M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Hervé Maurey, président de la commission de l'aménagement du territoire. Il ne suffit pas de dire qu’on mène des politiques ambitieuses pour que ce soit vrai ! Il ne suffit pas d’annoncer 67 mesures – ce n’est pas la quantité qui compte ! –, d’organiser de grands barnums, des assises, où l’on fait des constats qu’on connaît depuis des années, pour que les choses bougent !
Je ne prendrai que deux exemples. Ce sont d’ailleurs ceux qui concernent le plus nos territoires, et un certain nombre de nos collègues les ont évoqués.
Le premier, c’est celui de la désertification médicale : on n’a jamais autant manqué de médecins dans les territoires non seulement ruraux, mais aussi urbains et périurbains. Et la situation ne fait que s’aggraver !
M. Claude Bérit-Débat. Il fallait le dire avant 2012 !
M. Hervé Maurey, président de la commission de l'aménagement du territoire. La différence entre vous et moi, cher collègue, c’est que, ce que je dis aujourd'hui, je le disais aussi lorsque j’étais dans la majorité. S’il y a une chose avec laquelle je suis d’accord avec Mme la ministre, c’est sur le fait que le manque de volonté politique en matière d’aménagement du territoire ne remonte pas à 2012. Malheureusement, il n’y a eu aucun changement depuis lors, si ce n’est de grands et beaux discours, et de la « com » !
Le second exemple, c’est celui du numérique, sujet que nous avons encore évoqué en commission lors de l’audition de Mme Lemaire. Il y a encore 15 % des Français qui n’ont pas la moindre connexion en haut débit. Mme la secrétaire d’État nous a dit hier qu’il fallait avoir un langage de vérité et ne pas laisser croire que tout le monde disposera de la téléphonie mobile. Or, aujourd’hui, vous tenez le discours exactement inverse, madame la ministre. Mettez-vous d’accord avec Mme Lemaire, qui a su au moins faire preuve d’une certaine honnêteté !
J’ai entendu des choses incroyables durant nos échanges. D’abord, la contractualisation serait le gage de l’uniformité… Mais c’est tout le contraire ! La contractualisation permet de s’adapter à chaque situation.
J’ai entendu ensuite qu’il s’agirait d’un texte de circonstance, à l’approche des élections régionales. Mais le seul à avoir parlé ici des régionales, c’est M. Filleul, pour dresser le bilan de ce qui a été fait dans sa région. Si l’un d’entre nous mérite, dans ce débat, le carton rouge du comportement politicien, c’est donc bien M. Filleul ! Je rappelle d’ailleurs, comme l’a fait Mme la rapporteur, que ce texte a été déposé au mois de mai. Si nous avions souhaité verser dans l’électoralisme, nous aurions proposé des mesures beaucoup plus « populaires », beaucoup plus parlantes aux yeux des électeurs, que la création de contrats territoriaux de développement rural. Il s’agit d’une simple mesure pratico-pratique, qui permettra aux territoires ruraux de disposer d’un outil de même nature que celui qui existe déjà pour les villes.
Dernier élément – je ne voudrais pas mettre en transe nos collègues socialistes, et je ne pense pas, jusqu’à présent, avoir abusé de mon temps de parole – (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.),…
M. le président. Ce n’est pas une raison, monsieur le président. Il faut conclure !
M. Hervé Maurey, président de la commission de l’aménagement du territoire. … un certain nombre d’entre vous l’ont dit : le diagnostic est bon, ce sont les mesures qui ne le sont pas. Mais, dans ce cas, pourquoi n’avez-vous pas profité du véhicule législatif qui vous était proposé pour déposer des amendements et contribuer ainsi à l’amélioration du texte ?
M. Jean-Jacques Filleul. Ça n’aurait servi à rien !
M. le président. La parole est à M. Michel Vaspart, pour explication de vote.
M. Michel Vaspart. Quand on entend notre collègue Chasseing parler de l’impossibilité pour certaines intercommunalités de financer la part qui leur revient pour le déploiement du numérique, on ne peut qu’être inquiet pour nos territoires ruraux.
Certains de mes collègues du groupe Les Républicains sont réservés sur ce texte, inquiets du manque de moyens financiers pour accompagner sa mise en œuvre. Comme l’a indiqué mon collègue Rémy Pointereau, s’il s’agit d’inviter le Gouvernement à passer de la parole aux actes et de l’effet d’annonce à la réalité des chiffres, pourquoi pas ? Nous voterons donc la proposition de loi, mais c’est un « oui, mais ».
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Gabouty, pour explication de vote.
M. Jean-Marc Gabouty. En tant qu’élu urbain d’un département rural, je voterai bien entendu la proposition de loi. Je voudrais simplement faire plusieurs remarques.
