M. Emmanuel Macron, ministre. Cet amendement vise à préciser et à compléter l’initiative prise par la commission spéciale, et va dans le sens des dispositions présentées à l’instant par M. Bruno Retailleau. C’est pourquoi, d’ailleurs, je demanderai à ce dernier de bien vouloir retirer son amendement n° 838 rectifié au bénéfice de celui du Gouvernement, qui présente une solution plus complète, s’inscrivant dans la lignée des annonces faites par le Premier ministre le 13 mars dernier.
Je souscris pleinement aux propos qui viennent d’être tenus. D’ailleurs, on peut percevoir, depuis que nous évoquons ces sujets, un net consensus sur toutes les travées quant à cette question. Celle-ci fait partie de ces thématiques qui sont essentielles à la fois pour la reconquête économique, mais aussi pour la reconquête démocratique. Nous parlons d’une absence d’accès à la connaissance et à la capacité économique ! Et, indépendamment des statistiques officielles, que je rappelais l’autre jour et qui, on le voit bien, sont en décalage avec la réalité, cette privation est aujourd’hui devenue un élément de révolte.
Cet amendement vise donc à mettre en vigueur un plan d’action global, car, effectivement, nous avons trop attendu collectivement. Dans la lignée de nos discussions d’hier, et compte tenu de la pression accrue sur les opérateurs, il m’apparaît que des mesures concrètes s’imposent.
Nous devons mettre en œuvre un plan combiné, et non séquentiel, sur la 2G et la 3G. Vous avez raison, monsieur Retailleau, la 2G à elle seule ne suffirait pas, et nous ne pourrions considérer avoir traité le problème en nous contentant de mesures concernant la 2G.
Il n’en demeure pas moins que certaines zones ne sont couvertes ni en 2G ni en 3G. Nous procéderons donc à l’achèvement du programme de résorption des zones blanches de téléphonie mobile 2G, en actualisant la liste des communes à couvrir. La liste complète de ces communes sera rapidement arrêtée, en liaison avec le Commissariat général à l’égalité des territoires, les associations d’élus, l’ARCEP et les opérateurs. Notre but sera de permettre une couverture de l’ensemble des communes par tous les opérateurs d’ici à la fin de 2016.
Le programme « zones blanches » sera étendu à la 3G, avec un calendrier de réalisation. Il est proposé que les 2 900 sites restant à couvrir en 3G soient réalisés d’ici à la mi-2017.
Quel est le sens d’inscrire tout cela dans la loi en faisant par ailleurs référence à l’ARCEP ? L’idée est de définir à la fois la liste des communes, les objectifs dans le temps et de donner la possibilité à l’ARCEP de faire respecter le programme en usant de ses pouvoirs de sanction. Jusqu’à présent, tel n’était pas le cas. Nous ne nous étions jamais collectivement engagés. C’est la même philosophie qui sous-tend votre amendement, monsieur Retailleau : dorénavant, les opérateurs qui ne respecteront pas les engagements fixés par la loi pourront être sanctionnés par l’ARCEP. Une gradation des sanctions est prévue, passant par des amendes, mais pouvant aller jusqu’à des sanctions pénales ou des retraits de capacité à exploiter le réseau.
Deuxièmement, il est prévu de mettre en place un guichet permettant le financement de compléments locaux de couverture mobile, à la demande des collectivités. Notre idée est d’instaurer un guichet unique, et non plus une liste limitative, capable de traiter au fil de l’eau les demandes des collectivités territoriales. Ce guichet sera créé au sein de la Direction générale des entreprises, en lien avec le Commissariat général à l’égalité des territoires, en association avec l’Assemblée des départements de France, l’ADF, l’Association des régions de France, l’ARF, l’ARCEP et les représentants des opérateurs.
