M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer, auteur de la question n° 1332, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.
Mme Agnès Canayer. Monsieur le ministre, ma question porte sur la valorisation de la filière bois en Seine-Maritime.
Si la superficie de la forêt ne représente que 16 % du territoire de la Seine-Maritime, son poids économique est important. En Normandie, sur l’ensemble de la « chaîne bois », la filière emploie près de 22 200 personnes.
Conformément à la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, adoptée en 2014, un nouveau programme national de la forêt et du bois a été présenté en mars dernier.
D’ores et déjà, plusieurs difficultés sont mises en évidence par les professionnels, qui attendent des réponses pragmatiques.
Le premier point concerne l’indemnisation des dégâts de grand gibier, définie par l’article R. 425-21 du code de l’environnement.
En effet, la question de la représentativité des propriétaires forestiers au sein de la commission départementale de la chasse et de la faune sauvage, qui émet, chaque année, un avis sur le plan de chasse, est régulièrement soulevée. Par ailleurs, les modalités d’indemnisation doivent pouvoir être révisées dès lors que le plan de chasse ne permet pas de limiter les dégâts causés aux forêts. Les professionnels s’inquiètent et attendent des engagements de l’État.
Le second volet a trait à la question des normes phytosanitaires, alors que l’arrêté du 1er avril dernier reporte de nouveau de six mois la mise en place du traitement des grumes par fumigation.
L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES, doit mener une étude préalable à une autorisation de mise sur le marché d’un autre produit, le Forester. Pouvez-vous, monsieur le ministre, faire état de l’avancée de cette étude ? Une concertation avec les acteurs de la filière est-elle menée ?
Je veux également évoquer la régénération de la forêt, ou le reboisement. Avec une période de renouvellement global évaluée à 214 ans et 70 millions de plants plantés chaque année, la forêt française ne sera plus en mesure, d’ici à quelques années, de fournir la matière première nécessaire.
Il est regrettable de constater, aujourd’hui, d’une part, l’absence de stratégie sylvicole et, d’autre part, l’insuffisance de l’abondement du fonds stratégique de la forêt et du bois.
Enfin, la déclinaison normande du programme national forêt-bois suscite des questions : comment seront prises en compte les spécificités locales, notamment la nécessité de réimplanter des feuillus en Seine-Maritime ? Quelles sont les aides financières pérennes envisagées afin de mener une politique sylvicole normande à la hauteur des ambitions ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Madame la sénatrice, votre première interrogation porte sur le fonds stratégique de la forêt et du bois. Depuis la disparition du fonds forestier, c’est la première fois qu’un fonds stratégique pour financer le reboisement a été recréé par la loi, en 2014.
Ce fonds, qui a été abondé par des centimes forestiers précédemment gérés par les chambres d’agriculture et complété par ce que l’on appelle la « compensation forestière », laquelle consiste à faire payer ceux qui détruisent de la forêt, est alimenté à hauteur de 25 millions d’euros. Comme je l’ai déjà souligné devant le Sénat, mon objectif est qu’il soit doté de 100 millions d’euros, pour financer le reboisement.
Je le répète, c’est la première fois, depuis la disparition du fonds forestier, que de l’argent sera de nouveau consacré au reboisement de la forêt française.
Votre deuxième interrogation porte sur l’existence d’une stratégie sylvicole en France aujourd’hui. À ce sujet, je rappelle que c’est aussi la première fois qu’un Conseil supérieur de la forêt et du bois a été mis en place ! C’est encore la première fois qu’un programme national forêt-bois a été soumis à tous les acteurs de la filière forestière et adopté par ceux-ci. Comme vous l’avez évoqué, ce programme se déclinera au travers de plans régionaux. En effet, dès lors que le programme national a été adopté par tous les acteurs de la filière, il faut que les régions assument également leurs responsabilités, à leur niveau, et qu’elles adaptent le programme aux caractéristiques de leurs propres forêts, que celles-ci soient composées de résineux ou de feuillus.
