COMPTE RENDU INTÉGRAL
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
Mme Catherine Deroche,
Mme Françoise Gatel.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Organisation des travaux
M. le président. Je vous propose, mes chers collègues, de décaler à seize heures trente le débat sur le logement social, initialement prévu à seize heures quinze.
Il n’y a pas d’observation ?…
Il en est ainsi décidé. (Exclamations amusées.)
J’ai « consulté le Sénat du regard » ! (Sourires.)
3
Questions d’actualité au Gouvernement
M. le président. Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les membres du Gouvernement, mes chers collègues, l’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
La séance est retransmise en direct sur France 3, sur Public Sénat, sur le site internet du Sénat et sur Facebook.
Chacun d’entre vous sera attentif à deux choses : l’une, évidente, le respect des uns et des autres, l’autre, qui nécessite un peu de volonté, le respect du temps imparti.
gestion du retour des djihadistes
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, mesdames, messieurs les membres du Gouvernement, ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
La situation des djihadistes de retour sur le territoire national ou européen constitue une cause d’inquiétude à court, moyen et long terme. Nous ne les avons pas vraiment vus partir ; j’ai quelques doutes sur le fait que nous les repérions quand ils reviennent.
Les femmes présentent un danger à peu près équivalent aux hommes. Quant aux enfants, leur prise en charge doit être assurée en fonction de leur âge, compte tenu des traumatismes qu’ils ont vécus ; plusieurs traumatologues évoquent un fort potentiel de dangerosité à terme.
Nous le savons, à ce stade, aucune politique de déradicalisation ne semble convaincante, ni en France ni à l’étranger. Pourtant, nous ne pourrons pas nous contenter de colloques, de forums, ni de rapports, et les détentions ne seront pas éternelles.
Monsieur le Premier ministre, ma question est extrêmement simple : quels éléments concrets pouvez-vous nous donner aujourd’hui pour répondre à notre inquiétude ? Que faisons-nous de ces djihadistes de retour sur le territoire national ? (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.
M. Gérard Collomb, ministre d’État, ministre de l’intérieur. Madame Goulet, vous le savez, le Gouvernement porte une attention particulière au problème des returnees.
Les accords passés entre la Turquie et la France, dits « accords Cazeneuve », nous permettent de porter un regard particulièrement attentif sur celles et ceux qui reviennent des théâtres de guerre syro-irakiens. Plus de 240 majeurs et plus de 50 mineurs, dont la plupart ont moins de 12 ans, sont revenus depuis 2012 sur le sol français.
Vous le savez sans doute, le traitement judiciaire est un principe systématique, avec une qualification de nature criminelle, et c’est le procureur de la République de Paris qui a la charge de cette question.
La prise en charge des returnees passe depuis 2015 par un placement systématique en garde à vue des femmes et des hommes majeurs et des quelques mineurs combattants. Après leur placement en garde à vue, le juge des libertés et de la détention peut décider d’une incarcération, et une très grande majorité des returnees – plus de cent trente – est actuellement en prison. Quant aux autres, ceux qui sont en liberté, ils font évidemment tous l’objet soit d’un suivi administratif par les services de renseignement – DGSI ou SCRT –, soit d’un suivi judiciaire, lorsque les juges ont décidé d’un placement sous contrôle judiciaire.
Ainsi ce problème est-il parfaitement pris en charge aujourd’hui. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour la réplique.
Mme Nathalie Goulet. Je ne doute pas, monsieur le ministre d’État, de votre bonne foi, pas plus que de celles du gouvernement actuel, du gouvernement précédent et du Parlement, qui a largement soutenu les dispositions adoptées depuis deux ou trois ans.
Je veux simplement vous dire que FRONTEX fonctionne mal, qu’il faut plus de moyens en hommes et en matériel, pour le contrôle des passeports et des frontières.
