M. le président. Il faut conclure, monsieur le ministre !
M. Thierry Mandon, secrétaire d'État. Bref, la politique du ministère de l’éducation nationale ne correspond nullement à la caricature que vous en avez faite. Elle vise bien au contraire à accompagner l’indispensable démocratisation de notre système d’enseignement scolaire d’une forte exigence de qualité. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Grosperrin, pour la réplique.
M. Jacques Grosperrin. Nous ne voulons plus d’une école uniforme, de diplômes au rabais, de filières qui n’ont d’excellence que le qualificatif. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Je suis ravi que Mme la ministre Najat Vallaud-Belkacem assiste à la cérémonie de remise des prix du concours général, lequel a distingué des jeunes gens devenus ensuite illustres tels que Jaurès, Blum, Chevènement, Pompidou, Juppé, Pasteur… Je l’invite d’ailleurs à se pencher sur le texte tiré de De Officiis proposé à l’épreuve de version latine du concours général de 2005 et dans lequel Cicéron énonce les devoirs des gouvernants. Aidons nos élèves, quels qu’ils soient, pour favoriser leurs résultats ! (Applaudissements sur certaines travées du groupe Les Républicains.)
21ème critère de discrimination : la précarité sociale
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Yonnet, pour le groupe socialiste et républicain.
Mme Evelyne Yonnet. Ma question s'adresse à Mme la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion.
Madame la secrétaire d’État, le 31 mars 2015, notre collègue Yannick Vaugrenard a déposé une proposition de loi, cosignée par un grand nombre de sénateurs du groupe socialiste et républicain, visant à lutter contre la discrimination à raison de la précarité sociale.
L’article unique de cette proposition de loi modifie le code pénal et le code du travail pour inclure la reconnaissance « de la particulière vulnérabilité résultant de leur situation économique, apparente ou connue de son auteur » comme critère supplémentaire de discrimination contre lequel nous devons protéger nos concitoyens les moins aisés.
La grande pauvreté touche aujourd’hui plus de 8,7 millions de personnes dans notre pays. Dans les quartiers dits « prioritaires » de la politique de la ville, ex-zones urbaines sensibles, plus d’un enfant sur deux vit sous le seuil de pauvreté. En parallèle des nombreuses mesures prises depuis le début du quinquennat pour lutter contre la pauvreté, nous devons agir sur les mentalités, car la discrimination est à la fois l’une des causes et l’une des conséquences de la pauvreté.
Un an après son adoption au Sénat, la proposition de loi de Yannick Vaugrenard vient d’être adoptée à l’Assemblée nationale, le 14 juin dernier.
Quels actes l’exécutif compte-t-il poser pour garantir la pleine application de cette proposition de loi et selon quel calendrier ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion.
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Je veux tout d’abord rappeler pourquoi le Gouvernement a soutenu cette proposition de loi déposée par Yannick Vaugrenard et le groupe socialiste et républicain du Sénat.
Le plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté correspondait à un engagement du Président de la République. Il a été adopté dès janvier 2013. Quels sont les objectifs de ce plan ? Il s’agit, d’une part, d’assurer à tous les moyens de mener une vie digne sur le plan matériel, au travers de la revalorisation des minima sociaux et de certaines prestations familiales destinées aux plus modestes, et, d’autre part, de permettre à chacun d’accéder à ses droits, c’est-à-dire à une formation, aux soins, à un logement, etc.
Force est de constater qu’un nombre encore trop important de personnes peuvent se voir refuser l’accès à des biens essentiels pour la simple raison qu’on les soupçonne de ne pas pouvoir payer. Il existe un risque de dérive vers une société du soupçon, de l’arbitraire. Encore aujourd’hui, des hommes et des femmes politiques parlent de la pauvreté comme si c’était une tare, accusent les personnes pauvres d’être coupables de leur situation. Il faut donc rester vigilants.
Dans cette perspective, la proposition de loi en question ne doit pas se borner à une déclaration d’intentions destinée à se donner bonne conscience, sans portée concrète. Oui, la mise en œuvre de ce nouvel outil juridique devra être assortie de sanctions. Il jouera aussi un rôle de dissuasion à l’égard de certains comportements discriminatoires à raison de la précarité sociale. C’est d’ailleurs déjà de cette façon que nous avons pu faire reculer les discriminations racistes, homophobes, sexistes.
