Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Luche, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Luche. Il a été rappelé à plusieurs reprises ce matin que nos concitoyens pouvaient bénéficier de prestations sociales, notamment du RSA. Or, en tant que président d’un conseil départemental, je souhaiterais vous demander, madame la secrétaire d’État – ce n’est pas à proprement parler de votre compétence, mais vous êtes chargée de la lutte contre l’exclusion –, comment puis-je faire savoir aux bénéficiaires potentiels du RSA qu’ils y ont droit. Reste que je n’ai pas d’argent pour le payer… Il faut donc que le Gouvernement donne aux départements les moyens de contribuer à la diminution de la pauvreté et de l’exclusion, par l’insertion, à laquelle conduit notamment le RSA.
Pour ma part, je m’abstiendrai sur cette proposition de loi.
Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l'article unique constituant l’ensemble de la proposition de loi visant à lutter contre la discrimination à raison de la précarité sociale.
(La proposition de loi est adoptée.) – (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures quinze, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)
PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher
M. le président. La séance est reprise.
6
Questions d'actualité au Gouvernement
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
Je rappelle que la séance est retransmise en direct sur France 3 et Public Sénat.
Je tiens à saluer la première présence au banc du Gouvernement de Mme Clotilde Valter, dans ses fonctions de secrétaire d’État chargée de la réforme de l’État et de la simplification (Applaudissements.), et de Mme Martine Pinville, dans ses fonctions de secrétaire d’État chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire. (Applaudissements.)
Mesdames les secrétaires d’État, je vous adresse, en notre nom à tous, nos souhaits de cordiale bienvenue. Vous aurez une séance de répit, peut-être, mais pas plus… (Rires.)
situation des migrants
M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour le groupe Les Républicains.
M. Roger Karoutchi. Monsieur le ministre de l’intérieur, l’affaire des migrants pose en réalité trois problèmes.
Tout d’abord, il y a un problème humanitaire. Sans revenir dessus en détail, il est clair que ce qui se passe actuellement en Méditerranée est inacceptable. La mort, la souffrance, le débarquement dans des conditions invraisemblables en Italie créent une situation qui s’impose à tous, et pas seulement aux Italiens.
Ensuite, se pose un problème matériel et financier. Je ne reviendrai pas sur les chiffres de la Cour des comptes, qui évalue à peu près à 2 milliards d’euros le coût pour notre pays de l’asile, déboutés compris, et de l’immigration clandestine, si l’on ajoute l’aide médicale de l’État, l’hébergement, l’allocation temporaire d’attente, la durée d’instruction de chaque dossier de demandeur d’asile. À défaut d’être certifié, ce chiffre apparaît quand même probable ; en ces temps de contraintes financières et matérielles, il ne peut que nous interpeller.
Enfin, un certain nombre de responsables, pas seulement de droite, disent que nous sommes à un point de rupture, l’acceptation de cette situation par notre société étant de plus en plus difficile. Il n’est qu’à voir les incidents qui se sont produits entre les CRS et certains migrants à Calais ou à Paris. D’aucuns proposent la création de centres, mais personne ne s’y retrouve.
Parallèlement, nous avons l’impression que l’Europe balbutie, et ce qui vient de se passer à Luxembourg n’est pas de nature à nous rassurer. Nous avons également le sentiment que vous souhaitez faire preuve de fermeté, mais que le cadre européen ne se prête pas à la prise de décision rapide et efficace qui s’impose au regard de ce qui se passe en Méditerranée.
Le système français n’a plus la capacité financière de suivre. D’un côté, nous intégrons mal ceux qui obtiennent le droit d’asile et, de l’autre, nous traitons massivement ceux qui sont déboutés et qui ne sont pas raccompagnés à la frontière.
Pour résumer, je dirai que nous subissons une pression considérable aux frontières, notamment celles du sud, avec l’Italie. Par ailleurs, le point d’acceptation dans la société française est dépassé, d’autant qu’on nous annonce 300 000 personnes supplémentaires dans l’année qui vient. Aussi, ma question est simple : concrètement, que fait le Gouvernement français ? Certes, vous avez annoncé hier un plan pour un meilleur accueil, qui contient d’ailleurs un certain nombre de mesures qui étaient déjà prévues, mais je suis désolé de vous dire que nous sommes loin du compte au regard de la pression que nous subissons à nos frontières.
