Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Cartron, pour explication de vote.
Mme Françoise Cartron. Je souhaite apporter une précision sur l’amendement n° 344 rectifié ter de Mme Ghali.
Même s’il s’agit sans doute d’un amendement d’appel dans le cadre ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, je rappelle que le Président de la République a tenu hier un discours très fort sur la politique de la ville et l’ensemble des maux dont souffrent les quartiers sensibles. Au-delà des engagements pris en matière de sécurité et d’école, je crois que des engagements forts devront également être pris pour inciter les médecins généralistes et spécialistes à s’implanter dans ces quartiers, car ceux-ci ont un rôle éminent à y jouer.
Ces incitations ne vont pas pour autant déshabiller les territoires qui sont bien pourvus en praticiens. Pour prendre l’exemple de mon département de la Gironde, les quartiers sensibles sont à la limite de l’agglomération bordelaise. À Bordeaux même, médecins généralistes et spécialistes sont surreprésentés, alors que, à deux kilomètres de là, on constate un déficit de présence médicale ! Comme l’a dit Mme Ghali, il faut donc étudier ce problème avec beaucoup de sérieux.
Mme la présidente. La parole est à Mme Samia Ghali, pour explication de vote.
Mme Samia Ghali. Merci, madame la présidente, d’avoir sauvé notre débat tout à l'heure.
Madame la ministre, je suis extrêmement déçue et attristée par votre réponse qui, je vous le dis, m’a choquée !
Mme Laurence Rossignol. Très bien !
Mme Samia Ghali. En effet, je ne retrouve pas dans les propos que vous avez tenus ici ce que j’ai entendu hier de la bouche du Président de la République. Cela m’interpelle et cela doit tous nous interpeler : après avoir entendu le Président de la République sur le terrain, dans les quartiers, devant les caméras, on ne peut pas accepter que des propos tenus dans cet hémicycle aillent à l’encontre d’un discours qui a donné de l’espoir ou, en tout cas, m’a donné de l’espoir pour les territoires que je représente.
On ne devrait plus parler de désertification médicale, mais de désertification des soins. Comment expliquer à des habitants qui sont déjà très éloignés des soins que l’on ne veut pas déshabiller Paul pour habiller Pierre ? On trouve tellement de médecins dans certains territoires que les plaques médicales accrochées aux murs se superposent les unes aux autres ! (Mme la ministre manifeste son scepticisme.) Je vous invite à vous rendre dans ces quartiers favorisés, madame la ministre, je vous démontrerai par A + B ce que j’affirme !
Ailleurs, on a trente-quatre médecins qui se lèvent à cinq heures tous les matins et dont les actes ont augmenté de 28 % pour une seule année. Là encore, je vous invite à m’accompagner voir le médecin de la cité de la Castellane, cité de 8 000 habitants, exercer son activité. Vous y verrez une longue file d’attente devant la porte de son cabinet dès cinq heures du matin. C’est une réalité vécue au quotidien, madame la ministre !
Je ne peux pas vous laisser dire que nos propos sont choquants, simplement parce que l’on demande des solutions pour que les médecins soient encouragés à apporter le minimum vital à nos administrés. Il s’agit d’assistance à personne en danger, madame la ministre ! Lorsque l’on voit que certains enfants sont loin des soins, qu’ils souffrent de malnutrition, de dénutrition, parfois de diabète, qu’ils ont de graves problèmes de santé au quotidien, comment imaginer qu’ils puissent réussir à l’école ?
Il est important que vous entendiez cette voix. J’ai peut-être mal compris vos propos. Le débat est peut-être tellement passionné et passionnant que certains mots vous ont échappé, alors que vous ne les pensiez pas. J’espère vraiment que vous allez nous rassurer, car vous n’avez pas rassuré les habitants des quartiers sensibles, ces citoyens éloignés des soins que la République leur doit.
Pour finir, j’ajoute qu’il faut penser à tous ces médecins qui sont en souffrance, parce qu’ils sont obligés de faire leur métier dans des conditions inacceptables.
Je souhaite à cet égard soulever le problème des urgences…
Mme la présidente. Il faut conclure, ma chère collègue !
