M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Mme Yonnet invoque la nécessité d’associer les collectivités territoriales, les ARS et l’ensemble des acteurs concernés pour engager des dynamiques visant à favoriser l’installation de professionnels de santé dans les zones peu denses afin de remédier à la désertification médicale. C’est précisément tout l’enjeu du pacte territoire-santé.
Même si je souscris à l’objectif qui est le vôtre, madame Yonnet, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, dans la mesure où il est déjà prévu que l’ARS puisse conclure des contrats territoriaux de santé avec les équipes de soins primaires et les communautés professionnelles de territoire pour répondre aux besoins identifiés dans le cadre des diagnostics régionaux définis à l’article 12 bis. De ce fait, l’ensemble des mesures que vous préconisez sont déjà inscrites dans le texte, même si ce n’est pas dans les termes que vous proposez.
M. le président. Madame Yonnet, l'amendement est-il maintenu ?
Mme Evelyne Yonnet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 425 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 552 rectifié, présenté par Mme Imbert, MM. Retailleau et D. Laurent, Mme Cayeux, M. Pillet, Mme Morhet-Richaud, MM. A. Marc et Perrin, Mme Deromedi, MM. Charon et Bonhomme, Mme Deseyne, M. Fouché, Mme Giudicelli et M. Allizard, est ainsi libellé :
Après l’article 12 ter A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, six mois après la promulgation de la présente loi, un rapport présentant des propositions pour rendre le contrat d'engagement de santé publique plus attractif.
La parole est à Mme Corinne Imbert.
Mme Corinne Imbert. Cet amendement vise à demander la remise d’un rapport, ce qui ne fera peut-être pas plaisir à la commission ! (Sourires.)
Il s’agit de mieux faire connaître l’un des outils incitatifs à l’installation des jeunes médecins dans les zones où l’offre médicale est insuffisante, à savoir le contrat d’engagement de service public créé par la loi HPST portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires et destiné aux étudiants et aux internes en médecine. Ce dispositif leur permet de bénéficier d’une allocation mensuelle à partir de la deuxième année des études médicales en contrepartie d’un engagement d’exercer pendant la durée de l’indemnisation ou pendant une durée minimale de deux ans dans une zone où l’offre médicale fait défaut. Cet outil doit, à notre avis, être rendu plus attractif. Afin que notre amendement ne soit pas déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution, nous devons nous borner à demander la remise d’un rapport…
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, corapporteur. Nous examinons en moyenne dix demandes de rapport par jour depuis le début de la discussion de ce projet de loi… Quels que soient leurs signataires, la commission s’opposera à tous les amendements ayant cet objet. Tout à l’heure, en commission, certains de nos collègues, y compris des membres de l’opposition sénatoriale, ont jugé qu’ils étaient très nombreux.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Madame la sénatrice, je comprends d’autant mieux votre demande qu’une telle disposition figurait à l’article 12 ter, qui a été supprimé par la commission des affaires sociales. Que voulez-vous que je vous dise ?… Je ne désespère pas que l’article 12 ter soit rétabli tout à l’heure. Dans l’immédiat, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour explication de vote.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Nous débattons ici d’un sujet que les élus des territoires ruraux ou de certaines zones urbaines connaissent bien, à savoir la désertification médicale.
Mme Yonnet a très bien posé le problème en citant des données issues de l’atlas publié par l’Ordre national des médecins. Certaines mesures incitatives ont déjà été mises en place, au travers de la loi HPST ou par vous-même, madame la ministre. Cela va dans le bon sens, mais les résultats restent encore très partiels, et je pense que des mesures structurelles devront être prises si l’on veut vraiment résoudre le problème.
Une piste pourrait être de différencier la rémunération des médecins selon qu’ils travaillent en zone sous-dense ou non. Je ne trouverais pas cela choquant. On pourrait par exemple instaurer une sorte de bonus pour les médecins qui acceptent d’exercer dans des territoires insuffisamment pourvus.
Peut-être faut-il également envisager la poursuite du relèvement du numerus clausus, engagé voilà quelques années, mais dont les effets n’apparaîtront que dans cinq, six ou sept ans. Il est un peu curieux de voir nombre de jeunes Français aller faire leurs études de médecine en Belgique ou en Roumanie, tandis que nous faisons appel à des médecins étrangers…
Dans l’attente de telles mesures structurelles, adopter l’amendement de Mme Imbert ne saurait nuire à la santé ! Cela pourrait au contraire nous donner l’occasion de travailler sur des pistes nouvelles pour renforcer les dispositions incitatives mises en place par vous-même, madame la ministre, ou par vos prédécesseurs.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Je suis tentée de voter cet amendement, même s’il s’agit encore de demander un rapport.
