M. le président. L'amendement n° 67 rectifié, présenté par M. Commeinhes, Mme Hummel, M. Houel, Mme Deromedi et MM. Charon et Calvet, n'est pas soutenu.
L'amendement n° 1247, présenté par Mmes Deroche et Doineau et M. Milon, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 49, première phrase
Après le mot :
décret
insérer les mots :
en Conseil d’État
II. – Alinéa 78
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Il publie chaque année un rapport transmis au Parlement.
III. – Alinéa 112
Rédiger ainsi cet alinéa :
c) Au IV, la référence : « au I de l'article 25 » est remplacée par les références : « aux I et IV de l'article 25 » ;
IV. – Après l’alinéa 162
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au second alinéa de l’article 72, les mots : « deuxième alinéa de l'article 54, le comité consultatif » sont remplacés par les mots : « cinquième alinéa du II de l'article 54, selon le cas, le comité d'expertise ou le comité compétent de protection des personnes » ;
La parole est à Mme Catherine Deroche, corapporteur.
M. le président. L'amendement n° 68 rectifié, présenté par MM. Commeinhes, Calvet et Charon, Mme Hummel, M. Houel et Mmes Mélot et Deromedi, n'est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 214 rectifié et sur les amendements identiques nos 241 rectifié bis et 1167 ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. L’amendement n° 214 rectifié vise à remplacer la notion d’« intérêt public » par celle d’« intérêt général ».
Comme l’a relevé notre collègue Gilbert Barbier, il s’agit là d’une question de vocabulaire, qui ne semble pas, selon nous, emporter de conséquences très importantes.
La loi « informatique et libertés », dans le cadre de laquelle le dispositif d’accès aux données de santé s’inscrit largement, utilise d’ailleurs les termes d’« intérêt public ».
Néanmoins, la commission souhaite connaître l’avis du Gouvernement sur cet amendement.
Concernant la modification de l’alinéa 37 proposée dans les amendements identiques nos 241 rectifié bis et 1167, l’UNPS n’est en rien exclue de l’accès aux données de santé : elle est couverte par la formulation prévue à l’alinéa 7.
Par ailleurs, la modification prévue à l’alinéa 49 n’est pas souhaitable, dans la mesure où rien ne justifie que l’UNPS puisse bénéficier d’un accès direct aux données de santé dans les mêmes conditions que les agences sanitaires, par exemple. Il en va de même pour la modification portant sur l’alinéa 65.
Ces amendements identiques sont donc satisfaits pour ce qui concerne le premier alinéa, et la commission est défavorable aux deux autres alinéas proposés.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Monsieur Barbier, je souhaite que vous retiriez votre amendement n° 214 rectifié.
En effet, ce sont les termes « intérêt public » qui sont employés dans la loi « informatique et libertés » ainsi que dans les textes européens. Nous avons donc choisi ces termes dans un souci de cohérence.
En ce qui concerne les amendements identiques nos 241 rectifié bis et 1167, je vous demande, messieurs les sénateurs, de bien vouloir les retirer ; à défaut, j’émettrais un avis défavorable.
Vous proposez d’ajouter les instances représentatives des professions de santé libérales à la liste des organismes pouvant être désignés par voie réglementaire pour bénéficier d’un accès permanent, alors qu’elles peuvent bénéficier d’un accès à ces données au cas par cas. Je ne pense pas qu’il faille s’engager dans cette direction.
En effet, les représentants de professionnels et des établissements de santé sont bien cités à l’alinéa 22 parmi les personnes ayant vocation à accéder aux données du SNDS sous le contrôle de la CNIL. Or, par le passé, l’expérience le montre, cette dernière leur a donné ces autorisations, et il n’y a donc pas de raison de penser que tel ne sera pas le cas à l’avenir. Elles pourront donc toujours obtenir de la CNIL le droit d’accéder à ces données en fonction de leurs projets ou missions spécifiques.
Au-delà, prévoir un accès systématique conduirait à un élargissement très important du droit de ces organismes à obtenir ces données, car il n’existerait plus qu’un contrôle a posteriori. Or la limitation établie dans le projet du Gouvernement est un élément indispensable de l’équilibre entre ouverture et protection des données, pour nos concitoyens.
