Mme la présidente. La parole est à M. Yvon Collin.
M. Yvon Collin. Je voudrais remercier Mme la secrétaire d’État de cette réponse qui, en vérité, ne me surprend pas.
Il ne m’a pas échappé que le principe n’est pas très lourd en conséquences financières pour les collectivités locales. Il ne s’agit pas – que l’on me comprenne bien – de tirer sur les auto-entrepreneurs, dont je connais l’efficacité et le dynamisme ! Je crois néanmoins que les collectivités locales éprouvent vraiment le besoin d’être sécurisées et rassurées sur les recettes dont elles disposent dans la période un peu difficile que nous vivons.
Je posais cette question pour lancer en quelque sorte un appel à la vigilance : il s’agit d’éviter de grever par trop les recettes des collectivités locales, au gré des différentes lois de finances.
imposition des pensions allemandes perçues par des retraités résidant en france
Mme la présidente. La parole est à Mme Claudine Lepage, auteur de la question n° 779, adressée à M. le ministre des finances et des comptes publics.
Mme Claudine Lepage. Ma question s’adressait en effet à M. le ministre des finances et des comptes publics. Elle porte sur l’accord de principe, conclu à la fin du mois de décembre 2013, entre le ministre de l’économie et des finances français et son homologue allemand, qui porte sur l’imposition des retraites allemandes perçues par les titulaires de pensions résidant en France.
En effet, depuis 2005, l’Allemagne prévoit que les pensions de retraite versées par le système social allemand aux retraités résidant à l’étranger sont assujetties à l’impôt sur le revenu en Allemagne. Cette législation concerne notamment près de 50 000 Français, qui doivent, depuis 2005, déclarer ces pensions en Allemagne, bien que le Trésor allemand n’ait commencé à exiger les sommes dues qu’à partir de 2010, rendant le versement des arriérés particulièrement problématique pour un grand nombre de retraités.
De plus, cette imposition est vécue comme une injustice. En effet, parce qu’ils sont considérés comme non-résidents par le centre des impôts allemand, les retraités ne bénéficient pas des abattements auxquels ils auraient droit s’ils résidaient en Allemagne.
Grâce à cet accord, les retraites versées aux résidents français ne seront plus soumises qu’à l’impôt français. Cependant, les travailleurs frontaliers étant seuls mentionnés dans le communiqué du ministre, j’aimerais savoir ce qu’il en est des autres Français ayant travaillé en Allemagne, qu’on ne saurait oublier.
Par ailleurs, madame la secrétaire d’État, je souhaiterais que vous m’indiquiez où en sont les négociations sur les modalités techniques du dispositif et quelle est, notamment, la date d’entrée en vigueur envisagée.
Enfin, puisqu’il n’est pas prévu que le dispositif soit rétroactif, je désirerais savoir si une solution est prévue pour les retraités devant encore s’acquitter de lourds arriérés.
Et, dernière question, quelles sont les contreparties demandées par l’Allemagne ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Madame la sénatrice, la convention fiscale franco-allemande du 21 juillet 1959 autorise l’Allemagne à imposer les pensions de source allemande perçues par un résident de France.
Les modalités d’imposition par l’Allemagne de ces pensions, y compris les pensions de réversion, relèvent de la souveraineté de cet État dès lors qu’elles respectent les termes de notre convention fiscale.
Néanmoins, la situation de nos compatriotes percevant une pension de source allemande, qu’ils soient ou non anciens travailleurs frontaliers, a retenu toute l’attention du Gouvernement.
Aussi, après plusieurs années de discussions constantes avec le gouvernement allemand, un accord de principe a pu être trouvé sur ce sujet en 2013 entre le ministre de l’économie et des finances, Pierre Moscovici, et son homologue allemand, Wolfgang Schäuble. Il acte le principe du versement d’une compensation financière à l’Allemagne en contrepartie de l’attribution à la France du droit exclusif d’imposer les retraites des contribuables concernés pour l’avenir.
Afin de définir les modalités techniques et pratiques de la mise en œuvre de cet accord qui, vous vous en doutez, ne sont pas simples, et pour qu’il puisse s’appliquer le plus rapidement possible, les administrations fiscales française et allemande sont en contact étroit en vue d’une finalisation de ce dispositif au cours des prochains mois s’agissant notamment du montant, à définir, de la compensation financière.
Je peux vous assurer, madame la sénatrice, que nous faisons le maximum pour parvenir à un accord le plus rapidement possible avec nos partenaires.
Mme la présidente. La parole est à Mme Claudine Lepage.
Mme Claudine Lepage. Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, de ces précisions.
Je retiens de votre intervention que les non-frontaliers seront également inclus dans cet accord.
