M. Alain Fouché. Non, c’est faux !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je regrette, mais ces chiffres sont exacts !
Mme Costes suggère de développer le travail avec les écoles. La Prévention routière, qui est une association de la loi de 1901, réalise déjà un travail remarquable partout dans les départements. Ainsi, dans mon département, toutes les classes du primaire et du collège passent au moins deux jours par an et par niveau dans des centres de prévention routière.
La Sécurité routière a également signé un protocole avec 900 entreprises françaises afin de sensibiliser 3 millions de salariés aux problèmes liés à l’alcool au volant, à la vitesse, etc. Beaucoup de choses sont donc faites.
J’ai également été interrogée sur les délais d’attente pour passer le permis de conduire. Comme cela a été rappelé, une réforme a été engagée par M. Cazeneuve, l’ancien ministre de l’intérieur, laquelle a produit des effets. Aujourd’hui, le délai d’attente médian est de 40 jours, soit une durée inférieure à celle qui était constatée auparavant. Quant au coût du permis, il est effectivement assez élevé, mais il se situe dans la moyenne européenne, qui oscille entre 1 600 euros et 1 800 euros.
M. Gontard m’a interrogé sur la place du vélo dans le plan Mobilité. Le plan Vélo figurera bien dans le projet de loi d’orientation sur les mobilités, lequel sera prochainement soumis au Parlement. Je vous invite donc à vous rapprocher de Mme Borne, qui défendra ce projet de loi.
M. Leroy m’a interrogé sur les caméras-piétons des policiers municipaux. Je rappelle que la décision, en date du 3 juin 2016, d’équiper les policiers municipaux avait été prise par l’ancien gouvernement et que sa mise en œuvre est intervenue par décret au mois de septembre 2016. Comme le prévoyait la loi, une expérimentation a été effectuée. Elle a eu lieu dans 344 communes. Au total, 2 106 caméras ont été fournies aux policiers municipaux. Un rapport sera présenté dans quelques jours. Le bilan est positif.
Monsieur Leroy, le groupe UDI, Agir et indépendants de l’Assemblée nationale a déposé une proposition de loi en ce sens, soutenue par le Gouvernement. Celle-ci, inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale le 13 juin prochain, a été examinée en commission des lois ce matin. L’expérimentation va donc être pérennisée. Cela s’inscrit dans la logique générale d’équipement des gendarmes et des policiers, la police de sécurité du quotidien, vous le savez, tendant à organiser territorialement la sécurité en nouant des relations étroites entre la police, la gendarmerie et la police municipale. Cette proposition de loi sera ensuite évidemment soumise au Sénat ; je pense que son adoption ne devrait pas poser de problème.
Avant de conclure, mesdames, messieurs les sénateurs, après avoir répondu, je l’espère, à toutes vos questions, je tiens à souligner que le sujet dont nous débattons ce soir est grave. Je fais partie de ceux qui ont assisté à la réflexion menée par le Premier ministre sur la question. De plus, il se trouve que j’habite un département rural comportant des voiries très accidentogènes, en particulier les levées de la Loire, ou encore les routes de Sologne, fréquemment traversées par des animaux sauvages, notamment des sangliers. Donc, je vous le dis très sincèrement, cela ne me choque pas que la vitesse soit limitée à 80 kilomètres par heure sur certaines routes. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. (M. Alain Fouché applaudit.)
M. Hervé Maurey, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais d’abord saluer nos trois rapporteurs, qui ont eu à cœur de travailler avec sérieux, rigueur et sans a priori, sans méconnaître la gravité du sujet, soulignée par Mme la ministre à la fin de son propos.
La lutte contre l’insécurité routière est un combat que nous partageons tous dans cet hémicycle, mais c’est un combat qui, pour être efficace, ne peut être mené sans faire œuvre de pédagogie et sans rechercher un minimum d’adhésion de la part des usagers de la route.
Aujourd’hui, force est de constater que les politiques de sécurité routière sont beaucoup trop souvent perçues comme punitives, ce que nous déplorons tous. Pire, beaucoup de Françaises et de Français considèrent que ces politiques ont pour seul objectif de « remplir les caisses de l’État », « de faire du chiffre », disent certains, quand ils ne parlent pas de « racket ». Ce n’est évidemment pas satisfaisant, mais cela illustre bien la défiance à l’égard de la politique de sécurité routière.