Il faut donc trouver un compromis, car si l’on commence à ouvrir systématiquement et a priori – j’insiste sur ce point – des droits d’accès à certaines catégories d’acteurs, on ne voit pas pourquoi on les restreindrait à d’autres. Or on mettrait ainsi en danger des principes d’ordre constitutionnel, notamment le droit au respect de la vie privée.
En ce qui concerne l’amendement n° 1247 de la commission, je donnerai un avis que nous avons pris l’habitude de qualifier de « sagesse contrainte ».
En effet, je ne suis pas, sur le fond, favorable à cet amendement, dans la mesure où il tend à modifier la procédure applicable en cas d’urgence sanitaire.
J’ai déjà indiqué qu’il s’agissait de l’un des points de divergence entre le Gouvernement et la commission. Même si le Gouvernement n’a pas souhaité déposer des amendements sur cet article, considérant que l’équilibre du texte était respecté – c’est le plus important ! –, nous nous appuierons sur la suite de la procédure parlementaire pour procéder à des adaptations de détail.
Cela étant dit, comme vous l’avez souligné, madame le rapporteur, il s’agit d’un amendement de cohérence. C’est pourquoi j’émets un avis de sagesse contrainte. Chacun comprendra ce que cela signifie…
M. le président. Monsieur Barbier, l'amendement n° 214 rectifié est-il maintenu ?
M. Gilbert Barbier. Puisque le langage administratif prime le langage officiel de l’Académie française, je retire mon amendement, monsieur le président ! (Sourires.)
M. Jean-Claude Requier. Non, c’est le langage européen !
M. le président. L'amendement n° 214 rectifié est retiré.
Monsieur Mouiller, l’amendement no 241 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Philippe Mouiller. Compte tenu de l’argument avancé et en accord avec M. Houpert, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 241 rectifié bis est retiré.
Monsieur Bonnecarrère, l'amendement n° 1167 est-il maintenu ?
M. Philippe Bonnecarrère. Dans la mesure où l’Union nationale des professionnels de santé fait partie des personnalités visées par le droit d’accès aux données – cela répond à la première partie de la question que je posais –, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 1167 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 1247.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 1170 est présenté par M. Bonnecarrère.
L'amendement n° 1171 est présenté par M. Lemoyne.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Après l’alinéa 36
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« 1° bis Soit à des fins d’exercice, à titre professionnel, de l’activité de journaliste, dans le respect des règles déontologiques de cette profession ;
II. – Alinéa 40
Après les mots :
au 1°
insérer les mots :
et au 1° bis
III. – Après l’alinéa 49
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« IV. – Les obligations mentionnées au III ne sont pas applicables aux entreprises de presse qui accèdent aux données en application du I.
IV. – Alinéa 134
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
La Commission nationale de l’informatique et des libertés autorise également les traitements effectués par les organes de presse qui accèdent aux données à caractère personnel issues du système national des données de santé en application du 1° bis du I de l’article L. 1461-3 du code de la santé publique.
V. – Après l’alinéa 141
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La Commission nationale de l’informatique et des libertés statue sans avis préalable du comité d’expertise et de l’Institut national des données de santé lorsque la demande émane d’un organe de presse dans les conditions prévues au I.
La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, pour présenter l’amendement n° 1170.
M. Philippe Bonnecarrère. Il s’agit d’un amendement relatif à l’accès par la presse, qui est très attentive à cette question, aux données du programme de médicalisation des systèmes d’information, le PMSI. Je ne vous ferai pas le grief, madame la ministre, de ne pas avoir réfléchi à cette question dans le cadre des dispositions concernant les données ouvertes, l’« open data ».
Vous connaissez tous, mes chers collègues, la pratique de la presse, établie depuis une vingtaine d’années, consistant à classer les établissements de soins. Cela avait alors suscité des débats, mais, aujourd'hui, ces classements – qui relèvent par ailleurs de la liberté d’information – ne posent pas, à ma connaissance, de difficulté, y compris pour les établissements concernés. Ainsi, il n’y a jamais eu, à ce jour, de dérive journalistique à ce sujet ; en tout cas, aucun cas de dérive ne nous a été présenté.
