M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Monsieur Iacovelli, dans le cadre du programme Action publique 2022, l’accès dématérialisé à tous les services publics est une priorité. L’objectif est de simplifier et de faciliter l’accès de nos concitoyens aux services publics en leur offrant un service plus rapide et plus efficace.
L’Institut national de la propriété industrielle s’inscrit dans cette dynamique commune à tous les services publics.
Grâce aux téléservices mis en place, le dépôt en ligne et la suppression des formalités au format papier sont effectifs pour les indications géographiques et les demandes d’extension des marques à l’international depuis 2015, pour les oppositions de marques depuis 2016 et pour les marques, les dessins et modèles et les inscriptions modificatives depuis octobre 2017.
La dématérialisation complète de ces procédures présente de nombreux avantages. Ainsi, l’utilisation du support électronique rend plus fluide le traitement des dossiers, ce qui bénéficie en retour au déposant, lequel peut obtenir une réponse plus rapide à sa demande. Les téléservices renforcent la qualité des échanges entre l’INPI et les déposants, en permettant notamment à ceux-ci d’avoir accès en temps réel à l’état d’avancement de leurs demandes. Enfin, le dépôt électronique élimine le risque d’erreur de saisie des données et sécurise ainsi la procédure de traitement des dossiers.
Des mesures d’accompagnement ont été prises pour faciliter l’appropriation des téléservices par les utilisateurs. Ainsi, l’institut propose à tous les déposants une assistance téléphonique personnalisée par des spécialistes pour les aider dans leur prise en main. Les équipes des délégations régionales de l’INPI, implantées dans chacune des treize régions métropolitaines, sont également disponibles pour proposer leurs services et fournir tous les renseignements utiles.
L’INPI reçoit annuellement plus de 90 000 demandes de marques françaises, dont 94 % étaient déjà déposées sous un format électronique avant le mois d’octobre dernier ; trois mois après la décision de dématérialisation complète de la procédure, l’INPI reçoit moins d’un dossier par jour par voie papier sur les 400 marques déposées quotidiennement, soit 0,25 %, ce qui permet d’apporter aux usagers dans cette situation une réponse personnalisée.
Comme vous pouvez le constater, la dématérialisation des procédures n’a donc en rien affecté la continuité du service public.
Il convient évidemment d’encourager cette démarche de dématérialisation et de progrès, tout en prévoyant les mesures d’accompagnement appropriées des agents comme des usagers, afin d’assurer dans les meilleures conditions le passage au format numérique et de répondre aux 0,25 % de demandes encore présentées sous format papier, que je viens d’évoquer.
Je vous remercie de votre question, monsieur le sénateur, car elle nous permet de faire un état des lieux sur la démarche du Gouvernement en matière de modernisation des services publics, en particulier de dématérialisation des procédures.
Soyez assuré que nous veillerons scrupuleusement à ce que l’intégralité des dépôts de marques puissent être effectués par l’ensemble des usagers, mais avec l’objectif d’une dématérialisation complète à terme, accompagnée de services de prise en main et d’assistance aux usagers.
M. le président. La parole est à M. Xavier Iacovelli.
M. Xavier Iacovelli. Monsieur le secrétaire d’État, votre réponse me satisfait en grande partie. Néanmoins, nous devons rester attentifs à tous ceux qui ne peuvent pas encore effectuer de dépôt sous forme dématérialisée.
On peut certes aller vers le « tout-dématérialisé », mais un accompagnement reste indispensable. A minima, l’INPI devrait accepter d’enregistrer les dépôts au format papier dans un premier temps, quitte à les rejeter par la suite pour qu’ils soient dématérialisés. C’est la moindre des choses quand on touche à des marques françaises.
communes sans dotation globale de fonctionnement frappées de prélèvements supplémentaires
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, auteur de la question n° 147, adressée à M. le ministre de l’action et des comptes publics.
M. Jean-Marc Todeschini. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite attirer votre attention sur la situation de certaines collectivités locales, notamment les communes. J’illustrerai mon propos par un exemple pris en Moselle.