La décision du Premier ministre – je dis bien du Premier ministre, puisqu’elle ne semble pas faire l’unanimité au sein du Gouvernement – de réduire de manière unilatérale et brutale la vitesse maximale autorisée à 80 kilomètres par heure sur la quasi-totalité des routes secondaires ne fait que renforcer ce sentiment. Cette décision provoque l’incompréhension et le mécontentement de nombreux citoyens et d’élus.
Cette incompréhension et ce mécontentement, cette colère même, touchent particulièrement les habitants des territoires ruraux, car ce sont bien eux les plus concernés. Les habitants des grandes villes ou des grandes métropoles disposent en effet de transports en commun pour circuler et, quand bien même ils utilisent leur véhicule, la question de rouler à 90 ou à 80 kilomètres par heure ne se pose pas.
En revanche, en milieu rural, vous n’avez pas d’alternative à l’usage de la voiture pour parcourir chaque jour parfois plusieurs dizaines de kilomètres pour aller travailler. Comment s’étonner dès lors que cette mesure soit perçue comme un mauvais coup supplémentaire porté à la ruralité ?
Cette mesure est d’autant moins compréhensible qu’elle intervient après la conduite d’une expérimentation dont le moins que l’on puisse dire est qu’elle est fortement contestée sur le plan scientifique.
M. Alain Fouché. Absolument !
M. Hervé Maurey, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Le délégué interministériel à la sécurité routière a d’ailleurs été dans l’incapacité d’apporter à nos commissions des éléments tangibles prouvant l’utilité de cette proposition. Le Gouvernement n’y est pas non plus parvenu.
Dans ces conditions, pourquoi ne pas avoir commencé par réaliser une véritable expérimentation sur un nombre significatif de tronçons routiers et pendant une période suffisante ?
M. Gilbert Bouchet. Il y en a eu une dans la Drôme !
M. Hervé Maurey, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Pourquoi ne pas avoir décidé d’associer le plus largement possible les acteurs concernés à la décision de réduction de la vitesse maximale autorisée, notamment les présidents de département ?
À ce problème de méthode s’ajoute un problème lié au caractère uniforme de cette mesure. Une étude publiée par l’Observatoire national interministériel de la sécurité routière le 17 avril dernier, dont vous avez d’ailleurs parlé, madame la ministre, montre que, parmi les routes à double sens sans séparateur central, ce sont les routes nationales et les principales routes départementales drainant le plus fort trafic qui sont responsables du plus grand nombre d’accidents mortels.
En approfondissant ce travail, il aurait été possible de dresser une cartographie des routes accidentogènes département par département.
Pourquoi, dès lors, vouloir appliquer la réduction de vitesse à l’ensemble des routes bidirectionnelles ? Qui peut prétendre que toutes les routes nécessitent la même limitation de vitesse ? Qui peut affirmer qu’elles présentent toutes la même dangerosité ? C’est pour le moins une vision manichéenne et technocratique.
Les propositions formulées par nos rapporteurs, notamment celle de laisser aux présidents de département le soin de fixer la vitesse maximale autorisée en fonction de la dangerosité des routes, me semblent tellement plus logiques et mieux adaptées que ce que le Premier ministre a décidé. Pourquoi refuser d’en tenir compte ?
Nous ne pouvons donc que regretter cette décision, madame la ministre, et le fait que le Gouvernement, comme souvent malheureusement, ne fasse aucun cas des travaux menés par le groupe de travail sénatorial.
Nos rapporteurs ont formulé une proposition de bon sens qui favoriserait l’acceptabilité de la mesure de réduction de la vitesse maximale autorisée et la rendrait plus efficace.
Nous sommes prêts, nous l’avons dit, à soutenir les initiatives du Gouvernement en matière de sécurité routière et sommes majoritairement favorables aux mesures contenues dans le plan visant à renforcer les sanctions contre les auteurs d’infractions graves au code de la route et à sévir davantage contre l’usage du téléphone et l’alcoolémie au volant.