Depuis que je suis sénatrice, j’entends parler de désertification médicale !
M. Jean-Baptiste Lemoyne. C’est le problème !
Mme Annie David. Un ancien collègue membre de la commission des affaires sociales, M. Juilhard, qui n’était pas de mon groupe, avait rédigé un rapport sur ce sujet. Depuis lors, d’autres rapports sur le même thème ont été publiés, mais nous butons toujours sur le même problème : comment inciter les médecins à s’installer dans les zones sous-denses ? Le rapport demandé permettrait peut-être d’ouvrir des pistes nouvelles à cet égard.
Une solution pourrait être de refuser le conventionnement aux médecins s’installant dans les zones denses, sauf s’ils remplacent un collègue partant à la retraite. Peut-être M. Maurey accepterait-il de soutenir une telle mesure, qui ferait sans doute réfléchir les médecins ? On pourrait également accorder un bonus aux médecins s’installant dans une zone sous-dense, ou du moins leur assurer des conditions d’exercice plus favorables que celles de leurs collègues établis dans des zones denses.
Concernant le relèvement du numerus clausus, il faut noter qu’un certain nombre d’étudiants en médecine, une fois leur diplôme en poche, choisissent une autre voie que la pratique de leur spécialité ; il conviendrait d’étudier cette question.
Madame la ministre, des solutions doivent être trouvées pour que l’on puisse enfin parler au passé des déserts médicaux. Ce rapport permettrait de faire un premier pas dans cette voie.
M. le président. Madame la ministre, mes chers collègues, je propose que nous prolongions la séance jusqu’à zéro heure trente, afin de poursuivre l’examen de ce projet de loi.
Il n’y a pas d’opposition ?...
Il en est ainsi décidé.
La parole est à M. Hervé Maurey, pour explication de vote.
M. Hervé Maurey. Je n’avais pas prévu d’intervenir maintenant, mais puisque Mme David m’a interpellé, je ne résiste pas à la tentation de lui répondre !
Comme le montrent toutes les études, la désertification médicale est, avec le numérique, le problème numéro un dans les territoires ruraux, ainsi que dans les zones périurbaines.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. C’est vrai !
M. Hervé Maurey. Je regrette d’ailleurs que l’on aborde une question aussi essentielle, qui mérite d’être étudiée avec beaucoup de sérieux, à plus de minuit, un vendredi matin. S’il y a une instance qui doit se pencher sur ce sujet, c’est bien le Sénat, qui, aux termes de la Constitution, assure la représentation des collectivités territoriales de la République. Je serais extrêmement marri que le présent projet de loi ressorte de cette assemblée sans avoir été marqué du sceau de la défense des territoires.
Cela a déjà été dit, l’Atlas de la démographie médicale en France qu’a publié l’Ordre des médecins nous apprend que l’on n’a jamais compté autant de médecins en France et que les déserts médicaux n’y ont jamais été aussi étendus, ce qui peut apparaître paradoxal.
Cela montre bien que nous devons donc envisager les choses selon une perspective nouvelle et que les mesures purement incitatives mises en place depuis vingt-cinq ans par les gouvernements successifs ne suffisent pas. À cet égard, je ne crois pas qu’un rapport de plus permettra de régler les problèmes. En tout cas, il est grand temps de faire preuve d’audace, de courage, afin de dépasser les conservatismes en la matière.
M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.
M. André Reichardt. Je voudrais à mon tour voler au secours de cet amendement.
Certes, il s’agit une nouvelle fois de demander un rapport et je comprends bien la réticence que peut susciter une telle requête. En l’espèce, toutefois, ce rapport doit permettre au Gouvernement de présenter des propositions pour rendre plus attractif le contrat d’engagement de service public, d’engager une réflexion si possible collective pour trouver des solutions en vue de la résorption des déserts médicaux. J’ajoute que l’article 40 de la Constitution nous oblige à procéder ainsi.
Les auteurs de cet amendement, auxquels je veux rendre hommage, tendent une perche au Gouvernement. Travaillons ensemble afin d’élaborer des propositions propres à rendre le contrat d’engagement de service public plus attractif.
M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour explication de vote.
M. Gilbert Barbier. Nous souhaitons conserver une médecine libérale. Pour ma part, je ne suis pas favorable à la coercition, car elle ne donnera rien. En revanche, par des mesures incitatives, dont un certain nombre ont été évoquées, notamment par M. Lemoyne, il est certainement possible d’encourager des médecins, jeunes ou moins jeunes, à s’installer dans des zones sous-dotées.
