Mme la présidente. Les amendements nos 415 et 651 rectifié bis ne sont pas soutenus.
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l’amendement n° 1061.
Mme Éliane Assassi. L’article 13 bis, dans sa nouvelle rédaction, crée un système de zones comprenant des zones d’implantation libres, déterminées par le ministre de la justice et qui correspondent à des secteurs dans lesquels le nombre d’offices paraissant insuffisant, l’implantation de nouveaux offices pourrait renforcer la proximité juridique.
Dans les autres zones, où l’implantation n’est donc pas libre, le projet de loi prévoit que le ministre de la justice peut refuser une demande de création d’office. Pourtant, s’il ne s’agit pas d’une zone où une éventuelle carence a été constatée, le garde des sceaux n’a aucune raison d’autoriser l’ouverture d’un nouvel office, ce qui déstabiliserait l’équilibre des offices existants.
Au-delà, autoriser une telle implantation dans des zones non prioritaires, alors que le ministère de la justice définit lui-même les zones présentant un besoin de création, paraît complètement illogique. Maintenir en l’état l’alinéa 11 de l’article 13 bis revient, en réalité, à conserver le principe de dérégulation, peut-être en le camouflant…
C’est pourquoi nous proposons que le ministre de la justice refuse systématiquement toute création d’office dans ces zones.
Nous souhaitons ainsi, au travers de cet amendement, maintenir l’idée de deux zones distinctes et d’une liberté d’installation contrôlée par le garde des sceaux uniquement dans les zones que celui-ci aura identifiées comme présentant une offre insuffisante en matière de professions juridiques.
Mme la présidente. Les quatre amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 119 rectifié est présenté par M. Grand et Mme Cayeux.
L'amendement n° 230 rectifié est présenté par MM. Mézard, Bertrand, Arnell, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Requier et Collombat.
L'amendement n° 650 rectifié bis est présenté par MM. Tandonnet et Médevielle, Mme Joissains, MM. Gabouty, Détraigne, Bonnecarrère, Canevet, Kern, Roche, Longeot et Guerriau, Mmes Férat, Gatel et Loisier, MM. Cigolotti, Bockel, Delahaye, Marseille, Pozzo di Borgo, Namy et les membres du groupe Union des démocrates et indépendants - UC.
L'amendement n° 1062 est présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 21
Remplacer les mots :
d’expérience
par les mots :
de diplôme
L’amendement n° 119 rectifié n’est pas soutenu.
La parole est à M. Guillaume Arnell, pour présenter l’amendement n° 230 rectifié.
M. Guillaume Arnell. Bien que cet amendement soit très proche d’un autre, je me fais fort de le présenter, car la nuance qu’il comporte me semble utile au débat.
Le projet de loi prévoit que le ministre de la justice pourra faire droit à la demande de création d’offices de notaire, d’huissier de justice ou de commissaire-priseur judiciaire qui lui est adressée lorsque le demandeur remplit, par ailleurs, les conditions de nationalité, d’aptitude, d’honorabilité, d’expérience et d’assurance requises.
Concrètement, cela signifie que ces nominations seront discrétionnaires, et rien ne garantit que les candidats détiennent les compétences nécessaires à l’exercice des missions de notaire, d’huissier de justice ou de commissaire-priseur judiciaire. Quid de la qualité du conseil qui sera dispensé aux clients ?
Aujourd’hui, sept années d’études après le baccalauréat sont nécessaires pour devenir notaire. Après avoir suivi des études juridiques jusqu’au master 1, donc à bac +4, les aspirants notaires doivent choisir entre deux types de formation, l’une universitaire, l’autre professionnelle. Dans les deux cas, ils doivent effectuer un stage rémunéré.
Pour devenir huissier, il faut obtenir un master 1 de droit ou un diplôme reconnu comme équivalent, puis réaliser un stage de deux années clôturé par le passage de l’examen.