M. le président. Veuillez conclure, madame la secrétaire d’État !
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. Ce texte vise à redonner confiance à celles et ceux qui ont perdu espoir parce qu’ils se sentent discriminés en raison de leur pauvreté. Ils doivent savoir qu’ils ont le droit de leur côté et reprendre confiance ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Yonnet, pour la réplique.
Mme Evelyne Yonnet. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse, qui satisfera sans aucun doute les associations caritatives et humanitaires qui ont soulevé ce problème. Néanmoins, nous attendons toujours l’inscription effective de sanctions dans le code pénal et le code du travail.
rapport de la cour des comptes sur les politiques de lutte contre les consommations nocives d’alcool
M. le président. La parole est à M. Gérard César, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur certaines travées de l’UDI-UC.)
M. Gérard César. Ma question s'adresse à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé et j’y associe des collègues siégeant sur diverses travées de notre hémicycle.
Le 13 juin dernier, la Cour des comptes a publié un rapport sur les politiques de lutte contre les consommations nocives d’alcool. Ce rapport recommande de mettre en œuvre tous les leviers disponibles pour faire baisser la consommation moyenne d’alcool dans l’ensemble de la population, et non plus de lutter contre les excès de consommation, fondement même des politiques de santé publique.
Cette approche semble remettre ainsi en cause toute idée de consommation modérée. Les actions préconisées dans ce rapport visent à relever fortement la fiscalité, à supprimer les repères de consommation, à limiter la publicité, à accroître les contrôles et les sanctions. Aucune priorité, aucun objectif clair n’est affiché, et cette démarche ne correspond ni à la réalité du terrain ni aux véritables enjeux de santé publique.
C’est le vin qui est plus particulièrement ciblé. Nous savons tous que ce n’est pas le produit qui pose problème : c’est l’excès, le comportement à risque.
Je souhaiterais savoir, madame la ministre, quelles suites le Gouvernement entend donner à ce rapport. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées de l'UDI-UC.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le sénateur, vous vous êtes illustré en menant la bataille, à l’occasion de la discussion d’une loi de santé publique, pour mettre à bas un volet de la loi Évin qui encadrait la publicité pour les boissons alcooliques. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) L’examen d’un tel texte n’est pourtant pas le moment le plus opportun pour se pencher sur cette question…
Mais je vois que vous avez de la suite dans les idées (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.) : au moment où la Cour des comptes publie un rapport mettant en exergue la nécessité d’actionner tous les leviers disponibles pour faire reculer la consommation excessive d’alcool, vous souhaitez remettre en question les politiques menées en la matière.
M. Gérard César. Pas du tout !
Mme Marisol Touraine, ministre. J’ai étudié avec beaucoup d’intérêt les préconisations de la Cour des comptes. Les politiques publiques nécessaires ont été engagées ; il convient de les relayer. Je rappelle que l’alcool est responsable de 50 000 décès par an dans notre pays. Nous devons donc faire en sorte de renforcer la prévention et l’information en direction des jeunes.
M. Gérard César. Nous sommes tous d’accord là-dessus !
Mme Marisol Touraine, ministre. Des dispositions à cette fin ont été introduites dans la loi de modernisation de notre système de santé.
Il est nécessaire d’encadrer les messages publicitaires, de mettre en place des avertissements et de former les professionnels de santé.
Nous agissons en direction des jeunes en instaurant des consultations spécifiques pour ceux d’entre eux qui sont dépendants de l’alcool ou d’autres substances.
M. le président. Veuillez conclure, madame la ministre !
Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement continuera à agir résolument, en matière de santé publique, pour faire en sorte que la consommation excessive d’alcool cause moins de décès dans notre pays. (Applaudissements sur la plupart des travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. Gérard César, pour la réplique.
M. Gérard César. La priorité est en effet de privilégier l’éducation, la prévention et la protection, en particulier des jeunes et des populations à risque.