Hier, madame la sénatrice, j’ai présenté un plan recherche et innovation 2025 pour la filière forêt-bois, afin de préciser les grandes orientations pour la forêt française sur les dix prochaines années. Je ne peux donc accepter d’entendre dire qu’il n’existerait pas de stratégie pour la forêt en France aujourd’hui !
Vous m’avez également interrogé sur les exportations et l’usage des produits phytosanitaires.
Depuis quinze ans, une dérogation, faisant suite à la tempête Klaus, qui a touché les Landes, permet de traiter les bois en bordure de forêt avec des produits phytosanitaires spécifiques. Nous devons modifier notre système pour assurer la certification demandée par les acheteurs de bois français situés à l’étranger. J’ai fait des propositions négociées en ce sens. La mise en œuvre des nouvelles mesures devait intervenir dès ce mois-ci. Nous l’avons reportée, tout en demandant aux ports de se mettre en conformité avec les nouveaux produits, afin de permettre l’exportation.
Il ne s’agit pas de freiner les exportations, même si je préfère que le bois français soit transformé en France : notre pays mérite mieux que d’exporter des billes de bois, pour, ensuite, réimporter des meubles !
Mon objectif est également de développer la filière de transformation. Voilà pourquoi nous lancerons, le 7 juin prochain, avec l’ensemble des villes qui le souhaitent, un vaste programme de construction de grands immeubles en bois, qui fera la part belle à l’utilisation de nouvelles techniques, françaises en particulier. Je pense notamment aux panneaux de bois lamellé croisé – les panneaux Cross-Laminated Timber, ou CLT –, qui permettent de réaliser de nouvelles constructions beaucoup plus résistantes que le béton. De nouveaux architectes sont en train de s’y mettre. Bien évidemment, c’est le carbone que nous visons là.
Tous ces points font partie du plan recherche et innovation 2025.
En ce qui concerne l’utilisation des produits phytosanitaires, nous n’avons d’autre objectif que de nous mettre en conformité avec les règles à respecter pour pouvoir exporter du bois, même si, je le répète, la filière bois française doit, selon moi, réaliser plus de valeur ajoutée en France.
La dernière question que vous avez soulevée, madame la sénatrice, porte sur l’équilibre sylvo-cynégétique – autrement dit, entre les forestiers et les chasseurs – que le Sénat a adopté, après plusieurs heures de débat en pleine nuit, lors de l’examen de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt. Les discussions ont été longues et difficiles avec les chasseurs – il y en a parmi les membres de cet hémicycle ! Certains forestiers estimaient, pour leur part, qu’il y avait trop de gibier… (Sourires.)
Nous avons pu trouver un équilibre, notamment grâce à l’engagement de deux sénateurs, qui ont travaillé jusqu’à une heure avancée de la nuit pour parvenir à un accord. Cet équilibre était nécessaire. Il sera appliqué, car, s’il convient d’assurer du gibier aux chasseurs, celui-ci ne doit en aucun cas empêcher les forestiers de percevoir l’usufruit de leur forêt.
Le maintien de cet équilibre est la ligne constante que je me suis fixée lors de l’examen de la loi d’avenir, qui a été adoptée par le Parlement voilà plus d’un an et demi.
M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer.
Mme Agnès Canayer. Merci, monsieur le ministre, de ces éléments.
Néanmoins, les propriétaires forestiers, sur les territoires, sont inquiets et ont besoin d’être rassurés. Ils espèrent notamment que vos ambitions et votre plan bénéficieront de financements à la hauteur des engagements pris et, surtout, que ces financements seront pérennes et permettront d’assurer le reboisement à long terme de nos forêts.
commissariats de police de cournon-d'auvergne et gerzat
M. le président. La parole est à M. Alain Néri, auteur de la question n° 1351, adressée à M. le ministre de l'intérieur.
M. Alain Néri. Je souhaite attirer l’attention du ministre de l’intérieur sur l’annonce, faite par la presse – convenez-en, cela peut être choquant pour les élus concernés –, d’un projet de fermeture des commissariats de Cournon-d’Auvergne et de Gerzat, projet qui aurait été évoqué lors d’un comité technique réuni en préfecture le 8 janvier dernier.