À cet égard, je défendrai tout à l’heure un amendement visant à rétablir l’article 12 ter, dont l’objet est de lutter contre la désertification médicale de nos campagnes et de nos banlieues. Même dans une petite ville comme la mienne, Dole, plus un seul médecin ne s’installe dans l’ancienne ZUP, où les conditions de vie et d’exercice n’ont pourtant rien de catastrophique. De fait, si l’on n’incite pas les médecins à s’installer dans les zones sous-denses, on courra à l’échec. Le conseil de l’Ordre des médecins a produit un très beau rapport, qui comporte des préconisations intéressantes. Espérons qu’il en sera tenu compte.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre. Je rejoins les propos que vient de tenir M. Barbier.
Si j’ai émis un avis défavorable sur l’amendement n° 552 rectifié, c’est parce que l’article 12 ter du projet de loi initial, qui a été supprimé par la commission et dont M. Barbier et le Gouvernement proposeront le rétablissement par voie d’amendement, me paraît beaucoup plus complet.
Ainsi, madame David, cet article prévoyait notamment que le comité national chargé d’assurer le suivi de la mise en œuvre du pacte territoire-santé établisse un rapport annuel d’évaluation des actions engagées. Cela allait donc au-delà de ce que prévoit l’amendement de Mme Imbert.
L’article 12 ter inscrivait le pacte territoire-santé, qui existe depuis maintenant trois ans, dans la loi et affirmait l’objectif d’améliorer l’accès aux soins de proximité en tout point du territoire. Il assignait au pacte territoire-santé plusieurs missions, parmi lesquelles la promotion de la formation et de l’installation des professionnels de santé, l’accompagnement de l’évolution de leurs conditions d’exercice.
D’ores et déjà, on observe une hausse, certes encore insuffisante, du nombre d’installations dans les territoires sous-dotés. L’idée fondamentale, c’est de donner envie aux professionnels de santé d’aller s’installer dans ces zones, et non pas de les y contraindre. Quand on leur demande quelle est la meilleure façon de leur donner cette envie, ils répondent qu’il faut leur assurer des modes d’exercice correspondant à leurs attentes. L’exercice isolé dans un cabinet n’entre pas dans ce cadre, c’est pourquoi ce projet de loi comporte de nombreuses mesures relatives à la mise en place de coopérations, par le biais par exemple de maisons de santé, afin de répondre aux aspirations, en particulier, des plus jeunes.
J’aurai sans doute l’occasion de revenir sur les mesures que nous mettons en place. Le Président de la République a lui-même annoncé le renforcement de certaines d’entre elles voilà quelques jours. Ainsi, nous nous sommes fixé l’objectif de 1 000 maisons pluridisciplinaires de santé à l’horizon 2017, contre 800 aujourd’hui, nous avons instauré et renforcé les contrats d’engagement de service public, qui consistent à accorder des bourses à des étudiants en contrepartie d’un engagement de s’installer dans un territoire sous-doté – on n’en comptait pratiquement aucun en 2012, il en existe 1 300 aujourd’hui et notre objectif est d’en signer 1 700 à l’horizon 2017 –, nous avons accéléré la mise en place des médecins correspondants du SAMU pour que les territoires isolés comptent des urgentistes de premier recours, si j’ose dire – ils étaient une centaine en 2012, ils sont près de 600 à ce jour et notre objectif est de porter leur nombre à 700 d’ici à 2017. Ce sont autant de mesures dont l’application est très concrètement évaluable.
Par ailleurs, nous entendons favoriser des modes d’exercice qui incitent des professionnels à s’installer. Je pense par exemple à la mise en place de maisons de santé à caractère universitaire, ce qui permettra à des internes ou à des chefs de clinique de venir exercer dans les territoires ruraux ou dans des zones urbaines difficiles. Leur présence créera un environnement favorable à l’arrivée d’autres professionnels de santé.
Le pacte territoire-santé prévoit donc toute une série d’actions et de mesures en faveur de nos territoires. Je regrette que l’article 12 ter ait été supprimé. Nous aurons l’occasion d’y revenir.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, corapporteur.
M. Alain Milon, corapporteur. Les propos de Mme la ministre sont particulièrement intéressants, mais il ne s’agit en fait que de la mise en œuvre de différentes mesures figurant dans la loi HPST : je pense en particulier aux maisons de santé.