Monsieur le ministre, le Gouvernement ayant la responsabilité de la sécurité intérieure et de l’unité de la nation, comment comptez-vous procéder ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. David Assouline. Trente secondes de dépassement !
M. le président. Je demande à chacun de respecter son temps de parole.
La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur. Monsieur Karoutchi, vous évoquez un problème extrêmement grave, à propos duquel je m’interdis tout commentaire, étant moi-même en situation de responsabilité. Pourtant, j’entends beaucoup de commentaires, y compris de la part de ceux qui ont, par le passé, exercé des responsabilités. Étant donné la gravité de la situation, chaque parole sur le sujet devrait être pesée et responsable.
Nous devons trouver les solutions les plus pertinentes à ce problème international. Vous pourrez dire tout ce que vous voulez sur le niveau d’acceptation en Europe, la réalité qui s’impose à nous est celle d’hommes et de femmes jetés sur les chemins de l’exode par les persécutions et les exactions perpétrées par des régimes sanguinaires et des groupes terroristes.
Faut-il que l’Europe assure l’accueil de ceux qui relèvent du statut de réfugié ? La réponse du Gouvernement est clairement oui ! Les cinq pays accueillant 75 % de ces réfugiés peuvent-ils continuer à le faire seuls ? La réponse est clairement non ! C’est la raison pour laquelle nous avons proposé un dispositif de solidarité. Il faut savoir que les propositions faites par l’Union européenne ont été inspirées par la France.
Le 30 août 2014, j’ai fait une tournée des capitales européennes en proposant à tous mes homologues d’accepter un dispositif introduisant non seulement plus de solidarité, mais également plus de responsabilité, ce qui implique trois choses.
D’abord, il faut que les migrants soient enregistrés dans le pays de première arrivée, pour qu’il soit possible de distinguer ceux qui relèvent du statut de réfugié de ceux qui relèvent de l’immigration économique irrégulière.
Ensuite, il faut que ceux qui relèvent de l’immigration économique irrégulière soient reconduits vers les pays de provenance. C’est pourquoi nous avons obtenu le triplement des moyens de Frontex et de passer d’une opération exclusivement humanitaire à une opération couplant l’humanitaire au contrôle des frontières extérieures de l’Union européenne.
Enfin, nous devons travailler avec les pays de provenance – d’où mon déplacement au Niger voilà trois semaines –, pour qu’il y ait de véritables centres de réadmission et le maintien dans la bande sahélienne de populations auxquelles nous devons, par ailleurs, apporter des projets de développement.
En France, nous menons deux types d’action.
D’une part, nous proposons des dispositifs d’hébergement renforcés. Nous prévoyons en effet plus de places pour les réfugiés qui sont dans les CADA – les centres d’accueil pour demandeurs d’asile –, dans la rue ou les centres d’hébergement d’urgence, car ils doivent entrer dans le droit commun du logement, avec des dispositifs d’insertion. Nous ouvrons également de nouvelles places dans les centres d’hébergement d’urgence et dans les CADA.
D’autre part, nous faisons davantage preuve fermeté en mettant en place des dispositifs de reconduite à la frontière.
M. le président. Il faut conclure !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Nous avons éloigné 15 000 personnes l’an dernier ; c’est beaucoup plus que ce qui avait été fait auparavant. Sachez que nous continuerons à conduire cette politique de fermeté avec responsabilité et humanité. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
taxis et vtc (véhicules de tourisme avec chauffeur)
M. le président. La parole est à M. Philippe Esnol, pour le groupe du Rassemblement démocratique et social européen.
M. Philippe Esnol. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.
Mardi, plus d’une centaine de taxis parisiens ont participé à des rassemblements du type « opération escargot » au départ des aéroports parisiens, avant de converger vers la capitale.
Hier, les organisations de taxis, regroupées en intersyndicale, ont appelé le Gouvernement à faire cesser au plus vite les applications mobiles organisant le transport entre particuliers, de type UberPop, faute de quoi elles envisagent, à partir du 25 juin, un mouvement d’ampleur nationale à durée illimitée.