Cette entité – vous avez été plusieurs à le souligner hier, en particulier M. Retailleau – répond à l’idée selon laquelle l’État doit se donner plus de moyens. Vous avez raison. C’est l’objectif assigné à cette agence du numérique qui, en son sein, regroupera la mission « très haut débit ». Cette mission a permis d’organiser les choses, mais il convient de lui accorder davantage de moyens. Des fonctionnaires doivent notamment être à la disposition des collectivités territoriales. Il est important que ce guichet unique – ce sera inscrit dans la loi – vienne soutenir cette initiative. Il faut à la fois surveiller les actions qui sont conduites, mais également prévoir un appui intellectuel opérationnel. À cette fin, les collectivités bénéficieront d’un cofinancement par l’État des équipements installés auxquels l’ensemble des opérateurs auront l’obligation de se raccorder.
Troisièmement, je souhaite insister sur les mesures en vue d’accélérer la résorption des zones grises de la téléphonie et d’améliorer la couverture à l’intérieur des logements. Un accord à cet égard sera conclu rapidement avec les opérateurs mobiles pour la mise à disposition des solutions adaptées, qu’il s’agisse des femtocellules, des picocellules, etc. Je ne reviendrai pas sur ce débat que vous avez certainement dû avoir. Ces solutions sont à faibles coûts et interopérables, ce qui permettra de mieux satisfaire les besoins.
Ici, l’objectif du Gouvernement est de traduire les obligations en matière de couverture mobile des zones rurales, en proposant en parallèle que le service universel de télécommunication soit modernisé.
Quatrièmement, le corrélat de ces avancées et de cette mise sous contrainte est la suppression de la composante publiphonie du service universel. Aujourd'hui, les opérateurs se réfugient derrière l’existence des fameuses cabines téléphoniques, lesquelles ont été sous-investies. Si nous voulons les maintenir, il faudra réinvestir et trouver de l’argent. Nous sommes donc en quelque sorte dans un équilibre sous-optimal. Nous demandons aux opérateurs d’accroître leurs investissements et d’être plus exigeants en termes de couverture. Dans le même temps, nous proposons de sortir la publiphonie du service universel, mais de manière strictement parallèle : tant que les obligations en matière de couverture en 2G et 3G ne seront pas remplies, nous n’accepterons pas de recul en ce qui concerne la publiphonie.
Somme toute, à l’heure actuelle, l’accès au service universel n’est plus la cabine téléphonique, mais la couverture 3G. À partir du moment où les opérateurs se conformeront dans un endroit donné à leurs obligations en matière de couverture 3G, la notion de service universel sera remplie et nous pourrons nous désengager sur la publiphonie. Cette évolution répond aux préconisations de MM. Camani et Verdier dans leur rapport parlementaire sur l’évolution du service universel des communications électroniques : ils avaient bien constaté l’obsolescence de la publiphonie comme composante principale du service universel. C’est pourtant le régime sous lequel nous vivons…
La désaffection de l’utilisation des publiphones aujourd'hui est très rapide. Je citerai un chiffre, afin que nous l’ayons tous en tête : le trafic des cabines représentera, à la fin de l’année 2015, moins de 1 % de ce qu’il représentait en 2000. Notre exigence est donc non pas de réinvestir dans des cabines, dont l’obsolescence technologique nécessiterait de mettre sur la table plusieurs dizaines de millions d’euros, mais d’achever la couverture 2G et 3G. D’autres pays sont allés largement en ce sens, qu’il s’agisse de l’Allemagne, du Danemark ou du Luxembourg. Nous pourrons revenir sur ce point dans la suite du débat, si vous le souhaitez.
L’amendement du Gouvernement a pour objet de garantir à court terme la couverture mobile de l’ensemble des centres-bourgs des communes françaises. C’est la réponse légitime, me semble-t-il, à la préoccupation que vous avez exprimée hier comme aujourd'hui, et dont nous nous soucions. Nous sommes pleinement d’accord avec vous, raison pour laquelle nous proposons d’inscrire pour la première fois dans la loi des engagements fermes.