Mme Samia Ghali. … de l’hôpital des quartiers nord de Marseille, qui sont complètement saturées en raison d’une très forte affluence.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Je ne reviendrai pas sur les propos qu’ont tenus mes confrères sur la meilleure façon de favoriser l’installation des jeunes médecins dans les différents quartiers de la Nation, car cela a été suffisamment expliqué.
Après vous avoir écoutés, mes chers collègues, j’ai en revanche le sentiment que vous avez très mal, ou même pas du tout, pris connaissance du plan pour l'égal accès aux soins. En effet, les propositions que je viens d’entendre dans cet hémicycle ont déjà été présentées il y a quelques semaines par la ministre dans le cadre de ce projet. Le Gouvernement s’est d’ailleurs inspiré de différents rapports provenant de l’Assemblée nationale, du Sénat, mais aussi de l’IGAS, l’Inspection générale des affaires sociales.
Les projets du Gouvernement vont donc dans le sens des propos que je viens d’entendre, propos tenus parfois dans le calme, parfois dans l’énervement. (Mme Samia Ghali sourit.)
S’il manque des médecins dans notre pays, ce n’est sûrement pas de la faute des médecins. C’est probablement la faute des dirigeants politiques qui se sont succédé ces vingt dernières années, quels qu’ils soient ou quels qu’ils aient été. Pour former un médecin, il faut en effet compter dix à douze ans. S’il n’y a pas suffisamment de médecins aujourd'hui ou s’il vient à en manquer dans quatre ou cinq ans, il est trop tard pour les former : c’était il y a sept ou dix ans qu’il aurait fallu le faire.
On peut reprocher beaucoup de choses aux médecins, comme le fait qu’ils ne s’installent pas volontiers, qu’ils préfèrent les remplacements à l’installation et à la médecine libérale ou qu’ils sont peut-être davantage formés à la médecine hospitalière qu’à la médecine libérale. La possibilité qui serait offerte à certains de devenir maîtres de stage me paraît donc être une excellente solution pour que les jeunes médecins aillent au contact de la réalité de la médecine libérale.
En déclarant que les hommes et les femmes politiques de ce pays n’ont pas pris les décisions qui s’imposaient pour former des médecins, j’ai conscience que certains d’entre eux ne sont plus là, mais aussi que nous devons nous aussi nous sentir visés. En effet, nous étions déjà là il y a dix ou douze ans, que ce soit au Sénat, à l’Assemblée nationale, dans nos villes ou ailleurs. (M. Philippe Mouiller fait la moue.)
Certains jeunes parlementaires peut-être pas, monsieur Mouiller ! (Sourires.) D’autres étaient là à votre place… Et vous êtes en quelque sorte l’héritier de ces dirigeants qui n’ont pas pris les bonnes décisions.
Ce que je veux dire, c’est que la responsabilité des uns et des autres est engagée. Je ne dis pas cela pour soutenir le gouvernement actuel, puisque je ne fais pas partie de sa majorité. Je le dis simplement pour soutenir la ministre de la santé, dont le travail est, selon moi, excellent pour l’instant, au moins au niveau médical – je ne parle pas des aspects financiers, monsieur Darmanin.
Le travail réalisé par Mme la ministre est actuellement excellent, en comparaison notamment avec la politique menée par les unes et les autres dans le passé ; j’implique ainsi les différents ministres de la santé qui se sont succédé depuis 2004.
Jusqu’à présent, le Sénat avait la réputation de la sagesse et du calme. Aussi, s’il vous plaît, mes chers collègues, gardez votre calme et faites preuve de sagesse !
Mme Samia Ghali. Mais nous sommes calmes ! (Sourires.)
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. De toute façon, les solutions sont là, ou du moins bientôt là, parce qu’il faut beaucoup de temps pour former un médecin. En tout cas, il faut laisser aux médecins la possibilité de décider de leur avenir ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, du groupe Les Indépendants – République et Territoires et du groupe La République En Marche.)
Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Ravier, pour explication de vote.
M. Stéphane Ravier. Je voudrais revenir sur les propos et le constat dressé par notre éminente collègue Samia Ghali. Elle a évoqué le désert médical en milieu urbain et, plus précisément, dans les quartiers nord de Marseille.
