M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » et les comptes affectés qui lui sont rattachés embrassent un large spectre de l’action publique, allant des effectifs de douaniers aux crédits de l’ENA, en passant par la vente par l’État de l’ensemble immobilier Penthemont-Bellechasse, situé dans le VIIe arrondissement de la capitale.
Ses crédits s’inscrivent dans la perspective de réduction de la dépense publique ; au regard de l’effort consenti, ils sont même exemplaires. Au sein de la mission, les principaux postes de dépenses concernent les directions du pôle économique et financier de l’État, au premier rang desquelles la direction générale des finances publiques, figurant au programme 156. Cette dernière connaît une diminution de crédits, tant en autorisations d’engagement, qui baissent de 2,52 %, qu’en crédits de paiement, qui sont réduits de 1,34 %.
Comme l’ont indiqué les précédents orateurs, le principal poste d’économies vise les dépenses de personnel. Un chiffre est à ce titre éloquent : la suppression de 2 400 équivalents temps plein qui succède à une mesure similaire l’année passée.
Les administrations concernées poursuivent leur modernisation, qui s’inscrit dans un cadre pluriannuel, jusqu’en 2018. La généralisation du numérique et la dématérialisation des échanges sont autant de vecteurs de simplification que de sources d’économies, en personnel notamment.
Comme les rapporteurs spéciaux, je m’interroge donc sur la diminution des crédits d’investissement : cette forte baisse à court terme ne doit pas être réalisée en sacrifiant des programmes de modernisation à moyen et à long terme.
De surcroît, comment concilier ces économies avec l’engagement du Gouvernement de lutter contre la fraude et l’évasion fiscale ? À ce titre, nous pouvons souligner l’effort consenti, dans le programme 302, en faveur de l’action Surveillance douanière des flux de personnes et de marchandises et lutte contre la grande fraude douanière, dont les crédits sont stabilisés, et, dans le programme 156, en faveur de l’action Fiscalité des grandes entreprises. Mais cela sera-t-il suffisant ?
Quant aux suppressions de postes dans l’administration des douanes, qui figurent dans le programme 302, elles suscitent une autre interrogation. En effet, la Direction générale des douanes et droits indirects, la DGDDI, participe à la réduction des effectifs à hauteur de 250 emplois équivalents temps plein. Or, dans une économie mondialisée, la multiplication des échanges économiques rend les contrôles douaniers particulièrement importants. De surcroît, la douane française a fait de l’accompagnement des entreprises à l’international l’une de ses priorités. Pourra-t-il en être de même avec ces contractions de personnels ? Nous verrons bien…
Dépassant le strict cadre de la mission, mais restant dans la thématique des ressources humaines, je rappelle que, depuis 2012, l’exécutif a désigné trois grands secteurs prioritaires : l’éducation, la sécurité et la justice. Pour ces trois missions, 10 601 postes seront créés en 2015. Dans le contexte actuel, cet effort mérite d’être souligné. Il sera compensé par 11 879 suppressions de postes dans d’autres missions, notamment dans la mission « Défense » et dans celle dont nous débattons en ce moment.
Plusieurs amendements déposés par M. le rapporteur général esquissent le contre-projet de la majorité sénatoriale. Le premier vise à toucher à un « marqueur » politique et à instaurer trois jours de carence pour les fonctionnaires. Si l’on peut s’interroger – à juste titre d’ailleurs – sur le coût de la suppression, dans la dernière loi de finances, du jour de carence et sur son incidence sur l’absentéisme dans la fonction publique, porter ce délai à trois jours nous paraît disproportionné.
Quant à la proposition de réduction du GVT, le glissement vieillesse technicité, une telle évolution ne nous semble pas opportune, d’autant que le gel du point d’indice des fonctionnaires devrait perdurer au moins jusqu’à la fin de la législature.
Les sénateurs du groupe du RDSE n’ont aucune opposition de principe à l’égard de la réforme de la fonction publique. Cependant, ils ne se retrouvent pas dans les amendements proposés par le rapporteur général.
Enfin, je ne ferai qu’aborder le compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État ». Le rapport de nos collègues Michel Bouvard et Thierry Carcenac relève le dilemme auquel est confronté l’État depuis le vote de la loi Duflot du 18 janvier 2013 : d’un côté, il y a l’État propriétaire, qui souhaite vendre ses biens immobiliers au meilleur prix, et, de l’autre, l’État stratège, qui entend participer par le biais de ces ventes à la politique du logement.