Selon les informations recueillies par la presse qui les a diffusées, la fusion des commissariats de Gerzat et de Cournon-d’Auvergne avec celui de Clermont-Ferrand serait envisagée.
Le commissariat de Cournon-d’Auvergne couvre un secteur de 36 000 habitants, comprenant les communes de Cournon-d’Auvergne, Lempdes, Le Cendre et Pérignat-lès-Sarliève. Son rôle est essentiel et irremplaçable pour la sécurité des citoyens, car le travail de la police nationale, vous le savez, est une tâche difficile, qui exige connaissance du terrain, proximité, discernement et esprit d’initiative.
Le rôle du commissariat de Gerzat est tout à fait identique.
La présence d’un commissariat de police au cœur des villes de Cournon-d’Auvergne, deuxième ville du département, avec plus de 20 000 habitants, et de Gerzat a permis d’éviter une explosion de la délinquance, contrairement à ce qui s’est produit dans plusieurs villes de banlieue classées en zone urbaine sensible.
Les maires et les conseillers municipaux sont soucieux de la tranquillité et de la sécurité de leurs concitoyens. Ils n’hésitent pas à redoubler d’efforts, en augmentant le nombre de policiers municipaux et de médiateurs et en équipant de systèmes de vidéoprotection les bâtiments communaux sensibles, en dépit d’un contexte budgétaire difficile. Notons également que la ville de Cournon-d’Auvergne a récemment engagé 65 000 euros pour la rénovation des locaux du commissariat de police, afin d’améliorer les conditions de travail des policiers.
Il n’en reste pas moins que la sécurité des citoyens est une compétence régalienne de l’État. À cet égard, je répète que la présence d’un commissariat de police est essentielle et irremplaçable. C’est aussi un symbole fort de la présence de la République dans nos communes.
Par conséquent, je souhaite savoir quelle suite M. le ministre de l’intérieur entend réserver au projet de fusion évoqué dans la presse. Je lui demande de rassurer les élus et les populations, qui veulent garder leurs policiers, ces policiers qui sont, avant tout, pour eux, de véritables gardiens de la paix.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence du ministre de l’intérieur.
La presse publie tant d’informations, souvent alimentées par des personnes qui ne sont guère bienveillantes, qu’il importe de prendre beaucoup de distance à l’égard des nouvelles diffusées.
Soucieux de mettre en œuvre une politique ambitieuse de lutte contre la délinquance, le Gouvernement, dont je rappelle qu’il a créé des postes dans la police, a pris des initiatives fortes, qui traduisent la priorité donnée aux politiques publiques de sécurité. Ainsi, depuis 2013, à l’occasion de chacune des lois de finances, ont été décidées des mesures de renforcement sans précédent des moyens mis à la disposition des services.
L’importance de ces efforts, qui augmentent la capacité opérationnelle des services, ne saurait pour autant constituer la seule réponse aux besoins croissants de sécurité qu’expriment nos compatriotes, dans le contexte de menaces que nous connaissons. L’efficacité des services est également un facteur déterminant.
À cet égard, le cadre juridique de l’action des forces de sécurité doit évoluer, comme leurs méthodes et leur organisation.
La création des zones de sécurité prioritaires, les ZSP, qui ont été mises en place dès le début du quinquennat, l’adoption des lois renforçant la lutte contre le terrorisme et organisant, pour la première fois dans l’histoire de la République, le cadre légal du renseignement, la réorganisation des services spécialisés, tels que le renseignement ou la police judiciaire, sont autant d’initiatives structurelles qui contribuent à rendre plus efficace l’action de la police et de la gendarmerie.
