M. Claude Kern. Cet amendement a pour objet d’élargir le champ des missions de la Société du Grand Paris en matière d’infrastructures de réseaux numériques.
Aujourd’hui, les usagers des réseaux de transport publics demandent de plus en plus à pouvoir bénéficier d’une continuité d’accès aux services numériques depuis leurs terminaux mobiles. Dans les prochaines décennies, cela deviendra même un impératif. S’agissant du Grand Paris Express, très majoritairement souterrain, il sera nécessaire, dans cette perspective, de mettre en place des infrastructures numériques spécifiques, qui ont été prévues par la loi.
En effet, l’article 2 de la loi du 3 juin 2010 relative au Grand Paris dispose que « les infrastructures du réseau du Grand Paris intègrent des dispositifs destinés à permettre le déploiement d’un réseau de communication électronique à très haut débit ». La création de plusieurs réseaux, par exemple filaire et hertzien, apparaissant opportune, il convient de prévoir explicitement cette pluralité dans la loi. Par ailleurs, la conception et la réalisation de dispositifs techniques destinés à cet usage sont des activités annexes à la mission principale de la Société du Grand Paris : elle peut les conduire dans le cadre des textes actuels sans méconnaître le principe de spécialité propre aux établissements publics.
En outre, la location de ces réseaux aux opérateurs de communications électroniques pourrait procurer à la Société du Grand Paris des revenus complémentaires de l’ordre d’une vingtaine de millions d’euros par an.
Pour l’ensemble de ces raisons, il apparaît indispensable que la Société du Grand Paris intervienne en tant que maître d’ouvrage du projet numérique global et qu’elle ne se contente pas de consentir des droits de passage aux opérateurs, approche incompatible avec l’étroite coordination qui devra être assurée durant des décennies, dans les tunnels, entre les intervenants sur les infrastructures de transport et les intervenants sur les réseaux à très haut débit. Cela suppose donc de donner à la Société du Grand Paris les moyens juridiques d’exercer une maîtrise d’ouvrage élargie dans le domaine des réseaux et des services de communication électronique.
Il est pour cela nécessaire d’élargir le champ des missions de la Société du Grand Paris, en lui permettant d’exercer, par le biais d’une filiale créée à cet effet, l’activité d’opérateur de communications électroniques au sens du code des postes et des communications électroniques.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État, pour présenter l’amendement n° 1655.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Ces deux amendements identiques visent à étendre les compétences de l’établissement public « Société du Grand Paris » en matière de réseaux de communication électronique.
Le dispositif prévu est favorable au déploiement du numérique dans les infrastructures de transport du Grand Paris. Par ailleurs, la filiale chargée d’exercer des activités d’opérateur serait soumise aux règles de concurrence et aux obligations s’imposant aux opérateurs.
Dans ce contexte, la commission spéciale a émis un avis favorable sur ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Requier. L’objet de l’amendement précise qu’il s’agit « d’élargir le champ des missions de la Société du Grand Paris en matière d’infrastructures de réseau dans le numérique et l’énergie ». Pourquoi cette mention de l’énergie, alors qu’il n’en est pas question dans le projet de loi ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur.
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. L’amendement a été rectifié pour supprimer la mention de l’énergie. Vous devez disposer d’une version plus ancienne, mon cher collègue.
M. Jean-Claude Requier. À la campagne, on a toujours un peu de retard… (Sourires.)
Mme la présidente. Le texte de l’amendement a bien été rectifié, comme vient de l’indiquer Mme la corapporteur, mais la mention de l’énergie subsiste dans l’objet.
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Quelle est la finalité de la création d’une telle filiale ? Qu’apportera-t-elle de plus ? Je souhaiterais que le Gouvernement puisse nous éclairer sur ce point.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Emmanuel Macron, ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique. Je remercie mon collègue Thierry Mandon de m’avoir suppléé avec talent.
Comme l’a indiqué M. Kern, la loi du 3 juin 2010 relative au Grand Paris dispose en son article 2 que « les infrastructures du réseau du Grand Paris intègrent des dispositifs destinés à permettre le déploiement d’un réseau de communication électronique à très haut débit ». La création de plusieurs réseaux, par exemple filaire et hertzien, apparaissant opportune, il convient de prévoir explicitement cette pluralité dans la loi.