En revanche, vous l’avez compris, nous regrettons le caractère général de la réduction de la vitesse à 80 kilomètres par heure, la méthode choisie et l’entêtement du Premier ministre.
Vous nous dites, madame la ministre, que la mesure sera revue dans deux ans : cela ne me paraît ni réaliste, ni sérieux, ni même décent, ne fût-ce que parce que, selon les chiffres du Gouvernement, environ 9 millions d’euros auront été investis dans des panneaux de limitation de vitesse à 80 kilomètres par heure !
Lorsqu’il s’agit de mesures aussi significatives que l’abaissement de la vitesse autorisée sur l’ensemble du réseau, la moindre des choses est de faire preuve de pédagogie et de concertation. Le Gouvernement n’a fait preuve ni de l’une ni de l’autre. Cette mesure ne fera donc que renforcer davantage encore la défiance des Français à l’égard de la politique de sécurité routière et la colère des automobilistes qui vont être verbalisés, particulièrement en milieu rural. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, du groupe Les Républicains, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe Les Indépendants – République et Territoires, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Indépendants – République et Territoires.)
M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, mes chers collègues, je veux à mon tour saluer et remercier nos rapporteurs qui, en un temps record, ont mené à bien des travaux dont chacun, à cette tribune, a pu saluer la sérénité, l’objectivité, la sagesse, le recul et la hauteur de vue.
Madame la ministre, si je partageais vos certitudes, je n’hésiterais pas à soutenir les dispositions que le Premier ministre a arrêtées, mais je ne les partage pas. Le rapport que nos collègues nous ont présenté devrait suffire à convaincre le Gouvernement qu’il a adopté une mesure qui ne produira pas les effets escomptés.
La croyance dans l’efficacité de cette mesure me paraît relever d’un acte de foi – j’y suis sensible, bien sûr (Sourires.) – plutôt que d’une démonstration.
Le rapport d’avril dernier que vous avez cité a parfaitement identifié un certain nombre d’axes sur lesquels les accidents mortels sont nombreux, mais il n’a nullement dit que ces accidents avaient été causés par une vitesse comprise entre 80 et 90 kilomètres par heure, et que la solution consistant à diminuer de dix kilomètres par heure la limitation de vitesse serait donc la solution pour mettre fin aux accidents qui se produisent sur ces routes. Si bien que l’invocation de ce rapport, à longueur de journée, n’a strictement aucun caractère scientifique.
Nous vous rejoignons, bien sûr, pour dire que, sur ces axes, des mesures doivent être prises pour réduire ces accidents.
Madame la ministre, vous le savez, j’étais aux côtés de Jacques Chirac quand il a fait de la lutte contre la mortalité routière l’un des grands chantiers de son quinquennat. Je veux vous dire mon engagement total pour cette cause, qui est une grande cause nationale. Nous la partageons tous : il n’y a pas, d’un côté, le Gouvernement qui veut réduire la mortalité routière et, de l’autre, le Sénat qui s’oppose à toute mesure destinée à cette réduction.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Vous ne nous avez pas accusés, madame la ministre, d’avoir de telles intentions.
Le Gouvernement nous dit vouloir s’inscrire, par les mesures nouvelles qu’il propose, dans la continuité de l’action qui a été conduite au début des années 2000. Je ne conteste naturellement ni sa sincérité ni la légitimité de ses intentions, mais il ne suffit pas que les objectifs soient justes pour que les moyens soient bons.
Le Gouvernement doit cesser de diaboliser les interrogations et les réserves qui sont exprimées. Elles ne résultent pas d’une résurgence tardive de je ne sais quel poujadisme, mais d’un examen critique, approfondi, documenté, de la pertinence des mesures de limitation de la vitesse normale sur les routes départementales à 80 kilomètres par heure et de l’évaluation de son efficacité. Nous partageons la certitude objective que la vitesse tue. Cependant, il serait plus exact de dire que c’est l’excès de vitesse par rapport aux limitations actuelles qui tue (Exactement ! sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.) et non pas le fait que ces limitations seraient insuffisantes. Il n’y a pas de rationalité au raisonnement qui sous-tend la mesure que le Premier ministre entend imposer aux Français, il n’y aura donc pas non plus de résultats.
