Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Monsieur le sénateur, vous avez raison, et c'est d’ailleurs ce que prévoit le projet de loi, puisqu’il n’est possible d’agir que dans le cadre des sept finalités déterminées par le texte. Si des éléments concernant une personne autre que celle interceptée peuvent justifier des écoutes spécifiques, il faudra faire une nouvelle demande d’autorisation, selon les procédures fixées dans la loi.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. J’entends les propos du rapporteur et de M. le ministre. Depuis le début de la discussion de ce projet de loi, les représentants du Gouvernement et les parlementaires ne cessent de dire que ce texte est protecteur des libertés et qu’il présente des garanties : en effet, toutes ses dispositions obéissent à des finalités précises, strictement déterminées et ciblées – il en va ainsi des recherches concernant une personne comme des algorithmes qui seront utilisés.
Nous avons largement répété, comme nous l’avons fait encore hier soir longuement, que nous récusions tout ce qui pourrait s’apparenter à du « pompage » c’est-à-dire, pour employer une expression plus littéraire, à de la captation d’un très grand nombre de données, sans finalité particulière. C’est cela qui nous distingue des pratiques d’autres pays – je pense notamment au système mis en place aux États-Unis sur lequel le Sénat américain est, à juste titre, revenu.
Nous maintenons donc cet amendement, qui pourrait sans doute, il est vrai, être amélioré sur la forme. Nous souhaitons marquer notre différence et conserver l’état d’esprit qui a présidé à la rédaction de ce texte.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Monsieur Sueur, ce n’est pas parce que vous allez obtenir des informations sur un citoyen B dans le cadre de l’interception de sécurité dont fait l’objet un citoyen A que vous faites de la surveillance de masse ! Cela n’a rien à voir !
M. Jean-Pierre Sueur. J’ai bien compris !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. À quelle situation nous conduirait l’adoption de votre amendement ? Je prendrai un exemple très concret : si j’obtiens, dans le cadre d’une interception concernant, par exemple, une affaire terroriste, des informations concernant un autre citoyen que celui surveillé, il nous faudra passer de nouveau devant la CNCTR pour avoir le droit d’intercepter ces autres éléments.
Votre amendement empêchera la transcription d’éléments de l’interception de sécurité relatifs à ce dernier, et donc d’utiliser des informations extrêmement utiles et précieuses, dans le cadre de la prévention de la lutte contre le terrorisme, notamment au titre de mesures de police administrative pour lesquelles ce texte a été élaboré.
Il faudrait ôter la deuxième phrase du premier alinéa. Ainsi rédigé, votre amendement ne nous conduirait pas à une situation où l’État ne pourrait pas transcrire des informations précieuses et où il serait obligé de les détruire, ce qui rendrait inefficace son action de police administrative.
Si vous acceptez ma proposition, qui a pour but de vous montrer ma bonne foi, je pourrais être favorable à votre amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Bas, rapporteur. Monsieur le ministre, je suis navré de ne pouvoir m’associer à votre tentative de compromis. Il se trouve que l’alinéa 68 du texte de la commission correspond exactement à l’amendement n° 144 rectifié bis, tel que vous souhaitez qu’il soit rédigé. Je crains fort que votre proposition ne soit pas réellement une solution, mais peut-être ai-je mal compris ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Monsieur le rapporteur, c'est vous qui avez parfaitement bien compris ! Cela montre bien la difficulté à laquelle je suis confronté lorsque j’essaye de donner satisfaction à des auteurs d’amendements qui ne m’ont pas convaincu, particulièrement dans le cadre d’une discussion parlementaire portant sur un sujet sensible.
Compte tenu de la précision que vous venez d’apporter, je suis donc obligé de confirmer mon avis défavorable sur l’amendement n° 144 rectifié bis, à moins que Jean-Pierre Sueur n’accepte de le retirer.
Mme la présidente. Monsieur Sueur, l'amendement n° 144 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Sueur. J’ai été sensible à la proposition de M. le ministre. Il est clair que la conjonction de la première phrase et de la dernière phrase de mon amendement permet de répondre à notre préoccupation, sans entraîner les inconvénients que peut engendrer la deuxième phrase.
Le rapporteur a raison lorsqu’il dit que cela figure déjà à l’alinéa 68. Simplement, la dernière phrase précisait, ce que M. le ministre était prêt à accepter, que la destruction avait lieu « sous l’autorité du Premier ministre ». Cette référence au Premier ministre pourrait être ajoutée.