La conception et la réalisation de dispositifs techniques destinés à cet usage sont des activités annexes à la mission principale de la Société du Grand Paris : dans le cadre des textes actuels, elle peut les exercer, mais elle ne peut pas assurer la gestion des réseaux, une fois ces derniers mis en service.
Au-delà de la réalisation de ces infrastructures numériques, prévoir l’implication de la Société du Grand Paris dans la mise en œuvre des services associés et donc dans l’activation de ces réseaux numériques apparaît essentiel pour lui assurer une bonne maîtrise du projet numérique global qu’elle doit conduire.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1428 rectifié bis et 1655.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 3 quinquies.
Article 4
Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi afin de :
1° Modifier et codifier les règles applicables en matière de création, d’aménagement et d’exploitation des gares routières de voyageurs par les personnes publiques et privées, définir les principes applicables en matière d’accès à ces gares par les entreprises de transport public routier de personnes et modifier les règles applicables en matière de police dans ces gares pour garantir l’accès à celles-ci des usagers et des opérateurs, de façon à assurer leur participation effective au développement et au bon fonctionnement du transport routier de personnes ;
2° Confier à l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières la compétence de préciser les règles d’accès, d’en assurer le contrôle et de prononcer des sanctions ;
2° bis Définir les conditions dans lesquelles cette même autorité peut être saisie en cas de différend portant sur l’accès à ces gares ou sur leur utilisation ;
3° (Supprimé)
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie David, sur l'article.
Mme Annie David. Monsieur le ministre, nous sommes opposés à l’article 4 de votre projet de loi fleuve – si je puis dire, s’agissant ici de transport par autocar –, non par dogmatisme, esprit de contradiction ou volonté d’obstruction, comme voudrait le faire croire Mme Bricq, mais, une nouvelle fois, en raison d’arguments de fond, parce que nous défendons des valeurs auxquelles nous sommes attachés.
Tout d’abord, il s’agit de nouveau d’autoriser le Gouvernement à légiférer par ordonnance et d’écarter ainsi, encore une fois, les parlementaires de la prise des décisions sur des sujets importants. Cela ne nous semble pas sérieux ni respectueux du Parlement.
Ensuite, par son contenu, cet article s’inscrit dans la continuité de l’article 2 et de la libéralisation du transport par autocar que vous souhaitez mettre en œuvre.
En effet, l’article 4 traite des gares routières de voyageurs. Au regard de vos ambitions, il est certain que celles-ci vont devenir un élément essentiel et structurant de notre territoire. Pourtant, alors que l’échéance est très proche, leur avenir semble encore bien flou, ce qui ne laisse pas de nous inquiéter.
Selon le très récent rapport de la commission d’étude de l’impact du projet de loi, en l’état actuel du développement des gares routières en France, « il semble qu’elles ne soient pas toutes en mesure d’accueillir une activité sensiblement supérieure », en raison notamment d’un risque de « désorganisation ».
Je précise d’ailleurs que seule la moitié des préfectures départementales disposent d’une gare routière, selon la carte de la Fédération nationale des transports de voyageurs. De même, dans de nombreuses gares existantes, il n’y a ni quai, ni guichet, ni même, parfois, de toilettes. Bref, seul un service minimum est assuré, ce qui ne semble pas correspondre à l’ambition que vous affichez.
Cet état de choses nous semble constituer un très important point faible de votre projet, monsieur le ministre. Comment comptez-vous développer massivement les transports en car s’il existe trop peu de gares routières et si leur capacité à accueillir les voyageurs est insuffisante ? Des aménagements importants sont nécessaires pour assurer le report modal et l’accessibilité. Comment seront-ils réalisés et financés ? Comment le réseau sera-t-il harmonisé sur le territoire national, compte tenu des disparités existant en matière de gestion et de propriété ?
En somme, beaucoup de questions primordiales en termes d’aménagement du territoire et de cohérence globale de la réforme que vous souhaitez mettre en œuvre restent en suspens. De plus, vous préférez procéder par ordonnance, ce qui est pour nous inacceptable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur.