Comment en est-on arrivé là, alors qu’en octobre 2014 a été promulguée une loi sur le sujet ? Ce texte réprime plus fortement l’activité clandestine de taxi et réglemente l’activité des voitures de transport avec chauffeur, les VTC.
Monsieur le ministre, à en croire les chauffeurs de taxi, cette loi ne serait que très peu appliquée. Les contrôles seraient nettement insuffisants, pour ne pas dire inexistants, notamment ceux qui sont destinés à vérifier que les VTC respectent l’obligation qui leur est faite de retourner à leur point d’origine entre deux courses.
Aujourd’hui, de nombreux litiges sont devant les tribunaux et des procédures ont été engagées contre des chauffeurs UberPop, mais la relaxe, la semaine dernière, de l’un d’entre eux a rallumé la colère des taxis, qui dénoncent cette concurrence déloyale et des pratiques de travail dissimulé sous couvert de covoiturage.
Sans approuver les menaces de blocage, il nous semble urgent que le Gouvernement prenne les mesures qui s’imposent et permette tout simplement à la loi de la République de s’appliquer. D’ailleurs, peut-on seulement attendre une autre position du pouvoir exécutif, et particulièrement de votre ministère ? Aussi, allez-vous donner des instructions pour intensifier les contrôles policiers et les procédures judiciaires à l’encontre des taxis non professionnels en infraction ? (Applaudissements sur les travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur. Monsieur le sénateur, vous m’interrogez pour savoir si nous sommes prêts à faire ce que nous faisons déjà. La réponse ne fait pas de doute, puisque tout ce que vous souhaitez nous voir mettre en œuvre est déjà appliqué, comme je vais vous le démontrer.
La loi du 1er octobre 2014 définit le cadre juridique dans lequel les activités de taxi et de VTC peuvent se développer. Deux acteurs économiques, à savoir les chauffeurs de taxi et ceux de VTC, sont aujourd’hui confrontés à l’activité totalement illicite, incontestablement illégale des véhicules UberPop, dont les chauffeurs se prêtent à ces activités sans acquitter la moindre charge sociale, contrairement à eux, qui évoluent dans un cadre concurrentiel extraordinairement contraint.
Un tribunal correctionnel s’est déjà prononcé, précisément parce que nous avons agi. Les conducteurs de ces véhicules en infraction s’exposent désormais à des peines d’amende de 1 500 euros. Par ailleurs, pour ceux qui organisent ces activités, comme l’entreprise UberPop, la loi a prévu des amendes de 300 000 euros et des peines d’emprisonnement, mesure qui fait actuellement l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité.
Vous me demandez si nous agissons et si des procédures sont en cours. Sachez que nous avons diligenté un nombre incalculable de contrôles et que nous continuerons à le faire avec la plus grande fermeté. Plus de 420 procédures ont ainsi été engagées par mon ministère depuis la fin de l’année dernière, avec des suites pénales données par l’autorité judiciaire. Je me dois d’ailleurs de compléter votre information sur les décisions du tribunal correctionnel de Paris rendues la semaine dernière. Cette juridiction a condamné le même jour un conducteur à une peine de prison avec sursis, et le parquet a fait appel de la décision de relaxe que vous avez évoquée dans votre question.
Par ailleurs, le Premier ministre a saisi le délégué national à la lutte contre la fraude afin que des contrôles et des actions soient engagés en matière fiscale et sociale. Comme le prévoit un projet de circulaire interministérielle, les procédures seront transmises systématiquement aux URSSAF et aux services fiscaux pour mise en œuvre des redressements éventuels.
Nous faisons tout cela dans le respect du droit, avec détermination et une volonté absolue de transparence. J’ai totalement confiance dans les autorités judiciaires pour donner les réponses pénales les plus fermes à l’égard de ces actes inacceptables.
M. le président. Il faut conclure !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Je le répète, comme nous l’avons fait jusqu’à présent, nous continuerons ces contrôles, et les préfets prendront des arrêtés d’interdiction de ces activités manifestement et incontestablement illicites. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
politique de la france en europe en matière d'accueil des demandeurs d'asile
M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour le groupe écologiste.
