéric Marchand. Ma question s’adresse à M. le secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.

Le 25 septembre 2015, voilà trois ans, 193 États membres adoptaient à l’ONU le programme de développement durable à l’horizon de 2030, dit Agenda 2030. Cet agenda est porteur d’une vision forte : transformer le monde en affichant l’éradication de la pauvreté comme une nécessité et se donner les moyens d’une transition vers un développement durable.

Dix-sept objectifs de développement durable et 169 cibles ou sous-objectifs forment le cœur de cet agenda, qui engage ses signataires. Une partie de ces engagements porte sur la question, cruciale, de l’eau.

Sur ce sujet, la France est en première ligne. Le 24 novembre dernier, à l’occasion du congrès des maires, le Président de la République annonçait le lancement des assises de l’eau, afin notamment de renouveler et de moderniser nos infrastructures. En avril dernier s’ouvrait la première séquence de ces assises, consacrée à la relance des investissements sur les réseaux et l’assainissement.

Dans ce cadre, et pour répondre au mieux aux attentes des territoires, une concertation très large et inédite a été engagée avec les élus locaux, notamment via une consultation en ligne des maires et des échanges sur le terrain au sein des comités de bassin. Cette méthode était claire : s’appuyer sur les élus locaux pour être au plus proche des préoccupations de nos concitoyens. En parallèle, un diagnostic détaillé révélait notamment qu’un litre sur cinq se perd dans les réseaux d’eau, avec de forts contrastes selon les services d’eau et d’assainissement.

Il ressort des assises de l’eau que, pour améliorer la qualité de service et optimiser les investissements, il faut améliorer la connaissance des services d’eau sur l’ensemble du territoire.

En définitive, ces assises de l’eau, en s’appuyant particulièrement sur les élus locaux, ont été riches d’enseignements. Elles sont d’ailleurs amenées à se poursuivre sur la question, cruciale, du rapport entre le changement climatique et les ressources en eau.

Dans l’attente de cette deuxième séquence, pouvez-vous nous indiquer, monsieur le secrétaire d’État, quelles mesures seront prises pour concrétiser les conclusions de ces assises et si les financements nécessaires seront bien au rendez-vous ? (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.

M. Sébastien Lecornu, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur Marchand, la consultation à laquelle 2 500 maires de France ont participé a en effet permis d’établir deux constats assez clairs.

Premièrement, si la gestion de l’eau et de l’assainissement est une compétence phare de la décentralisation, les élus locaux expriment le besoin d’un accompagnement de l’État, notamment en matière d’ingénierie financière et technique.

Deuxièmement, à l’évidence, nos collègues élus locaux ont des difficultés pour connaître leur patrimoine et leurs réseaux d’eau. C’est là aussi une question de méconnaissance en matière d’ingénierie.

Les assises de l’eau, auxquelles ont participé tous les acteurs du monde de l’eau, en particulier toutes les associations d’élus, mais également les entreprises de la filière et les ONG, ont permis de réaffirmer un certain nombre de principes forts et un investissement inédit, sur lequel le Premier ministre lui-même a présenté des annonces dans les Hautes-Alpes, au début de ce mois.

Le premier principe, c’est l’attachement collectif au principe et au modèle des agences de l’eau, avec à leur côté leur conseil d’administration et les différents comités de bassin.

Le deuxième principe, c’est l’affirmation des solidarités dans trois dimensions. D’abord, la solidarité de l’urbain vers le rural, avec un effort financier inédit pour le rural, puisque 2 milliards d’euros vont être débloqués sur six ans, ce qui représente 50 % en plus par rapport à la période précédente. Ensuite, la solidarité pour les outre-mer, où la question de la ressource en eau est parfois préoccupante. Je pense évidemment au plan Eau-DOM et aux contrats de progrès – nous serons amenés à y revenir avec le Président de la République dans quelques jours. Enfin, la solidarité avec les personnes les plus fragiles.

L’accompagnement portera également sur l’innovation. Ainsi, 300 millions d’euros supplémentaires serviront à financer l’innovation, notamment pour les grandes villes. La Caisse des dépôts et consignations mettra sur la table 2 milliards d’euros en prêts pour les cinq années à venir.

Au total, l’effort pour l’eau passera de 36 milliards à 41 milliards d’euros entre 2009 et 2024.