Néanmoins, compte tenu de la position de M. le ministre et de la remarque juste du rapporteur, j’accepte de retirer mon amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Bas, rapporteur. Le Premier ministre est déjà mentionné dans le texte. Il n’est donc pas utile de dupliquer cette référence. En effet, au début du chapitre II intitulé « Des renseignements collectés », à l’alinéa 56, l’article L. 822-1 du code de la sécurité intérieure, le texte de la commission prévoit déjà que les procédures sont mises en œuvre sous l’autorité du Premier ministre.
Mme la présidente. L'amendement n° 144 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 145 rectifié, présenté par MM. Sueur, Delebarre, Boutant, Reiner et Gorce, Mmes S. Robert et Jourda, MM. Bigot, Raynal, Duran, Desplan et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 69
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 822-4. – Les procès-verbaux de la destruction des données collectées, transcriptions ou extractions mentionnées à l’article L. 822-3 sont tenus à la disposition de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. L’amendement se justifie par son texte même, qui est très limpide. Il nous paraîtrait singulier qu’il en aille autrement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Je tiens à le rappeler, tous les membres de la commission des lois ont été associés à l’élaboration du texte dont nous débattons aujourd’hui.
L’alinéa 69 adopté par la commission comprend, en réalité, beaucoup plus de garanties que l’alinéa présenté dans l’amendement n° 145 rectifié. Disparaissent, en effet, un certain nombre d’éléments utiles du texte de la commission, comme la référence aux agents habilités à procéder aux opérations de transcription et d’extraction.
Comme cet alinéa ne comporte pas exclusivement des dispositions sur les procès-verbaux et l’accès qu’en a la CNCTR, la commission souhaiterait le retrait de cet amendement ; à défaut, elle y serait défavorable.
M. Jean-Pierre Sueur. Il y a lieu de le retirer, en effet !
Mme la présidente. L'amendement n° 145 rectifié est retiré.
Je suis saisie de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 95, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 79
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 1° Un député et un sénateur désignés conjointement par le Président de l’Assemblée nationale et le Président du Sénat, dont au moins un appartient à un groupe ne soutenant pas le Gouvernement, après chaque législature de l’Assemblée ou renouvellement partiel du Sénat ;
II. - En conséquence, alinéa 78
Remplacer le mot :
neuf
par le mot :
sept
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. Cet amendement vise à limiter la place des parlementaires qui composent actuellement près de la moitié de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement.
En effet, nous considérons, à l’inverse de nos collègues socialistes, que le nombre de quatre parlementaires, sur neuf membres de la commission, est trop important pour permettre un contrôle actif et permanent de la CNCTR. Nous proposons donc de limiter leur nombre à deux.
De surcroît, il est nécessaire que, parmi la représentation parlementaire, il y ait un membre d’un groupe ne soutenant pas le Gouvernement, afin d’assurer une représentation pluraliste. Il est donc proposé que le député et le sénateur soient désignés conjointement par les présidents des deux assemblées.
Mme la présidente. L'amendement n° 146 rectifié, présenté par MM. Sueur, Delebarre, Boutant, Reiner et Gorce, Mmes S. Robert et Jourda, MM. Bigot, Raynal, Duran, Desplan et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 79
Remplacer les mots :
Deux députés et deux sénateurs
par les mots :
Trois députés et trois sénateurs
II. – Alinéas 80 et 81
Remplacer le mot :
deux
par le mot :
trois
III. – En conséquence, alinéa 78
Remplacer le mot :
neuf
par le mot :
treize
IV. – Alinéa 85
Remplacer les mots :
moitié tous les trois ans
par les mots :
tiers tous les deux ans
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Cet amendement vise à revenir au texte adopté par l'Assemblée nationale.
Mme la présidente. Les amendements nos 115 rectifié, 86 rectifié et 81 rectifié ne sont pas soutenus.
L'amendement n° 96, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 82
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« 5° Une personnalité qualifiée pour sa connaissance en matière de respect des droits et libertés, nommée sur proposition du Défenseur des droits.
« Le représentant mentionné au 5° exerce son activité à titre bénévole.
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. L’amendement n° 96 ainsi que l’amendement suivant, n° 97, visent à élargir et à diversifier la composition du collège de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, en y incluant, d’une part, une personne nommée par le défenseur du droit et, d’autre part, une personne nommée par la Commission nationale de l’informatique et des libertés.
Par leur expertise et leur indépendance, ces deux personnes nous semblent à même de renforcer l’effectivité du contrôle de la CNCTR.