Dans leur majorité, les sénateurs du groupe du RDSE s’accordent sur les crédits de cette mission, en dépit des remarques que je viens de formuler. Nous ne souhaitons pas que le Sénat en modifie l’équilibre général. Dans le cas où les amendements soutenus par le rapporteur général seraient adoptés, nous serions contraints de ne plus apporter notre soutien aux crédits ainsi modifiés. (Applaudissements sur les travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye.
M. Vincent Delahaye. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » contribue fortement à l’effort d’assainissement de nos finances publiques. Avec une réduction de 1,4 % des crédits de paiement, soit 174 millions d’euros d’économies sur 11,2 milliards d’euros, elle constitue un véritable exemple de réduction de la dépense publique. Je tiens à saluer cet effort : une baisse de 1,4 % est certes modeste, mais elle représente déjà une économie réelle, et non pas une tendance, comme cela est souvent dit.
Pourtant, je le crois, nous pourrions faire mieux, et pas seulement pour ce qui concerne la présente mission.
En effet, dans le cas qui nous occupe aujourd’hui, la réduction des crédits a été obtenue en sollicitant les dépenses de personnel à hauteur de 1,2 %, soit 105 millions d’euros, et les dépenses d’investissement à hauteur de 89 millions d’euros en autorisations d’engagement.
On le constate bien, on rogne sur les différents titres de dépenses, afin de produire un résultat modeste, mais la gestion de cette mission n’a pas permis une véritable réflexion sur son périmètre et sa structure interne.
Je prendrai un seul exemple : les services administratifs de la direction générale des finances publiques sont les principaux concernés par cette mission. Or, nous le savons, près de 30 % des effectifs de cette direction sont chargés de la gestion administrative de la collecte de l’impôt sur le revenu.
Autrement dit, il suffirait d’effectuer la réforme, depuis longtemps envisagée, du prélèvement à la source de l’impôt pour pouvoir redéployer un tiers des effectifs de ce service vers d’autres services de Bercy ou d’autres métiers de l’administration. Des solutions simples existent donc pour mieux gérer la dépense publique et dépenser utilement, sans en venir nécessairement à menacer intégralement le statut de la fonction publique.
Sur cette question, j’anticipe le débat que nous aurons lors de l’examen des articles non rattachés. Je proposerai la baisse du plafond des emplois de l’État, afin de revenir au principe du non-remplacement d’un fonctionnaire partant à la retraite sur deux.
Je crois également qu’il faudrait diffuser cette idée auprès des opérateurs de l’État dont les effectifs ont gonflé à mesure que ceux de la fonction publique de l’État diminuaient jusqu’en 2012. Là aussi, il s’agit une mesure simple d’économie budgétaire à long terme, qui concerne aussi bien le programme « Fonction publique » de cette mission que l’ensemble des missions et du compte d’affectation spéciale « Pensions ».
Pour en revenir plus directement à la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », je me pose deux questions.
Pourquoi avoir augmenté le nombre de postes au concours de l’École nationale d’administration ? J’avais noté que l’enseignement était une priorité, tout comme la police, et que nous coupions largement dans les effectifs de la défense nationale. Alors, pour quelle raison créer des postes d’administrateurs civils ?
Quant aux dépenses d’investissement de la mission, je m’interroge sur l’opérateur national de paye. Sa mise en place a été un échec, très bien documenté dans le rapport de la commission des finances. Un investissement de 206 millions d’euros sans aucun résultat : c’est tout de même très fâcheux !
Dans l’immédiat, je me rangerai à l’analyse du rapporteur général, qui nous présentera ses propositions sur le jour de carence et sur le GVT. Je veux bien ne pas remettre en cause le statut de la fonction publique, mais il faut néanmoins rechercher davantage d’équité entre le secteur privé et le secteur public. Le Gouvernement serait bien inspiré de revoir un certain nombre de mesures catégorielles ciblées au profit des fonctionnaires.
J’en viens maintenant à la mission « Provisions ». Elle fait apparaître, selon moi, un certain nombre d’anomalies de gestion. Il est effectivement prudent de provisionner des crédits pour faire face aux imprévus, mais, de fait, il ressort de mes trois années d’expérience au Sénat que ces crédits sont plus souvent employés comme une variable d’ajustement gestionnaire que comme un outil de prise en charge de l’imprévu.
