Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, dans le débat de politique générale, à la suite de l’intervention du Premier ministre, Manuel Valls, je lui avais demandé au nom de mon groupe d’ajouter aux priorités qu’il avait annoncées– et que nous pouvions partager – une priorité essentielle pour nous : la recherche et l’innovation.
Nous constatons que, dans le cadre du vote du projet de loi de finances en première lecture à l’Assemblée nationale, les députés ont approuvé une série d’amendements de dernière minute du Gouvernement réduisant de plus de 130 millions d’euros le programme « Formations supérieures et recherche universitaire », programme qui finance les établissements universitaires d’enseignement supérieur et de recherche.
Nous ne pouvons approuver une telle décision. C’est pourquoi j’ai déposé un amendement tendant à l’annuler, et je note avec satisfaction que d’autres amendements allant dans le même sens ont été déposés, dont un par la commission de la culture.
En effet, il n’est pas possible d’accepter une telle diminution de ces crédits, qui engendrerait de grandes difficultés dans nos établissements d’enseignement supérieur. Dans un contexte budgétaire que nous savons tous difficile, il s’agit d’une décision de court terme qui ne peut se révéler que très rapidement contre-productive.
Seules l’innovation, issue de la recherche des laboratoires, et la formation au plus haut niveau de nouvelles générations permettront de donner à notre pays les moyens de reconquérir les parts de marché qu’il perd depuis des décennies faute de compétitivité scientifique et industrielle suffisante.
Je citerai un exemple, parmi beaucoup d’autres : le volume d’activité de l’École normale supérieure a augmenté de plus de 20 % au cours des quatre dernières années, grâce à des succès majeurs en recherche qui ont permis à ce fleuron de notre recherche de décrocher des contrats importants, tant industriels qu’issus des agences de financement française et européenne, se traduisant par une augmentation des recrutements d’étudiants au niveau doctoral.
Cette augmentation d’activité au meilleur niveau mondial, comme l’attestent de nombreux prix et évaluations des laboratoires et des étudiants de cette école, s’est faite avec un budget de fonctionnement en légère baisse et une masse salariale – financée par l’État – constante. C’est donc un gain de productivité remarquable, qui montre que les messages ont été entendus et que nous avons des établissements de très haut niveau ; il faut continuer à les aider !
Une coupe complémentaire dans la dotation d’État aurait des conséquences désastreuses aussi bien pour la recherche que pour la formation, au moment où un établissement comme celui que je viens de citer pourrait être propulsé prochainement, avec ses partenaires de « Paris Sciences et Lettres » dans le « top 20 » des meilleures unités mondiales.
Il n’est pas possible, dans un strict souci de court terme, monsieur le secrétaire d'État, de prendre de telles décisions. Nous vous demandons de revenir dessus. Il s’agit pour nous de défendre les intérêts de l’enseignement supérieur et de la recherche, car ils sont les moteurs du dynamisme de notre pays, de sa capacité d’innovation, en même temps qu’un élément essentiel d’une politique susceptible de redonner de l’espoir aux jeunes générations.
Nous insistons sur ce point, monsieur le secrétaire d'État, parce qu’il est à nos yeux absolument central : on ne saurait, pour un effet à court terme, pénaliser ainsi ce qui est essentiel pour la vie de nos universités et de nos établissements de recherche. (Mme Françoise Laborde marque son approbation.)
J’en viens à ma seconde observation.
Après m’être penché rapidement sur la situation d’un établissement comme l’École normale supérieure, je voudrais évoquer l’avenir des pôles universitaires délocalisés.
Sans positionnement fort de l’État, dans le cadre de l’autonomie des universités qu’une autre majorité a mise en place, les problèmes de financement laissent très clairement se profiler un risque d’asphyxie des pôles universitaires délocalisés, selon le principe bien connu suivant lequel, lorsque le feu atteint la maison, on ne s’occupe plus de la grange.
Avec les grandes régions du futur, les risques vont encore s’aggraver pour ces pôles universitaires délocalisés, situés loin des métropoles régionales.
Monsieur le secrétaire d’État, il faut que le Gouvernement, par les choix qui lui incombent – je pense aux contrats de projets État-région –, donne un signal fort, afin que nos territoires ruraux puissent conserver de la matière grise. C’est primordial pour l’aménagement du territoire. Nous attendons donc vos réponses sur les crédits de cette mission, en particulier ceux du programme 150, « Formations supérieures et recherche universitaire ». Notre vote tiendra compte de votre réponse. (Mmes Françoise Laborde et Valérie Létard applaudissent.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Férat.