Tout à l’heure, on a évoqué la loi Florange, du nom d’une commune de Moselle connue pour ses déboires sidérurgiques ; pour ma part, je citerai la ville de Gandrange.
Depuis plusieurs années, Gandrange est confrontée à une baisse très importante de sa dotation globale de fonctionnement, ou DGF, ainsi qu’à la chute de ses recettes fiscales locales du fait de la déconstruction de l’usine Mittal.
En 2013, cette commune percevait 458 986 euros au titre de la DGF ; elle ne recevait plus que 217 382 euros en 2014, 133 077 euros en 2015 et 44 651 euros en 2016. Enfin, en 2017, Gandrange s’est vu notifier une DGF réduite à zéro.
Les difficultés ne s’arrêtent pas là : par un arrêté du préfet en date du 2 octobre 2017, l’État réclame à la commune un prélèvement supplémentaire de 39 643 euros. Gandrange, qui ne recevait plus rien en 2017, se retrouve ainsi avec une DGF négative !
Dans le même temps, la déconstruction de l’usine Mittal, engagée en 2016, a amputé de moitié le produit de la taxe foncière sur les propriétés bâties. Cette dernière est passée de 528 536 euros à 287 413 euros.
Si rien n’est fait, la commune de Gandrange – et bien d’autres communes vivent la même situation ! – se trouvera très vite dans l’impasse et dans l’incapacité de dégager des ressources pour conduire ses investissements. Pis, elle ne sera plus en mesure d’assumer ses dépenses de fonctionnement, lesquelles sont liées à des investissements passés, engagés à l’époque où la sidérurgie était florissante.
Monsieur le secrétaire d’État, vous conviendrez avec moi qu’il y a là un problème. Les élus locaux ont tout simplement l’impression que l’État leur fait les poches.
Bien sûr, je le répète, Gandrange est un exemple parmi d’autres ; mais les élus concernés ont le sentiment que l’État procède à ces ponctions pour assurer son propre fonctionnement, et qu’il les laisse seuls face aux réalités quotidiennes difficiles dont ils ont à connaître dans l’exercice de leurs fonctions.
Envisagez-vous de procéder à une étude approfondie de ces différentes situations, afin d’en évaluer la portée et les conséquences ? Plus encore, comptez-vous engager une réflexion afin d’annuler ces amputations sur les budgets des communes qui ne perçoivent aucune DGF et qui doivent faire face à de nouvelles baisses de recettes, notamment lorsqu’elles sont liées à des restructurations économiques entraînant la disparition d’entreprises et, par contrecoup, des diminutions de recettes via la fiscalité sur le foncier bâti ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Monsieur Todeschini, comme vous l’avez rappelé, les collectivités territoriales ont été associées à l’effort de redressement des finances publiques.
Compte tenu du poids des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales dans les recettes de celles-ci, soit 22,5 % de leur montant total en 2015, des mesures ont été prises dès 2008 pour encadrer l’évolution des dotations. En 2010, ces dotations ont été gelées. Puis, à compter de 2014, l’État a décidé de baisser le montant de la dotation globale de fonctionnement versée aux collectivités territoriales. A contrario, l’année 2018 marquera le retour à la stabilité de l’enveloppe globale de dotations versées par l’État aux collectivités territoriales.
Depuis 2014, une contribution au redressement des finances publiques, ou CRFP, a ainsi été répartie entre les différentes catégories de collectivités, et ce proportionnellement à la part respective de leurs recettes dans les recettes totales des collectivités territoriales.
Pour les communes, qui ont contribué à hauteur de 4,2 milliards d’euros entre 2014 et 2017, la répartition de l’effort s’est faite au prorata des recettes réelles de fonctionnement, conformément aux propositions du comité des finances locales. Grâce à cette disposition, chaque commune contribue de manière strictement proportionnelle aux ressources dont elle dispose.