C’est en partie pour cette raison que j’avais déposé dans le cadre du récent examen du projet de loi de programmation des finances publiques un amendement tendant à baisser par mission le taux de provisionnement des crédits, afin d’ouvrir la voie à une réduction généralisée de ceux-ci.
Enfin, j’évoquerai en quelques mots la politique immobilière. Nous aurons ce débat demain lors de l’examen de la mission « Défense », mais la pratique de la cession à outrance pour trouver, là encore, des facilités de gestion ne paraît pas de bonne administration.
Nous vendons nos biens, généralement trop vite et donc assez mal, pour finalement en louer d’autres. C’est absurde ! Rien que pour la mission « Justice » examinée hier, j’aurais pu vous parler de l’hôtel particulier loué 450 000 euros annuellement pour accueillir la Cour de justice de la République, ou encore du coût exorbitant de la construction du nouveau ministère de la justice, le projet Millénaire 3, élaboré grâce à un partenariat public-privé.
Une fois encore, les facilités de gestion d’aujourd’hui creusent les déficits de demain. À force de fragiliser nos actifs pour combler le déficit de quelques centaines de millions d’euros, c’est tout l’appareil administratif que nous suspendons au bon paiement des loyers des immeubles dans lesquels nous installons les services.
Que nous parlions de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », de la fonction publique, des provisions, ou encore de la politique immobilière de l’État, nous ne pouvons pas nous laisser aller à la facilité. Le Gouvernement serait bien inspiré de mesurer, derrière les bons résultats de façade, le chemin qui lui reste à parcourir pour avoir une administration financière encore plus efficiente qu’elle ne peut l’être déjà. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et sur quelques travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson.
M. Jean-François Husson. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il nous revient d’examiner les crédits des missions « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » et « Provisions ».
Notre discussion portera donc sur la gestion financière et économique des administrations dépendant de Bercy et sur la gestion de la politique immobilière de l’État, au travers d’un compte d’affectation spéciale.
Outre nos réserves sur la gestion de la politique immobilière, nous regrettons que les dépenses de fonctionnement courant continuent à croître. Si un effort a été engagé, il demeure, à nos yeux, insuffisant. L’opposition sénatoriale l’a d’ailleurs souligné, par la voix de son rapporteur spécial Thierry Carcenac.
Il conviendrait également de mieux évaluer le rapport coût-efficacité des nouveaux logiciels de gestion de paie introduits dans l’administration, dont les coûts se révèlent très souvent bien supérieurs à ce qui était prévu, pour un rendement très aléatoire.
Les pertes financières liées à l’abandon partiel ou total de certains logiciels sont à chaque fois très importantes. Je pense, par exemple, à l’opérateur national de paye, aux systèmes Louvois, Copernic, ACCORD, ou encore CHORUS... Cette critique vaut d’ailleurs pour tous les gouvernements, qu’ils soient de gauche ou de droite.
Par ailleurs, pour ce qui concerne la suspension sine die de l’écotaxe, se pose le problème des 130 douaniers qui sont affectés au centre de gestion de Metz et qui devaient être chargés de sa mise en œuvre. Qu’adviendra-t-il de ces personnels ? Pourquoi ne pas les réaffecter en partie vers la lutte contre la fraude sur internet ?
Je vous rappelle que, voilà un an, Albéric de Montgolfier et Philippe Dallier avaient publié un rapport d’information intitulé : Les douanes face au commerce en ligne : une fraude fiscale importante et ignorée. Ils avaient pointé du doigt la nécessité de renforcer nos instruments juridiques pour lutter contre la fraude fiscale à la TVA liée à la vente en ligne. Au-delà des lacunes juridiques, ils avaient notamment souligné le manque d’effectifs dans les aéroports comportant seulement une quinzaine d’agents se consacrant spécifiquement à la fraude sur internet, sur les 17 000 que comptent les douanes.
Un redéploiement des effectifs pourrait ainsi être opéré au sein des brigades de contrôle du fret express et du fret postal, du service Cyberdouane, de la Direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières et du service national de douane judiciaire.