D’ailleurs, le contrôle de la CNIL, qui se fonde sur les finalités des journalistes, permet la publication de ces analyses, dès lors que l’on procède à l’évaluation et à l’analyse des pratiques. Un classement peut être publié, alors que d’autres études ne pourraient pas l’être.
J’ajoute que, au-delà du caractère particulièrement lourd de l’accès aux banques de données, celles-ci sont protégées et si un média portait atteinte à cette règle, il encourrait une sanction pénale lourde.
Le dispositif actuel prévoit un accès en deux étapes : l’autorisation de la CNIL et une contractualisation. Cela ne pose aucune difficulté.
Le dispositif proposé pose problème dans la mesure où il instaure deux filtres supplémentaires, qui représentent une véritable atteinte à la liberté d’information. Je n’insisterai pas sur la jurisprudence constitutionnelle ni sur celle de la Cour européenne des droits de l’homme en la matière.
La disposition que nous proposons au travers de cet amendement, qui tend à créer une exception au système de filtrages successifs « à des fins d’exercice, à titre professionnel, de l’activité de journaliste, dans le respect des règles déontologiques de cette profession », nous paraît parfaitement adaptée.
C’est pourquoi je me permets, mes chers collègues, de vous demander d’adopter cet amendement, qui est très attendu par la presse.
M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour présenter l'amendement n° 1171.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. L’objet de cet amendement a déjà été exposé dans le détail par mon collègue Philippe Bonnecarrère.
L’Assemblée nationale a inséré, parmi les bénéficiaires de l’accès aux données de santé, les organismes de presse, qui sont désormais mentionnés à l’article 47. Cela étant, il a été proposé – le débat permettra de préciser les choses ; c’est l’objet de nos échanges – que l’accès au SNDS soit aussi autorisé pour permettre des traitements à des fins de recherche, d’étude ou d’évaluation.
Nous proposons de mentionner que cet accès est aussi autorisé à des fins d’exercice, à titre professionnel, de l’activité de journaliste, dans le respect des règles déontologiques de cette profession. L’objectif est ainsi d’inclure dans le champ de cette disposition les études citées précédemment, qui existent déjà depuis un certain nombre d’années.
Quel est le contexte ?
En 1998 et 1999, quand les premières études de ce type ont été publiées, les auteurs de ces études avaient rencontré des difficultés pour avoir accès aux données. Votre prédécesseur de l’époque, madame la ministre – il s’agissait alors de Martine Aubry –, n’avait pas forcément facilité les choses ; c’est ainsi, en tout cas, que la profession l’avait ressenti.
Or les journalistes souhaitent faire leur métier, dans le cadre des règles déontologiques qui s’appliquent à leur travail. Nous souhaitons donc nous assurer, au travers de cet amendement, que la mention « à des fins de recherche, d’étude ou d’évaluation » englobe cette profession.
Par ailleurs, nous voulons nous assurer que le comité d’experts qui doit éclairer la CNIL quand celle-ci prend sa décision ne donne pas un avis d’opportunité et ne fait qu’apprécier l’adéquation entre la demande des organismes de presse et les données demandées.
En 2015, aucune instance ne doit pouvoir donner un avis sur l’opportunité de la publication de telle ou telle recherche, de tel ou tel article. Nous comprenons, en revanche, qu’il faille s’assurer de l’adéquation entre la demande et les données sollicitées.
Cela dit, nos débats vont être de nature à nous éclairer sur ce point. En tout cas, les choses seront écrites noir sur blanc en cas d’éventuels recours.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des lois ?
M. André Reichardt, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ces deux amendements identiques visent à offrir aux journalistes un régime particulier d’accès aux données de santé, notamment en les dispensant de l’examen par le comité d’expertise, comme cela vient d’être rappelé.
Or la commission des lois estime que cet examen est essentiel dans la mesure où la CNIL n’a pas l’expertise pour se prononcer sur la qualité scientifique de l’étude envisagée, non plus que sur la proportionnalité et la pertinence du nombre et du type de données demandées avec l’objet de l’étude.