Mme Françoise Férat. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la mission « Recherche et enseignement supérieur », pilotée par la mission interministérielle éponyme, la MIRES, est au cœur de la préparation de l’avenir, de la compétitivité et du rayonnement de la France à l’étranger.
La recherche et l’innovation peuvent être de puissants leviers pour nous permettre de sortir de la crise, d’améliorer la croissance potentielle de notre pays et de le préparer aux défis de la mondialisation– ou au moins nous y aider.
Quant à l’enseignement supérieur, point n’est besoin d’insister sur son importance pour atteindre ces mêmes objectifs dans le monde actuel.
En effet, quel est l’avenir d’un pays qui ne soutiendrait ni sa recherche ni son enseignement supérieur ?
L’effet sur nos jeunes n’est pas négligeable. Quel message leur envoyons-nous si nous ne garantissons pas la qualité de leur formation dans le supérieur ? Je rappellerai que l’un des engagements de notre Président pour le quinquennat était de « remettre l’éducation et la jeunesse au cœur de l’action publique ».
Compte tenu de l’ampleur de ces enjeux, rien d’étonnant à ce que cette mission soit la quatrième de l’État en termes de crédits.
Malheureusement, le budget qui nous est présenté aujourd’hui n’est pas à la hauteur de ces attentes et de ces ambitions. À périmètre constant et en tenant compte de l’inflation, avec près de 26 milliards d’euros, les crédits de paiement de la mission sont en très légère augmentation, de 0,5 %.
Cependant, la stagnation de ces crédits, qui semble de prime abord une bonne nouvelle, masque mal les difficultés actuelles des deux secteurs concernés, des difficultés qui ne manqueraient pas d’être aggravées par le « siphonage » – je n’ai pas trouvé de terme plus précis –, opéré par le Gouvernement à l’Assemblée nationale, de 135,5 millions d’euros des crédits de la MIRES !
Ce coup de rabot devait servir à financer 45 000 nouveaux contrats aidés dans le secteur non marchand, 30 000 contrats d’accompagnement dans l’emploi – CAE – et 15 000 emplois d’avenir.
Quel message souhaitez-vous adresser à nos concitoyens, monsieur le secrétaire d’État, sur les orientations de la majorité présidentielle ?
Plutôt que de miser sur la compétitivité et l’avenir, donc sur l’emploi productif de demain, on choisit de faire artificiellement et ponctuellement baisser les chiffres du chômage par de l’emploi public et parapublic, décision d’autant plus contestable que seuls 20 % de ces contrats aidés permettent d’accéder durablement à l’emploi. Vendredi dernier, le Sénat a d’ailleurs supprimé par amendement ces 45 000 nouveaux contrats aidés, contrats qui ne sauraient être financés, vous en conviendrez, au détriment de l’enseignement supérieur.
Monsieur le secrétaire d’État, le Gouvernement va-t-il en prendre acte et en tirer les conséquences en rendant à la MIRES ses 135 millions d’euros.
D’ailleurs, le 26 novembre dernier, la commission de la culture, de l’éducation et de la communication a adopté à l’unanimité de ses membres…
M. David Assouline. Sur proposition socialiste !
Mme Françoise Férat. … un amendement qui vise à rétablir le montant initialement prévu des crédits de la MIRES. Tant la recherche que nos universités en ont grandement besoin.
En effet, du côté de la recherche, la stabilisation des crédits ne fait que consacrer un sous-financement chronique des organismes de recherche. Comme notre collègue Valérie Létard l’a très bien souligné, ils sont tous dans une situation financière extrêmement tendue.
Une fois prises en compte les obligations de mise en réserve et les mesures de régulation budgétaire en cours d’exercice, certains d’entre eux pourraient même se retrouver dans l’impasse, ce qui risque de les conduire soit à abandonner des programmes de recherche, soit à se retourner vers le secteur privé, au détriment donc de toute recherche non immédiatement opérationnelle.
Une autre source d’inquiétude majeure réside dans le volet « recherche » des contrats de projets État-région.