À cet égard, un rapport de la Commission européenne a estimé à 32 milliards d’euros le manque à gagner en matière de TVA pour la France. Assurément, ce n’est pas rien !
Dans le cadre de l’examen de la présente mission, le groupe UMP présentera un amendement, que je défendrai, visant à diminuer le coût de la masse salariale de la fonction publique, qui est l’une des dépenses les plus onéreuses de l’État, en ralentissant le glissement vieillesse technicité.
Nous soutiendrons également un amendement de la commission des finances tendant à instaurer trois jours de carence dans les trois fonctions publiques.
Il s’agit d’une mesure d’équité par rapport au secteur privé, puisque, aujourd’hui, les arrêts pour cause de maladie des fonctionnaires, a contrario de ceux des salariés du privé, sont indemnisés par la sécurité sociale dès le premier jour.
Madame le ministre, vous allez nous rétorquer que, pour les salariés du secteur privé, ces jours sont couverts par des assurances privées dans le cadre d’accords de branche ou d’entreprise. Mais tous ces salariés ne sont pas couverts par de telles assurances, au moins un tiers d’entre eux n’en bénéficie pas ; en outre, cette couverture assurantielle ne concerne que les salariés en CDI ; enfin – point important –, elle se traduit par des cotisations supplémentaires pour les bénéficiaires.
Par ailleurs, vous savez très bien que le jour de carence que nous avions instauré et que votre majorité a supprimé voilà un an avait eu des effets positifs sur l’absentéisme dans les fonctions publiques concernées.
Au moment de sa suppression, certains élus socialistes avouaient avoir constaté, depuis sa mise en œuvre, une baisse du nombre d’absences dans leur collectivité.
Ce jour de carence avait surtout eu un effet sur les arrêts d’une seule journée : selon une étude du mois de décembre 2013 effectuée par un assureur que je ne citerai pas et qui couvre notamment l’indemnisation des arrêts maladie, les arrêts d’une journée auraient diminué de ce fait de 43 % dans les collectivités en 2012 et de 40 % dans les hôpitaux.
Par ailleurs, deux enquêtes de la Fédération hospitalière de France, portant sur des établissements représentant 44 % des effectifs, concluent à des diminutions du nombre d’absences allant de 3 % à 7 %, et jusqu’à 20 % dans certains établissements.
Il ne fait par conséquent aucun doute que l’abrogation du jour de carence a surtout visé à faire accepter aux fonctionnaires le gel de leur rémunération pour la cinquième année consécutive.
C’est donc sous réserve de l’adoption de leurs amendements que les membres du groupe UMP voteront les crédits de la présente mission, conformément au souhait du rapporteur spécial Michel Bouvard, que nous félicitons pour la qualité du rapport qu’il a présenté, établi, il faut le souligner, en parfaite concertation avec notre collègue de l’opposition, Thierry Carcenac. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
M. le président. La parole est à M. René Vandierendonck.
M. René Vandierendonck. Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs spéciaux, mes chers collègues, le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 a fixé une trajectoire des finances publiques pour ramener le déficit sous la barre des 3 % en 2017 et tendre à l’équilibre structurel en 2019.
Selon certains, cet effort est insuffisant. Pour ma part, je constate qu’il est d’une ampleur inédite et qu’il est d'ores et déjà bel et bien engagé. Jusqu’à preuve du contraire, réaliser 50 milliards d’euros d’économies en trois ans, dont 21 milliards d’euros dès 2015, et mettre à contribution les trois versants de la fonction publique, c’est du jamais vu !
La mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » contribue fortement à l’effort de maîtrise des dépenses publiques. Ainsi, pour atteindre cet objectif, le Gouvernement n’a pas hésité à confirmer la stabilisation des effectifs de la fonction publique d’État, ainsi que le gel du point d’indice jusqu’en 2017.
Premièrement, le groupe socialiste note que les engagements sélectifs qui ont été pris, concernant l’éducation, la sécurité et la justice, sont respectés. Ces engagements trouvent une traduction dans le document budgétaire.