M. le président. L'amendement n° 1400, présenté par Mme Assassi, M. Bosino et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
… - L’article L. 1615-2 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les collectivités territoriales et leurs groupements bénéficient également des attributions du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée au titre des dépenses d’investissement réalisées en vertu des dispositions de l’article de la loi n° … pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques. »
… - L’augmentation du prélèvement sur recettes découlant, pour l’État, de l’application du paragraphe ci-dessus, est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement tend à rendre éligibles les dépenses des collectivités pour l’équipement numérique de leur territoire au Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée, le FCTVA.
Sans rouvrir le débat sur les zones blanches et grises, je souligne que les collectivités délaissées préfèrent effectuer elles-mêmes les investissements nécessaires pour attirer les opérateurs, dans un objectif évident d’améliorer la vie de leurs concitoyens sur leur territoire. La question de la légitimité de ces investissements n’en demeure pas moins posée.
Nous l’avons encore rappelé hier soir, nous sommes favorables à un dispositif contraignant pour les opérateurs privés, les obligeant – il s’agit en effet d’un service d’intérêt général – à desservir toutes les zones quand bien même certaines d’entre elles ne constituent pas une source de bénéfices suffisante.
Cependant, a minima, nous pensons que les collectivités investissant pour supprimer les zones blanches et grises dans ce secteur doivent bénéficier du FCTVA.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. L’amendement n° 838 rectifié a un objectif similaire à celui de l’article 33 septies D adopté par la commission spéciale dans le cadre de ses travaux, même si sa formulation est un peu différente et moins détaillée. Voilà pourquoi la commission s’en était remis à la sagesse du Sénat sur cet amendement.
Il se trouve qu’entre-temps le Gouvernement a déposé l’amendement n° 1761 rectifié qui devrait donner satisfaction aux auteurs de l’amendement n° 838 rectifié. Le Gouvernement répond aux attentes formulées par la commission, d’abord en intégrant dans le texte l’article 33 septies D actuel, qui est à l’initiative de Jacques Mézard, puis en émettant un avis de sagesse sur l’amendement de Bruno Retailleau qui vise à prévoir un système alternatif de couverture des zones blanches.
Cet amendement du Gouvernement nous paraît aller dans le bon sens. Pour autant, compte tenu de son dépôt tardif, de sa longueur et de sa complexité, il soulève un certain nombre de questions. Il ne nous a matériellement pas été possible d’en mesurer l’impact réel, même si M. le ministre, à l’instant, vient de compléter son argumentaire et d’apporter un certain nombre de réponses.
Néanmoins, nous sommes en droit de nous interroger sur la faisabilité du dispositif qui prévoit la fin du programme de couverture des zones blanches en 2G d’ici à la fin de l’année 2016, c'est-à-dire à très courte échéance. Selon les chiffres, 170 communes restent encore à couvrir. En raison des difficultés liées à l’implantation de nouvelles antennes, cela constitue un réel défi, vous nous l’accorderez.
Par ailleurs, des questions subsistent sur le coût pour les opérateurs qui auront à installer de nouvelles antennes. Monsieur le ministre, vous avez évoqué à l’instant la possibilité d’un cofinancement pour les collectivités. Cette solution demeure tout de même vague. Quelle sera la nature de ce cofinancement ? Pourriez-vous nous donner des informations supplémentaires sur ce point.
Vous avez également évoqué la création d’un guichet couverture unique ouvert aux collectivités souhaitant favoriser l’implantation de sites d’émission, mais sans préciser le périmètre de celui-ci. Quel sera-t-il ?
Enfin, en ce qui concerne la suppression de la composante publiphonie, vous avez cité des chiffres sur les cabines téléphoniques. La commission spéciale aurait souhaité disposer également d’une analyse d’impact de la mesure.