Je ne partage donc pas votre position. Je pense qu’il faut être beaucoup plus vigilant et qu’il faut, en toute hypothèse, accorder à ce sujet une attention majeure, notamment à l’échelon européen. Nous ne pourrons pas en sortir autrement qu’en confortant nos frontières. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
révision de la directive sur les travailleurs détachés
M. le président. La parole est à M. François Patriat, pour le groupe La République En Marche. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
M. François Patriat. Monsieur le Premier ministre, lundi dernier, à l’issue d’une très longue journée de concertation, les ministres des affaires sociales de l’Union européenne ont abouti à un compromis historique sur la révision de la directive « travailleurs détachés ». Il s’agit là d’une avancée importante, répondant aux vœux du Président de la République, qui voulait que l’on modifie le cadre juridique applicable aux travailleurs détachés de façon à construire une Europe qui protège.
C’est à l’issue d’un long tour des capitales européennes que le chef de l’État a réussi à convaincre ceux qui étaient jusqu’à présent réticents, aboutissant ainsi à ce que, demain,…
M. Jacques Grosperrin. Dans combien de temps ?
M. François Patriat. … sur notre territoire, on ne puisse plus profiter des différences de protection sociale et salariale existant entre les pays membres et qui pouvaient aller de un à trois dans l’Europe à quinze et de un à dix dans l’Europe à vingt-huit.
M. Jacques Grosperrin. Surtout chez les transporteurs !
M. François Patriat. Vous comprendrez que les travailleurs se sentiront un peu mieux protégés et que les entreprises subiront moins la concurrence internationale.
Nous aboutissons ainsi à quatre avancées majeures.
En premier lieu, dans tous les pays d’Europe, les salariés seront payés au tarif du pays où ils sont détachés. En deuxième lieu, la fraude sera mieux contrôlée. En troisième lieu, la durée du travail détaché ne pourra excéder douze mois, au lieu de vingt-quatre, voire plus, aujourd’hui. En quatrième lieu, la voie est maintenant ouverte à des améliorations dans le domaine routier, qui relèvera de la directive, au cours des six prochains mois.
Voici ma question, monsieur le Premier ministre (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.) : quelles suites voyez-vous à cette décision historique, que mes collègues salueront tous, je l’espère, avec moi ? (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le président Patriat, je vous remercie de vos propos, qui saluent l’investissement du Président de la République, du Gouvernement et de l’ensemble de la diplomatie française.
Je veux, si vous me le permettez, remercier notamment de leur travail exceptionnel Mmes Muriel Pénicaud, ministre du travail, et Nathalie Loiseau, ministre chargée des affaires européennes (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.), qui ont toutes les deux parcouru de façon incessante les capitales européennes, pour expliquer la position française et convaincre de son bien-fondé.
Revenons un peu en arrière, mesdames, messieurs les sénateurs. Personne ici, je crois, ne considérait, voilà trois ans, que la situation prévalant sous l’empire de la directive telle qu’elle existait à l’époque, était une bonne situation.
M. François Patriat. Exactement !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Je n’ai jamais vu aucun parlementaire, que ce soit à l’Assemblée nationale ou au Sénat, se lever pour affirmer : « Cette directive est vraiment parfaite, surtout ne la changeons pas ! ».
M. André Gattolin. Absolument !
M. Jacques Grosperrin. C’est vrai !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. La solution n’était donc pas satisfaisante.
Il y a un peu plus d’un an, lorsque la Commission européenne a déposé sur la table sa proposition, peu de gens imaginaient que celle-ci serait susceptible de rencontrer rapidement un accord, parce que de très nombreux pays disaient ne pas vouloir d’une modification de la directive « travailleurs détachés ».
Lundi dernier, après un travail très important de conviction, après que nos partenaires les plus proches eurent décidé de se rallier à nous et que d’autres partenaires, plus lointains – je pense à un certain nombre de pays qui se trouvent à l’est de l’Europe et que l’on n’espérait pas forcément de notre côté sur ce sujet – eurent décidé de nous rejoindre, nous avons obtenu un accord. J’ai la conviction, et elle est largement partagée, que l’accord que nous avons obtenu sur la directive « travailleurs détachés » crée une situation bien meilleure aujourd’hui qu’hier.