M. Amiel a quant à lui exposé les raisons qui expliqueraient selon lui le désert médical en milieu rural. En revanche, il est passé très vite sur ce qui est à l’origine du désert médical en milieu urbain. Il est même passé tellement vite sur le sujet qu’il ne l’a quasiment pas évoqué ! Pourquoi un tel silence ? On a connu notre collègue beaucoup plus en verve, comme hier soir, lorsqu’il a eu le courage, pour ne pas dire le culot, de déclarer que les retraités étaient responsables de notre endettement…
Aujourd'hui, M. Amiel se montre beaucoup plus prudent quant aux causes du désert médical en milieu urbain. Eh bien, il faut avoir le courage de le dire ou au moins d’attirer l’attention sur l’une des raisons : si les médecins ne s’installent plus dans les quartiers nord de Marseille, alors qu’il existe une population nombreuse et malheureusement malade, c’est à cause de l’insécurité !
Dans ces quartiers, les cabinets médicaux sont souvent la proie de jeunes ou de moins jeunes gens qui espèrent y trouver des produits de substitution à la drogue. Les médecins y sont agressés dans leurs cabinets et ne peuvent pas effectuer de visite chez leurs patients sans être contrôlés par des individus postés à l’entrée des cités pour protéger et surveiller le trafic de drogue qui s’y est développé.
J’informe en effet Mme la ministre, invitée par notre collègue à se rendre à la cité de la Castellane, que les médecins, comme les autres habitants, doivent se plier à cette fouille ! Dans ces conditions, il est bien évident qu’ils ne se bousculent pas pour s’installer en milieu urbain.
Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Stéphane Ravier. Il faut donc d’abord s’attaquer à l’insécurité.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Le débat a été long et passionné, parce qu’il porte sur un sujet qui touche beaucoup d’entre nous.
Madame Ghali, je regrette que vous laissiez entendre que je ne suis pas intéressée par ces enfants malades qui risqueraient de mourir dans les quartiers nord de Marseille. Votre argument ne tient pas : nous sommes tous convaincus ici qu’il existe un problème majeur.
Pour de multiples raisons, nous sommes collectivement les héritiers de vingt ans de politiques publiques qui n’ont pas pris en compte le fait que la médecine avait changé, que les métiers s’étaient féminisés, que les médecins voulaient désormais concilier leur vie professionnelle et leur vie familiale, que le paiement à l’acte des médecins induisait un choix de régulation pour éviter le creusement du déficit de la sécurité sociale qui repose sur la baisse du nombre de médecins. Il faut le dire, c’était un choix ! Aujourd'hui, nous en payons tous le prix collectivement.
Après vous avoir longuement écoutés, mesdames, messieurs les sénateurs, je regrette votre décision de déposer des amendements visant à alléger les charges pour résoudre le problème de la désertification médicale. La question des déserts médicaux est en effet traitée de façon très complète à l’article 35 du PLFSS.
Cet article prévoit un certain nombre de financements en faveur d’innovations organisationnelles et de dérogations réglementaires, qui permettront à chaque territoire de s’emparer des mesures du plan pour renforcer l'accès territorial aux soins. Je crains que beaucoup d’entre vous n’aient pas vu ou lu le contenu de ce plan.
Je ne peux pas répondre dans le détail à toutes vos remarques, mais sachez que beaucoup des mesures proposées figurent dans le plan dont je viens de parler : c’est le cas notamment des stages en médecine libérale, des postes d’assistants à temps partagé ou encore de l’augmentation du plafond du cumul emploi-retraite.
Ce plan est intégralement financé par le dispositif de l’article 35, qui prévoit notamment l’augmentation des dotations du fonds d’intervention régional, le FIR, sous la responsabilité des directeurs généraux des agences régionales de santé.
Chaque territoire sera désormais en mesure de s’emparer de ces dispositions innovantes, en créant un centre de santé avec des médecins de santé, par exemple, en créant des maisons de santé ou des réseaux de santé. Il pourra également aider la médecine libérale à s’organiser, à créer des centres de santé adossés aux hôpitaux. Bref, toutes les solutions sont possibles et envisageables.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous en prie, dans la mesure où nous sommes tous les héritiers de cette situation, commencez par prendre connaissance des mesures figurant dans mon plan avant de vous emballer !