Je comprends très bien que vous ne soyez pas encore en mesure de me donner une date précise à partir de laquelle cet accord entrera en vigueur. Cela étant, au nom des non-frontaliers, je vous remercie !
accords de libre-échange et avenir de la filière de la viande française
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Bailly, auteur de la question n° 788, adressée à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargée du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l’étranger.
M. Gérard Bailly. Je souhaitais attirer l’attention de Mme la secrétaire d'État chargée du commerce extérieur sur l’accord de libre-échange que la Commission européenne négocie actuellement avec les États-Unis, dans une très grande discrétion, et qui pourrait acter l’ouverture du marché européen à droits de douane nuls à de nombreuses productions.
Sur ce sujet grave et vaste, je ne retiendrai que la question qui concerne la viande bovine américaine, laquelle pourrait être importée en plusieurs centaines de milliers de tonnes et produite selon des normes opposées à celles qui sont imposées à nos professionnels sur le plan sanitaire, sur le plan environnemental et sur le plan du bien-être animal.
Ces négociations interviennent après l’accord obtenu, en octobre dernier, avec le Canada, qui prévoit l’ouverture du marché européen à 65 000 tonnes de viande bovine canadienne à droits nuls et sans aucune réciprocité en termes de contraintes de production.
Ces négociations font peser sur la filière bovine française et européenne une double menace.
D’abord, sur le plan économique, de telles importations à droits nuls seraient particulièrement destructrices pour notre filière « viande bovine ». Parce que les systèmes de production du Canada, des États-Unis et des pays du Mercosur ne sont pas soumis aux contraintes sanitaires, sociétales et sociales imposées aux producteurs français et européens, leurs viandes peuvent être, de ce fait, extrêmement compétitives en prix.
C’est donc dans une situation de concurrence déloyale sans précédent que nos entreprises pourraient être plongées avec, à la clé, la destruction de nos troupeaux de races à viande, la fermeture d’exploitations et d’entreprises d’abattage ou de découpe, la suppression de milliers d’emplois contribuant directement à l’animation de nos territoires ruraux.
Ensuite, sur le plan sociétal, alors que les professionnels du secteur, soutenus par les pouvoirs publics, mettent tout en œuvre pour restaurer la confiance des consommateurs, renforçant la transparence au sein des filières, on ne saurait justifier la commercialisation sur notre marché de viandes produites à partir d’animaux largement traités aux antibiotiques, engraissés dans des parcs qui peuvent contenir jusqu’à 30 000 bovins - les exploitations françaises ne comptent guère que 60, 100, 200, voire 300 bovins au maximum -, sans parler de la possibilité de carcasses décontaminées à l’acide lactique !
Comment continuer à se battre pour toujours plus de traçabilité en France et en Europe, quand nos frontières s’ouvrent sans contraintes à des produits issus d’un pays où cette notion n’a aucun sens ?
Après l’affaire de la viande de cheval, je rappelle que les consommateurs français sont à 82 % opposés à l’introduction en France de viandes produites à partir d’animaux nourris au maïs ou soja OGM avec utilisation d’antibiotiques ou autres activateurs de croissance.
Je demande donc à Mme la secrétaire d’État de bien vouloir être notre interprète auprès du Gouvernement pour qu’il s’oppose très fermement à la position de la Commission européenne. Cette dernière, pour laquelle la filière « viande bovine » n’est pas une filière d’avenir, a décidé de miser sur l’importation, en échange, naturellement, de concessions obtenues par l’Europe sur des intérêts commerciaux plus offensifs !
Ce sacrifice de la viande bovine française est d’autant moins stratégique que ce secteur, essentiel pour la viabilité d’importants territoires ruraux, est devenu l’un des rares à n’être délocalisables ni en travailleurs ni en capitaux. Il serait d’autant plus surprenant que les pouvoirs publics aient la volonté de détruire notre savoir-faire et l’exception française au profit des grands groupes à capitaux étrangers !
Pourrions-nous savoir – cela peut intéresser tous mes collègues sénateurs et toute la filière d’élevage – où en sont ces négociations, madame la secrétaire d'État ? Je sais que le dernier acte s’est déroulé très récemment, du 19 au 23 mai, en Virginie, à Arlington. Pourrions-nous savoir ce que la France entend défendre dans cette affaire et quelle est la stratégie du gouvernement français.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur Bailly, je voudrais excuser Mme Fleur Pellerin, secrétaire d’État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargée du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l’étranger. Mais c’est tout le Gouvernement qui est préoccupé par la filière bovine et qui entend vos inquiétudes. À titre personnel, en tant que médecin, je porte une grande attention à la santé liée à l’alimentation. En tant qu’élue d’un département rural, j’ai, bien entendu, accordé une importance toute particulière à votre question.
Je souhaite vous répondre, point par point et très précisément. Cette réponse, nous l’avons élaborée conjointement, Fleur Pellerin et moi-même.