Au-delà, le cœur de métier des forces de sécurité, c’est-à-dire la police du quotidien, doit lui aussi faire l’objet de toute notre attention. Au-delà des moyens accrus que je viens de rappeler, son organisation doit être articulée autour de deux missions structurantes : l’investigation et la présence sur la voie publique, qui est un vrai sujet – vous l’avez vous-même évoqué, monsieur le sénateur.
C’est précisément pour accroître cette présence sur le terrain que les services du ministère de l’intérieur ont engagé une réflexion sur les évolutions souhaitables de l’organisation fonctionnelle du réseau de sécurité publique. L’idée maîtresse de cette réflexion consiste à mutualiser plus étroitement les fonctions transversales– administration, soutien…. – entre les sites proches, de manière à dégager un potentiel plus important, au profit des missions opérationnelles de terrain.
Comme l’ensemble des directions départementales de la sécurité publique, celle du Puy-de-Dôme est concernée par la réflexion qui a été lancée. J’imagine que c’est sur la base de cette réflexion que les informations dont vous faites état ont vu le jour.
Cette étude n’en est qu’à son début et le directeur départemental devra, conformément aux instructions qu’il a reçues et sous l’autorité de la préfète du Puy-de-Dôme, procéder à une très large consultation des responsables et des acteurs intéressés : les associations de quartier et de commerçants, les autorités judiciaires, les organisations représentatives du personnel et, bien entendu, les élus du territoire, au premier rang desquels figurent, bien évidemment, les maires directement concernés.
En tout état de cause, le ministre de l’intérieur est d’ores et déjà en mesure de vous informer que la fermeture des commissariats de Gerzat et de Cournon-d’Auvergne n’est aucunement envisagée.
M. le président. La parole est à M. Alain Néri.
M. Alain Néri. Quel bon début de matinée, monsieur le ministre, en ce 10 mai tout à fait symbolique pour nous !
Je ne doute pas que cette nouvelle satisfera les maires des communes de Gerzat et de Cournon-d’Auvergne, mais aussi la population.
Comme je l’ai dit, nous sommes très attachés – comme vous aussi, très certainement – à la police de proximité. Nous nous félicitons donc de la décision, prise au début de ce quinquennat, d’augmenter le nombre de policiers, qui avait précédemment été diminué.
En effet, il est essentiel que les policiers et la population se connaissent et puissent échanger, car, si les policiers sont chargés de faire respecter la loi, ils sont aussi investis d’une mission d’éducation civique et citoyenne. Par conséquent, la connaissance réciproque entre la population et les policiers est, selon moi, essentielle et irremplaçable.
Monsieur le ministre, merci encore de la bonne nouvelle que vous nous avez apportée. Comptez sur les communes pour contribuer, aux côtés de l’État, au maintien de la paix civile et de la sécurité, auxquelles nos concitoyens sont aujourd'hui particulièrement attachés.
ligne charles-de-gaulle-express
M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, auteur de la question n° 1390, adressée à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche.
M. Pierre Laurent. Monsieur le ministre, qu’il me soit permis tout d’abord de saluer les cheminots, qui se mobilisent aujourd'hui pour l’avenir du service public ferroviaire.
Ma question concerne le projet de ligne Charles-de-Gaulle-Express. Le « CDG-Express » est un projet, encore à l’étude, de liaison ferroviaire directe entre la gare de l’Est, à Paris, et l’aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle.
Or la ligne B du RER relie déjà Paris et l’aéroport Charles-de-Gaulle et la ligne 17 du Grand Paris Express desservira elle aussi cet aéroport.
Tel qu’il est prévu, le « CDG-Express » ne desservirait ni les arrondissements parisiens ni les villes de la banlieue parisienne qu’il traverserait. Il revêt donc, à nos yeux, un intérêt général limité. J’ajoute qu’il n’est même pas conçu pour être utile aux salariés de la plateforme aéroportuaire.