Madame la ministre, je vous rappelle que la consommation de vin dans notre pays a baissé de façon constante, à hauteur de 66 % en cinquante ans, et de 20 % ces dix dernières années.
Pourtant, les problèmes demeurent. Il paraît possible de concilier atouts économiques et promotion de la santé publique, en favorisant une consommation responsable, culturelle, de plaisir, en accord avec la défense de notre patrimoine culturel, économique et gastronomique.
Je rappelle que la France accueille 10 millions d’œnotouristes par an et que la filière vins et spiritueux enregistre un chiffre d’affaires de 11 milliards d’euros à l’export. Contrairement à ce que vous pensez, madame la ministre, la loi Évin n’a pas été « détricotée » par le Parlement ; elle a été clarifiée afin de permettre une meilleure communication. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées de l'UDI-UC.)
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.
Je rappelle que les prochaines questions d’actualité au Gouvernement auront lieu mardi prochain 12 juillet 2016, de seize heures quarante-cinq à dix-sept heures trente, et qu’elles seront retransmises en direct sur Public Sénat et sur le site internet du Sénat.
Mes chers collègues, avant d’aborder le point suivant de l’ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures dix, est reprise à seize heures trente, sous la présidence de M. Hervé Marseille.)
PRÉSIDENCE DE M. Hervé Marseille
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
6
Transformation d'un groupe de travail en commission spéciale
M. le président. L’ordre du jour appelle, en application de l’article 16, alinéa 2, du règlement, la proposition de création d’une commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi relatif à l’égalité et à la citoyenneté.
Je vous rappelle que, lors de sa réunion du 15 juin 2016, la conférence des présidents avait adopté le principe de la création de cette commission spéciale ainsi que la mise en place d’un groupe de travail préfigurant cette commission, dont les trente-six membres ont été nommés en séance le 22 juin dernier.
Le projet de loi ayant été transmis, il appartient désormais au Sénat de décider son renvoi à une commission spéciale qui se substituera au groupe de travail.
Il n’y a pas d’opposition ?…
Il en est ainsi décidé et je proclame Mmes Aline Archimbaud, Maryvonne Blondin, Agnès Canayer, M. Jean-Claude Carle, Mmes Françoise Cartron, Hélène Conway-Mouret, MM. Philippe Dallier, René Danesi, Francis Delattre, Mme Catherine Di Folco, M. Daniel Dubois, Mme Dominique Estrosi-Sassone, M. Christian Favier, Mmes Joëlle Garriaud-Maylam, Françoise Gatel, M. Loïc Hervé, Mmes Corinne Imbert, Françoise Laborde, M. Jean-Claude Lenoir, Mme Marie-Noëlle Lienemann, MM. Jean-Jacques Lozach, Jacques-Bernard Magner, Jacques Mézard, Louis Pinton, Hugues Portelli, Mmes Sophie Primas, Christine Prunaud, MM. Alain Richard, Yves Rome, Jean-Pierre Sueur, Henri Tandonnet, René Vandierendonck, Michel Vaspart, Alain Vasselle, Yannick Vaugrenard et Mme Evelyne Yonnet membres de la commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi relatif à l’égalité et à la citoyenneté.
7
Orientation des finances publiques et règlement du budget 2015
Débat, puis rejet en procédure accélérée d’un projet de loi modifié
M. le président. L’ordre du jour appelle le débat sur l’orientation des finances publiques et la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2015 (rapport d’information n° 763, projet n° 756, rapport n° 759, tomes I et II).
La conférence des présidents a décidé de joindre la discussion générale de ce projet de loi au débat sur l’orientation des finances publiques.
Dans le débat commun, la parole est à M. le secrétaire d’État chargé du budget. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des finances, messieurs les rapporteurs généraux, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi de règlement que le Gouvernement vous soumet aujourd’hui nous invite à débattre en séance publique des résultats de l’exécution 2015 du budget de l’État.
Comme le veut le « chaînage vertueux » dont la mention est de tradition à cette époque de l’année, c’est sur la base de l’analyse de cette exécution que nous pouvons discuter des perspectives des finances publiques.