M. André Gattolin. C’est bien mieux !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Est-ce que cela signifie qu’elle est parfaite ? Peut-être pas. Est-ce que cela signifie qu’elle est meilleure qu’hier ? Évidemment oui. (Marques de doute sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et sur des travées du groupe socialiste et républicain.) Mais si, vous verrez, vous-mêmes, vous le direz.
M. Martial Bourquin. Elle l’est un peu…
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Il y a donc eu des avancées majeures – M. Patriat les a précisées, je n’y reviens pas –, mais il y a encore beaucoup de travail pour que les éléments soient complètement stabilisés, car la commission de l’emploi et des affaires sociales du Parlement européen a pris, il y a quelque temps, une position qui n’est pas identique à celle que les États membres ont définie lundi soir, même si elle n’en est pas non plus très éloignée.
La commission de l’emploi et des affaires sociales, à la suite du travail très intéressant de notre compatriote Élisabeth Morin-Chartier, a en effet pris une position qui me paraît pouvoir se rapprocher rapidement de la nôtre, grâce à un dialogue ou, plus exactement, à un trilogue entre la Commission, les États membres et les députés européens. Je souhaite que cette discussion s’engage dès que possible, car, pour l’ensemble des États membres, pour l’ensemble des travailleurs européens, et non simplement français, ce texte représente une protection supplémentaire. Il importe donc qu’il puisse entrer en vigueur le plus rapidement possible, et, pour cela, il faut que les discussions entre les acteurs encore autour de la table aient lieu dans les plus brefs délais.
J’ajoute que l’accord auquel nous sommes parvenus lundi soir rappelle que la directive s’applique aux travailleurs du secteur des transports ; mais, compte tenu des spécificités évidentes de ce secteur, des discussions interviendront pour préciser notamment les conditions dans lesquelles les contrôles s’appliquent aux travailleurs de ce secteur qui sont, par nature, mobiles. Il s’agit donc d’une discussion qui est devant nous et qui devra intervenir rapidement.
Je veux dire pour conclure, monsieur le président, que le travail effectué a été un travail de constitution d’une majorité européenne ; c’est un travail qui s’adresse à tous les partenaires de la France, non pas simplement aux partenaires les plus traditionnels et les plus importants par leur nombre ou par leur influence, mais, j’y insiste, à tous les partenaires de la France.
Ce qui a prévalu est donc une méthode : nous affichons et nous exprimons clairement nos ambitions, nous essayons de constituer des majorités avec un travail très fin, auprès de l’ensemble de nos partenaires, sans jouer de l’opposition, mortifère pour l’Union européenne, entre les pays de l’Ouest et ceux de l’Est, c’est un point sur lequel je veux insister. Dans la discussion qui est intervenue lundi soir, l’ensemble des pays ont veillé à ce que cette opposition ne prévale pas et à ce que des pays situés à l’est puissent rejoindre le compromis ; c’était précieux pour l’avenir de ce texte et c’est, à mon avis, précieux pour le reste de l’Europe. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
territoires à énergie positive pour la croissance verte
M. le président. La parole est à M. Raymond Vall, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
M. Raymond Vall. Ma question s’adresse à M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, M. Nicolas Hulot. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
En 2014, le ministère de l’environnement, de l’énergie et de la mer décide de lancer le programme Territoires à énergie positive pour la croissance verte, afin de territorialiser la politique de transition énergétique. À partir de là, 554 territoires sont labellisés sur l’ensemble du territoire métropolitain et ultramarin, ce qui représente 15 000 communes et près de 40 millions de nos concitoyens.