C’est simplement en cas d’insuffisance de la dotation forfaitaire que les communes ont contribué au redressement des finances publiques via un prélèvement sur recettes fiscales. Cette situation concernait 439 communes au total en 2017. Le prélèvement sur la fiscalité ne pouvait donc concerner que des communes pour lesquelles la dotation forfaitaire représente une part faible des ressources.
C’est le cas de la commune de Gandrange que vous avez citée en exemple, pour laquelle la dotation forfaitaire représentait seulement 5 % des recettes en 2014.
Sur le fond, le choix d’un vecteur complémentaire d’imputation de la CRFP a été fait par le législateur dans le souci de garantir l’égalité entre les collectivités. En effet, il aurait été inéquitable que les collectivités territoriales disposant, au titre de leur budget, de ressources fiscales proportionnellement plus élevées que la DGF soient exemptées d’une partie de leur CRFP du seul fait de l’extinction de leur dotation forfaitaire.
C’est également la raison pour laquelle le législateur a fait le choix, à travers l’article 159 de la loi de finances initiale pour 2018, de reconduire à compter de 2018 les prélèvements opérés sur la fiscalité des communes au titre de la CRFP, comme cela était prévu depuis 2014.
Là encore, annuler ces prélèvements après 2017 aurait conduit les communes ayant payé une partie de la contribution sur leurs recettes fiscales à bénéficier d’un avantage sous la forme d’une sorte de « remise à zéro » des compteurs, alors que la contribution a été intégrée dans la base de calcul de la DGF pour l’immense majorité des communes.
J’en viens au second point de votre question.
Les indicateurs financiers utilisés dans le calcul des concours financiers et des fonds de péréquation prennent bien en compte le rétrécissement des bases fiscales lié à d’éventuelles restructurations d’entreprises. Ainsi, dans la mesure où elle se traduit par une perte de bases de la cotisation foncière des entreprises, la CFE, la fermeture d’une usine entraînera les années suivantes, et toutes choses égales par ailleurs, une diminution du potentiel fiscal de la commune. Cette dégradation des indicateurs financiers d’une collectivité serait susceptible de la rendre éligible soit aux dotations spécifiques soit aux fonds de péréquation.
Enfin, vous nous invitez à étudier en détail les conséquences du prélèvement sur la fiscalité pour les communes à qui l’on demande un montant de CRFP plus élevé que celui de leur dotation forfaitaire.
Une telle analyse a été réalisée par le précédent gouvernement. Le gouvernement actuel l’a reprise dans le cadre de la loi de finances pour 2018. Je le répète, nous considérons qu’il serait injuste de remettre les compteurs à zéro en annulant les prélèvements sur la fiscalité de collectivités…
M. le président. Il faut conclure, monsieur le secrétaire d’État !
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. … dont on ne mésestime pas les difficultés économiques, mais qui ont des recettes fiscales plus élevées.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini.
M. Jean-Marc Todeschini. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez rappelé l’existence de procédures que je n’ignore pas. Mais ces éléments ne répondent pas à la situation que connaît actuellement la ville de Gandrange : cette dernière a subi une baisse brutale de ses différentes ressources, et ce au cours de la même année.
Je rappelle que, en 2007, la France a ratifié la Charte européenne de l’autonomie locale, adoptée le 15 octobre 1985 par le Conseil de l’Europe.
Ne pensez-vous pas que la décision d’amputer les ressources propres des collectivités locales, afin d’abonder le budget de l’État et de diminuer son déficit, obère la capacité de ces collectivités à présenter un budget en équilibre, obligation à laquelle celles-ci sont soumises, contrairement à l’État ? N’y a-t-il pas là une incohérence manifeste entre, d’une part, notre législation et, de l’autre, le droit européen applicable, notamment l’article 9 de la Charte européenne de l’autonomie locale, en vertu duquel « les collectivités locales ont droit, dans le cadre de la politique économique nationale, à des ressources propres suffisantes dont elles peuvent disposer librement dans l’exercice de leurs compétences » ?