Mme Esther Benbassa. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.
Depuis la semaine dernière, j’accompagne avec mes collègues écologistes les expulsés de la rue Pajol. On n’y a pas vu beaucoup d’élus, mais des centaines de gendarmes mobiles. Curieux, n’est-ce pas ? Surtout face à ces êtres démunis, au regard vide, épuisés à force de dormir dehors. Ils ne parlent pas, on les dirait atteints d’un mutisme dénotant la souffrance. Par pudeur, je n’en dirai pas plus.
Des voisins, des jeunes gens et des moins jeunes apportent qui une couverture, qui un peu à manger ou à boire. Une modeste association de bienfaisance leur sert un plat chaud avec un peu de pain.
Monsieur le ministre, vous avez certes annoncé hier la création de quelques milliers de places pour les demandeurs d’asile entre la fin de l’année et la fin de 2016 et 5 000 places de plus d’ici à 2017 pour ceux qui ont déjà obtenu le statut de réfugié. Si nous saluons vos promesses d’hébergement, une question demeure : l’« humanité » affichée prévaudra-t-elle sur une « fermeté » parfois brutale ?
En 2014, notre pays a octroyé l’asile à 17 % des demandeurs, alors que, d’une manière générale, dans l’Union européenne, ce taux s’élève à 45 % !
Avant l’ouverture de vos hypothétiques grands chantiers, que ferez-vous dans l’immédiat des expulsés des campements que vous qualifiez d’illicites, des demandeurs d’asile sans logement ou en centre de rétention ? Ils ne vont quand même pas dormir dans la rue ou rester dans ces centres jusqu’à la fin de 2015 ! Des places d’hébergement doivent être ouvertes en urgence et accessibles vingt-quatre heures sur vingt-quatre ! Quid des mesures privatives de liberté à la frontière pour les mineurs isolés demandeurs d’asile auxquelles le candidat Hollande avait promis de mettre fin ? (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
Des actes, monsieur le ministre, nous voulons des actes, et pas des mots ni des promesses non tenues ! (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur. Madame Benbassa, je vous remercie pour votre question.
Vous aurez constaté avec moi que ceux qui commentent ces situations compliquées sur les plateaux de télévision ne sont pas au banc du Gouvernement en train d’agir pour trouver des solutions. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Didier Guillaume. Très bien !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. D’une manière générale, ceux qui sont sur les plateaux de télévision, je ne les ai pas beaucoup vus auprès des migrants faisant acte de solidarité.
Mme Éliane Assassi. Si !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Je conviens que ce n’est pas votre cas, madame Benbassa. On ne peut pas en effet être à la fois discrètement auprès des migrants avec les qualités du cœur et dans un exercice narcissique de pur commentaire à la télévision. Je tenais à préciser les choses, car j’ai vu un cynisme total et assez peu d’humanité.
Vendredi, lorsque nous avons décidé avec des membres de l’OFII, l’Office français de l’immigration et de l’intégration, et de l’OFPRA, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, de mettre à la disposition des migrants qui ont été évacués du camp de La Chapelle des solutions d’hébergement, il n’y avait pas un policier. Les migrants sont montés dans le bus tout à fait librement, car ils savaient que nous avions prévu des dispositifs d’urgence. Qui les en a fait descendre ? Ce sont des groupuscules, ces mêmes acteurs que l’on retrouve sur les plateaux de télévision, qui avec le plus pur cynisme ont conduit ces migrants dans une caserne qui menace de tomber en ruines.
Madame Benbassa, nous n’avons pas proposé hier quelques milliers de places d’hébergement, mais 11 000 places, qui permettront de créer 4 200 places d’hébergement en plus des 8 000 que nous avons déjà créées en centre d’accueil pour demandeurs d’asile. Nous voulons conduire une politique de l’asile qui permette à ceux qui ont le statut de réfugié d’être accueillis dignement.