Mme la présidente. L'amendement n° 97, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 82
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« 5° Une personnalité qualifiée pour sa connaissance en matière des traitements automatisés et de protection des données personnelles, nommée sur proposition de la Commission nationale de l’informatique et des libertés.
« Le représentant mentionné au 5° exerce son activité à titre bénévole.
Cet amendement vient d’être défendu par son auteur.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Ces amendements sont contraires au texte de la commission, qui préfère le sien à celui de l’Assemblée nationale, ce qui ne surprendra aucun de nos collègues participant au débat ! La commission est donc défavorable à l’ensemble des amendements.
L’amendement de Mme Benbassa tend à réduire à un seul représentant par assemblée le nombre de parlementaires, ce qui est préjudiciable au pluralisme. Par ailleurs, il prévoit que ces parlementaires seront désignés par les présidents des deux assemblées. Nous préférons qu’ils le soient par les assemblées elles-mêmes après une procédure plus démocratique.
Les amendements nos 96 et 97 tendent à ajouter au collège des personnalités qualifiées. Cette proposition me semble être de nature à déplacer le centre de gravité que le texte avait donné à la CNCTR en définissant ses missions. La Commission dispose de services techniques, dont elle a besoin, mais elle n’est pas composée de techniciens.
Elle est composée, puisqu’il s’agit de questions de droit, de parlementaires, de conseillers à la Cour de cassation et de conseillers d’État. En effet, son objectif est de chercher des solutions légales permettant de concilier au mieux, d’une part, les nécessités de l’action publique portant sur des motifs d’intérêt national avec, d’autre part, les exigences de respect de la vie privée et des libertés. En déplaçant le centre de gravité de cette commission du côté des techniciens, on risque de l’empêcher d’accomplir ses missions. C’est pourquoi nous émettons un avis défavorable.
Quant à l’amendement n° 146 rectifié, qui vise purement et simplement à reprendre le texte de l’Assemblée nationale – qui était d’ailleurs contraire à celui du Gouvernement –, il conduit à créer une commission aux effectifs beaucoup trop importants. Or non seulement cela nuirait à la qualité de son travail, mais surtout cela poserait un problème de recrutement. Ne croyez surtout pas que les membres de la Cour de cassation et du Conseil d’État vont se précipiter pour siéger dans une commission dont les missions, pour intéressantes qu’elles soient puisqu’elles contribuent à la qualité de l’action publique et à la protection des libertés, ne sont pas de même nature que celles de ces juridictions, qui mobilisent souvent l’engagement et parfois la passion des magistrats.
Par conséquent, il sera très difficile de trouver davantage de magistrats pour siéger dans cette commission. D’ailleurs, il sera compliqué aussi de recruter plus de parlementaires, dans la mesure où ceux-ci ont déjà – nous le voyons jour après jour, y compris aujourd'hui – un emploi du temps extrêmement chargé, qui les empêche de siéger trop souvent dans ce type d’instances extérieures.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Le Gouvernement partage l’avis de la commission, sauf pour l’amendement n° 146 rectifié au sujet duquel il émet un avis de sagesse.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 146 rectifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable et que le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 197 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 325 |
Pour l’adoption | 126 |
Contre | 199 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 96.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 98, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 82
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La composition de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement respecte une représentation équilibrée de chaque sexe. L’écart entre chaque sexe ne peut être supérieur à un. Un décret fixe les conditions dans lesquelles est appliquée cette parité. »
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. Cet amendement vise à rétablir une disposition relative à la parité figurant dans le texte de l’Assemblée nationale et supprimée par la commission des lois du Sénat. Le groupe écologiste est très attaché à la défense de la parité, quelle que soit l’institution dont il est question. Aussi, il nous semble important que soit inscrit dans la loi le principe de représentation équilibrée de chaque sexe au sein de la CNCTR. Il est dur d’accepter les femmes !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Je voudrais que nul ne doute de l’attachement de la commission des lois à la mixité…
Mme Éliane Assassi. À la parité ! Ce n’est pas pareil !
M. Philippe Bas, rapporteur. … qui constitue pour nous un objectif extrêmement important. Mais nous avons remarqué, malheureusement, que les institutions qui seront amenées à désigner les membres de la CNCTR, à commencer par le Parlement, ne sont pas encore, et c’est bien sûr regrettable, paritaires.
Vouloir que des institutions non paritaires désignent paritairement les membres d’autres institutions est très difficile.