Le bilan fait en avril 2017 a été très positif, puisque l’effet de levier obtenu par le fonds permet de multiplier par trois les investissements des collectivités, avec des résultats concrets pour l’environnement, pour l’économie locale et pour l’emploi. Ainsi, cela a représenté 810 000 tonnes de CO2 économisées, plus de 1,4 million de foyers supplémentaires alimentés à partir d’énergies renouvelables, plus de 3 500 véhicules électriques et hybrides, 4 millions de mètres carrés de surface photovoltaïque déployée et 200 territoires à zéro pesticide.
Aussi, monsieur le ministre d’État, vous comprenez bien que votre circulaire du 26 septembre dernier, accompagnée le 5 octobre suivant de son guide d’interprétation, ayant pour but d’arrêter tous les projets possibles afin de limiter le montant des crédits de paiement à 400 millions d’euros, alors que les engagements conclus s’élèvent à plus de 750 millions d’euros, ait déclenché un véritable tremblement de terre au sein de ces territoires, qui se sont engagés, forts de la signature de l’État, auprès de leur population et parfois des entreprises locales.
Monsieur le ministre d’État, cette décision brutale est perçue comme injuste ; elle doit faire l’objet d’une nouvelle évaluation, plus précise, avant que ne s’alimente une fois encore le sentiment que la parole de l’État n’est plus respectée. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.
M. Nicolas Hulot, ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur Vall, vous imaginez bien que ce n’est pas de gaieté de cœur que j’ai déclenché cette onde sismique ; je partage comme vous la conviction que la transition écologique passe par les territoires – vous en avez fait la démonstration.
Effectivement, dans la dynamique issue de l’adoption de la loi de 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, et à l’appel de l’État, des milliers de collectivités se sont engagées, vous l’avez mentionné, dans des projets de transition, en se regroupant entre elles et en associant des acteurs économiques locaux. Les collectivités françaises sont en pointe, il faut le reconnaître, dans la lutte contre le changement climatique.
Pour accompagner cette dynamique, une enveloppe spéciale de transition énergétique a été mise en place, mais elle n’a été abondée en 2015 et en 2016 qu’à hauteur de 400 millions d’euros de crédits de paiement. Or le problème que j’ai découvert est que les conventions conclues avec les territoires représentent un total de 748 millions d’euros. C’est au regard de cette insuffisance de crédits que j’ai effectivement adressé une circulaire aux préfets de région le 26 septembre dernier.
Pour trouver une solution, j’ai d’abord besoin d’un état des lieux précis. On doit mesurer le niveau d’avancement des projets et identifier ceux qui rencontrent des difficultés de mise en œuvre, afin de préciser le niveau d’engagement financier de l’État. La collecte d’informations est en cours et il est donc trop tôt pour répondre à toutes les interrogations qui nous remontent.
Toutefois, je sais que la confiance est nécessaire entre l’État et ces territoires, je peux par conséquent vous rassurer sur le fait que la parole de l’État sera tenue, les projets déjà lancés et qui seront menés à leur terme dans les délais seront financés.
Nous allons continuer à travailler dans le cadre de la Conférence nationale des territoires, car ceux-ci sont, j’en suis convaincu comme vous, la clef pour réussir ma propre transition écologique. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
M. le président. La parole est à M. Raymond Vall, pour la réplique.
M. Raymond Vall. Monsieur le ministre d’État, j’ai bien enregistré ce que vous avez dit.
Simplement, et très sincèrement, si vous voulez pouvoir compter sur ces territoires pour mettre en œuvre le plan Climat très ambitieux que vous avez présenté en 2017, ne les laissez pas tomber. Eux aussi comptent sur vous ! (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe La République En Marche et du groupe Les Républicains.)
citoyens français emprisonnés à l’étranger
M. le président. La parole est à Mme Christine Prunaud, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Mme Christine Prunaud. Ma question s’adressait à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Madame la ministre chargée des affaires européennes, après avoir déjà passé sept ans en prison, notre compatriote Salah Hamouri a été une nouvelle fois arrêté par l’armée israélienne, le 23 août dernier. Le 18 septembre suivant, un tribunal militaire l’a de nouveau condamné à une détention administrative, qui peut être, vous le savez, renouvelable à l’infini sans justification.