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Je voudrais exprimer moi aussi un certain nombre de préoccupations sur la question du développement des gares routières.
Tous les acteurs concernés reconnaissent que le cadre juridique qui leur est applicable, défini par une ordonnance de 1945, est obsolète et doit être réformé. Les gares routières sont en nombre insuffisant et, lorsqu’elles existent, les entreprises de transport ont grand-peine à identifier les collectivités responsables.
L’Autorité de la concurrence et la commission d’étude présidée par Mme Anne Perrot ont insisté sur l’importance de ce sujet pour la réussite de la libéralisation des transports par autocar. Si l’on ne fixe pas de cadre juridique satisfaisant suffisamment en amont, les gares routières risquent de se développer de façon désorganisée, sans recherche de complémentarité avec les autres modes de transport.
C’est la raison pour laquelle le présent article vise à habiliter le Gouvernement à procéder par ordonnance pour encadrer leur développement. Cependant, lorsque j’ai interrogé les services des ministères compétents pour savoir ce qui était concrètement envisagé, il est apparu que c’est le flou absolu !
Le Gouvernement admet ne pas encore savoir ce qu’il compte faire, par exemple en matière de gouvernance, tout en reconnaissant qu’il s’agit d’un enjeu majeur pour la réussite de la libéralisation des transports par autocar. Le recensement des gares qu’avait préconisé l’Autorité de la concurrence ne semble pas avoir encore été engagé.
Or, cette libéralisation entrera en vigueur dès la promulgation de la loi pour les transports sur une distance supérieure à 200 kilomètres et, pour les autres, six mois après la promulgation de la loi. Il faut donc agir vite. On peut même se demander si ces dates d’entrée en vigueur ne sont pas un peu prématurées.
C’est cette urgence qui a conduit la commission spéciale à maintenir l’habilitation à légiférer par ordonnance prévue à l’article 4, bien qu’elle soit très insatisfaisante. Le Parlement se trouve en effet invité à se dessaisir d’un sujet majeur, alors que le Gouvernement lui-même ne sait pas ce qu’il compte faire.
Mme Annie David. Oui !
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Toutefois, peut-être le Gouvernement a-t-il avancé dans sa réflexion ces dernières semaines et pourra-t-il nous dire en exclusivité quelles orientations il compte prendre dans ce domaine ? Je vous en remercie par avance, monsieur le ministre !
Mme la présidente. L'amendement n° 5, présenté par Mme Assassi, M. Bosino, Mme David et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Patrick Abate.
M. Patrick Abate. Tout a déjà été dit ! Précipitation, recours aux ordonnances, flou artistique guère rassurant, conviction dogmatique que la libéralisation permettra de relancer la croissance et de développer l’emploi : tout cela aboutit à des propositions dangereuses !
Ainsi, la libéralisation du transport par autocar, entreprise dans un cadre qui rend le développement de celui-ci très délicat, compliquera la situation du secteur ferroviaire. Par ailleurs, encore une fois, il y a de la privatisation dans l’air, l’idée sous-jacente étant que le maillage du territoire par des gares routières peut se faire sans véritable association des collectivités locales et de la puissance publique, comme si le recours au marché pouvait suffire à régler les difficultés.
Nous proposons de supprimer purement et simplement cet article.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Bien qu’étant moi-même très circonspecte à l’égard de l’article 4, je pense que le supprimer n’est pas la bonne solution. En effet, cela reviendrait à en rester au statu quo. Je pense au contraire qu’il faut vraiment se saisir du sujet des gares routières. J’espère que M. le ministre apportera des réponses aux questions que nous avons posées.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Emmanuel Macron, ministre. Le cadre de la régulation et de l’organisation des gares routières est certes insuffisant. Pour autant, il en existe déjà sur notre territoire, des autocars circulent, la SNCF possède même ses propres gares routières via une filiale.
Partant de ce constat, partagé par l’Autorité de la concurrence et France Stratégie, nous avons voulu promouvoir une meilleure organisation du réseau des gares routières, car c’est un élément décisif pour la montée en puissance du transport par autocar.