Par ailleurs se pose une autre difficulté puisque quatre institutions – la Cour de cassation et le Conseil d'État pour les magistrats ; l’Assemblée nationale et le Sénat pour les parlementaires – désigneront les membres de la commission. Comment se fera le calcul ? Nous nous trouverons, me semble-t-il, devant une équation impossible.
M. Philippe Bas, rapporteur. Je le déplore, mais la commission, en raison de ces deux obstacles assez lourds…
M. Philippe Bas, rapporteur. … et même dirimants, a cru de son devoir de formuler un avis défavorable sur l’amendement n° 98.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bernard Cazeneuve, ministre. En dépit de toute la considération que j’ai pour M. Bas, son argumentation est celle d’un conservateur manchois, ce qui est logique puisqu’il est président du conseil départemental de la Manche. (Sourires.)
Je m’explique : le raisonnement de M. Bas consiste à constater que, par conservatisme, par absence de modernité, les institutions parlementaires ne sont pas paritaires, et à inférer de cet état de fait qu’elles sont incapables de créer les conditions de désignation paritaire dans des organismes qui dépendent d’elles. C’est la double peine ! Cela signifie que des instances qui ne sont pas paritaires…
Mme Éliane Assassi. Et qui ne le seront jamais !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. … seraient incapables de désigner des femmes dans d’autres organismes pour que la parité y soit possible. Mais on peut très bien, dans une institution non paritaire comme le Sénat, corriger cette situation…
Mme Nathalie Goulet. Pour la rattraper !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. … en faisant en sorte que, dans les organismes qui en dépendent, la parité soit réalisée !
Pour ma part, je fais le choix du raisonnement inverse. Voilà pourquoi je suis très favorable à l’amendement n° 98 de Mme Benbassa.
M. Philippe Bas, rapporteur. Quelle démagogie !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Je le suis d’ailleurs d’autant plus que c’est la première fois que je peux l’être. (Sourires.)
M. Philippe Bas, rapporteur. Sans doute la dernière aussi !
Mme Esther Benbassa. On demande l’égalité, pas la charité !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Ce n’est pas le sens de mon propos, madame la sénatrice. J’aimerais plus souvent être en accord avec vous. Je ne cache donc pas ma joie ici.
Mme la présidente. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour explication de vote.
Mme Esther Benbassa. Merci, monsieur le ministre, de vos propos. Vous ouvrez le débat.
Monsieur Bas, ça fait des années que j’entends de tels arguments. Je suis professeur à l’université, où nous sommes 10 % de femmes à ce rang. On nous a toujours dit qu’il était très difficile d’en recruter plus à cause des périodes de grossesse qui nous empêchaient d’enseigner !
Regardez l’hémicycle, c’est triste qu’il y ait si peu de femmes ! Nous sommes 25 % et nous nous sommes battues pour cela ! Les arguments que vous nous opposez sont fallacieux ! Depuis des siècles, on soulève sans cesse les difficultés que pose l’acceptation des femmes ! Il est temps que l’on s’ouvre à cette idée. Le Sénat se porterait mieux avec plus de femmes !
M. Jean-Jacques Hyest. C’est vrai !
Mme Éliane Assassi. Il faut la proportionnelle pour cela !
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Plus sénateur que sénatrice, je dirai néanmoins quelques mots par solidarité avec Mme Benbassa.
En l’espèce, je soutiens absolument le ministre dans ce débat entre Bas-Normands. (Sourires.) Ce n’est pas parce qu’une institution n’est pas paritaire qu’elle ne peut pas tendre à ce que d’autres le soient ! En outre, il ne s’agit pas de « mixité », mais de « parité » ! Par solidarité, je soutiendrai l’amendement n° 98.
Mme la présidente. La parole est à Mme Michèle André, pour explication de vote.
Mme Michèle André. Il y a quelques années, lorsque nous avons créé le Haut Conseil des finances publiques, nous avons eu un débat de cette nature. Le ministre qui représentait alors le Gouvernement dans l’hémicycle n’était pas opposé à l’idée d’une parité, même s’il ne voyait pas très bien comment procéder concrètement. Nous sommes aujourd'hui dans une situation similaire.
En tout état de cause, sachez que Didier Migaud, président du Haut Conseil des finances publiques, dont la composition est aujourd'hui paritaire, m’a dit il y a quelques jours combien il appréciait cet équilibre.
De la même manière, il a fallu nommer un nombre égal d’hommes et de femmes à la Banque publique d’investissement, la BPI.