En outre, ces deux amendements identiques visent à dispenser les entreprises de presse de l’obligation de prouver que la façon dont elles accéderont aux données ne leur permettra pas d’en faire un mésusage. Si de telles contraintes peuvent paraître excessives pour un journaliste vertueux et citoyen, elles sont nécessaires pour prévenir les éventuelles dérives, volontaires ou non.
J’ajoute que, depuis le projet de loi initial, des garanties nouvelles ont été apportées. D’une part, à l’article L 1460-1 du code de la santé publique, il est prévu que les organismes de presse ont accès aux données de santé. D’autre part, l’accès peut être demandé non seulement à des fins de recherches, mais également à des fins d’études et d’évaluations, ce qui recouvre bien, me semble-t-il, les investigations conduites par les journalistes.
Pour toutes ces raisons, la commission des lois ne peut que donner un avis défavorable sur ces deux amendements identiques. D’ailleurs, il me semble que la commission des affaires sociales ait émis le même avis.
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Même avis, en effet !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Je demande le retrait de ces deux amendements identiques, qui visent à inscrire un régime dérogatoire au nouveau droit commun applicable aux journalistes.
Certes, il y a des journalistes vertueux, comme vient de le souligner à l’instant M. Reichardt. Il n’y a d’ailleurs aucun doute sur la qualité du travail mené par les journalistes de certains hebdomadaires – citons Le Point, puisque des inquiétudes s’y sont exprimées – pour établir, année après année, les palmarès des établissements de santé qui ont été évoqués. Mais il n’y a pas qu’eux ! L’ouverture des données de santé pourrait ainsi donner des idées à certains journalistes d’une presse plus « grand public », si je puis dire, qui voudra publier des informations relatives à telle ou telle personnalité publique. Nous devons évidemment éviter de telles dérives.
Pour autoriser le traitement des données de santé à caractère personnel, la CNIL devra apprécier s’il s’agit d’une finalité d’intérêt public – c’est bien, sans aucun doute possible, le cas des usages statistiques en vue de la publication d’articles d’information ! –, et si cette finalité exige bien le recours aux données à caractère personnel auxquelles il est demandé l’accès. Les avis que la CNIL recevra sur ces deux points fonderont sa décision.
Néanmoins, comme tout cela peut prendre du temps, le Gouvernement a élargi, en accord avec la CNIL, le panel des méthodes simplifiées auxquelles cette dernière pourra recourir pour délivrer plus rapidement des autorisations. Ainsi, un organisme qui réalise, de manière répétée, des traitements « répondant à une même finalité, portant sur des catégories de données identiques et ayant des catégories de destinataires identiques » pourra faire l’objet d’une autorisation unique.
Concrètement, un journaliste qui réalise chaque année un palmarès des établissements de santé – hôpitaux ou cliniques – n’aura plus, pour ce faire, à obtenir chaque fois l’autorisation de la CNIL. En outre, les données agrégées et les échantillons dont le risque de ré-identification est réduit seront accessibles, à condition de se conformer à une procédure simple homologuée par la CNIL. Dans ce cas, l’autorisation est obtenue sans délai sur le site internet de la CNIL.
En bref, une convention-cadre permettra, une fois que les éléments de départ seront bien établis, de renouveler le travail, année après année.
J’ajoute que le texte adopté par l’Assemblée nationale prévoyait une troisième disposition, tendant à faciliter considérablement l’accès à des données appauvries dont le caractère « réidentifiant » était réduit. Cette mesure était destinée à permettre à l’INDS, par exemple, de mettre à disposition des jeux de données agrégées et des échantillons de données dans un cadre préalablement validé par la CNIL, ce qui offrait la possibilité de se passer de l’autorisation de celle-ci au cas par cas. Cette disposition a été modifiée par la commission des affaires sociales du Sénat, au point de la rendre de fait inopérante puisque seules les données entièrement anonymes pourront faire l’objet de cette procédure. Le Gouvernement proposera à l’Assemblée nationale de réintroduire sur ce point la rédaction initiale.