Qui plus est, sachez que ce plan sera copiloté avec les élus, l’Association des régions de France et l’Association des maires de France. Avec une femme médecin, présidente d’un syndicat de médecine générale, votre collègue sénatrice Élisabeth Doineau et le député Thomas Mesnier seront chargés de la déclinaison du plan en région. Je pense en effet que c’est aux territoires de nous apporter des idées.
Ce plan est dynamique : il doit évoluer d’année en année, de sorte que vos propositions et les blocages que vous observez sur le terrain se traduisent sous la forme de mesures dans le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Laissez le temps à ce plan de se déployer, lisez l’article 35 et les mesures qui y figurent et cessez de proposer des mesures dérogatoires d’allégements de charges, qui, malheureusement, se révèlent un outil extrêmement limité et un levier très peu efficace pour créer des activités de médecine dans les territoires ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe Union Centriste. – M. René-Paul Savary applaudit également.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 344 rectifié ter.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix, par priorité, l'amendement n° 29 rectifié bis.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 9, et les amendements nos 425 rectifié bis, 558 rectifié bis et 559 rectifié n'ont plus d'objet.
L'amendement n° 280 rectifié bis, présenté par MM. Chasseing, Wattebled, A. Marc, Malhuret et Decool, Mme Mélot et MM. Bignon, Capus, Guerriau, Lagourgue et Fouché, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le III de l’article L. 131-4-2 du code de la sécurité sociale, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« … - . L’exonération prévue au I est applicable pour une durée de cinq années dans les intercommunalités classées en zone de revitalisation rurale, dont la densité de population est inférieure à 20 habitants par kilomètres carrés.
« À l’issue des cinq années de l’exonération prévue au I, le bénéfice de l’exonération est maintenu de manière dégressive pendant les trois années suivantes au taux de 60 % du montant des cotisations, contributions et versements précités la première année, de 40 % la deuxième année et de 20 % la troisième année.
« Pour les entreprises de moins de cinq salariés, le bénéfice de l’exonération est maintenu de manière dégressive pendant les neuf années suivantes, au taux de 60 % du montant des cotisations, contributions et versements précités lors des cinq années qui suivent le terme de cette exonération, de 40 % les sixième et septième années, et de 20 % les huitième et neuvième années. »
II. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Cet amendement vise à soutenir l’économie dans les zones de revitalisation rurale, les ZRR, tout particulièrement dans les zones hyper-rurales, c’est-à-dire dans les communautés de communes comptant moins de 20 habitants par kilomètre carré.
Ce soutien serait apporté au travers d’un mécanisme d’exonération des cotisations sociales aux entreprises, valable cinq ans – au lieu d’un an pour les ZRR qui ne sont pas situées dans ces zones hyper-rurales –, puis maintenu, de manière dégressive, pendant trois ans et, pour les entreprises de 5 salariés, pendant neuf ans.
Ces mesures visent à maintenir l’emploi dans les territoires les plus fragiles, en créant des incitations à l’implantation des entreprises.
Monsieur le ministre, j’ai cosigné un amendement, qui a été présenté voilà quelques instants, relatif à une exonération des charges jusqu’à 1,6 SMIC. Je sais que cette mesure serait très efficace pour l’emploi, mais j’ai bien compris qu’on ne pouvait la mettre en œuvre à cause des 5 milliards d’euros et je souhaite un retour à l’équilibre de la sécurité sociale pour 2020.
Je n’ai pas non plus chiffré la mesure proposée dans le présent amendement. Cependant, monsieur le ministre, nous sommes à la croisée des chemins en milieu rural profond. Il nous faut des médecins – je me suis déjà exprimé sur le sujet –, mais aussi des créations d’emplois, notamment pour remplacer les pertes d’emplois dans l’agriculture d’élevage, un secteur actuellement en grandes difficultés.
Cinq ans d’exonération dans les ZRR en secteur hyper-rural, ou bien des emplois francs, comme dans certains quartiers de la ville : cela permettrait des créations de petites et moyennes entreprises – PME –, des créations d’emplois et, au-delà, le maintien de la vie dans ces territoires.