Pour conclure, je voudrais parler de ces élus locaux qui ont connu le désastre des restructurations : aujourd’hui, ils ont le sentiment d’être abandonnés. Ils estiment que l’État n’assure pas l’équité entre tous les territoires. Je pense notamment aux élus d’un département comme la Moselle, qui a connu le départ de plus de 5 000 militaires et qui a toujours subi les décisions prises à Paris, quels que soient les gouvernements. Heureusement que le Luxembourg se situe à proximité de ce territoire ! Sur le terrain, les élus locaux se sentent réellement floués.
manque de moyens de l’hôpital albert-chenevier de créteil
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, auteur de la question n° 148, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Laurence Cohen. Monsieur le secrétaire d’État, l’hôpital Albert-Chenevier, situé à Créteil, dans le Val-de-Marne, appartient au groupement hospitalier, ou GHU, Henri-Mondor de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, l’AP-HP. Cet hôpital est composé de neuf pôles, dont le pôle psychiatrique et d’addictologie, qui regroupe à la fois le service de psychiatrie sectorisée, des centres experts innovants qui travaillent sur la schizophrénie, les troubles bipolaires ou encore le syndrome d’Asperger, un centre de remédiation cognitive et sociale et un service d’addictologie.
D’une capacité de cent lits, le pôle psychiatrique a enregistré 41 000 journées d’hospitalisation en 2017 et se trouve aujourd’hui au bord de l’explosion : unités suroccupées, manque de lits, sous-effectif du personnel, épuisement, turn-over, etc.
Du fait de la suroccupation, certains patients se retrouvent à deux par chambre, sans pour autant que l’équipement suive, avec ne serait-ce qu’une armoire pour ranger leurs effets personnels.
Il s’agit, hélas ! d’une situation que connaissent, sinon tous les établissements psychiatriques, du moins un grand nombre d’entre eux, du fait de la réduction subie par les budgets au fil du temps. Je pense notamment à l’hôpital psychiatrique de Rennes ou au centre hospitalier Le Vinatier à Lyon, dont on connaît les mobilisations.
L’équipe de direction de l’hôpital Albert-Chenevier a tiré la sonnette d’alarme quant à la dégradation des conditions de travail des soignants et de la prise en charge des patients, lesquels demandent peut-être encore plus que d’autres de l’attention, de la bienveillance, du temps d’écoute et un cadre serein.
Cette situation dramatique et indigne s’explique en partie par la tarification à l’activité, ou T2A, qui est inadaptée au fonctionnement de nos hôpitaux, ainsi qu’à la réforme de l’organisation du temps de travail mise en place par le directeur de l’AP-HP.
Sans vouloir opposer les disciplines les unes aux autres, j’observe que ces difficultés s’expliquent aussi par le fait que la psychiatrie française, après avoir longtemps été très novatrice dans son approche, est aujourd’hui le parent pauvre de notre système de santé. Tous les professionnels que je rencontre, que ce soit en pédopsychiatrie ou en psychiatrie, appellent au secours.
Aussi, monsieur le secrétaire d’État, je me fais ici le relais des demandes des professionnels de l’hôpital Albert-Chenevier : nous voudrions savoir si Mme la ministre des solidarités et de la santé, dont je déplore d’ailleurs l’absence, compte intervenir pour débloquer des postes d’aides-soignants et d’infirmiers, ainsi qu’une unité d’hospitalisation supplémentaire avec, là aussi, les équipes nécessaires.
Plus généralement, quels moyens votre gouvernement entend-il consacrer à la psychiatrie, discipline mise à mal depuis des années ? Quelle politique entend-il mener dans ce domaine au cours du quinquennat pour redonner à la psychiatrie française toutes ses lettres de noblesse ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Madame Cohen, permettez-moi tout d’abord d’excuser Mme la ministre des solidarités et de la santé, qui est retenue ce matin et qui m’a demandé de répondre, en son nom, à la question que vous posez.
Au sein des hôpitaux universitaires Henri-Mondor, l’hôpital Chenevier héberge trois secteurs de psychiatrie : Maisons-Alfort, Créteil et Bonneuil-Boissy-Saint-Léger. Ces secteurs interagissent avec trois groupements hospitaliers de territoire : le GHT 94 Nord, le GHT 94 Est et le GHT 94 Ouest.