Précisément parce que le dispositif n’est pas prêt, nous proposons logiquement de procéder par ordonnances. Celles-ci devront bien entendu être ratifiées par le Parlement.
Nous avons commencé le travail. Si les auditions qui ont été menées ont pu donner le sentiment que ce n’était pas le cas, je le regrette. Un chargé de mission auprès du ministre a été désigné pour suivre ce dossier. Une vingtaine de réunions avec l’ensemble des professionnels du secteur ont été programmées par les différents ministères concernés, dont cinq se sont déjà tenues, entre la lecture du projet de loi à l’Assemblée nationale et celle qui nous rassemble aujourd'hui.
Le Gouvernement n’est donc pas à l’arrêt. Au contraire, nous avons engagé un travail d’organisation, afin de ne pas perdre de temps, car notre conviction profonde est qu’il existe des opportunités à saisir en termes de développement de la mobilité et de création d’emplois. Il s’agit bien d’établir un cadre régulé, et non de libéraliser à tout crin. Ce ne sera pas l’anarchie !
Les gares routières existantes seront développées, par des collectivités publiques ou par des opérateurs privés, dans un cadre que nous allons moderniser et bien définir. Le ministère des transports a commencé à se saisir du sujet. Lors de la deuxième lecture du texte à la Haute Assemblée, je pourrai vous en dire davantage, car j’ai bon espoir que dix ou quinze réunions supplémentaires se seront tenues d’ici là.
Pleine transparence sera faite sur ces ordonnances et leur préparation. Elles sont indispensables, et cohérentes avec vos préoccupations. En effet, l’article relatif à l’ouverture des services de transport non urbains par autocar ayant été adopté, il me semblerait quelque peu paradoxal que vous supprimiez l’article tendant à habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour définir le cadre de la régulation et de l’organisation de cette activité.
À la lumière des votes précédemment intervenus, il serait logique que cet amendement de suppression de l’article soit retiré.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Le Scouarnec, pour explication de vote.
M. Michel Le Scouarnec. Je voudrais en remettre une petite couche sur ce sujet important, après mes collègues Laurence Cohen et Patrick Abate.
De nombreux projets de gare routière existent dans les territoires. Je pense, en particulier, à la création de pôles multimodaux. Dans le Morbihan, un tel projet lancé voilà plus de cinq ans déjà n’a toujours pas abouti.
Le Gouvernement s’était engagé à revenir sur le sujet devant la représentation nationale l’an dernier, lors de la discussion de la réforme ferroviaire. La question des gares routières est d’autant plus épineuse que le développement de l’intermodalité implique l’engagement d’une réflexion globale et concertée entre de nombreux acteurs. Éluder un débat qui concerne directement des millions de nos concitoyens est à nos yeux très regrettable.
Enfin, il s’agit, au travers de cet article, de donner de nouvelles compétences à l’actuelle Autorité de régulation des activités ferroviaires, l’ARAF, appelée à devenir l’ARAFER, l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières. Le texte prévoit en effet que cette autorité indépendante aura la charge de « préciser les règles » s'appliquant aux gestionnaires des gares routières en matière d'accès aux gares, « d’en assurer le contrôle et de prononcer des sanctions ». Selon vos propres termes, monsieur le ministre, l’ARAF sera ainsi dotée de « pouvoirs extrêmement étendus ». Or, comment accepter que des prérogatives aussi fondamentales que la réglementation et le contrôle en matière d’accessibilité pour les personnes en situation de handicap n’incombent pas directement à l’État, mais relèvent d’une autorité indépendante ?
L’extension des compétences de l’ARAF recèle un danger. En effet, nous savons pertinemment que les transferts de compétences de l’État à des organismes indépendants peuvent ouvrir la voie à des privatisations futures. Or nous n’ignorons pas que la question de la privatisation des gares est loin d’être dénuée d’intérêt pour la Commission européenne…
Parce que nous nous opposons à l’extension des compétences de l’ARAF et parce que nous ne souhaitons pas que le recours à des ordonnances devienne la norme en matière législative, nous souhaitons la suppression de l’article 4.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Je ne voterai pas cet amendement de suppression. (Mme Laurence Cohen s’exclame.) Ne soyez pas déçue, madame Cohen, cela ne changera pas le vote du Sénat !