Voilà donc un amendement d’appel – d’appel au secours, d’une certaine manière – en faveur de l’aménagement des territoires ruraux profonds, c'est-à-dire, je le répète, des territoires dont la densité est inférieure à 20 habitants au kilomètre carré, mais qui, disposant d’un bourg-centre et de services, présentent encore un potentiel de développement.
Le rôle du parlementaire doit aussi être d’alerter l’État et de proposer des expérimentations.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je rappelle que les cotisations patronales vont devenir résiduelles au niveau du SMIC, et ce de manière permanente. L’opération dégressive que vous proposez, monsieur Chasseing, me paraît, en définitive, moins intéressante pour les entreprises que ce dispositif permanent à venir. La commission n’était donc guère favorable à cet amendement, mais pour vous plaire, elle a décidé de s’en remettre à la sagesse de notre assemblée.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Buzyn, ministre. Cet amendement tend à renforcer l’exonération dite ZRR pour les entreprises installées dans une intercommunalité dont la densité de population est inférieure à 20 habitants par kilomètre carré.
Or le principe d’une réforme du zonage des ZRR a déjà été décidé lors des deux comités interministériels aux ruralités qui se sont tenus en 2015, dans le prolongement d’une mission parlementaire. Ces nouveaux critères de classement sont justes et pertinents. Ils permettent de mieux tenir compte, dans une logique d’aménagement du territoire, de la fragilité des territoires ruraux.
De plus, dans le cadre de la mise en œuvre des allégements renforcés à compter du 1er janvier 2019 – l’article 8 du PLFSS –, il est prévu de revoir l’ensemble des dispositifs d’exonération sociale zonés, dont les ZRR, qui deviendront moins favorables pour la plupart des salariés et dont, au moins sur le champ social, l’efficacité est fortement contestée par un rapport IGAS–IGF.
Enfin, dans le cadre des discussions sur le projet de loi de finances pour 2018, un amendement a été adopté, permettant d’étendre jusqu’au 31 décembre 2019, au lieu du 1er juillet 2017, la période transitoire entre l’ancien et le nouveau zonage ZRR.
Il ne paraît donc pas opportun d’aller plus loin.
Pour ces raisons, monsieur Chasseing, nous vous demandons de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, l’avis sera défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Chasseing, l'amendement n° 280 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Daniel Chasseing. J’accepte de le retirer, madame la présidente, mais je m’exprime ici au nom de territoires ruraux profonds, auxquels, je pense, une exonération sur une période de cinq ans pour des créations d’emplois apporterait un plus. Elle encouragerait l’implantation de PME et le maintien de la vie.
Jusqu’à présent, en effet, la vie c’était l’agriculture. Or la population agricole dans les secteurs de l’élevage est en train de s’effondrer…
Mais je retire l’amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° 280 rectifié bis est retiré.
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 423, présenté par MM. Patient et Karam, est ainsi libellé :
Après l'article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – En Guyane, l’exonération prévue à l’article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale s’applique pendant une période transitoire courant du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2018, dans les conditions définies au présent article.
II. – L’exonération s’applique à toutes les entreprises, sans condition d’effectif et quel que soit le secteur d’activité.
III. – Le montant de l’exonération est calculé chaque mois civil, pour chaque salarié, en fonction de sa rémunération telle que définie à l’article L. 242-1 du même code. Lorsque la rémunération horaire est inférieure ou égale au salaire minimum de croissance majoré de 180 %, le montant de l'exonération est égal au montant des cotisations de sécurité sociale à la charge de l'employeur. Au-delà de ce seuil, la rémunération est exonérée des cotisations de sécurité sociale à la charge de l'employeur, dans la limite de la part correspondant à une rémunération égale au salaire minimum de croissance majoré de 180 %.
IV. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Antoine Karam.
M. Antoine Karam. Voilà quelques mois, un mouvement social d’une ampleur historique a secoué la Guyane, avec, comme point d’orgue, la signature de l’accord de Guyane du 21 avril 2017, qui engageait l’État sur le plan d’urgence et sur un certain nombre de mesures sectorielles.