Pour ce qui concerne les commissaires-priseurs judiciaires, deux diplômes sont requis pour s’inscrire à l’examen : l’un en droit et l’autre en histoire de l’art, en arts appliqués, en archéologie ou en arts plastiques. L’un de ces diplômes doit être au moins une licence, et l’autre de niveau bac +2 au minimum. Par ailleurs, quatre-vingt-dix euros sont demandés au titre de l’inscription à l’examen ; ce versement devrait être supprimé, afin de garantir un égal accès de tous à cet examen public.
Ces exigences scolaires sont loin d’être superflues, quand on connaît la complexité du droit et l’importance que le conseil juridique aura pour ceux qui le demandent.
S’il est nécessaire d’ouvrir ces professions, il est également salutaire de préserver leur niveau d’exigence en matière de compétences !
Mme la présidente. La parole est à M. Henri Tandonnet, pour présenter l’amendement n° 650 rectifié bis.
M. Henri Tandonnet. Monsieur le ministre, vous l’avez remarqué, un grand nombre d’amendements tendent à remplacer les mots « d’expérience » par les mots « de diplôme ». Il faut dire que les différentes professions concernées ont été fortement préoccupées par cette référence à l’expérience. Il s'agit en effet de professions réglementées, pour l’accès desquelles les diplômes sont essentiels.
Parmi les conditions requises, l’aptitude est mentionnée. Je suppose que ce terme recouvre la notion de diplôme. Mais il faudrait clairement le préciser, ce qui permettrait de rassurer les professionnels. Alors, les amendements que j’ai évoqués pourraient être retirés.
Mme la présidente. La parole est M. Jean-Pierre Bosino, pour présenter l’amendement n° 1062.
M. Jean-Pierre Bosino. Je souhaite rappeler que l’article 13 bis, tout en introduisant la déréglementation des implantations et de la création des offices dans certaines zones, pourrait remettre en cause l’exigence d’un diplôme pour l’accès aux professions de notaire et d’huissier, ainsi qu’à l’ensemble des professions juridiques réglementées, et déréglementer ainsi cet accès.
En effet, l’alinéa 21 de cet article fait référence aux personnes « remplissant les conditions de nationalité, d’aptitude, d’honorabilité, d’expérience et d’assurance requises » pour être nommées par le ministre de la justice dans les différentes professions précédemment évoquées.
Aucune condition de diplôme n’est clairement visée, Henri Tandonnet vient de l’indiquer, la notion d’aptitude étant bien trop floue. Les conditions d’aptitude et d’expérience ne paraissent pas à même de garantir la qualité professionnelle et la formation des personnes exerçant des professions chargées de missions de service public relevant de la justice. D’ailleurs, monsieur le ministre, dans l’une de vos interventions, vous avez bien utilisé le mot « diplôme ».
En revanche, le projet de loi entend imposer à toute personne sollicitant son installation en tant que notaire, commissaire-priseur judiciaire ou huissier de justifier d’une durée d’expérience, ce qui limite l’entrée des jeunes dans la profession.
Pour ce qui concerne les notaires, les dispositions actuelles régissant leur nomination exigent la possession d’un diplôme d’aptitude aux fonctions de notaire, ce qui assure la qualité des candidats et permet l’équité dans l’accès à la profession et la bonne réalisation du service rendu, dans une vocation d’intérêt général, à laquelle ces professionnels sont attachés.
La seule référence à l’expérience ne peut pas suffire pour l’exercice d’une délégation de puissance publique. Il faut qu’un diplôme garantisse l’acquisition d’un certain nombre de compétences contrôlées.
C’est pourquoi il est proposé de remplacer les termes « d’expérience » par les mots « de diplôme ».
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur l’ensemble des amendements restant en discussion ?