Au reste, le prix envisagé pour voyager sur cette ligne – 20 euros par personne pour un aller simple – est nettement plus élevé que celui d’un trajet via le RER B, à savoir 10 euros en 2015. De plus, il ne sera pas possible, avec ce billet, d’utiliser le réseau du métro une fois arrivé à la gare de l’Est. Surtout, le « CDG-Express » ne sera pas accessible aux usagers munis d’un abonnement Navigo.
Par ailleurs, le « CDG-Express » utiliserait, en grande partie, le réseau ferré existant, alors que celui-ci est déjà saturé tant à la sortie de la gare de l’Est que sur le réseau Nord.
Par exemple, les sillons horaires réservés aux trains « CDG-Express » sur la ligne reliant Paris à Hirson ne pourraient plus servir à d’autres circulations – je pense à la recréation de RER directs entre Roissy et la gare du Nord ou au passage de nouveaux TER. À ce sujet, je rappelle que, en 1976, les trains du RER B assuraient le trajet direct en seulement dix-neuf minutes !
Il est à noter également que le coût de ce projet est estimé à 1,9 milliard d’euros, somme supérieure à ce que prévoit le contrat de plan État-région pour la modernisation de l’ensemble des lignes RER et du Transilien.
De plus, le 2 février 2016, dans un avis sur l’ordonnance permettant la réalisation du « CDG-Express », l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, l’ARAFER, a rappelé que, aux termes de la loi, SNCF Réseau ne pouvait pas financer ce projet, dont la marge opérationnelle est particulièrement faible. Dans ces conditions, l’ARAFER en appelle à des financements publics, donc, en dernier ressort, au contribuable, pour financer le projet.
Par ailleurs, compte tenu du fait que la fréquentation du « CDG-Express » est estimée à 14 millions de personnes par an, soit moins de 50 000 personnes par jour, alors que 900 000 passagers empruntent, chaque jour, le RER B, ne serait-il pas prioritaire de mettre en place des financements complémentaires pour investir dans la modernisation des lignes de RER, au niveau tant des infrastructures que du matériel roulant ?
Le « CDG-Express » risque d’être lourdement déficitaire. Comment imaginer que le contribuable soit sollicité pour éponger ce déficit, alors qu’il y a tant besoin d’investir sur les lignes bien plus utiles que sont les RER ?
Ma question est double. Que compte faire le Gouvernement en vue d’un abandon de ce projet, tellement contesté ? Quels moyens financiers seront dégagés pour l’amélioration du service des RER, y compris du RER B, qui dessert l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle ? La création d’une recette dédiée est-elle envisagée ? Je pense, par exemple, à une augmentation de la taxe locale sur les bureaux, telle que nous la proposons.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence M. Vidalies, qui m’a chargé de vous transmettre sa réponse.
Le projet « Charles-de-Gaulle-Express » est indispensable pour améliorer le lien entre le centre de Paris et son principal aéroport. La qualité de cette liaison est vitale pour l’économie et l’attractivité de notre pays et de sa capitale, première destination touristique d’Europe.
Avec une croissance moyenne du trafic de l’aéroport de 3 % par an, soit un doublement en vingt ans, l’accès à celui-ci par les autoroutes A1 et A3 ainsi que par le RER B ne pourra plus suffire. Dans le RER, les voyageurs aériens, chargés de bagages, et les voyageurs du quotidien se gênent mutuellement, notamment à chaque arrêt, qui voit la montée et la descente de nombreux passagers. Pour avoir souvent emprunté cette ligne de RER, je suis particulièrement conscient du problème.
Le projet « CDG-Express » permettra de dédier véritablement le RER B ainsi que la future ligne 17 du Grand Paris Express aux transports du quotidien et, par ailleurs, d’opérer un transfert modal de la route vers le fer pour l’accès à l’aéroport, ce qui concourra à la lutte contre la pollution de l’air et le changement climatique. J’ajoute qu’il permettra de lutter contre les embouteillages qui se forment souvent le matin et le soir.
Le coût du projet se monte à 1,4 milliard d’euros, aux conditions économiques de 2014, et sa mise en service est prévue pour 2023, compte tenu des candidatures aux jeux olympiques et paralympiques de 2024 et de l’exposition universelle de 2025.