En effet, si les effectifs de la fonction publique d’État sont quasi stables, le plafond des autorisations d’emplois est fixé à 1 891 629 équivalents temps plein, en diminution de 0,14 % par rapport à 2014. En dépit de cette baisse, nous constatons, avec satisfaction, que l’engagement du Président de la République de créer 60 000 emplois dans l’enseignement et 5 000 emplois dans les secteurs de la sécurité et de la justice sur la durée du quinquennat est respecté : en 2015, 9 421 emplois supplémentaires sont prévus pour l’enseignement, 405 emplois supplémentaires pour la police et la gendarmerie et 600 emplois nouveaux pour la justice. En contrepartie – c’est inévitable ! –, d’autres ministères perdent des emplois. Il en va notamment ainsi du ministère de la défense et du ministère des finances et des comptes publics.
Deuxièmement, les crédits dévolus aux dépenses d’action sociale qui visent à améliorer le pouvoir d’achat des agents de l’État et de leur famille repartent à la hausse, puisqu’ils augmenteront de 2,8 % en 2015. Ces crédits, qui représentent 60,6 % du programme « Fonction publique », s’établissent à 122,3 millions d’euros en autorisations d’engagement. Les chèques-vacances, les chèques emploi service universels pour la garde d’enfants âgés de zéro à six ans, l’aide à l’installation des personnels de l’État sont autant de mesures incontestablement positives. Je tiens en particulier à souligner les dispositions ciblées en direction des fonctionnaires qui sont le plus en difficulté ; je pense notamment aux familles monoparentales et aux parents isolés.
L’ensemble de ces arbitrages nous donnent satisfaction.
Désormais, madame la ministre, les membres du groupe socialiste attendent – ils n’auront plus à attendre très longtemps ! – que vous nous indiquiez enfin, à cette tribune, les incidences de la réforme territoriale en termes de transferts de personnels de l’État vers les collectivités locales. Pour ma part, je ne connais pas d’exemples de transferts de personnels qui se soient passés dans de mauvaises conditions ; j’en ai pourtant connu, dans d’autres administrations ! En outre, je suis intimement persuadé, comme l’écrivent MM. Malvy et Lambert dans leur rapport, que d’importants effets positifs peuvent être espérés de ces transferts, du point de vue non seulement de la qualité du service public, mais aussi de la maîtrise budgétaire. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique. Monsieur le président, je vais essayer de respecter le temps de parole qui m’est alloué. Je détaillerai tout à l'heure l’avis du Gouvernement sur les différents amendements qui seront présentés.
Je reviens tout d’abord sur les données générales concernant les crédits de fonctionnement des administrations, notamment ceux de la direction générale de l’administration et de la fonction publique, et les comptes publics. Sans aller jusqu’à reprendre les mots de René Vandierendonck, je veux vous faire remarquer, mesdames, messieurs les sénateurs, que, comme les années précédentes, les administrations contribuent de manière exemplaire aux économies budgétaires.
Je ne doute pas que le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République contribuera à ces économies, mais il serait prématuré d’annoncer à l’avance les transferts de personnels qui pourraient en résulter, par exemple dans les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, les DIRECCTE, et les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement, les DREAL. Au reste, le ministère de l’agriculture s’est déjà exprimé sur les transferts relatifs à la gestion des fonds structurels, comme le savent les présidents de région.
Pour l’heure, nous ne disposons pas d’éléments chiffrés, et nous ne voulons pas en communiquer tant que ces aspects n’auront pas été étudiés d’extrêmement près. En tout état de cause, il est certain que les deux lois de réforme territoriale permettront de savoir « qui ne fait plus quoi », et non plus « qui fait quoi », et de diminuer les doublons.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je veux revenir sur quelques sujets que vous avez abordés.
La réduction des effectifs à hauteur de 2 400 équivalents temps plein, soit une baisse de 1,8 % du plafond d’emplois, est, effectivement, un effort extrêmement important. Il est salué, même si je constate qu’il suscite quelques inquiétudes chez les sénateurs de toutes les sensibilités politiques. Les dépenses hors personnel baissent de 60 millions d’euros et les dépenses de personnel, hors retraite, de 82 millions d’euros.
Chargée, entre autres, du programme 148, « Fonction publique », je veux rappeler que la formation interministérielle des fonctionnaires, qui concerne l’ENA, les IRA, et l’action sociale interministérielle, pour les prestations individuelles et collectives – je regroupe volontairement les thèmes abordés dans les différentes interventions, pour ne pas me répéter –, nous ont conduits à supprimer quelques postes, en particulier à l’ENA, à entamer de vraies négociations entre l’ENA et l’INET, sur un certain nombre de modules communs, afin de croiser les cultures – cela rejoint la question de René Vandierendonck sur les parcours professionnels de nos fonctionnaires, qu’ils soient d’État ou territoriaux, dans la perspective des évolutions institutionnelles –, ainsi qu’à augmenter légèrement le nombre des élèves de l’ENA, pour répondre aux demandes, émanant de l’administration, que soient pourvus certains postes aujourd'hui vacants.