Alors que la cinquième génération des CPER, qui prend fin cette année, prévoyait 13 milliards d’euros d’engagement de l’État, la sixième génération, qui couvrira la période 2014-2020, en prévoit un peu moins de 10 milliards, soit une contraction de 25% ! C’est colossal, surtout lorsqu’on sait que ces engagements conditionnent ceux de la région et de l’Europe.
Monsieur le secrétaire d’État, comptez-vous rééquilibrer les contrats de projets État-région en la matière ?
Les inquiétudes que je viens d’exprimer sont renforcées par certains choix regrettables effectués dans ce projet de loi de finances.
Ainsi en est-il de la suppression du programme 410, « Recherche dans le domaine de l’aéronautique », secteur d’excellence qui emploie 320 000 personnes et qui représente le premier secteur exportateur de notre économie.
Nous déplorons également que les moyens alloués au programme 191, « Recherche duale (civile et militaire) » n’aient pas été amplifiés. Ce programme concerne en effet des domaines de recherche dont les applications, à la fois civiles et militaires, représentent de véritables gisements d’emplois.
Plus généralement, nous regrettons que, au travers de la mission « Recherche et enseignement supérieur », le rôle stratège de l’État en matière de recherche et d’innovation au service de la compétitivité ne soit pas affirmé, alors qu’il conviendrait que l’État soutienne massivement les entreprises dans des secteurs d’excellence, tels que l’aéronautique, la chimie, la santé, la transition énergétique ou le numérique.
Cette absence de vision stratégique se retrouve malheureusement dans le volet « enseignement supérieur » de la mission.
En ce qui concerne les crédits de l’enseignement supérieur proprement dits, encore une fois, la supposée bonne nouvelle de leur augmentation sur les programmes « Formations supérieures et recherche universitaire » et « Vie étudiante » est largement cosmétique.
Ces augmentations doivent couvrir la création annuelle de 1000 postes dans ce secteur.
À cela il faut ajouter l’augmentation des effectifs des étudiants pour constater que les universités ne disposeront d’aucune marge de manœuvre supplémentaire.
C’est donc à une nouvelle sanctuarisation des baisses intervenues en 2013 que l’on assiste.
Que signifie l’autonomie des universités dans un pays où l’État reste décisionnaire ? Le parallélisme avec la situation des collectivités territoriales est frappant.
Obtenir aujourd’hui des moyens supplémentaires de l’État est impossible, alors même que la recherche et l’enseignement constituent des domaines stratégiques.
La loi sur l’autonomie des universités devait être suivie de l’octroi de ressources propres, de la liberté encadrée sur les droits d’inscription, de l’analyse des débouchés des filières de formation, de la gestion autonome des patrimoines, de la flexibilité dans la gestion des ressources humaines. Mais nous sommes restés au début du chemin… Pas plus qu’envers les collectivités territoriales, l’État n’a respecté ses engagements vis-à-vis des universités. Il ne leur a pas accordé les moyens nécessaires pour compenser les charges qui, parallèlement, leur ont été transférées.
Ces charges sont d’ailleurs énumérées par l’amendement de notre collègue Jacques Grosperrin, déposé au nom de la commission de la culture, qui tend à demander la remise d’un rapport au Parlement et au Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche à la fin du premier semestre de 2015.
Il s’agit de l’augmentation du solde positif du GVT – glissement vieillesse technicité – des universités, de leur participation au compte d’affectation spéciale « Pensions », du manque à gagner de l’exonération des droits de scolarité des étudiants boursiers ou encore du non-remboursement aux universités de certains crédits de fonctionnement et des réductions de cotisations sociales prévues par la loi TEPA.
À cette liste j’ajouterai la charge de la contribution au fonds d’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique – PIPHFP – dont elles devront s’acquitter à partir de 2015 en lieu et place de l’État. Les universités de mon département, la Marne, m’ont confirmé les inquiétudes que cette contribution suscite.
En l’absence de compensation, dès cette année, les universités auront des difficultés à régler les salaires des deux derniers mois...
Mes chers collègues, du fait des lourdes incertitudes que le présent projet de budget fait peser sur la recherche et l’enseignement supérieur, le groupe UDI-UC votera contre les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Duranton.