Pour toutes ces raisons, tout en estimant que l’amendement du Gouvernement constitue une avancée – elle a été permise, je le rappelle, à la fois par l’article 33 septies D introduit par la commission spéciale et par l’amendement n° 838 rectifié, défendu par M. Retailleau –, avancée que nous saluons les uns et les autres dans cet hémicycle, la commission spéciale s’en remet à la sagesse du Sénat sur l’amendement n° 1761 rectifié.
L’amendement n° 1400 prévoit, quant à lui, que les collectivités bénéficient du financement des collectivités par le Fonds de compensation pour la TVA au titre de leurs investissements en matière d’aménagement numérique. Sa rédaction nous semble très floue. Elle ne détermine pas quel type d’investissement précis ces financements sont censés soutenir : référence est faite au présent projet de loi sans spécifier un article en particulier. En outre, les collectivités sont déjà éligibles au Fonds national pour la société numérique, qui dispose de 1 670 millions d’euros consacrés au développement des réseaux à très haut débit. Elles peuvent également requérir auprès de lui des subventions pour le financement des réseaux d’initiative publique. La commission spéciale a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Emmanuel Macron, ministre. Le Gouvernement demande le retrait de l’amendement n° 838 rectifié. À défaut, il s’en remettra à la sagesse du Sénat. Certes, l’amendement du Gouvernement est plus détaillé que celui qu’a présenté M. Retailleau, mais nous poursuivons les mêmes fins.
Le Gouvernement est en revanche défavorable à l’amendement n° 1400 pour les raisons qui ont été évoquées par la commission spéciale. Si vous le voulez, nous pourrions de nouveau avoir ce débat sur les modalités de financement et le recours au FCTVA. J’en profiterai néanmoins pour répondre en creux à une question qui m’a été posée.
Votre amendement, monsieur Foucaud, vise à permettre aux collectivités territoriales de bénéficier du FCTVA pour les dépenses d’investissement en la matière. Lorsque les réseaux sont mis à la disposition de tiers non éligibles à la délégation de service public, la TVA ne peut être récupérée ni par la voie fiscale ni par le biais du FCTVA. Ce n’est donc pas, selon moi, la bonne façon de procéder si l’on veut envisager une éventuelle compensation.
En termes de financement, le Gouvernement a été clair dès le début. Le niveau de cofinancement sera significatif puisqu’une somme importante sera mobilisée sur le triennal. Nous mobiliserons surtout les opérateurs. C’est un critère important.
Le travail de la commission spéciale, tout comme l’amendement de M. Bruno Retailleau et celui du Gouvernement vont dans le même sens : il s’agit de veiller au respect dans le temps des obligations de couverture et de prévoir des sanctions à l’encontre des opérateurs s’ils ne mettent pas en œuvre les dispositions prévues par la loi. Sans cela, nous ferions peser sur eux des contraintes non encadrées en termes de déploiement, en particulier en ce qui concerne le mobile, ce qui pourrait donner lieu à des « manœuvres » dilatoires pouvant fragiliser le dispositif.
La commission spéciale m’a posé deux questions très précises. En ce qui concerne le guichet unique, le but est de pouvoir traiter plusieurs centaines de sites par an. Des discussions sont en cours avec les opérateurs. L’agence du numérique, qui consolidera l’ensemble des équipes compétentes, a précisément vocation à pouvoir traiter plusieurs centaines de sites par an ; nous y mettrons d’ailleurs les moyens. En ce qui concerne le déploiement des antennes, l’objectif dont il est question, à savoir la couverture de 170 sites identifiés, me semble totalement réalisable dans le délai imparti.
Il est beaucoup plus complexe, sur le plan technique et logistique, d’installer des antennes en milieu urbain qu’en milieu rural, qui est le secteur le plus concerné. L’objectif paraît donc réaliste. Il manquait uniquement une mise sous contrainte législative et la capacité pour l’ARCEP d’exercer des pouvoirs de sanction. Voilà pourquoi nous faisons aujourd'hui collectivement une avancée importante.