Monsieur le président Larcher, je tiens à remercier l’ensemble des sénateurs, de tous les groupes politiques, qui ont participé à cette œuvre consensuelle, notamment pour nos territoires ruraux. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)

relations des élus locaux avec le gouvernement

M. le président. La parole est à Mme Sylviane Noël, pour le groupe Les Républicains. C’est la première question de notre collègue, à qui nous souhaitons le meilleur ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Sylviane Noël. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.

Monsieur le ministre d’État, c’est la première fois que je prends la parole dans l’hémicycle depuis mon entrée au Sénat, en août dernier. Pendant dix ans, j’ai exercé le beau mandat de maire dans une petite commune de montagne. Très présente sur le terrain, je constate la résignation qui gagne les maires et, plus largement, l’ensemble des élus municipaux.

Baisse des dotations, suppression de la taxe d’habitation, diminution des contrats aidés, changements incessants des lois et réglementations, inflation des normes techniques coûteuses, fermeture des services publics, irrespect des lois et violences par les gens du voyage : la liste est longue des problèmes qui expliquent le ras-le-bol des maires. Des maires qui souffrent de ne pas se sentir considérés par l’État, dont ils sont pourtant les premiers serviteurs. Des maires qui, eux, établissent et font voter des budgets en équilibre, quand l’État, lui, n’a pas présenté un budget en équilibre depuis 1974. Des maires qui en ont assez d’être pointés du doigt par l’État pour leur gestion, alors qu’ils gèrent leur commune en bons pères de famille.

Cet été, un chiffre est passé inaperçu : plus de 1 000 démissions de maires ont été recensées depuis 2014. Gageons que, en 2020, malheureusement, ils seront nombreux à ne pas se représenter.

Aujourd’hui, monsieur le ministre d’État, les maires se posent des questions sur l’avenir du mandat municipal, et nous avec eux. Quand un député parisien de votre majorité déclare cet été qu’il suffit de regrouper les communes, que cherche-t-on : une République de « technotables » ?

Demain, comment le Gouvernement pourra-t-il réformer le pays sans le concours des communes et de leurs élus, alors que l’État n’a plus assez de services sur le terrain ? Comme le répète inlassablement le président du Sénat, l’État ne peut se réformer contre les territoires !

Notre République a besoin des communes, qui constituent le terreau de la démocratie. Les maires en sont les vigiles autant que les fantassins.

Monsieur le ministre d’État, ma question est simple : le Gouvernement est-il prêt à changer d’attitude et de cap pour renouer le dialogue avec les maires de France et leur redonner leur place, leur rôle et leurs moyens d’action légitimes au service du pays ? (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur.

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre dÉtat, ministre de lintérieur. Madame la sénatrice, permettez-moi de vous féliciter pour votre élection au Sénat de la République.

Je connais bien votre département, pour y être allée régulièrement. J’ai de nombreux amis élus en Haute-Savoie, et j’y pensais en écoutant la réponse précédente, car j’étais tout à fait dans votre secteur au mois de mars, à Cluses, dans la vallée de l’Arve. Nous avons beaucoup travaillé avec le fondateur du syndicat mixte d’aménagement de l’Arve et de ses abords, le SM3A. C’est aussi grâce à Martial Saddier, sur le terrain, que nous avons pu, dans le cadre des assises de l’eau, dont Sébastien Lecornu vient de parler, travailler avec les élus locaux et construire des politiques avec eux.

C’est en effet dans le dialogue, madame la sénatrice, que le Gouvernement agit sur le terrain et négocie au sein de la Conférence nationale des territoires (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.), ainsi bien sûr qu’avec les associations d’élus et les élus qui veulent bien être présents.

Par ailleurs, vous ne pouvez pas parler de baisse des dotations. (Rires et exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Non, vous ne le pouvez pas ! (M. Martin Lévrier applaudit.) En effet, comme vous le savez, c’est la première fois depuis de longues années que la dotation globale de fonctionnement a une enveloppe stable et que les dotations d’investissement aux collectivités territoriales augmentent par rapport à l’année précédente – vous constaterez dans le prochain budget qu’elles s’établissent à 2,1 milliards d’euros.

Enfin, vous parlez de la lassitude des élus. On peut, bien entendu, démissionner pour plein de raisons,…

M. François Grosdidier. Voyez Collomb ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Jacqueline Gourault, ministre. … mais il ne vous a pas échappé…

M. le président. Il faut conclure !

Mme Jacqueline Gourault, ministre. … que deux phénomènes ont joué cette année : l’instauration des nouvelles règles de cumul des mandats – vous-même avez été obligée de démissionner de votre mairie (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) –…