M. Patrick Abate. Sait-on jamais ?
M. Jean Desessard. Cela étant, monsieur le ministre, vous n’avez pas répondu aux questions soulevées par Mme la rapporteur.
M. Jean Desessard. Non, monsieur le ministre, ou alors nous n’avons pas la même conception de ce que doit être une réponse…
Cinq réunions ont été tenues, nous avez-vous dit, mais l’important est de savoir s’il en est sorti quelque chose, par exemple en termes de définition du maillage territorial des gares routières ou de perspectives de développement au regard de l’urbanisme. Quels services seront assurés dans les gares au bénéfice des usagers ? Envisage-t-on, notamment, de mettre en place un gardiennage de vélos ?
En 1989, je défendais, au nom d’une association d’usagers de transports, le tramway, qui était alors absent de nos villes, à une exception près. À cette époque, nos interlocuteurs affirmaient que la solution du transport en car était préférable, car plus souple en termes de définition des trajets. Nous répondions que le tramway contribue à structurer la ville.
Il s’agit ici un peu du même débat : les gares routières participent au développement et à l’embellissement de la ville. Il est donc important que nous puissions connaître vos projets les concernant, monsieur le ministre. Plus que la fréquence des réunions que vous organisez, c’est leur teneur qui nous importe ! (Sourires.)
Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Abate, pour explication de vote.
M. Patrick Abate. Monsieur le ministre, sur la forme, le raisonnement qui vous conduit à nous inviter à retirer notre amendement est certes sans faille, mais il est important d’avoir un débat de fond sur ce sujet.
Soyons clairs, notre démarche ne relève pas d’une posture de rejet systématique, dogmatique.
M. Vincent Capo-Canellas, président de la commission spéciale. C’est vrai !
M. Patrick Abate. Nous sommes pour le développement de toutes les mobilités, y compris la mobilité par autocar, mais nous craignons que cela n’aboutisse à porter atteinte à cette infrastructure fondamentale, en termes de maillage et d’égalité des territoires, qu’est le rail.
Le transport par autocar représente, selon nous, une mobilité de troisième classe, dont le développement ne va pas dans le sens du progrès, même s’il peut rendre des services. Ce qui nous pose vraiment problème, c’est le flou artistique qui entoure ce projet : il est nécessaire de conduire une réflexion d’ensemble, prenant en compte l’intérêt général et l’aménagement du territoire !
Tout cela nous paraît par trop précipité. Nous maintenons donc notre amendement de suppression, même si nous savons que, sur la forme, le ministre a plutôt raison…
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission spéciale.
M. Vincent Capo-Canellas, président de la commission spéciale. Vous le savez, monsieur le ministre, le Parlement n’apprécie guère le recours aux ordonnances. En quelque sorte, il en est des ordonnances comme des médecins : moins on en voit, mieux on se porte, mais il faut parfois en passer par là ! (Sourires.)
En tout état de cause, si l’on veut que le Parlement vote une habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance, il faut lui en donner un peu l’envie… À cet égard, monsieur le ministre, il serait bon, à mon avis, que vous nous indiquiez comment vous comptez l’associer aux groupes de travail que vous avez évoqués.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Emmanuel Macron, ministre. Les réunions avec les acteurs du secteur que j’ai évoquées visent à identifier les besoins, à recenser les gares existantes et à établir une cartographie. Je ne suis pas en mesure de dire a priori où se situent ces besoins. Tel est donc l’objet de ces réunions techniques.
L’élagage de l’article 4 par la commission spéciale rend moins transparentes les intentions du Gouvernement, madame la rapporteur. En effet, l’alinéa 2 du texte de cet article tel qu’issu des travaux de l’Assemblée nationale détaillait très précisément selon quelles perspectives le Gouvernement avait élaboré son projet. Les trois quarts des mesures dont vous proposerez tout à l’heure la mise en œuvre au travers d’un amendement y figuraient, monsieur Desessard !