L’analyse de l’exécution a déjà fait l’objet de plusieurs échanges devant votre commission des finances. Je n’en rappellerai que quelques éléments essentiels.
Tout d’abord, pour l’ensemble des administrations publiques, trois constats sont à retenir.
Premièrement, le déficit public connaît une baisse ininterrompue depuis le début de la législature. En 2015, il s’est établi à 3,6 % du PIB ; il avait atteint 5,1 % en 2011.
M. Daniel Raoul. Il faut le rappeler !
M. Francis Delattre. Et la croissance ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Deuxièmement, pour la première fois depuis 2000, le solde public s’améliore alors que les prélèvements obligatoires diminuent.
M. Philippe Dallier. Si peu…
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Si le déficit et les impôts baissent simultanément, c’est bien que l’on fait des économies !
Troisièmement, après des années de hausse marquée, la dette publique est désormais quasiment stabilisée.
Je le répète, le déficit structurel atteint 3,6 % du PIB en 2015, chiffre largement inférieur à l’objectif de 4,1 %. La trajectoire fixée par la loi de programmation des finances publiques étant respectée, il n’y a pas lieu de déclencher la procédure de correction des écarts.
Ces éléments sont connus et consensuels ;…
M. Francis Delattre. Oh non !
M. Vincent Delahaye. Certainement pas !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. … je ne m’y attarderai donc pas.
J’en viens aux résultats de l’exécution du budget de l’État, qui est le cœur de ce projet de loi.
Lors de la discussion de la loi de finances initiale, le Gouvernement vous avait proposé de fixer des prévisions prudentes de recettes. L’exécution du budget confirme cette prudence : les recettes fiscales nettes sont supérieures de 1 milliard d’euros à la prévision de la loi de finances initiale.
L’analyse du passé devant éclairer l’avenir, l’exécution des recettes en 2015 nous livre un enseignement important.
Il est facile de se focaliser sur les mauvaises nouvelles qui peuvent affecter l’exécution du budget. Mais, au cours de la gestion, il n’y a pas que des mauvaises nouvelles : il y en a aussi de bonnes.
Ainsi, on a pu craindre que la faible inflation limite le produit de la TVA, mais cet effet a été compensé par une consommation des ménages plus dynamique que prévu. (M. Jacques Chiron acquiesce.)
En ce qui concerne l’impôt sur les sociétés, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, s’est révélé plus coûteux qu’anticipé.
M. Philippe Dallier. En effet !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Toutefois, les bons résultats du contrôle fiscal et le dynamisme du bénéfice fiscal ont permis de compenser ce manque à gagner.
Pour ce qui concerne l’impôt sur le revenu, certains revenus au titre de 2014 ont été plus faibles qu’escompté, mais, là aussi, la hausse du taux de recouvrement et les bons résultats de la lutte contre la fraude ont permis une plus-value de 400 millions d’euros.
Au total, parce que nous avions fixé des prévisions prudentes, les bonnes nouvelles compensent les mauvaises et le déficit est moins élevé que prévu.
J’en viens aux dépenses de l’État.
Non seulement le niveau de dépenses voté en loi de finances a été respecté, mais il a été réduit de 700 millions d’euros en cours d’exécution.
Cette baisse a été conciliée avec le financement de nos priorités, avec l’engagement de moyens nouveaux pour assurer la sécurité des Français et soutenir l’emploi. Ces éléments sont connus, et je n’y reviendrai pas. Je voudrais plutôt remettre en perspective les résultats obtenus depuis 2012 s’agissant de la dépense de l’État.
Prenons les chiffres à périmètre constant pour pouvoir effectuer des comparaisons d’une année sur l’autre.
Pour le premier budget de la législature, à savoir la loi de finances pour 2013, la dépense de l’État hors charge de la dette et pensions s’élevait à 303,2 milliards d’euros. Pour 2016, nous prévoyons une dépense de 295,2 milliards d’euros, soit une baisse de 8 milliards d’euros en quatre ans. Si l’on prend en compte la charge de la dette et les pensions, la baisse atteint 9,4 milliards d’euros.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je parle ici d’une baisse nette, en euros sonnants et trébuchants, et non d’une baisse liée à une évolution tendancielle de la dépense.