Madame la rapporteur, vous avez eu raison de mentionner le sénateur Jacques Mézard – j’ai moi-même tout à l’heure oublié de le faire lorsque j’ai fait référence à plusieurs travaux parlementaires –, qui est à l’origine de cette initiative. Il l’avait soutenue dans le cadre du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République. Son idée est ici reprise à la fois par les travaux de la commission et par l’amendement gouvernemental, preuve que toutes les sensibilités politiques se sont utilement mobilisées sur ce sujet.
M. le président. Monsieur Retailleau, l'amendement n° 838 rectifié est-il maintenu ?
M. Bruno Retailleau. Non, je vais le retirer. Il existe une convergence numérique, et l’amendement du Gouvernement complète utilement celui que nous avons déposé. Mais, au préalable, je voudrais faire une remarque et poser une question.
Il faut que nous puissions mobiliser les techniques qui nous permettent une bonne couverture. Cela revient au débat que nous avions hier soir sur la bande 700 mégahertz. On a des fréquences en or, dans la mesure où elles permettent de couvrir trois fois plus de distance vis-à-vis d’une seule antenne. Cela permet donc d’économiser des antennes et de tenir compte des personnes électrosensibles, au sens où Jean Desessard l’a évoqué tout à l’heure.
Il faut aussi recourir à l’ensemble des techniques de mutualisation, qu’il s’agisse de la mutualisation des sites passifs, mais aussi des fréquences. Il faut convaincre et sans doute parfois contraindre les opérateurs à utiliser tout l’éventail de ces techniques de mutualisation afin qu’il soit mis un terme à l’implantation des sites, parce que cela est compliqué et dure trop longtemps.
La question est la suivante, monsieur le ministre : par quelle voie – vous avez en effet bien compris que la corapporteur et nous-mêmes sommes assez hostiles au rapport – informerez-vous de l’avancée de ces travaux et de la couverture très exacte de l’ensemble du territoire ? Cela me paraît fondamental.
Je pense, enfin, qu’il faudra changer la méthodologie par laquelle on mesure justement les zones blanches. Le critère retenu par l’ARCEP, qui est un taux de réussite pour un appel de 95 % en statique, à l’extérieur des bâtiments, n’est pas bon ; aujourd'hui, on voit que les limites sont souvent atteintes.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Emmanuel Macron, ministre. Vous avez raison, monsieur Retailleau. D’abord, il y a le travail de l’ARCEP, et nous allons mettre cette dernière sous pression ; mais, au-delà, on perçoit bien la dimension politique sensible du sujet. Moi, je m’engage à venir devant les commissions compétentes, tous les trimestres, rendre compte de l’état d’avancée de cette mesure.
Mme Nicole Bricq. Très bien !
M. Charles Revet. Bravo !
M. Emmanuel Macron, ministre. Je tiens tous mes engagements, et celui-là ne dépend que de moi. Mais je pense que c’est la seule façon d’avancer.
M. Bruno Retailleau. Cela dépend de votre présence au Gouvernement…
M. Joël Guerriau. Nous avons confiance…
M. Vincent Capo-Canellas, président de la commission spéciale. Longue vie au ministre Macron… jusqu’à l’exécution du plan mobile ! (Sourires.)
M. Emmanuel Macron, ministre. En tout cas, je ferai le maximum. Nous avons là, en quelque sorte, une convergence d’intérêts. Tous les trimestres, je viendrai rendre compte devant les commissions compétentes de l’avancée de ces travaux. Je considère que c’est extrêmement important, que c’est l’un des points-clés sur le plan du développement économique du texte que nous discutons. Il nous faut regarder les choses ensemble, et la carte sera demandée à l’ARCEP, ce qui me permettra d’exercer une pression accrue sur le régulateur avec vous. Donc, tous les trois mois, je viendrai vous rendre compte et nous aurons ce débat. (Mme Nicole Bricq applaudit.)