Mme Nicole Duranton. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous nous apprêtions à examiner une mission s’inscrivant dans la continuité du budget précédent, le Gouvernement s’étant engagé à une sanctuarisation des crédits considérés. Or le Gouvernement a brutalement renoncé à cette sanctuarisation en demandant de manière surprenante à l’Assemblée nationale de réduire de 136 millions d’euros le budget de la MIRES.
Ce sont ainsi 71 millions d’euros qui sont retirés à l’enseignement supérieur et 65 millions aux organismes de recherche.
On comprend bien la finalité de cette ponction, car on sait déjà que le projet de loi de finances pour 2015 n’améliorera guère le niveau du déficit public.
La contribution du budget au redressement des comptes publics doit-elle toucher la MIRES, pilier du développement de notre économie de la connaissance ? Je pense que non, car l’innovation et la croissance économique reposent avant tout sur la qualité de la formation supérieure dispensée à nos jeunes et sur nos capacités de recherche.
Un tel prélèvement sur le projet initial est révélateur des hésitations du Gouvernement, de son impréparation à gérer une situation de crise et à tenir le cap des priorités qu’il s’est fixées.
Toutes tendances confondues, la commission de la culture a adopté à l’unanimité un amendement qui vise à rétablir le montant prévu initialement. Nous nous sommes ainsi fait l’écho des protestations de divers présidents d’université, scandalisés. Que les crédits de cette mission soient ou non adoptés à l’issue de ce débat, nous espérons que les députés rejetteront le prélèvement sur la MIRES.
J’en viens aux crédits de la mission dans leur ensemble. Il existe un vrai décalage entre les annonces du Gouvernement et leur concrétisation.
Ainsi, concernant l’enseignement supérieur, sur les programmes « Formations supérieures et recherche universitaire » et « Vie étudiante », le Gouvernement sait déjà qu’il devra procéder à un dégel des crédits mis en réserve au cours de l’année, afin de payer aussi bien les bourses des étudiants que la masse salariale des établissements. Cela est évidemment contraire aux recommandations de la Cour des comptes.
Concernant la recherche, ce sont 200 millions d’euros qui sont annulés cette année, par décret d’avance sur le budget de 2014.
D’une manière générale, le principe de l’État décideur-payeur se trouve régulièrement démenti.
Il en est ainsi, notamment, de la compensation que devrait opérer le Gouvernement au titre de l’exonération des droits de scolarité pour les étudiants boursiers, ou de la compensation due pour l’augmentation du glissement vieillesse technicité, ou encore du non-remboursement de la dette due par l’État au titre de la réduction des cotisations sociales en application de la loi TEPA. La liste tend à s’allonger...
Aussi notre groupe soutient-il l’amendement de notre rapporteur pour avis demandant la remise au Parlement, avant la fin du premier semestre de 2015, d’un rapport sur le transfert par l’État aux universités des ressources permettant l’exercice normal de leurs responsabilités et de leurs compétences. Nous tirons ainsi un signal d’alarme, puisque nous ne pouvons contraindre l’État, en vertu de l’article 40 de la Constitution.
Je le rappelle, des difficultés budgétaires de cet ordre poussent les universités à revoir leurs priorités, ce qui n’est pas sans danger pour la qualité des formations qu’elles dispensent. Cela aboutit à des fermetures de filières, à la diminution du volume horaire des formations ou du nombre d’options, à l’augmentation du nombre d’étudiants en TD, au gel des postes...
Dans un tel contexte, il n’est pas surprenant que certaines universités se servent de la dotation destinée à la « création de 1 000 emplois par an » pour combler leur déficit et garantir leur fonctionnement sans recruter davantage de personnels.
L’examen des crédits consacrés aux établissements universitaires révèle donc de nombreuses zones d’ombre.
Avant de conclure, je tiens à évoquer la décision du Gouvernement de supprimer les bourses au mérite.
On peut être légitimement consterné par une telle décision,…
M. Jean-Claude Carle. C’est vrai !
Mme Nicole Duranton. … sachant que ces aides ne concernent que les boursiers sur critères sociaux et ne visent donc pas les familles aisées... Certes, le Gouvernement invoque une redistribution vers les boursiers. Toutefois, l’égalité des chances doit-elle empêcher la reconnaissance de l’excellence ? Quel modèle donnons-nous alors à nos jeunes ?