Les hôpitaux universitaires Henri-Mondor sont membres associés des deux premiers de ces groupements. Le pôle de psychiatrie a développé, au-delà de l’offre de soins sectorielle, une offre intersectorielle significative qui dépasse son champ traditionnel.
Premièrement, on y trouve un service d’accueil des urgences psychiatriques, qui recense 3 300 passages par an et dessert la quasi-totalité des urgences psychiatriques du Val-de-Marne. Un tiers des passages concerne les secteurs de l’hôpital Chenevier, deux tiers d’entre eux concernent le Val-de-Marne.
Deuxièmement, le pôle développe une psychiatrie de liaison sur l’ensemble de l’hôpital Henri-Mondor.
Troisièmement, le pôle de psychiatrie propose une offre de soins hospitalo-universitaire qui bénéficie d’un financement particulier avec des centres experts pour patients atteints de troubles bipolaires, du syndrome d’Asperger ou de schizophrénie, ainsi qu’un centre de réhabilitation cognitive et sociale.
Quatrièmement et enfin, le pôle mène un ambitieux projet d’institut hospitalo-universitaire soutenu par l’AP-HP.
L’offre d’hospitalisation sectorielle dispose aujourd’hui de quatre-vingt-dix lits situés sur le site de l’hôpital Chenevier et de quinze lits implantés à proximité du service d’accueil des urgences de l’hôpital Henri-Mondor, dont la mission est de prendre en charge les soins intriqués, somatiques et psychiatriques, ainsi que les primo-suicidants. Ce nombre de lits est structurellement faible et le taux, assez bas dès l’origine, est pénalisé par l’accroissement de la population desservie.
Le taux d’occupation est de 95 % ; la durée moyenne de séjour est bonne, mais s’allonge ; le taux des hospitalisations sous contrainte a été multiplié par deux en cinq ans, et le taux de réhospitalisation est de près de 22 %.
La réponse à cette tension dont l’hospitalisation complète fait l’objet se trouve en partie dans le déploiement de structures extra-hospitalières. Le pôle de psychiatrie dispose de trois centres médico-psychologiques, ou CMP, installés à Créteil et à Boissy-Saint-Léger, et d’un dispositif de soins partagés destiné à faciliter le lien avec les médecins généralistes et les spécialistes de ville.
Madame la sénatrice, pour répondre plus précisément à vos interrogations, un dispositif de rappel des primo-suicidants dit « VigilanS » doit être mis en œuvre en 2018 en lien avec le GHT 94 Nord.
En outre, une équipe mobile de soins intensifs permettant d’aller au domicile des patients récemment sortis de l’hôpital ou en phase subaiguë de leur pathologie doit être mise en place.
Les moyens humains notifiés au pôle de psychiatrie ont été substantiellement accrus en 2016 pour faire face à ces missions. Nous souhaitons qu’ils soient maintenus.
Cependant, on note une réelle difficulté dans les recrutements d’infirmiers. Cette situation est née d’un contexte général de recrutements en tension. Le problème est encore plus aigu en santé mentale du fait de la suppression de la filière spécialisée il y a déjà une dizaine d’années.
Mme la ministre des solidarités et de la santé prépare actuellement un plan de santé mentale. Des concertations avec les professionnels ont été engagées à la fin de l’année dernière. Nous espérons que ce plan permettra, dès cette année, d’apporter un certain nombre de réponses et fournira des moyens nouveaux pour répondre aux difficultés que connaissent les hôpitaux que vous avez évoqués et, plus largement, à la situation de la psychiatrie française.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez apporté un certain nombre de réponses et je vous en remercie. Cela étant, vous avez surtout dressé l’état des lieux d’une situation que je connais déjà bien, puisque j’habite le Val-de-Marne !