Nous ouvrons aussi 1 500 places de plus en hébergement d’urgence afin qu’il n’y ait plus une personne vulnérable qui dorme dans la rue. La création de ces places d’hébergement supplémentaires nécessitera, non pas des commentaires, mais un travail qui sera difficile.
Enfin, nous offrons 5 000 places pour ceux qui dorment dans la rue, qui sont dans les centres d’accueil pour demandeurs d’asile ou les centres d’hébergement d’urgence et qui ont depuis longtemps le statut de réfugié, car ils ont le droit d’entrer dans un parcours d’insertion.
M. le président. Il faut conclure !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Vous appelez cela des mesurettes. Or c’est un travail extrêmement difficile que nous faisons avec un certain nombre d’associations et la ville de Paris, et que nous continuerons à faire.
J’aimerais sur ce sujet un peu moins de commentaires, de posture et de cynisme et plus de sobriété et de dignité. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur certaines travées du RDSE et de l’UDI-UC.)
situation de l’hôpital
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour le groupe communiste républicain et citoyen.
Mme Laurence Cohen. Ma question s'adresse à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
L’hôpital public est en crise, il est malade des réformes successives dont il est victime depuis des années.
Les nouvelles restrictions budgétaires de 3 milliards d’euros d’ici à 2019 menacent 22 000 emplois, dont 4 000 à l’AP-HP, l’assistance publique-hôpitaux de Paris.
Un personnel épuisé, en sous-effectif, avec des salaires gelés depuis 2010 et à qui on demande toujours plus, est-ce ainsi que l’on pense assurer l’égalité d’accès aux soins et leur qualité ?
La loi HPST et la tarification à l’activité ont transformé l’hôpital en une entreprise, la gestion prenant le dessus sur le curatif.
L’annonce du projet de réforme des 35 heures de Martin Hirsch, directeur général de l’AP-HP, a mis le feu aux poudres. Les hospitaliers ne sont pas dupes de ces pseudo-réformateurs qui visent à « convertir des problèmes de moyens en problèmes d’organisation », comme le dit le sociologue Nicolas Belorgey, auteur de L’Hôpital sous pression.
Une nouvelle mobilisation d’ampleur à l’appel de l’ensemble des organisations représentatives des personnels a encore eu lieu ce matin, la quatrième en quelques semaines. Visiblement, le dialogue amorcé par le directeur général et la présentation de son document de travail n’ont pas suffi à calmer la colère des agents.
Diminuer le nombre de RTT reviendrait à réduire la durée quotidienne du travail et, donc, le temps de transmission entre les équipes de soins, indispensable à la bonne prise en charge des patients qui ont besoin d’un suivi permanent.
Si la colère gronde de Morlaix à Marseille, en passant par le centre hospitalier de Calais ou bien encore l’hôpital de Feurs dans la Loire, c’est parce que les personnels de santé savent bien que l’AP-HP sert de laboratoire d’expérimentation à toutes les réformes hospitalières. Sur l’ensemble du territoire national, on demande aux personnels toujours plus de sacrifices et, dans les faits, on assiste à un démantèlement de l’hôpital public. Des groupements hospitaliers de territoire à la promotion de l’ambulatoire, qui, sous couvert de modernité, devrait rapporter 1,5 milliard d’euros d’économies et ouvrir un boulevard aux prestataires privés, c’est la recherche de productivité, et non celle de la qualité des soins, qui est visée.
Madame la ministre, dans l’intérêt des patients et des personnels de santé, allez-vous renoncer aux 3 milliards d’euros d’économies programmés pour l’hôpital public et intervenir auprès de Martin Hirsch pour qu’il retire définitivement son projet de réforme ? Comment le Gouvernement entend-il permettre aux hôpitaux publics de continuer à assurer dans de bonnes conditions leurs missions, améliorer les conditions de travail des personnels de santé, garantir une offre de soins et une qualité de prise en charge des patients, dont on constate tous les jours qu’elles se dégradent ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe écologiste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre des affaires sociales.
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. L’hôpital public est une institution dont nous sommes fiers et à laquelle l’ensemble des Français sont attachés, car il est le cœur battant de la République sociale : il est ouvert vingt-quatre heures sur vingt-quatre et accueille tous nos concitoyens lorsqu’ils en ont besoin.