M. le président. Compte tenu des éléments qui viennent de vous être apportés, confirmez-vous le retrait de votre amendement, monsieur Retailleau ?
M. Bruno Retailleau. Oui, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 838 rectifié est retiré.
La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote sur l'amendement n° 1761 rectifié.
M. Daniel Chasseing. L’amendement n° 838 rectifié qui vient d’être retiré allait dans le même sens que d’autres amendements qui ont été présentés hier, par M. Requier notamment.
Pour les zones rurales et très rurales, comme celle où je réside, l’objectif d’une couverture en téléphonie mobile est très important. Je suis donc tout à fait satisfait de la position de M. le ministre. J’espère que l’annonce qu’il a faite aujourd'hui pourra effectivement se traduire dans les faits parce que, actuellement, dans certaines zones, on en est très loin.
Je pense qu’il ne pourra pas y avoir de fibre optique partout, ou alors il faudra renforcer très significativement les aides aux territoires ruraux. Actuellement, pour que la fibre soit installée non dans les maisons ou dans les villages, mais simplement à des points intermédiaires de raccordement, il faudrait que la communauté de communes de 5 000 habitants dont je suis membre dispose de 300 000 euros, ce qui est absolument impossible.
Je suis sensible à l’annonce que vous avez faite, monsieur le ministre, d’obtenir la couverture universelle pour les services de radiocommunication mobile d’ici à 2016. À défaut, vous l’avez dit, la fracture numérique entraînera une désertification des zones rurales.
L’un de nos collègues nous a expliqué hier les avancées qu’il avait pu réaliser dans sa commune ; je l’en félicite. Mais en tout cas, dans nos cantons ruraux, dans ma commune de 7 000 hectares en particulier, ce sera absolument impossible. Donc, on aura – vous l’avez dit, monsieur le ministre – des citoyens de seconde zone qui n’auront pas accès à la connaissance.
Permettez-moi de vous raconter une anecdote. Dans les années quatre-vingt-dix, le journaliste Léon Zitrone, dont les plus âgés d’entre vous se souviennent sûrement très bien, était venu dans mon canton, alors que j’étais conseiller général. À sa sortie de la voiture – j’étais au garde-à-vous pour l’accueillir ! (Sourires.) –, il m’a demandé s’il y avait l’électricité dans ma commune. (Rires.) Je fus étonné de cette parole un peu méprisante ! Mais actuellement, si un journaliste me rendait visite, il pourrait effectivement ne pas avoir internet dans une très grande partie de ma commune !
Toutes les zones ne seront pas couvertes, d’après les avis techniques que nous avons eus. Elles pourront l’être par des paraboles. Nous avons déjà procédé à des essais en différents points de ma commune, avec des résultats acceptables. Peut-être la technique pourra-t-elle s’améliorer.
En tout cas, vous avez dit, monsieur le ministre, que vous auriez un guichet unique avec l’ARCEP.
Je souhaite également que l’État reprenne un peu le pouvoir dans les départements et que le préfet puisse aussi disposer d’un guichet unique pour suivre l’avancée et les manques en matière de couverture de radiocommunication mobile. J’allais commettre un lapsus en parlant de couverture « radiosensible » parce que, effectivement, dans notre secteur, beaucoup de gens qui ne sont pas radiosensibles voudraient bien disposer de cette couverture. Je souhaite donc que les préfectures soient impliquées dans ce guichet unique afin de suivre l’avancée de ce travail extrêmement important pour les zones rurales.
M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot, pour explication de vote.
M. Philippe Adnot. J’avais prévu de poser cet après-midi une question d’actualité au Gouvernement sur les problématiques que nous évoquons maintenant. Ensuite, je me suis dit, compte tenu du travail de la commission, de M. Retailleau, du Gouvernement, que ce ne serait pas nécessaire. Eh bien, si, cela va être nécessaire, car tout ce que vous avez dit, monsieur le ministre, ne me rassure en rien !