Tels sont les efforts fournis par nos concitoyens pendant quatre ans, ou plus exactement une partie d’entre eux, car je n’ai parlé ni de la sécurité sociale, dont le déficit s’est considérablement réduit,…
M. Francis Delattre. Grâce à la CADES !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. … ni du secteur local. Ces efforts étaient indispensables pour remettre nos comptes en ordre, et ils ont été massifs.
Qu’en est-il pour 2017 ? Pour l’année prochaine, il y a un impératif : le déficit public doit atteindre 2,7 %, comme prévu et conformément à nos engagements européens. Nous avons fait des efforts pendant quatre ans, nous n’allons certainement pas les dilapider la dernière année.
M. François Marc. Bien sûr !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le déficit doit poursuivre sa réduction l’an prochain, pour repasser sous le seuil de 3 %. Nous construirons un budget le permettant, qu’il s’agisse du projet de loi de finances ou du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Cela étant, dans ce cadre budgétaire global, nous conservons la liberté de choisir ce que nous voulons pour le pays. Cette liberté, nous n’y avons jamais renoncé. À l’occasion de l’élaboration de chaque budget, nous avons pris des mesures pour que les choses changent dans le sens d’une plus grande solidarité et d’une plus grande égalité. Tantôt, nous avons accru les dépenses en faveur des Français les plus déshérités, par exemple avec le plan pauvreté ; tantôt, nous avons allégé l’impôt des classes moyennes, comme cette année. À l’occasion de chaque budget, nous avons pris cette liberté, et cela ne nous a pas empêchés de réduire chaque année le déficit.
Pour 2017, nous vous proposerons de mobiliser davantage de moyens pour l’éducation, pour l’emploi et pour la sécurité.
Un pays où l’on vit en sécurité et où chacun, quelle que soit sa condition sociale, peut avoir accès au savoir, vivre du fruit de son travail et s’élever dans la société par ses propres mérites, voilà ce que nous voulons.
Dans ces conditions, oui, la dépense de l’État hors charge de la dette et pensions va augmenter de 3,3 milliards d’euros en 2017. Cette augmentation, non seulement nous l’assumons, mais nous la revendiquons ! Je voudrais prendre quelques instants pour l’expliquer.
Tout d’abord, replaçons les choses en perspective : cette hausse intervient après quatre ans de baisse et, entre 2013 et 2017, la dépense de l’État hors charge de la dette et pensions aura diminué, en euros sonnants et trébuchants, de 4,6 milliards d’euros.
Les efforts demandés aux Français demeurent importants, mais nous leur en restituons une partie, parce que la sécurité de nos finances nous permet de le faire.
Ensuite, malgré tout ce qui a pu être dit ou écrit sur ce point au cours des derniers jours, augmenter la dépense, ce n’est pas forcément accroître le déficit. En l’occurrence, cette hausse de la dépense est entièrement financée…
M. Francis Delattre. Mais bien sûr…
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. … et rentre dans le cadre budgétaire global qu’impose l’objectif de ramener le déficit à 2,7 % du PIB l’année prochaine.
Cette hausse de la dépense est financée par deux moyens principaux.
Premièrement, la dernière annuité du pacte de responsabilité et de solidarité aura, en 2017, un impact budgétaire plus limité que prévu, le renforcement du CICE étant privilégié, comme l’a annoncé le Président de la République. Cela représente plus de 4 milliards d’euros.
M. Francis Delattre. Cela permet de décaler 5 milliards d’euros !
M. Daniel Raoul. C’est faux !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Deuxièmement, le produit de la lutte contre la fraude, c’est-à-dire les recouvrements sur contrôles fiscaux et les recettes dégagées par le service de traitement des déclarations rectificatives, le STDR, sera proche en 2017 du niveau qu’il atteindra cette année. Or nous avions budgété par prudence une forte baisse. Ce relèvement représente 1,4 milliard d’euros.
En outre, pour des montants moindres, nous avons pu revoir à la baisse nos prévisions du coût des contentieux fiscaux de série, à hauteur de 700 millions d’euros tout en restant prudents, et nous tenons compte à concurrence de 500 millions d’euros du contexte de taux d’intérêt, qui a évolué depuis le programme de stabilité.