La politique d’aménagement du territoire, en particulier en zone rurale, est un échec depuis des décennies. Le problème ne date donc pas de l’actuel gouvernement. Il serait temps que nous réfléchissions ensemble à des moyens plus efficaces que l’attribution de subventions ou autres crédits fléchés pour aider nos territoires ruraux. Comme j’ai l’habitude de le dire, cela revient en quelque sorte à administrer des doses de morphine à un patient pour l’aider à mourir paisiblement et en silence…
Cette réflexion faite, je voudrais dire que je suis d’accord avec la philosophie portée par ce texte. La contractualisation, qui permet d’associer différents partenaires, est la meilleure méthode pour conduire une action globale sur un territoire : elle conjugue développement économique et solidarité. Il est dommage qu’elle soit insuffisamment utilisée dans notre pays, parce qu’elle est plus efficace que les schémas. On fait de grands schémas, avec plein de bonnes intentions, mais ceux-ci débouchent le plus souvent sur pas grand-chose. En fait, on passe plus de temps à créer des schémas qu’à agir ! Quant à la politique de guichets, avec la dotation d’équipement des territoires ruraux, les subventions régionales ou départementales, elle aboutit à faire du coup par coup, du projet par projet, sans vision d’ensemble, sans projet de développement cohérent.
Pour terminer, je voudrais revenir à l’amendement présenté par Daniel Chasseing. J’adhère au principe des aides financières pour les entreprises installées dans des zones à faible densité de population – elles sont absolument nécessaires –, mais le sujet aurait dû être abordé différemment. Je pense qu’il faut moduler l’impôt sur les sociétés au prorata des effectifs employés sur un territoire. Il est en effet indispensable de poser des barrières, sinon certaines entreprises se contenteront d’installer leur siège social pour obtenir une aide.
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Jean-Marc Gabouty. En outre, une aide directe peut bénéficier à une entreprise insuffisamment performante. Moduler l’impôt sur les sociétés est au contraire susceptible d’attirer des entreprises plus performantes. Il nous faudra réfléchir à ce point dans un autre cadre.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Leroy, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Leroy. Je voudrais dire au président Maurey qu’il est injuste à l’égard du groupe socialiste : si l’article 2 a été quelque peu amélioré, c’est grâce à nos propositions, qui ont permis de sortir de l’impasse opposant les tenants du retrait pur et simple et les partisans de mesures cumulatives qui ne faisaient que complexifier davantage le texte. Je souhaiterais qu’il nous en donne acte !
Nous considérons que cette proposition de loi, pour louable que soit l’intention de ses auteurs, n’est d’aucune utilité. Même si le texte a été déposé en mai, la loi NOTRe est venue entre-temps et a totalement changé la donne. Peut-être que, pour certains, le temps s’est arrêté...
La région est devenue le lieu de la planification et celui de la contractualisation avec les territoires infrarégionaux que sont les PETR et les EPCI. De même, les différents comités interministériels ont mis à disposition des territoires des moyens nouveaux. Nous considérons que ces outils sont suffisants. D’ailleurs, cela n’a pas seulement été dit sur les travées du groupe socialiste ; nos collègues du groupe Les Républicains y ont beaucoup insisté au cours de la réunion de la commission.
Cette proposition de loi risque de complexifier les niveaux d’intervention, au moment où chacun souhaite gagner en clarté et en lisibilité. C’est la raison pour laquelle nous persistons dans notre volonté de voter contre ce texte.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l'ensemble de la proposition de loi visant à instaurer des contrats territoriaux de développement rural.
(La proposition de loi est adoptée.) – (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC.)
13
Dépôt d’un rapport
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre, en application de l’article 33 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015, le rapport sur l’impact de la réduction des ressources fiscales affectées aux chambres de commerce et d’industrie.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
Il a été transmis à la commission des affaires économiques ainsi qu’à la commission des finances.
14
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au lundi 26 octobre 2015 à seize heures et le soir :
Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public (n° 34, 2015-2016) ;
Rapport de M. Hugues Portelli, fait au nom de la commission des lois (n° 93, 2015-2016) ;
Texte de la commission (n° 94, 2015-2016) ;
Avis de M. Loïc Hervé, fait au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (n° 95, 2015-2016).
Projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine de la prévention des risques (procédure accélérée) (n° 693, 2014-2015) ;
Rapport de M. Michel Raison, fait au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable (n° 63, 2015-2016) ;
Texte de la commission (n° 64, 2015-2016).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-huit heures dix.)
Le Directeur du Compte rendu intégral
FRANÇOISE WIART