Le Conseil d’État a suspendu l’application de cette circulaire. La ministre de l’éducation nationale s’est engagée à maintenir le versement des bourses au mérite cette année, mais a néanmoins confirmé la suppression de cette aide dès le mois de juin 2015. Ainsi, cette décision va priver plus de 16 000 jeunes bacheliers et licenciés d’une bourse de 1 800 euros par an !
Pour toutes ces raisons, estimant que la recherche et l’enseignement supérieur constituent des domaines stratégiques qu’il faut absolument soutenir, le groupe UMP votera contre l’adoption des crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l'UDI-UC. – Mme Mireille Jouve applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’examen des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », qui constitue le troisième budget de l’État, nous donne l’occasion d’apprécier la manière dont le Gouvernement prépare l’avenir du pays. Nous, sénateurs du groupe socialiste, considérons que les crédits proposés garantissent sa volonté de tenir la promesse faite à la jeunesse.
Il faut d’abord rappeler quelques réalités, pour que nos débats soient empreints de vérité. (Exclamations sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)
Mme Françoise Férat. Notre vérité est différente de la vôtre !
M. David Assouline. Eh bien oui, il faut que les propos des uns et des autres, sous les différents gouvernements, soient appréciés à l’aune de cette vérité, afin que l’on puisse juger de leur sincérité !
Mme Françoise Férat. L’héritage, évidemment…
M. David Assouline. Entre 2007 et 2012, les crédits alloués à l’enseignement supérieur et à la recherche ont régressé (Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste.), alors même que Nicolas Sarkozy s’était engagé à les augmenter de 1,8 milliard d’euros par an ! La première année, on a vu un petit frémissement de hausse, mais elle a ensuite laissé place à une diminution continue !
M. Jacques-Bernard Magner. Bravo !
M. David Assouline. En 2009, 900 emplois ont été supprimés dans l’enseignement supérieur, après quoi le nombre des emplois a été gelé jusqu’en 2012.
Mme Maryvonne Blondin. Exactement !
M. David Assouline. Dans ces conditions, quelle crédibilité peuvent avoir ceux qui affirment aujourd’hui que les crédits qui nous sont présentés sont inacceptables, après avoir trouvé hier que des crédits inférieurs étaient tout à fait acceptables ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Jacques-Bernard Magner. En effet, c’est étonnant !
Mme Marie-Pierre Monier. Et ils nous donnent des leçons !
M. Philippe Dallier. Allez donc le dire aux présidents d’université !
Mme Françoise Férat. Vous verrez ce qu’ils vous répondront !
M. David Assouline. Chers collègues, c’est justement parce que nous dialoguons avec les présidents d’université, et parce que nous sommes soucieux de la vérité, que nous ne voulons pas de la baisse de crédits votée par l’Assemblée nationale, même si elle n’est que de 0,5 %, ce qui est infime par rapport à un budget globalement maintenu. Eh oui, quand nous considérons qu’une mesure n’est pas acceptable, même si le Gouvernement est de notre côté, nous le lui disons amicalement, parce que nous sommes attachés à la vérité !
Dans l’ensemble, l’effort est maintenu, et la priorité est à la jeunesse : aussi n’appelons-nous pas démagogiquement à voter contre les crédits de la mission, contrairement à vous, chers collègues de droite, qui avez pourtant approuvé par le passé des crédits inférieurs ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme Marie-Pierre Monier. Eh oui !
M. David Assouline. Monsieur le secrétaire d’État, l’Assemblée nationale a voté, en seconde délibération, une réduction des crédits de la présente mission : une réduction certes limitée, mais qui se produit dans un contexte où il faut affirmer une ambition très forte pour l’avenir de notre jeunesse et de notre pays. Cette diminution a été décidée sans que la communauté universitaire ni même les députés aient pu appréhender vraiment la raison de ce coup de rabot général appliqué à la mission.
Nous ne comprenons pas cette mesure. C’est pourquoi la commission de la culture, de l'éducation et de la communication a décidé, sur l’initiative des commissaires socialistes et à l’unanimité de ses membres, de présenter un amendement tendant à rétablir les crédits de la mission tels qu’ils avaient été initialement prévus. Nous voterons résolument cet amendement.
M. Jacques-Bernard Magner. Très bien !
M. David Assouline. Je tiens à évoquer la vie étudiante, car c’est une dimension dont l’importance est souvent insuffisamment reconnue.