Sa construction sera financée sans subvention publique, dans le cadre d’un montage juridique associant SNCF Réseau et Aéroports de Paris, avec la possibilité d’un tiers investisseur. À la suite de l’avis favorable émis par la Commission européenne sur ce montage, l’ordonnance du 18 février dernier permet aux deux opérateurs de créer sans plus attendre une société de projet pour concevoir, financer et réaliser l’infrastructure, dans le cadre d’un contrat de concession avec l’État. Le plan pour l’investissement en Europe, le fameux « plan Juncker », permettra également de mobiliser un financement. La France doit faire preuve d’initiative pour utiliser les fonds accordés dans ce cadre, qui s’élèveront à près de 325 milliards d’euros sur cinq ans.
Il n’y a pas lieu d’opposer le projet « CDG-Express » à la modernisation de la ligne B du RER, qui se poursuit, ni à réalisation de la ligne 17 Nord du Grand Paris.
En effet, l’État et la région se sont engagés dans une mobilisation sans précédent en faveur des transports du quotidien dans le cadre du nouveau contrat de plan 2015-2020, avec une enveloppe totale de 7,5 milliards d’euros pour l’ensemble des projets du plan de mobilisation, dont près de 1,3 milliard d’euros, d’ici à 2020, pour les schémas directeurs des RER. L’ensemble des lignes de RER ont, effectivement, besoin de financements.
Pour ce qui concerne l’insertion du projet, des concertations sont en cours avec l’ensemble des acteurs territoriaux, sous l’égide du préfet de la région d’Île-de-France, en préalable à la prochaine enquête publique, qui permettra de compléter la déclaration d’utilité publique du projet, compte tenu du nouveau montage que je viens d’évoquer.
Bien évidemment, la Ville de Paris est étroitement associée, pour réussir l’insertion urbaine du projet. M. Alain Vidalies est même convaincu que le « Charles-de-Gaulle-Express » peut représenter l’occasion, pour celle-ci, de concrétiser son projet de parc urbain dans le XVIIIe arrondissement.
M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. Malheureusement, la réponse de M. Vidalies ne me permet pas d’afficher la même satisfaction que l’orateur précédent !
M. le secrétaire d’État confirme le projet « Charles-de-Gaulle-Express », malgré les critiques qui entourent celui-ci. Il continue de privilégier une infrastructure conçue sans considération pour la cohérence générale des réseaux. Il dit ne pas vouloir opposer les projets, mais les chiffres qu’il cite prouvent que l’on dépensera plus d’argent pour la seule ligne du « CDG-Express » que pour les investissements dont bénéficieront l’ensemble des lignes de RER. Cela paraît incohérent lorsque l’on connaît les problèmes liés aux transports.
J’ajoute que le « Charles-de-Gaulle-Express » risque de produire d’importantes nuisances quotidiennes dans le XVIIIe arrondissement de Paris. D’ailleurs, l’avis extrêmement critique que L’Autorité environnementale a rendu sur le projet, le 6 avril dernier, se fonde sur cette raison.
Selon nous, l’intérêt général commanderait de revoir ce projet et d’envisager avec plus d’ambition les investissements devant être réalisés sur l’ensemble du réseau francilien.
assouplissement des démarches administratives relatives au service civique
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Lamure, auteur de la question n° 1323, adressée à M. le ministre de la ville, de la jeunesse et des sports.
Mme Élisabeth Lamure. Madame la secrétaire d’État, ma question recoupe deux grands objectifs que les gouvernements successifs ont indiqué vouloir atteindre : d’une part, la simplification administrative, dont il est régulièrement question ; d’autre part, le renforcement du lien entre les citoyens et la Nation.
Ce lien est concrétisé par la loi du 10 mars 2010 relative au service civique, qui définit le volontariat et l’engagement.