Ses avocats n’ont toujours pas pu prendre connaissance des preuves sur lesquelles ces incriminations se fondent ; sa famille n’a toujours pas pu lui rendre visite.
Face à cet acharnement politique contre un défenseur des droits humains dont le dossier est vide, face aux méthodes israéliennes arbitraires et contraires, sur bien des points, au droit international, le Quai d’Orsay a enfin dénoncé, hier, cette détention administrative.
Il était temps ! Il était temps que notre pays intervienne en faveur de l’un de ses ressortissants, victime d’une injustice. Le légitime combat de Salah Hamouri pour la Palestine est pacifique ; il ne ressemble en rien à une entreprise terroriste.
Madame la ministre, être préoccupé et dénoncer, c’est bien ; mais l’exigence d’une libération immédiate de Salah Hamouri demeure. Que comptez-vous faire ? (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et sur des travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme Éliane Assassi. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la ministre auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes.
Mme Éliane Assassi. Je ne vois pas le rapport avec les affaires européennes…
Mme Nathalie Loiseau, ministre auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes. Madame la sénatrice Prunaud, le Gouvernement partage votre préoccupation sur la situation de Salah Hamouri, ressortissant palestinien, mais aussi français, donc notre compatriote.
Vous l’avez dit, il a été arrêté le 23 août dernier ; le juge de district israélien a confirmé, le 18 septembre, sa détention administrative ; la dernière audience en appel à l’encontre de cette décision de mise en détention s’est tenue à la Cour suprême israélienne de Jérusalem le 22 octobre. Ni notre compatriote ni ses avocats n’ont pu avoir connaissance des charges retenues contre lui.
Comme tous les Français détenus à travers le monde, Salah Hamouri bénéficie pleinement de la protection consulaire française, en conformité avec la convention de Vienne. Notre consul général lui a ainsi rendu visite sur son site de détention, et le consulat général était présent à chacune des audiences publiques auxquelles il a comparu.
Nous avons fait part aux autorités israéliennes de toute l’attention que nous portons à son cas et de notre préoccupation face à l’usage extensif de la détention administrative. En effet, je le rappelle, l’utilisation abusive et systématique de la détention administrative porte atteinte au droit à un procès équitable et aux droits de la défense. Nous demandons que l’ensemble des droits de notre compatriote soient respectés, et nous espérons sa libération. Nous sommes aussi intervenus pour demander que sa famille puisse lui rendre visite.
Soyez assurée, madame la sénatrice, de l’attention avec laquelle nous allons continuer de suivre la situation de M. Hamouri, et non pas seulement par des déclarations publiques. (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)
M. le président. La parole est à Mme Christine Prunaud, pour la réplique.
Mme Christine Prunaud. Je prends bonne note, madame la ministre, de l’attention que vous portez à cette affaire.
Les autorités françaises ont su engager des démarches similaires. Ce que vous avez pu exiger de la Turquie, un pays qui n’est pas non plus démocratique, pour la libération de Loup Bureau, nous souhaiterions que vous l’exigiez aussi pour Salah Hamouri, puisque ni l’un ni l’autre ne sont terroristes. Ce que nous voulons, c’est sa libération immédiate, et non pas dans deux, trois ou six mois.
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue !
Mme Christine Prunaud. Telle est la volonté de beaucoup d’entre nous, sur ces travées, et de bien des associations.
Je vous saurais donc gré, madame la ministre, de bien vouloir être encore plus exigeante.
généralisation du tiers payant
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour le groupe socialiste et républicain.