Vous l’avez tous souligné, et vous avez eu raison, les crédits dédiés à l’action sociale sont extrêmement importants, même s’ils représentent un tout petit budget. Ils concernent essentiellement les premières installations, les problèmes de logement, les difficultés rencontrées par des personnes ayant perdu des appuis familiaux – par exemple, des femmes seules –, ou encore les problèmes de garde d’enfants. Nous tenons à garder ce budget, en dépit de sa modicité, pour éviter à des fonctionnaires modestes de se retrouver en grande difficulté, en particulier dans les régions en tension en termes de logement ou de garde d’enfants.
Nous avons également revu l’ensemble de ces politiques pour que l’effort de redressement soit proportionnel aux capacités de nos fonctionnaires. Je vous remercie de l’avoir relevé.
Je veux répondre maintenant à quelques questions qui ont été posées.
Pour ce qui concerne les missions des douanes, je tiens à revenir non pas sur les chiffres avancés – ils correspondent à ceux dont nous disposons –, mais sur les économies qui ont été réalisées. La dématérialisation des procédures vise Bercy dans son l’ensemble, mais il est vrai que Christian Eckert, à la suite de ses prédécesseurs, accorde une attention particulière, depuis plusieurs mois, à la réorganisation de l’administration des douanes.
J’ai également été interrogée sur l’abandon d’Ecomouv’ – non pas sur le fond du dossier, mais sur ses conséquences. C’est vers la mi-décembre que mon collègue concerné se rendra sur place et donnera des réponses aux personnels, après que ceux-ci aient été interrogés sur leur avenir et sur leur envie de servir dans telles ou telles fonctions. Bien évidemment, il n’est pas question de garder les personnels qui n’auraient pas de mission précise.
En attendant, et compte tenu d’un certain nombre de questions que vous avez soulevées sur la fraude – sous toutes ces formes, d'ailleurs –, je rappelle que des missions temporaires ont été confiées aux personnes travaillant sur le site de Metz, nous permettant d’approfondir un certain nombre de sujets, comme le commerce électronique, la contrefaçon, ou encore les grands trafics qui ont pu être observés.
Je constate comme vous que l’opérateur national de paye est interrompu. Nous avons attendu que nous soit remise une analyse extrêmement précise de cet outil pour conclure que nous ne pouvions pas garder un organisme qui ne fonctionne pas. Vous savez que la négociation que j’ouvre avec les personnels, en particulier le dialogue social sur les parcours professionnels, les carrières et les rémunérations, évitera peut-être, à terme, le maintien des 1 700 régimes indemnitaires actuels et permettra de revenir à un système plus simple.
Je prends acte, par ailleurs, des remarques qui ont été formulées sur le jour de carence. Néanmoins, il faut faire extrêmement attention. Si 77 % des salariés des grandes entreprises voient leurs jours de carence compensés par une cotisation patronale – généralement, la cotisation salariale en la matière est très faible, voire inexistante –, il ne faut pas y voir uniquement de la philanthropie de la part de ces groupes, qui veulent surtout éviter que les salariés ne prennent des jours de carence à mauvais escient et prévenir, nous disent-ils, des phénomènes de contagion
Je le répète une nouvelle fois, l’égalité parfaite imposerait d’ouvrir une protection sociale à l’ensemble des salariés de la fonction publique, pour obtenir en leur faveur un traitement au moins égal aux 77 % des salariés des grands groupes ou à 47 % des salariés des petites entreprises – ce dernier taux augmente, d'ailleurs, d’année en année. Il importe donc que nous soyons prudents.
La dépense qui en résulterait concernerait les assureurs privés. Or l’analyse produite par l’assureur Sofaxis – pour ne pas le nommer – a bien montré que, si l’instauration du jour de carence a fait diminuer le nombre de congés d’un jour, elle a conduit à l’augmentation de celui des congés de trois ou quatre jours.