L’engagement, qui concerne les jeunes de seize à vingt-cinq ans, est la forme de service civique utilisée principalement par les collectivités.
Pour cela, la collectivité doit d’abord obtenir un agrément auprès de la direction départementale de la cohésion sociale, la DDCS. Une fois la mission achevée, un bilan doit être dressé. Or la pratique révèle que ce rapport pourrait être simplifié, afin de ne pas décourager les communes, surtout les plus petites d’entre elles.
Par ailleurs, la procédure administrative nécessaire au renouvellement de l’expérience s’étend sur un délai trop long, la collectivité devant attendre la fin de la première mission pour lancer les démarches administratives en vue d’un deuxième recrutement. En effet, malgré une première homologation, un nouveau dossier complet doit être rempli auprès de la DDCS, dossier dont la durée de traitement est supérieure à deux mois. Durant cette période, la collectivité est bloquée, car, sans le numéro délivré par la DDCS, l’offre de service civique ne peut pas être déposée sur le site internet dédié.
Ces complexités administratives expliquent sans doute le constat du Président de la République, qui déplorait, en janvier 2015, le décalage entre le nombre important de candidats et le peu de postes disponibles.
Aussi, madame la secrétaire d’État, je souhaiterais connaître vos intentions et celles du Gouvernement concernant l’allégement du dossier administratif – s’agissant tant du dépôt de la demande que du bilan d’activité –, la réduction des délais d’instruction et la suppression de la nécessité de constituer un nouveau dossier lorsque la collectivité ou la structure a déjà reçu un agrément.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Hélène Geoffroy, secrétaire d'État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargée de la ville. Madame la sénatrice, je sais votre engagement auprès des collectivités locales.
Comme vous l’avez dit, le Président de la République a fixé des objectifs ambitieux pour le service civique, afin de permettre, en 2018, l’accueil de 350 000 jeunes, ainsi qu’il l’a rappelé lors de ses vœux à la jeunesse et aux forces de l’engagement, le 11 janvier dernier.
Évidemment, les collectivités territoriales ont un rôle important à jouer pour donner à tous les jeunes qui souhaitent s’engager la possibilité de trouver une mission à proximité de leur domicile, mais aussi pour permettre aux jeunes de différents quartiers de se rencontrer.
En 2015, les collectivités territoriales ne représentaient que 6 % des missions agréées, contre 70 % pour les associations et 20 % pour l’État et ses établissements publics. Le Gouvernement partage votre souhait de voir s’accroître la part des missions réalisées dans les collectivités territoriales.
Sur la question de l’agrément des structures, le Gouvernement a déjà engagé des actions pour simplifier la procédure et accélérer les délais.
Le décret du 24 décembre 2015 porte de deux à trois ans la durée d’agrément au titre de l’engagement de service civique.
Afin de simplifier le traitement des demandes d’agrément en raccourcissant le circuit de validation, le décret du 9 février 2016 permet au préfet de département d’agréer des structures d’accueil établies à l’échelon local ou départemental.
La procédure du « silence vaut acceptation » a également été étendue à l’agrément des structures pour le service civique, dès trois mois après le dépôt complet d’une demande.
Enfin, dans le cadre du projet de loi « Égalité et citoyenneté », qui sera notamment présenté par Patrick Kanner au Parlement dans les prochaines semaines, le dispositif d’intermédiation, qui permet de mettre à disposition un volontaire aux fins d’accomplissement de son service auprès d’une autre personne morale non agréée, sera ouvert aux personnes morales de droit public.
Si nous appelons tous de nos vœux cette montée en charge, celle-ci ne doit pas se faire au détriment de l’encadrement, de la formation civique et citoyenne, ainsi que de l’accès à la citoyenneté des jeunes.
Afin que les jeunes tirent le meilleur profit du service civique dans la suite de leurs parcours, il est nécessaire de les accompagner – et je sais que les collectivités le feront – dans un processus de formalisation de leurs acquis. Tel est l’objectif du bilan réalisé à l’issue de leur mission.