Parmi ces mesures, figurait la création d’une zone franche fiscale et sociale susceptible de favoriser l’attractivité du territoire et la croissance des entreprises qui y sont implantées.
Si une mission d’expertise ministérielle s’est bien rendue en Guyane pour travailler sur ce sujet, les mesures transitoires prévues dans l’accord de Guyane n’ont pas été mises en œuvre.
Celui-ci prévoyait effectivement, pour 2017 et 2018, d’exonérer les entreprises guyanaises de cotisations patronales au titre de leurs salariés dont la rémunération est inférieure à 2,8 fois le montant du SMIC et de garantir ce niveau d’exonération pour les salaires dépassant ce seuil.
Cet amendement vise donc à accorder cette exonération aux entreprises de Guyane pour l’année 2018, avant que la zone franche fiscale et sociale ne soit mise en œuvre.
Avec le déploiement du plan d’urgence, plusieurs chantiers d’infrastructure seront lancés au cours des trois prochaines années. Il est donc indispensable de permettre, dès 2018, le développement local par la relance de l’emploi et de l’investissement.
Si toutefois l’exonération garantie jusqu’à 180 % du SMIC vous semblait trop importante, mes chers collègues, je vous proposerais, avec l’amendement n° 561, de garder les seuils existants, tels que prévus dans le code de la sécurité sociale, pour étendre uniquement la dégressivité jusqu’au seuil de 180 % du SMIC.
Mme la présidente. L'amendement n° 561, présenté par MM. Patient et Karam, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – En Guyane, l’exonération prévue à l’article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale s’applique pendant une période transitoire du 1er janvier au 31 décembre 2018, dans les conditions définies au présent article.
II – L’exonération s’applique à tous les employeurs, entreprises et organismes à l’exclusion des entreprises publiques et établissements publics mentionnés à l’article L. 2233-1 du code du travail, sans condition d’effectif et quel que soit le secteur d’activité.
III. – A. – Pour les entreprises mentionnées au I de l’article 244 quater C du code général des impôts et, au titre des rémunérations définies aux quatrième et cinquième phrases du même I, pour les organismes mentionnés à l’article 207 du même code, l’exonération est calculée selon les modalités suivantes :
Le montant de l’exonération est calculé chaque mois civil, pour chaque salarié, en fonction de sa rémunération telle que définie à l’article L. 242-1. Lorsque la rémunération horaire est inférieure à un seuil égal au salaire minimum de croissance majoré de 30 %, le montant de l’exonération est égal au montant des cotisations de sécurité sociale à la charge de l’employeur. À partir de ce seuil, la part de la rémunération sur laquelle est calculée l’exonération décroît et devient nulle lorsque la rémunération horaire est égale au salaire minimum de croissance majoré de 180 %.
Pour les entreprises, employeurs et organismes mentionnés au premier alinéa de l’article L. 2211-1 du code du travail et occupant moins de onze salariés, lorsque la rémunération horaire est inférieure à un seuil égal au salaire minimum de croissance majoré de 40 %, le montant de l’exonération est égal au montant des cotisations de sécurité sociale à la charge de l’employeur. Lorsque la rémunération horaire est égale ou supérieure à ce seuil et inférieure à un seuil égal au salaire minimum de croissance majoré de 60 %, la rémunération est exonérée des cotisations de sécurité sociale à la charge de l’employeur, dans la limite de la part correspondant à une rémunération horaire égale au salaire minimum de croissance majoré de 40 %. Au-delà d’un seuil égal au salaire minimum de croissance majoré de 60 %, la part de la rémunération sur laquelle est calculée l’exonération décroît et devient nulle lorsque la rémunération horaire est égale au salaire minimum de croissance majoré de 180 %.
B. – Pour les entreprises, employeurs et organismes autres que ceux mentionnés au A le montant des exonérations est calculé selon les modalités du B du III de l’article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale.
IV. – Par dérogation au III, le montant de l’exonération pour les entreprises de Guyane mentionnées au IV de l’article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale est calculé selon les modalités fixées au même IV.
V – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I à IV est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Antoine Karam.