Nous nous sommes démenés pour trouver les hommes et les femmes qui pourraient siéger, en nombre égal, dans ces deux instances, tout en respectant des équilibres politiques et un certain nombre d’autres exigences. C’est un peu compliqué, mais nous avons prouvé que c’était possible, et on en voit aujourd'hui les bienfaits !
Dès lors, je voterai cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour explication de vote.
M. Gaëtan Gorce. Mme Benbassa, dont je soutiens l’amendement, s’est laissé emporter à critiquer la charité, qui est un beau sentiment. Nous le savons bien à La Charité-sur-Loire, qui est une belle ville dont j’ai longtemps été le maire ! (Sourires.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Colette Mélot, pour explication de vote.
Mme Colette Mélot. Cet amendement participe à l’évolution de la condition des femmes. Même si je ne suis pas une féministe exacerbée, je pense que les femmes doivent pouvoir faire entendre leurs voix. Pourquoi une assemblée, même non paritaire, ne désignerait-elle pas des femmes pour siéger dans une instance ? Je ne saurais donc me dissocier de la position de mes collègues et je voterai l’amendement de Mme Benbassa.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 98.
(L'amendement est adopté.) – (Mme Esther Benbassa applaudit.)
Mme la présidente. L'amendement n° 113 rectifié bis n'est pas soutenu.
L'amendement n° 147 rectifié, présenté par MM. Sueur, Delebarre, Boutant, Reiner et Gorce, Mmes S. Robert et Jourda, MM. Bigot, Raynal, Duran, Desplan et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 98, deuxième phrase
Remplacer le mot :
quatre
par le mot :
six
Cet amendement n'a plus d’objet.
L'amendement n° 148 rectifié, présenté par MM. Sueur, Delebarre, Boutant, Reiner et Gorce, Mmes S. Robert et Jourda, MM. Bigot, Raynal, Duran, Desplan et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 105
Remplacer les mots :
doivent être
par le mot :
sont
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Il est retiré, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 148 rectifié est retiré.
L'amendement n° 57, présenté par Mmes Cukierman, Demessine et Assassi, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 110
Supprimer les mots :
sur le territoire national
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Il est également retiré, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 57 est retiré.
L'amendement n° 12 rectifié ter n’est pas soutenu.
L'amendement n° 179, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 114
Après le mot :
formulée
supprimer la fin de cet alinéa.
La parole est à Mme la garde des sceaux.
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Cet amendement a pour objet d’améliorer la rédaction des dispositions relatives au délit d’entrave à l’action de la CNCTR, en supprimant la pénalisation de l’absence de fourniture du contenu des transcriptions ou extractions sous une forme directement accessible.
Il vise notamment les situations dans lesquelles les contenus ne sont pas directement lisibles – par exemple, en cas de données chiffrées, de données dont la traduction s’avère complexe ou de données dégradées, difficilement lisibles ou audibles.
Dans la mesure où la CNCTR dispose d’un accès permanent aux renseignements recueillis, il est possible qu’elle sollicite cet accès à un moment où ces renseignements ne sont pas encore déchiffrés, mis au clair ou exploités. Dans cette situation, il serait excessif d’engager mécaniquement la responsabilité pénale des agents pour l’absence de fourniture d’un contenu qui n’a pas encore pu être rendu lisible ou exploitable pour leurs propres besoins.
La rédaction qui résulterait de l’adoption de cet amendement serait davantage conforme aux standards de rédaction de la définition du délit d’entrave, tel qu’on peut la retrouver, par exemple, à l’article 12 de la loi du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. L’adoption de cet amendement aurait une conséquence très grave. Si les données transmises à la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement ne le sont pas sous une forme directement accessible, autant dire qu’il ne sert à rien de les transmettre !
M. Jean-Jacques Hyest. Bien sûr !
M. Philippe Bas, rapporteur. Le délit d’entrave à l’exercice des pouvoirs de la CNCTR, que le Sénat a pris l’initiative de poser, serait vidé de sa substance s’il était permis aux services de fournir des données dont la forme n’est pas exploitable. J’estime d’ailleurs que la transmission de telles données serait assimilable à une mesure dilatoire de la part d’un agent ou d’un service.
C’est pourquoi la commission, avec beaucoup de fermeté et à l’unanimité, a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° 211, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 118
Après le mot :
permanent
insérer le mot :
, complet
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Bas, rapporteur. Nous nous sommes engagés à déposer cet amendement tout à l'heure, en vue de sortir d’une discussion difficile sur un autre amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?