Par ailleurs, les mesures incitatives évoquées, qui s’adressent aux étudiants en médecine, ont été mises en place voilà six ou sept ans. Or, dix années d’études étant nécessaires pour former un médecin, il faudra donc encore attendre pour en mesurer les résultats. Quant au relèvement du numerus clausus réclamé par certains, il ne produirait d’effets que dans dix ans et, à cette échéance, on comptera très probablement trop de médecins… Toutes les propositions faites sont intéressantes, mais toutes ne donneront pas des résultats positifs. Certaines, au contraire, produiront même des effets négatifs à l’horizon de dix ou quinze ans.
Concernant l’article 12 ter, s’il ne figure plus dans le texte de loi, c’est parce que son dispositif a été mis en application dès 2012, par le biais de textes réglementaires, et qu’il continuera à s’appliquer sans qu’un texte de loi soit nécessaire pour cela. Dès lors, nous avons estimé qu’il n’était pas utile de l’inscrire dans la loi. C’est tout !
Pour ce qui concerne la lutte contre la désertification médicale, de nombreuses mesures incitatives ont déjà été mises en place : laissons-leur le temps de produire leurs effets. Je ne suivrai pas ceux qui prônent l’adoption de mesures coercitives, car c’est à mes yeux la plus mauvaise des solutions !
En commission, j’ai entendu Mmes Cohen et David affirmer que les médecins s’installent sous le soleil… Or le dernier Atlas national de la démographie médicale en France publié par le Conseil national de l’Ordre des médecins fait apparaître que le nombre de médecins a considérablement diminué dans les régions Provence-Alpes-Côte d’Azur et Rhône-Alpes, tandis qu’il a fortement augmenté en Alsace.
M. André Reichardt. Il y fait très beau !
M. Alain Milon, corapporteur. Le nombre d’installations n’est donc pas forcément corrélé à l’ensoleillement, même si des régions comme la Bourgogne ou le Nord-Pas-de-Calais connaissent également des difficultés. Comme l’a dit Mme la ministre, il faut prendre en compte les motivations des nouveaux docteurs en médecine : elles ne sont plus du tout d’ordre climatique. J’ai rencontré voilà deux jours le doyen de la faculté de médecine de Marseille et celui de la faculté de Nice : on constate une désertification médicale en cours dans les Alpes-de-Haute-Provence, les Hautes-Alpes, le nord du Var et le Luberon… Seulement 40 % des jeunes médecins sortant des facultés de médecine de Marseille ou de Nice s’installent en Provence-Alpes-Côte d’Azur.
En revanche, depuis des années, nous votons des lois de financement de la sécurité sociale marquées par des déficits alors que, dans le même temps, les tarifs des actes des médecins, des chirurgiens, des gynécologues et obstétriciens n’augmentent pas : là est le vrai problème !
M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.
M. Yves Daudigny. Je ne remets pas du tout en cause l’exercice libéral de la médecine ; je suis même prêt à le défendre. Toutefois, il existe une différence importante entre l’exercice libéral de la médecine et celui d’autres professions : contrairement à ceux des architectes ou des notaires, par exemple, les revenus des médecins reposent pour une large part sur la solidarité nationale, le financement de la santé étant assuré en grande partie par des cotisations assises sur le travail ou par les impôts.
Au fond, toutes les difficultés que nous rencontrons actuellement reposent sur un fondement lointain, à savoir la charte de la médecine libérale de 1927, qui est née d’une réaction des médecins de l’époque contre le mouvement de création d’assurances sociales. Je ne peux résister au plaisir de citer l’honorable docteur Cibrié, qui, en 1927, écrivait que « le corps médical syndiqué refuse de collaborer aux assurances sociales telles que les établit le projet de loi voté par la Sénat »…
Peut-être faudrait-il maintenant négocier, penser et fonder une médecine libérale du XXIe siècle qui soit toujours fondée sur un principe de liberté, mais tienne compte du fait qu’elle est financée aujourd’hui essentiellement par des recettes issues de la solidarité nationale.
M. le président. La parole est à M. Maurice Antiste, pour explication de vote.
M. Maurice Antiste. J’observe que le débat semble être cantonné strictement à l’Hexagone. Je n’ai pas lu l’atlas publié par le Conseil national de l’Ordre des médecins, mais je peux dire que les territoires situés outre-mer ne sont pas logés à meilleure enseigne que l’Hexagone en matière de désertification médicale. J’en dirai davantage lorsque nous aborderons l’article 12 ter.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 12 ter A.