Mes chers collègues, tout ce dont nous débattons n’a de sens qu’au regard d’un objectif : faire réussir les jeunes. En effet, un système universitaire peut fonctionner, parfois même dans l’excellence, mais ne pas permettre au plus grand nombre d’aller le plus loin possible et d’acquérir un bagage utile non seulement dans le monde du travail, mais aussi dans la vie en général, tant il est vrai que ce n’est pas uniquement pour exercer un métier que l’on poursuit des études supérieures.
Or, nous le savons, une des raisons essentielles de l’échec, qui frappe en particulier les catégories sociales les plus démunies, réside dans les conditions de vie des étudiants. Ceux-ci doivent souvent travailler, quand ils le peuvent, pendant leurs études, ceux qui n’ont pas de logement adapté sont obligés de réaliser leurs travaux dans des conditions précaires, etc.
Dans de telles situations, il n’y a pas du tout d’égalité des chances, encore moins quels que soient les mérites des uns et des autres. En effet, un jeune peut être très méritant, vouloir vraiment y arriver et consacrer à cet objectif tout le temps qu’il peut : si ses conditions de vie sont déplorables, il a moins de chances que les autres !
J’ai entendu la droite s’insurger, une nouvelle fois, parce que l’on va éventuellement supprimer – car on verra ce qui sera décidé l’année prochaine, et dans quelles conditions – les bourses au mérite. Chers collègues, vous refusez de voir que, dans le même temps, 400 millions d’euros sont alloués à la vie étudiante ! Vous ne voulez pas voir non plus les 150 millions d’euros qu’il a fallu trouver en gestion, à la fin de l’année 2012, pour couvrir le versement du dixième mois de bourse, que le précédent gouvernement n’avait pas financé !
Mme Maryvonne Blondin. Absolument !
Mme Françoise Férat. C’est extraordinaire !
M. David Assouline. C’est la réalité, qui éclaire d’un jour cru la vérité des propos tenus par la droite. Chers collègues, pour être crédible, il faut être vrai ! En l’occurrence, avez-vous oublié que vous aviez promis une mesure sans la budgéter ? C’est la gauche, qui n’avait pas fait cette promesse, qui l’a tenue à son arrivée au pouvoir ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
MM. Marc Daunis et Jacques-Bernard Magner. Bravo !
M. David Assouline. Non seulement elle a fait cela, mais elle a revalorisé de 2,1 % les bourses de l’ensemble des échelons dès la rentrée de 2012, avant de revaloriser les bourses de 150 millions d’euros supplémentaires en 2013, puis encore de 157 millions d’euros en 2014 !
Au total, un effort de 457 millions d’euros a été réalisé, ce qui n’avait jamais été accompli auparavant ! Évidemment, ceux qui veulent faire croire que les crédits ne sont pas bons s’attachent aux seules bourses au mérite, prenant bien soin de laisser dans l’ombre la réalité d’un effort sans précédent au service de la réussite et de l’égalité sociale, à travers notamment l’augmentation des bourses.
M. Philippe Dallier. C’est curieux, les gens ne le comprennent pas comme ça…
M. David Assouline. L’effort entrepris pour améliorer les conditions de vie de nos étudiants, ce qui est une impérieuse nécessité, est confirmé pour 2015. En effet, les aides directes au profit des étudiants des catégories les plus désavantagées, c’est-à-dire du bas de la classe moyenne et des familles plus précaires, s’élèveront à 2,8 milliards d’euros.
Par ailleurs, en 2013 et 2014, plusieurs aspects qualitatifs de la vie étudiante ont été pris en compte, en concertation avec les étudiants.
De manière générale, une attention particulière a été portée aux plus désavantagés, ainsi que, cette année, aux étudiants issus des classes moyennes.
Chers collègues de droite, vous qui vous offusquez de la suppression éventuelle des bourses au mérite, songez que 100 000 jeunes ont bénéficié des nouvelles bourses dès cette année ! Cet effort se poursuivra en 2015 : 77 500 étudiants supplémentaires percevront une aide annuelle de 1 000 euros et mille autres recevront une bourse comprise entre 4 000 et 5 000 euros. Sans compter qu’un peu plus de 650 000 étudiants seront exonérés de tout ou partie de leurs droits d’inscription et de leurs cotisations à la sécurité sociale, une aide concrète qui équivaut à une bourse.
Ces aides directes apparaissent comme plus universelles et plus équitables que le système antérieur.