Je voudrais vous dire par ailleurs que si la vitesse tue, madame la ministre, elle tue plus encore quand elle est associée à d’autres facteurs. Vous les avez rappelés, beaucoup de collègues l’ont fait aussi, notamment nos rapporteurs : l’alcool, les stupéfiants, l’endormissement, l’usage du téléphone portable, les fautes de conduite…
Nos rapporteurs ont réalisé un travail considérable. Ils ont démontré qu’il faut agir sur tous ces facteurs pour être efficace. C’est la proposition qu’ils font avec une mesure décentralisée au lieu d’être étatique,…
M. Alain Fouché. Très bien !
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. … affinée plutôt qu’aveugle, concertée plutôt que décidée par voie d’autorité, qui responsabilise au lieu d’infantiliser, évaluée avant d’être appliquée. La sagesse voudrait que cette proposition soit acceptée par le Gouvernement : c’est une chance que nous lui offrons, une main que nous lui tendons. Notre but ne doit pas être de créer un électrochoc éphémère chez les Français, mais de les faire concourir par adhésion, en obtenant l’évolution de leur comportement au volant, à l’amélioration générale de la sécurité routière. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe Les Indépendants – République et Territoires, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
M. le président. Nous en avons terminé avec le débat sur les conclusions du rapport Sécurité routière : mieux cibler pour plus d’efficacité.
8
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, mercredi 6 juin 2018 :
À quatorze heures trente :
Explications de vote, puis vote sur la proposition de loi relative à l’autorisation d’analyses génétiques sur personnes décédées (n° 273, 2017-2018) ;
Rapport de Mme Catherine Deroche, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 523, 2017-2018) ;
Texte de la commission (n° 524, 2017-2018).
Explications de vote, puis vote sur la proposition de loi visant à attribuer la carte du combattant aux soldats engagés en Algérie après les accords d’Évian, du 2 juillet 1962 jusqu’au 1er juillet 1964 (n° 431, 2017-2018) ;
Rapport de M. Philippe Mouiller, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 511, 2017-2018) ;
Texte de la commission (n° 512, 2017-2018).
Proposition de résolution européenne au nom de la commission des affaires européennes, en application de l’article 73 quater du Règlement, en faveur de la préservation d’une Politique agricole commune forte, conjuguée au maintien de ses moyens budgétaires (n° 430, 2017-2018) ;
Rapport d’information de M. Daniel Gremillet, Mme Pascale Gruny, MM. Claude Haut et Franck Montaugé, fait au nom de la commission des affaires européennes et de la commission des affaires économiques (n° 437, 2017-2018) ;
Rapport de MM. Daniel Gremillet et Franck Montaugé, fait au nom de la commission des affaires économiques et texte de la commission (n° 475, 2017-2018).
Le soir :
Proposition de résolution relative aux obligations déontologiques et à la prévention des conflits d’intérêts des sénateurs, présentée par M. Gérard Larcher, président du Sénat (n° 364, 2017-2018) ;
Rapport de M. Philippe Bas, fait au nom de la commission des lois (n° 517, 2017-2018) ;
Texte de la commission (n° 518, 2017-2018).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt-trois heures vingt-cinq.)
nomination de membres de commissions
Le groupe communiste républicain citoyen et écologiste a présenté une candidature pour la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai prévu par l’article 8 du règlement, cette candidature est ratifiée : M. Pierre Laurent est membre de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, en remplacement de M. Thierry Foucaud.
Le groupe communiste républicain citoyen et écologiste a présenté une candidature pour la commission des affaires européennes.
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai prévu par l’article 8 du règlement, cette candidature est ratifiée : M. Pierre Laurent est membre de la commission des affaires européennes, en remplacement de M. Thierry Foucaud.
Le groupe communiste républicain citoyen et écologiste a présenté une candidature pour la commission de la culture, de l’éducation et de la communication.
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai prévu par l’article 8 du règlement, cette candidature est ratifiée : Mme Céline Brulin est membre de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, en remplacement de M. Pierre Laurent.
Direction des comptes rendus
GISÈLE GODARD