Le Gouvernement s’est fortement engagé pour défendre, soutenir et développer l’hôpital public. Je ne vous laisserai donc pas dire, madame la sénatrice, que nous assistons à son démantèlement dans notre pays.
Mme Éliane Assassi. Si !
Mme Marisol Touraine, ministre. En 2015, nous lui avons alloué 1,5 milliard d’euros de plus qu’en 2014. Depuis 2012, nous y avons créé près de 30 000 emplois afin d’assurer un meilleur accueil des patients.
L’hôpital public est aussi un lieu d’innovation et d’adaptation. C’est pourquoi nous devons faire en sorte – c’est le sens des projets que je porte – qu’il travaille mieux avec la médecine de ville et que la recherche y soit toujours plus performante. Je me réjouis d’ailleurs que nous ayons eu l’occasion cette année de célébrer la centième première mondiale réalisée dans un centre hospitalier universitaire français. C’est une réelle fierté pour notre pays ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Je suis extrêmement attentive aux conditions de travail au quotidien des personnels de l’hôpital public, qui sont, je le sais, très attachés à leurs missions car profondément attachés à la solidarité.
L’hôpital public pour répondre aux défis qu’il a à relever doit évoluer et s’adapter dans le cadre d’un dialogue social. À cet égard, je veux dire ma confiance à Martin Hirsch. Je sais qu’il œuvre avec les organisations syndicales pour que les conditions de travail et l’organisation soient adaptées et pour relever le défi d’une meilleure prise en charge de nos concitoyens vingt-quatre heures sur vingt-quatre et trois cent soixante-cinq jours par an.
C’est en relevant les défis de manière résolue et en adoptant une politique d’innovation et de modernisation que nous parviendrons à maintenir les valeurs d’égalité et de solidarité au fronton de nos hôpitaux publics. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Lalande, pour le groupe socialiste et républicain.
M. Bernard Lalande. Au nom de mon groupe, je salue la nomination au Gouvernement de Martine Pinville et de Clotilde Valter. Nous avons la certitude qu’elles serviront la République avec dévouement et avec talent dans leurs nouvelles fonctions.
Ma question s'adresse à Martine Pinville, secrétaire d'État chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire.
Dès 2012, dans un contexte économique difficile avec une croissance en berne, le Gouvernement a eu la volonté de résoudre une équation complexe : accorder des incitations fiscales aux entreprises pour les pousser à investir sans dévier de la trajectoire de redressement des finances publiques.
En allégeant les coûts des entreprises de 20 milliards d’euros par an, via le CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, en créant la Banque publique d’investissement, en développant des politiques de soutien à l’innovation, à la recherche et à l’économie numérique et, plus récemment, en créant un amortissement supplémentaire pour les investissements en matériels industriels, le Gouvernement répond aux attentes des entreprises et des entrepreneurs et, je tiens à le rappeler, obtient des résultats, puisque la croissance est de retour depuis le début de l’année 2015. Ces mesures énoncent un postulat : les résultats d’aujourd’hui font les investissements de demain et les emplois d’après-demain. L’objectif clairement annoncé par le chef du Gouvernement est de transformer la reprise d’activité en emplois non délocalisables.
Ainsi, pour lever les freins à l’emploi dans les TPE et les PME, tout en favorisant le développement de leur activité, le 9 juin dernier ont été annoncées un certain nombre de mesures dynamiques et adaptées qui devraient permettre à cette catégorie d’entreprise de bénéficier de la reprise de la croissance. L’une de ces mesures consiste à garantir des pratiques concurrentielles loyales en luttant contre les fraudes au détachement de travailleurs. Des mesures relatives à la lutte contre les fraudes au détachement de travailleurs et à la lutte contre le travail illégal avaient d’ailleurs déjà été prises, en particulier à travers le décret du 30 mars 2015. Nous savons aussi que la France, par la voix du Gouvernement, agit en Europe sur le sujet.
Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous nous indiquer en quoi les mesures annoncées dans le plan « Tout pour l’emploi dans les TPE et les PME » amélioreront les dispositifs déjà existants et quel sera le calendrier de leur mise en œuvre ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)