M. Jean Desessard. Absolument !
M. Emmanuel Macron, ministre. Je proposerai simplement, dans le souci de prendre en compte les apports de la commission spéciale, de rétablir les schémas régionaux de l’intermodalité, car il s’agit d’un élément important en termes de cohérence d’ensemble.
Encore une fois, si vous voulez en savoir davantage sur les intentions du Gouvernement en matière d’organisation et de régulation, je vous renvoie à l’alinéa 2 de la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale pour l’article 4 : il s’agit de « modifier les règles applicables en matière de création, d’aménagement et d’exploitation des gares routières de voyageurs par les personnes publiques et privées, en privilégiant l’intégration des gares routières dans les schémas régionaux de l’intermodalité, définir les principes applicables pour satisfaire le besoin en stationnement sécurisé des vélos dans et aux abords de ces gares […] ».
Si vous souhaitez collectivement que ces éléments soient réintroduits dans le texte, afin de mieux encadrer le travail du Gouvernement, j’y suis tout à fait favorable. Il vous appartient d’en décider. Quoi qu’il en soit, les clarifications que vous souhaitez figuraient dans cet alinéa 2.
Les réunions en cours visent à identifier les points du territoire où il serait souhaitable d’implanter des gares routières. Ce travail technique de recensement n’a pas vocation à définir les règles de l’intermodalité ou le contenu des futures ordonnances.
Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur.
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Je n’ai nullement l’intention d’être désobligeante, monsieur le ministre, mais je dois constater que l’alinéa 2 de l’article 4 tel qu’il figurait dans la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale relevait de l’énumération de mesures très générales, pour ne pas dire de l’incantation.
J’aimerais que vous m’expliquiez, par exemple, ce que signifie la formule « en privilégiant l’intégration des gares routières dans les schémas régionaux de l’intermodalité ». Pour ma part, je n’en sais rien ! En outre, à aucun moment il n’est précisé de quelle collectivité dépendront les gares routières. Un tel flou artistique ne nous satisfait pas !
Mme la présidente. L’amendement n° 523 n’est pas soutenu.
Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 430, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
1° Modifier les règles applicables en matière de création, d’aménagement et d’exploitation des gares routières de voyageurs par les personnes publiques et privées, en privilégiant l’intégration des gares routières dans les schémas régionaux de l’intermodalité, définir les principes applicables pour satisfaire le besoin en stationnement sécurisé des vélos dans et aux abords de ces gares et en matière d’accès à ces gares par les entreprises de transport public routier de personnes, définir les règles applicables au transport de vélo dans les autocars, modifier les règles applicables en matière de police dans ces gares pour garantir l’accès à celles-ci par l’ensemble des usagers, notamment les personnes handicapées et à mobilité réduite ainsi que les cyclistes, et des opérateurs, de façon à assurer leur participation effective au développement et au bon fonctionnement du transport routier de personnes et à favoriser l’intermodalité, notamment avec les modes de déplacement non polluants ;
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. L’article 4 prévoit la modification par voie d’ordonnance des règles relatives à la création, à l’aménagement et à l’exploitation des gares routières de voyageurs, sous le contrôle et après avis de l’ARAFER.
En commission spéciale, Mme la rapporteur a fait voter un amendement visant à simplifier la rédaction de cet article. Cependant, comme vient de le souligner M. le ministre, cette simplification a pour inconvénient de revenir sur un certain nombre d’avancées introduites par l’Assemblée nationale.
Quitte à alourdir un peu le texte, nous préférons que l’habilitation à légiférer par ordonnance prévoie le maximum de garanties possible. C’est pourquoi nous proposons de prévoir que la création, l’aménagement et l’exploitation des gares routières tiennent compte du besoin en stationnement sécurisé des vélos – c’est très important ! (Sourires.) –, de l’intermodalité, du transport des vélos par autocar et de l’accès des personnes à mobilité réduite.
Les gares routières sont en effet des espaces importants pour les transports terrestres, des hubs indispensables. Voilà pourquoi nous considérons que les ordonnances devront prendre en compte toutes ces thématiques.
Certes, la rédaction issue de l’Assemblée nationale était un peu plus complète,…