Les dépenses nouvelles sont donc bel et bien financées, mais je sais que certains, dans cet hémicycle, ont un problème avec la dépense publique…
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Pour la simple et bonne raison qu’il y en a trop !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. … en tant que telle et voient dans sa hausse un mal en soi.
Pour notre part, nous n’avons jamais considéré la dépense publique comme un bien ou comme un mal : à nos yeux, c’est un moyen pour agir, le plus efficacement possible.
Il faut être efficaces et continuer à l’être : c’est pourquoi le budget pour 2017 prévoira également de nouvelles économies sur les champs non prioritaires de notre action. Ainsi, la baisse des effectifs se poursuivra dans de nombreux ministères. C’est là la garantie que l’argent des Français soit utilisé à bon escient.
Cela étant, il faut aussi déployer des moyens là où cela nous semble nécessaire, que ce soit sous la forme de dépense publique, de baisses d’impôts ou autres ; il ne s’agit là que de modalités.
Je n’anticiperai pas les arguments de la majorité sénatoriale,…
M. Francis Delattre. C’est dommage !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. … mais j’invite d’ores et déjà ses orateurs à la modération.
M. Francis Delattre. Et pourquoi pas à la censure ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Quand, comme je l’ai lu dans certains documents, on promet un déficit de 3,5 % en 2017 et une dette publique atteignant 100,5 % du PIB en 2019, il faut savoir rester modéré.
Quand on critique des choix prétendument électoralistes,…
M. Philippe Dallier. Si peu…
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. … tout en proposant une mesure aussi conforme à l’intérêt général et à la justice sociale que la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune, l’ISF, il faut savoir rester modéré.
Quand on annonce des montants d’économies élevés, atteignant des centaines de milliards d’euros, sans présenter aucune explicitation, aucune documentation,…
M. Francis Delattre. Ça va venir !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. … il faut rester modeste.
Quand on annonce tout cela, et bien plus encore, on n’est pas forcément bien armé pour aborder ce débat budgétaire !
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, plus que jamais, le chaînage vertueux élaboré par les pères de la LOLF se révèle utile à nos débats. En effet, notre projet de budget pour 2017 découle directement des résultats obtenus au cours des dernières années. Les perspectives de nos finances publiques sont dans la continuité de ce que nous avons fait depuis le début de 2012 : nous poursuivons jusqu’au bout la remise en ordre de nos comptes publics. C’est là la responsabilité historique de ce gouvernement,…
M. Francis Delattre. Pour être historique, ce sera historique…
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. … et nous l’assumerons jusqu’au terme de la législature. L’objectif, j’y insiste, est de ramener le déficit public à 2,7 % en 2017.
Dans ce cadre budgétaire global, nous gardons la liberté de faire des choix et d’augmenter la dépense si cela nous paraît utile pour le pays et afin de restituer aux Français une partie des efforts consentis ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. François Marc. Bravo !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances.
M. Philippe Dallier. Ça ne va pas être tout à fait la même chose…
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Mon analyse sera un peu différente, en effet…
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des finances, monsieur le rapporteur général de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, nous nous trouvons aujourd’hui à un moment clef du calendrier budgétaire, celui où nous sommes amenés à regarder le passé pour préparer l’avenir. Nous allons donc examiner les principaux éléments de l’exécution du budget de l’année 2015, ainsi que les lignes directrices arrêtées par le Gouvernement en vue du débat d’orientation des finances publiques pour 2017.
À cet égard, je regrette que, pour la première fois, le Gouvernement n’ait pas respecté la loi organique relative aux lois de finances, qui lui imposait de transmettre son rapport avant le 30 juin. Celui-ci nous a été remis avec cinq jours de retard, la veille de l’examen en commission, ce qui n’a pas permis de l’examiner de manière satisfaisante. Encore avons-nous eu plus de chance que nos collègues de l’Assemblée nationale, qui l’ont reçu pendant la réunion de leur commission des finances. Les annonces faites le 30 juin par le Président de la République par voie de presse n’avaient manifestement pas été prises en compte dans le rapport initial…