M. Bernard Jomier. Ma question s’adressait à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
En 2016, plus d’un quart des assurés sociaux ont renoncé à des soins. Si les causes de ce renoncement sont multiples, les spécialistes de la question sont unanimes pour affirmer que l’extension des dispenses d’avance de frais serait un levier majeur d’action pour résorber ce problème. Le directeur de la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés l’a encore rappelé, hier, lors de son audition devant notre commission des affaires sociales.
Alors que le vote de la loi de modernisation de notre système de santé avait représenté un acte décisif en ce sens, les récentes déclarations de Mme la ministre entretiennent le flou et nous font craindre un retour en arrière. Pourquoi instiller le doute sur une mesure qui fonctionne et qui s’applique déjà, comme le souligne le rapport de l’IGAS, l’Inspection générale des affaires sociales, de ce mois-ci ? En effet, sur le terrain, au quotidien, le tiers payant est mis en place par les professionnels de santé pour les patients pris en charge à 100 % par la sécurité sociale.
Il reste, oui, à résoudre des difficultés techniques sur la part complémentaire, pour aboutir à un système qui doit bien entendu être simple et à flux unique pour les professionnels de santé. Je tiens à rappeler que, en Europe, vingt-quatre pays sur vingt-huit pratiquent d’ores et déjà la dispense totale de paiement.
En annonçant la généralisation du tiers payant, nous avons créé une forte attente et une approbation massive des assurés sociaux. Nous devons nous montrer à la hauteur de ces attentes et poursuivre l’action engagée en faveur de la dispense de paiement et dans le respect de la loi.
Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous confirmer l’engagement pris par le Président de la République pour la mise en place de cette mesure ? Pouvez-vous nous éclairer sur le délai dans lequel les Français pourront bénéficier d’une dispense complète d’avance de frais pour les actes pris en charge par l’assurance maladie ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement.
M. Christophe Castaner, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur Jomier, chacun d’entre nous est attaché à l’accessibilité la plus large possible aux soins ; jamais, non, jamais l’argent ne doit être un obstacle à ce que telle ou telle personne en bénéficie.
On observe bien, depuis quelques années, la montée en puissance de dispositifs assez similaires à celui de la généralisation du tiers payant. On le voit en particulier pour l’ensemble des publics en situation de précarité, notamment les bénéficiaires de la CMU complémentaire, mais encore ceux qui bénéficiaient de l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé ou ceux qui souffrent d’une ALD, une affection de longue durée.
Nous y sommes tous attachés, mais, au fond, dans ce pays, on se complaît trop souvent à confondre droits réels et droits formels ; il arrive à nos assemblées de penser qu’il suffit d’adopter un texte pour garantir sa mise en œuvre…
Or la réalité est un peu plus complexe et la ministre des solidarités et de la santé, que je vous prie d’excuser – elle est au banc du Gouvernement, à l’Assemblée nationale, pour l’examen du PLFSS –, a immédiatement diligenté une mission d’inspection de l’IGAS, pour apprécier la faisabilité de la mise en œuvre de cette mesure dans de bonnes conditions, afin de ne pas fragiliser les médecins, qui subissent déjà aujourd’hui les difficultés que chacun d’entre nous sait, et de faire en sorte que nous ne reculions pas, pour ceux qui en ont besoin.
Par conséquent, notre engagement a, tout d’abord, consisté à prendre acte de l’impossibilité technique de respecter les délais, sous peine de fragiliser l’ensemble de l’offre de soins sur nos territoires, mais aussi à se fixer une ambition : faire en sorte que le tiers payant soit généralisable le plus vite possible, qu’il soit garanti à toutes celles et tous ceux qui en ont le plus besoin, et qu’il soit généralisable pour toutes celles et tous ceux qui sont, en lien avec leur médecin, en capacité de le mettre en œuvre.
La ministre vous présentera, dans quelques jours ou dans quelques semaines, le plan d’action que nous voulons mettre en œuvre. Nous voulons faire en sorte que cet objectif se traduise concrètement dans les faits et non seulement dans les déclarations d’intention. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour la réplique.