Par ailleurs, les journalistes pourront être représentés au sein de l’INDS, par exemple par l’intermédiaire de l’Association des journalistes de l’information sociale.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Très bien !
Mme Marisol Touraine, ministre. Ils pourront ainsi s’assurer que leurs intérêts sont défendus au même titre que ceux des autres parties prenantes.
Il me semble, monsieur Bonnecarrère, monsieur Lemoyne, que les journalistes ont ainsi toutes les garanties de pouvoir accéder facilement à des données, sans que la vie privée de nos concitoyens soit mise en péril. L’équilibre du texte, qui a d’ailleurs évolué au fil de la discussion parlementaire, me semble donc répondre aux préoccupations que vous avez exprimées. Aller au-delà, ce serait prendre un risque au regard de la protection de la vie privée.
Je vous demande, par conséquent, de bien vouloir retirer vos amendements, à défaut de quoi j’y serai défavorable.
M. André Reichardt, rapporteur pour avis de la commission des lois. Très bien !
M. le président. Monsieur Lemoyne, l’amendement n° 1171 est-il maintenu ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Au regard de ce que les corapporteurs ont indiqué et des précisions apportées par madame la ministre, je vais retirer mon amendement.
Néanmoins, nous resterons vigilants quant à l’effectivité des droits prévus. Il faut que ce qui était possible jusqu’à présent le demeure, que le nouveau dispositif n’entrave pas le travail que les journalistes accomplissaient auparavant dans de bonnes conditions. De ce point de vue, je prends note avec intérêt de la présence de la profession au sein de l’INDS.
Bien entendu, si des problèmes devaient apparaître, nous serions amenés à prendre une initiative législative pour rouvrir le dossier.
M. le président. L'amendement n° 1171 est retiré.
Monsieur Bonnecarrère, l'amendement n° 1170 est-il maintenu ?
M. Philippe Bonnecarrère. Oui, monsieur le président, je le maintiens, mais sans illusion sur le résultat du vote.
Je le maintiens avec d’autant plus de conviction que la commission des lois, dans son argumentation, estime que la CNIL n’a pas l’expertise nécessaire. Or, à ce jour, cette question n’a jamais été posée, alors que nous vivons depuis plus de dix ans sous le régime actuel.
Il a été dit, notamment, que la CNIL n’avait pas la capacité d’analyse scientifique requise. Je ne vois pas comment on peut invoquer le manque de compétences scientifiques de la CNIL quand il s’agit pour elle de se prononcer sur une demande qui s’inscrit dans le cadre de la liberté d’information. On peut utiliser cet argument pour des travaux de recherche, mais pas pour des articles de presse !
Quant aux explications de la ministre selon lesquelles cet amendement introduirait une voie dérogatoire, elles m’ont encore plus inquiété. Il existe une liberté d’information, donc une liberté d’accès aux données, et on ne peut pas ramener l’amendement proposé à une demande de dérogation. Ou alors l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme et l’ensemble de notre corpus juridique qui en découle seraient une dérogation…
Pour ce qui est du départ entre une presse vertueuse et une presse non vertueuse, je me garderai de me livrer à tel exercice, même si je peux le comprendre.
Je partage l’analyse de Mme la ministre sur l’intérêt de la protection des données privées. Cependant, la question ne peut pas véritablement se poser, parce qu’il existe des dispositions pénales qui sont là pour empêcher les dérives. Du reste, personne ne peut aujourd'hui m’opposer un cas de dérive qui se serait produit. En vérité, madame la ministre, l’opposition, elle vient de votre administration centrale, qui ne veut pas trop ouvrir l’accès aux données, car cela pourrait remettre en cause son pouvoir d’analyse et d’expertise. Mais je ne crois pas à une dérive qui viendrait de la presse people.
Il revient aux concepteurs des banques de données de prévoir une protection suffisante pour éviter les difficultés.
Dans l’un des rares cas de dérives que l’on ait pu connaître, à savoir l’accès au dossier médical de M. Michael Schumacher – j’imagine que vous avez fait procéder à une enquête, madame la ministre –, il semble que les données qui ont été glanées ne provenaient pas des banques de données du PMSI : il s’agissait de données plus « locales », qui ont été recueillies par d’autres voies.