L'amendement n° 1174 rectifié ter, présenté par Mmes Ghali, Khiari et Yonnet, MM. Antiste, Montaugé et Courteau, Mmes Bataille et Guillemot et M. Sutour, est ainsi libellé :
Après l’article 12 ter A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, les médecins et les spécialistes bénéficient d’une exonération de charges sociales et fiscales en cas de nouvelle implantation. L’État fixe par décret les conditions d’application de ces exonérations.
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Evelyne Yonnet.
Mme Evelyne Yonnet. Je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Mme Ghali, qui ne pouvait être présente parmi nous ce soir mais qui est prête à rencontrer Mme la ministre pour discuter des propositions que nous allons présenter.
Dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, l’hôpital public et les services des urgences sont, depuis de nombreuses années, la solution de repli pour les habitants en matière de santé. L’esprit du projet de loi de modernisation de notre système de santé vise à placer le médecin généraliste au cœur du parcours de santé, afin d’offrir au patient non plus seulement des soins de premier recours, mais aussi une démarche de prévention.
Des moyens importants sont mis à disposition des politiques de la ville, principalement en matière de rénovation urbaine. S’il est essentiel de repenser les territoires urbains, tous les projets perdent de leur sens si les questions de santé dans ces quartiers sont éludées, voire négligées. Il faudrait favoriser l’installation de nouveaux médecins généralistes et spécialistes dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, selon un modèle de zones franches de santé. Cela nous semble indispensable pour réduire les déserts médicaux urbains et redonner de la cohérence au parcours de soins, afin de lutter, au cœur des grandes agglomérations, contre la fracture sociale en matière de santé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, corapporteur. Si l’amélioration de la couverture médicale des zones sensibles constitue bien évidemment une préoccupation partagée par tous, il n’est pas certain que l’outil des exonérations de charges soit le plus approprié pour atteindre cet objectif.
Dans son rapport sur la sécurité sociale de 2011, la Cour des comptes notait ainsi qu’« il existe en faveur des médecins dans les zones déficitaires une multiplicité d’aides financières, mais très peu connues des intéressés et loin d’être toutes évaluées. Quand elles le sont, [les méthodes encourues] se révèlent inefficaces, car ne répondant pas aux freins à l’exercice en zone démédicalisée exprimés par les médecins, à savoir l’isolement et la difficulté pour le conjoint d’y trouver du travail », entre autres choses.
En outre, la rédaction proposée ne répond pas au problème des déserts médicaux ne se situant pas en zone urbaine. L’adoption du dispositif aboutirait même à une rupture d’égalité entre territoires urbains et territoires ruraux.
C’est pourquoi la commission sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Toute une série d’aides fiscales et sociales existent déjà, dont l’efficacité est sujette à interrogations. De plus, au-delà des exonérations fiscales et sociales de niveau national, il existe de nombreux dispositifs incitatifs financiers mis en œuvre dans les territoires, parfois sur l’initiative de collectivités.
Pour y voir clair, j’ai confié à l’Inspection générale des affaires sociales la mission de faire le point sur l’ensemble des dispositifs existants, des mécanismes d’exonération pratiqués, et d’en évaluer l’efficacité. J’attends donc la remise de ce rapport, qui doit intervenir vers la fin de l’année, pour éventuellement en tirer les conséquences.
Aujourd’hui, on a un peu le sentiment de se trouver face un « maquis » de dispositifs empilés les uns sur les autres, sans que la cible visée soit forcément atteinte ni que les professionnels soient toujours bien informés des exonérations dont ils bénéficient.
Au bénéfice de ces explications, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, madame Yonnet.
M. le président. Madame Yonnet, l'amendement est-il maintenu ?
Mme Evelyne Yonnet. Dans notre ville de Seine-Saint-Denis, nous avons réussi à attirer un nouveau médecin, que l’agence régionale de santé a aidé en versant une certaine somme d’argent pour financer son installation et en lui garantissant le paiement de son loyer pendant six mois. Cela a marché : cette personne est maintenant bien intégrée dans le tissu social et s’est constitué une clientèle.
Je tiens à le souligner, la désertification médicale affecte également les zones urbaines confrontées à des difficultés importantes. En Seine-Saint-Denis, si la situation de la démographie médicale est satisfaisante à l’heure actuelle, elle sera beaucoup plus difficile dans dix ans, car nos médecins sont vieillissants.
Cela étant dit, je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 1174 rectifié ter est retiré.
Mes chers collègues, nous avons examiné 159 amendements au cours de la journée.
Mme Annie David. Ce n’est pas mal !