M. François Pillet, corapporteur. Sur l’amendement n° 199 rectifié, qui vise à supprimer l’avis de l’Autorité de la concurrence pour la définition des zones carencées dans lesquelles l’installation d’un office serait libre, la commission spéciale émet un avis défavorable. Compte tenu des débats qui se sont déroulés cet après-midi, je n’ajouterai pas d’autre commentaire.
La commission spéciale est également défavorable à l’amendement n° 1063.
Les amendements identiques nos 284 rectifié quater et 374 rectifié tendent à remplacer la condition d’expérience requise pour devenir notaire, huissier de justice ou commissaire-priseur judiciaire par une condition de diplôme. Or cette condition de diplôme – je le dis avec fermeté – est d’ores et déjà incluse dans celle d’aptitude. Le problème est donc réglé.
En outre, supprimer toute référence à la notion d’expérience pourrait conduire à autoriser la titularisation de diplômés qui n’auraient jamais accompli de stage professionnel. Or, actuellement, au cours de la préparation au diplôme supérieur de notariat, par exemple, les candidats doivent accomplir un stage de deux ans.
Pour dissiper toute crainte, j’ajoute que le droit en vigueur prévoit déjà la validation des acquis de l’expérience des clercs de notaire, des mandataires judiciaires ou des avocats.
Finalement, les amendements proposés sont en retrait par rapport au droit en vigueur. J’en suggère donc le retrait, pour éviter d’avoir à émettre un avis défavorable.
Les amendements identiques nos 229 rectifié, 283 rectifié quater, 372 rectifié et 1061 visent à obliger le ministre de la justice à refuser toute installation dans une zone autre que carencée. Je le répète, il existe trois zones. Une seule n’est pas carencée, et il convient d’y conserver une certaine souplesse.
Par ailleurs, ces amendements sont en retrait par rapport au droit en vigueur. À titre d’exemple, leur adoption aurait pour conséquence d’interdire au garde des sceaux la création d’un nouvel office dans une grande ville ou à Paris.
J’ajoute que, en tout état de cause, il paraît raisonnable de conserver au ministre de la justice une certaine liberté d’appréciation, d’autant que M. le ministre nous a indiqué tout à l’heure que celui-ci n’en avait pas abusé pendant la période antérieure au dépôt du projet de loi.
La commission spéciale est donc défavorable à ces amendements identiques.
Quant aux amendements nos 230 rectifié, 650 rectifié bis…
M. Henri Tandonnet. Je retire cet amendement, madame la présidente !
Mme la présidente. L’amendement n° 650 rectifié bis est retiré.
Veuillez poursuivre, monsieur le corapporteur.
M. François Pillet, corapporteur. La commission spéciale demande aux auteurs des amendements nos 230 rectifié et 1062, qui portent également sur la question du diplôme, de bien vouloir les retirer. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 284 rectifié quater et 374 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 229 rectifié, 283 rectifié quater, 372 rectifié et 1061.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 230 rectifié et 1062.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 592 rectifié n’est pas soutenu.
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 971, présenté par MM. Labbé, Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéas 12 à 17
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. La liberté d’installation accordée par le présent texte permettra au ministère de la justice de définir des zones prioritaires d’installation, dans lesquelles celle-ci sera libre. Le système serait suffisamment encadré pour éviter les dérives. Dans les zones déjà correctement dotées, le ministère de la justice pourra refuser les nouvelles installations.
Dans ces conditions, il n’y a pas lieu de créer un système d’indemnisation des offices préexistants, d’une part, parce que les garanties que je viens d’évoquer sont de nature suffisante pour éviter les dérives, d’autre part, parce que cela découragerait l’installation de nouveaux entrants, en raison du risque pesant sur leur activité au vu du montant de l’’indemnisation que l’on pourrait leur réclamer jusqu’à six ans après leur installation.
Il est également à noter que le maintien de ces dispositions signifierait un manque de confiance dans l’administration de la justice, puisque celle-ci pourrait être remise en question.