Par conséquent, la « dérive people » ne m’apparaît pas comme un argument pertinent pour s’opposer à un amendement qui tend à défendre la liberté d’information dans ce pays. C’est pourquoi je le maintiens, quitte à être battu.
M. le président. L'amendement n° 454, présenté par M. Vasselle, est ainsi libellé :
Alinéa 41
Après le mot :
lucratif
insérer les mots :
, à l’exception des établissements de santé privés,
La parole est à M. Alain Vasselle.
M. Alain Vasselle. Il s’agit d’un amendement d’appel, destiné à obtenir des éclaircissements sur ce qui a motivé la rédaction de l’alinéa 41 de l’article 47.
En effet, l’alinéa 7 du même article prévoit que « les établissements de santé », autrement dit l’ensemble de ceux-ci, qu’ils soient publics, privés à but lucratif ou privés à but non lucratif, peuvent avoir accès aux données de santé. Il est donc assez incompréhensible que l’alinéa 41 prévoie, quant à lui, qu’un sort particulier est fait aux établissements privés à but lucratif : pour eux, les traitements à des fins de recherche, d’étude ou d’évaluation seraient conditionnés à divers éléments mentionnés dans les alinéas suivants.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Cet amendement vise à exclure les établissements de santé privés des obligations d’intermédiation qui sont prévues pour les organismes à but lucratif dès lors qu’ils souhaitent accéder à des données de santé.
Considérant que la rédaction du texte pouvait en effet créer un décalage entre les établissements de santé publics et privés et faire assimiler les établissements de santé privés aux organismes à but lucratif, la commission a émis un avis de sagesse, en attendant de connaître l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Cet amendement nous montre que la restriction apportée au texte par la commission des affaires sociales du Sénat suscite des difficultés.
Dans la rédaction initiale du Gouvernement, qui était plus globale et plus large, les établissements à but lucratif avaient bien la possibilité de demander l’accès aux données. En restreignant de manière assez considérable la liste des organismes ayant un accès direct aux données du SNDS, la commission a fait surgir des difficultés, dont celle que vous avez relevée, monsieur Vasselle.
J’émets cependant un avis défavorable sur votre amendement, non parce que je ne voudrais pas que les établissements de santé privés aient accès aux données de santé, mais parce que je ne crois pas qu’il faille introduire une liste de dérogations. Il n’y a pas de sens à rétablir l’accès aux données pour les seuls établissements privés. Je préfère une démarche plus globale et c’est pourquoi, comme je l’indiquais tout à l’heure, je proposerai aux députés de revenir à la rédaction initiale du texte.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Mme la ministre fait état d’une certaine incohérence dans la rédaction issue des travaux de la commission. Celle-ci émet d’ailleurs un avis de sagesse sur cet amendement, qui ouvre la possibilité d’apporter un correctif. Je crois que nous pouvons faire confiance aux parlementaires pour se retrouver, à la fin de nos travaux, sur une rédaction qui permette de ne pas exclure du dispositif les établissements de santé privés.
M. le président. La parole est à M. André Reichardt, rapporteur pour avis.
M. André Reichardt, rapporteur pour avis de la commission des lois. La commission des affaires sociales s’en étant remise à la sagesse du Sénat et Mme la ministre ayant émis un avis défavorable, je crois utile de livrer le point de vue de la commission des lois sur cet amendement.
Aux termes de la rédaction prévue pour l’article L. 1461-3, les établissements de santé à but lucratif peuvent avoir accès, en leur qualité d’établissements de santé, aux données nécessaires à la gestion de leurs prestations.
S’agissant de l’accès à des fins de recherche, il n’y a pas d’inconvénient, compte tenu des risques de conflit d’intérêts, à les soumettre au régime des autres établissements à but lucratif. Ce régime autorise un accès aux données si la preuve a été apportée qu’un mésusage est impossible, ce que permettra le système du centre d’accès sécurisé à distance. Sinon, les établissements devront recourir à un laboratoire de recherche indépendant.
La commission des lois est donc également défavorable à cet amendement.