Je suis très heureuse d’apprendre que Mme la ministre des solidarités et de la santé est en train de préparer un plan de santé mentale : il serait bon que les parlementaires soient associés à ce travail…
Mais je m’étonne : alors que l’on vient de débattre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, texte d’austérité qui va asphyxier encore davantage le système de santé publique d’une manière générale, et les hôpitaux en particulier, la psychiatrie est littéralement laissée pour compte. En définitive, votre intervention ne répond absolument pas au cri d’alarme lancé par les professionnels en pédopsychiatrie et en psychiatrie.
Je parle d’un cri d’alarme, parce que ce secteur est délaissé depuis de nombreuses années et qu’il continue de l’être !
Vous avez parlé des centres médico-psychologiques : quels moyens comptez-vous donner à ces centres ? Là aussi, on observe des regroupements ; là aussi, les professionnels sont en souffrance, qu’il s’agisse des psychologues, des orthophonistes ou de l’ensemble des personnels paramédicaux : on déplore un manque de moyens.
De fait, en regroupant les CMP, on distend les liens de proximité. Je le répète, votre réponse ne correspond absolument pas à la réalité du terrain ou aux besoins en matière de psychiatrie.
Je souhaite également attirer votre attention sur le fait que le manque de moyens a de plus en plus pour effet de faire réapparaître des pratiques de contention et d’isolement, pratiques pourtant dénoncées par Mme la contrôleur général des lieux de privation de liberté. Cette situation doit nous alerter !
Enfin, je souhaite vous alerter sur la situation de l’hôpital Henri-Mondor, GHU dont le service de chirurgie hépatique est attaqué. J’aimerais bien que la ministre des solidarités et de la santé se penche sur cette question pour que ce centre ne ferme pas : celui-ci répond aux besoins de la population du Val-de-Marne et bien au-delà.
Monsieur le secrétaire d’État, comme vous pouvez le constater, vos réponses ne me satisfont pas !
situation sanitaire dans le pas-de-calais
M. le président. La parole est à Mme Sabine Van Heghe, auteur de la question n° 130, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Sabine Van Heghe. Je souhaite attirer l’attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la situation sanitaire très préoccupante que connaît le département du Pas-de-Calais.
Ainsi, sur le plan de la démographie médicale, on note une diminution du nombre de médecins généralistes libéraux et une augmentation significative de leur moyenne d’âge, ce qui entraînera inéluctablement un important mouvement de départs à la retraite dans les prochaines années.
À titre d’illustration, les agglomérations de Lens-Liévin et de Béthune-Bruay apparaissent moins dotées en médecins généralistes et spécialistes que d’autres agglomérations de même importance.
À terme, il existe clairement un risque de désertification médicale. Le taux d’équipement de santé du territoire à l’échelle du pôle métropolitain de l’Artois, par exemple, montre un sous-équipement en centres de médecine préventive et en établissements de court et moyen séjours.
La situation des hôpitaux dans le Pas-de-Calais est très préoccupante : les services des urgences sont saturés et les personnels sont à bout de forces.
Au-delà de ces difficultés conjoncturelles, c’est la situation du centre hospitalier de Lens à l’horizon 2020 qui inquiète les personnels, du fait de la diminution annoncée du nombre de lits.
La disparition du service de pneumologie de cet hôpital est une nouvelle illustration de la crise sanitaire qui affecte le Pas-de-Calais. L’inquiétude est très forte chez les patients concernés par cette fermeture, d’autant qu’ils se retrouvent parfois sans suivi, sans prise en charge, alors même que, dans le département, le nombre d’affections pulmonaires est bien supérieur à la moyenne nationale.
En outre, les menaces pesant sur le service de cardiologie de l’hôpital de Béthune amplifient l’impression ressentie par la population d’être sacrifiée sur l’autel des économies budgétaires dans le domaine de la santé.
Les situations économiques et sociales difficiles ont des conséquences sur les indicateurs sanitaires : plus on est fragile économiquement, moins on se soigne ! Dans le département du Pas-de-Calais, l’espérance de vie est de deux à trois ans plus basse qu’ailleurs.