Nous en avons débattu ce matin, monsieur le ministre, l’idée, c’est qu’il faut indemniser, les études alentour pouvant constater, au bout de six ans, une perte de revenus. Mais elle est contraire non seulement à votre idée selon laquelle il convient de permettre l’installation de nouveaux notaires dans les endroits où celle-ci est nécessaire, mais également à votre idée selon laquelle il faut améliorer la qualité du service rendu. Il peut en effet arriver qu’un notaire ne réponde jamais au téléphone et traite les affaires avec beaucoup de retard. Je ne dis pas que c’est le cas pour l’ensemble de la profession. Toutefois, on ne peut pas affirmer que tous les notaires sont formidables !
Cela étant, si de nouvelles personnes s’installent, acquièrent une clientèle, parce que, justement, elles sont jeunes, serviables, compétentes, actives et disponibles, pourquoi devraient-elles indemniser les professionnels qui travaillent mal ? Il y a là un problème, d’autant que, vous nous l’avez dit ce matin, il faut payer les charges. Aujourd'hui, quand une étude se crée, le professionnel se fait sa clientèle.
Tout cela est un peu contradictoire avec votre esprit libéral, monsieur le ministre !
Mme la présidente. L’amendement n° 594 rectifié n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 971 ?
M. François Pillet, corapporteur. Monsieur Desessard, il convient de bien distinguer les professions libérales, qui ne sont pas toutes de même nature.
Lorsque vous permettez l’installation d’un nouveau notaire, vous créez un office, vous lui donnez droit à un monopole. Ce faisant, vous affectez le monopole de ceux qui sont déjà en place et vous les lésez. L’indemnisation est donc de droit. Si vous supprimez celle-ci, vous vous heurtez à un problème constitutionnel.
Un avocat, en revanche, qui a passé son examen, n’a plus qu’à acheter sa plaque et à l’apposer sur la façade de l’immeuble.
En l’espèce, la commission spéciale ne peut donc qu’émettre un avis défavorable sur cet amendement, car les dispositions qu’il prévoit sont anticonstitutionnelles.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Les amendements nos 594 rectifié et 339 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote sur l’article.
M. Jacques Bigot. Avec les membres de mon groupe, je reconnais que la commission spéciale n’a pas voulu empêcher complètement l’installation de nouveaux notaires pour répondre aux besoins.
Je regrette bien évidemment que, sur certains points, nous n’ayons pu trouver un accord. À titre personnel, pour ce qui concerne la carte, je suis plus sensible à ce qu’elle soit établie après avis de l’Autorité de la concurrence et non sur sa proposition. Au demeurant, nous aurions pu en discuter à un autre moment.
Mon groupe, qui reconnaît le travail effectué en la matière, s’abstiendra sur cet article. Il ne votera pas contre, ce qui ne changerait d’ailleurs pas grand-chose au résultat !
Personnellement, je rentrerai serein dans mon département, puisque, de toute façon, il est prévu à l’alinéa 24 de l’article 13 bis que celui-ci ne s’applique pas dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle. (Sourires.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, je vais maintenant lever la séance. En effet, dans la mesure où nous devons impérativement arrêter nos travaux à dix-neuf heures, nous n’aurions pas le temps d’examiner sereinement les dix-neuf amendements déposés sur l’article 14.
Nous avons examiné 88 amendements au cours de la journée ; il en reste 1152.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
3
Ordre du jour
Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au lundi 13 avril 2015 à seize heures, le soir et la nuit :
Suite du projet de loi, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution après engagement de la procédure accélérée, pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (n° 300, 2014-2015).
Rapport de Mmes Catherine Deroche, Dominique Estrosi Sassone et M. François Pillet, fait au nom de la commission spéciale (n° 370, tomes I, II et III, 2014-2015).
Texte de la commission (n° 371, 2014-2015).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-huit heures trente.)
Le Directeur du Compte rendu intégral
FRANÇOISE WIART