M. Philippe Adnot. Il a fallu ce long article de plusieurs pages pour écrire, en réalité, que vos cartes ne concerneront que les centres-bourgs. Or le problème qui nous est posé n’a pas trait qu’aux seuls centres-bourgs.
Si, demain, vous affirmez que vous allez résoudre le problème des zones blanches en n’ayant traité que les centres-bourgs, vous aurez la révolution dans les campagnes, car les gens n’en peuvent plus !
M. Charles Revet. Ça, c’est vrai !
M. Philippe Adnot. On parle d’internet, mais ils nous disent : « On n’a même pas la téléphonie mobile ! »
J’ai demandé à la totalité des communes de mon département d’établir une carte à partir des éléments – téléphones, abonnements – qui leur ont été transmis, et elles ont fait le recensement de tous les points non couverts. Je peux vous dire qu’il ne s’agit pas de 170 zones blanches ni de 3 600 zones grises !
La question qui va être posée, c’est la définition des zones concernées. Il faut trois pages pour dire ce qui tient en une ligne : seul le centre-bourg est concerné !
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. C’est parce qu’on a bien travaillé !
M. Philippe Adnot. D'ailleurs, et c’est très intéressant, on peut lire dans l’objet de votre amendement que sera ouvert un guichet « couverture mobile » pour que les collectivités territoriales puissent s’occuper des zones blanches hors centres-bourgs. Cela veut dire, encore une fois, que, en France, l’aménagement du territoire, hors périmètre urbain, reste à la charge des collectivités.
M. Pierre-Yves Collombat. Tout à fait !
M. Philippe Adnot. Cela ne va pas nous satisfaire ! Je vais donc interroger le Premier ministre cet après-midi. N’imaginez pas faire un effet formidable en disant : « je vais résoudre le problème des zones blanches et venir tous les trois mois devant le Parlement ». S’il s’agit simplement de rendre compte tous les trois mois de l’avancée des travaux relatifs à la carte des centres-bourgs, ce n’est même pas la peine de venir ! La question qui importe, c’est la totalité de la couverture ! Je vous le dis d’emblée : je ne suis satisfait par aucun des amendements qui sont présentés là ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Patrick Chaize, pour explication de vote.
M. Patrick Chaize. Monsieur le ministre, j’ai écouté avec attention vos explications et je voterai votre amendement n° 1761 rectifié.
Néanmoins, je voudrais vous faire part de plusieurs observations.
Vous avez pris l’engagement de venir devant les commissions afin de vous expliquer et de faire un état régulier de l’avancée de la couverture des zones. Étant membre de la Commission supérieure du service public des postes et communications électroniques, je suis étonné que cette commission n’ait pas été sollicitée pour avis sur votre amendement, qui – je tiens à le souligner – est important.
D’une façon générale, je voudrais aussi exprimer plusieurs réserves.
D’abord, il me paraît utile d’intégrer une notion de contrôle de l’économie générale, car il serait dommageable que l’économie faite par l’opérateur ne soit pas totalement réinvestie sur le réseau.
En outre, il faudrait s’assurer que les collectivités ne se voient pas imposer de fait des investissements dont elles n’auraient pas normalement la charge, et ne soient pas en quelque sorte prises en otage, s’agissant de ces opérations.
Par ailleurs, vous avez abordé le sujet de l’agence numérique. C’est une avancée intéressante. Je souhaiterais qu’on soit attentif à ce que cette agence numérique ne devienne pas une administration centrale, éloignée des élus et des dossiers concrets.
Enfin, monsieur le ministre, vous avez abordé le service universel. Il est peut-être temps aujourd'hui de s’interroger de manière que ce service universel soit possible sur la fibre optique, ce qui n’est pas le cas aujourd'hui.