Je souhaite donc savoir si le Gouvernement a l’intention de renoncer à sa logique purement financière dans le domaine de la santé. Quelles mesures concrètes entend-il mettre en œuvre pour répondre à l’urgence sanitaire affectant le département du Pas-de-Calais ?
Dans un souci d’optimisation, une mutualisation pourrait être envisagée, qui s’appuierait sur le futur centre hospitalier de Lens, dit « hôpital numérique pilote ». Ainsi, un regroupement multipolaire Lens-Béthune-Arras-Douai permettrait d’élargir cette excellence, de voir revenir nos médecins et d’assurer le service qu’attendent nos concitoyens !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Madame Van Heghe, comme à votre collègue, je vous demande de bien vouloir excuser Mme Buzyn, ministre des solidarités et de la santé, qui est retenue ce matin et qui m’a chargé de vous répondre.
Comme vous le soulignez, le département du Pas-de-Calais présente une densité de professionnels de santé plutôt inférieure à la moyenne nationale.
Le développement de l’attractivité constitue donc l’un des principaux enjeux de ce territoire pour les cinq prochaines années. Il s’agit pour nous d’accompagner les professionnels de santé tout au long de leur parcours et de les attirer dans les territoires et les disciplines les plus en tension.
Quatre priorités ont été identifiées dans le Pas-de-Calais : tout d’abord, accompagner l’installation des professionnels de premier recours et soutenir les dynamiques de regroupements pluriprofessionnels et de télémédecine, afin de lutter contre l’accentuation des inégalités infra-territoriales – à ce titre, une attention particulière est portée aux zones rurales du Montreuillois, du Ternois, du sud-Arrageois et du sud-Audomarois ; ensuite, diminuer le recours aux services d’urgence en développant les maisons médicales de garde et en communiquant sur la bonne utilisation du système de soins ; en outre, conforter l’offre de formation paramédicale et médicale de proximité ; enfin, améliorer l’attractivité du Pas-de-Calais pour les psychiatres et les pédopsychiatres.
Comme vous le savez, le centre hospitalier de Lens fait l’objet d’un projet autour de la reconstruction du « Nouvel hôpital de Lens – Pôle hospitalier de la Gohelle ». L’établissement actuel continuera à fonctionner sans aucune incidence.
Pour le projet dont je parle, le financement national accordé est de 102 millions d’euros, dont 70 millions d’euros en capital, pour un montant global de 280 millions d’euros.
Au titre des objectifs en matière de chirurgie ambulatoire, une réduction du capacitaire de l’établissement est effectivement prévue. Parallèlement, le capacitaire de l’ambulatoire augmentera de 50 %, pour passer de 90 à 136 lits.
Lors du conseil de surveillance du 17 octobre 2017, la fermeture du service de pneumologie, qui regroupe 15 lits, a été annoncée à compter du 1er novembre 2017. À cette date, il ne restait que deux pneumologues dans l’établissement.
Dans un premier temps, et pour remédier à l’urgence, des décisions ont été prises afin d’assurer la continuité des soins au centre hospitalier de Lens avec une astreinte de pneumologie vingt-quatre heures sur vingt-quatre.
En parallèle, et pour apporter une réponse à long terme, l’agence régionale de santé, l’ARS, accompagne les pneumologues de Lens et de Béthune pour mettre en place une organisation territoriale de la pneumologie. Un travail comparable est également en cours pour la cardiologie.
Dans la perspective de la constitution de ces deux équipes médicales de territoire, l’ARS a décidé d’allouer un financement exceptionnel de 500 000 euros.
J’ajoute que l’amélioration de l’attractivité de ce territoire pour les professionnels passe par une dynamique partenariale plus forte entre les acteurs au sein des GHT, sans exclure la poursuite des coopérations préexistantes avec les autres partenaires. Les travaux conduits pour l’élaboration des projets médicaux partagés des GHT dans le territoire du Pas-de-Calais témoignent d’ailleurs d’une volonté de travail en commun qui répond à cette exigence et que le Gouvernement souhaite accompagner.