Monsieur le sénateur, le Gouvernement a donc bien pris note de vos préoccupations concernant les négociations du partenariat transatlantique.
Ces négociations ont été officiellement lancées en juillet 2013, après que les États membres de l’Union européenne ont adopté le mandat de négociation de la Commission.
Depuis lors, les équipes de négociation européennes et américaines se sont rencontrées à cinq reprises, et un premier échange d’offres tarifaires a déjà eu lieu. Dès l’ouverture des discussions, la France a plaidé pour davantage de transparence et s’est prononcée en faveur de la publication du mandat.
À ce titre, elle s’attache à informer les parties prenantes, ainsi que la société civile, de l’avancée des négociations. La Commission organise également des événements pour les représentants de la société civile. Je continuerai à plaider auprès de nos partenaires communautaires pour plus de transparence et à multiplier les actions d’information des professionnels et de la société civile en France.
Le Gouvernement vous rejoint sur le fait que les conditions d’élevage sont très différentes de part et d’autre de l’Atlantique, notamment en matière de réglementation sanitaire, de bien-être animal, mais également en termes de standards sociaux et environnementaux.
D’une part, nous comprenons que ces multiples contraintes engendrent un surcoût pour les opérateurs européens et imputent d’autant leur compétitivité. La France a toujours soutenu sa filière de production de viande bovine, qui crée de la valeur, des emplois, et contribue au maintien du tissu rural, auquel nous sommes tous attachés. Récemment, elle a réaffirmé sa position à l’occasion de la réforme de la politique agricole commune en soutenant notamment un rééquilibrage des aides en faveur de l’élevage.
C’est pourquoi, à la demande de la France, et grâce au soutien d’autres États membres, telles l’Irlande ou la Pologne, la viande bovine a été classée comme produit sensible dans l’offre européenne.
Si une exclusion totale des négociations ne semble pas envisageable, ce produit devrait faire l’objet d’un traitement spécifique, probablement sous la forme d’un contingent tarifaire à droit nul ou réduit. Les autorités françaises plaideront en faveur d’un contingent minimal et seront particulièrement attentives à ce que les concessions faites dans le cadre de l’accord avec le Canada ne servent pas de précédent non seulement pour la suite des négociations transatlantiques, mais aussi pour d’autres accords à venir, comme le Mercosur. Elles attachent également une grande importance à ce que l’ensemble de ces concessions ne concoure pas à déstabiliser la filière de production française.
D’autre part, vous craignez de voir arriver sur le marché européen de la viande bovine issue d’animaux élevés dans des conditions différentes de celles qu’impose la législation européenne.
À ce sujet, je tiens à vous rappeler que la préservation des acquis des consommateurs européens figure dans le mandat de négociation de la Commission européenne. Les États membres et la Commission le disent clairement : les actes législatifs européens de base, comme ceux qui concernent l’interdiction de la viande aux hormones ou, plus généralement, ceux qui visent à protéger la vie et la santé humaines, l’environnement et les intérêts des consommateurs, ne font pas partie des négociations.
Le contingent qui a été octroyé dans le cadre de l’accord avec le Canada n’est d’ailleurs ouvert qu’aux exportations de viande bovine issue d’animaux élevés dans des conditions qui satisferont l’ensemble de ces exigences.
Vous pouvez donc être entièrement rassuré sur ce point, monsieur le sénateur.
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Bailly.
M. Gérard Bailly. Je remercie Mme la secrétaire d’État pour sa réponse qui contient un certain nombre de points positifs. Elle évoque ainsi un traitement a minima, pour éviter des tonnages trop importants, une prise en compte spécifique de la filière de production de viande et le fait que l’accord avec le Canada ne constitue pas un précédent.
Oui, tout cela est positif. Je souhaite toutefois que cette réponse orale puisse être déterminante dans toutes les discussions. Il n’est pas souhaitable que l’agriculture, en particulier la filière viande, serve de variable d’ajustement des services et de l’industrie, une situation que nous avons connue durant les décennies précédentes.
Ces accords prévoient une exception culturelle. Pourquoi ne pas également envisager une exception « agriculturelle » ? Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous craignons qu’un afflux trop important de viande sur notre marché ne détruise cette filière bovine dont j’ai évoqué l’importance dans ma question.
Des collègues du Massif central sont présents, qui connaissent très bien l’importance de la filière bovine pour le devenir de ces territoires, la lutte contre la désertification et la protection de l’environnement. Je vous rappelle que, dans ce pays, treize millions d’hectares sont entretenus par les ruminants : il serait très préjudiciable, ne serait-ce que pour l’environnement, que cette filière souffre.
Madame la secrétaire d’État, vous avez fait référence à votre profession, pour laquelle je nourris une grande estime. Dans le domaine de la santé, on demande aux éleveurs français beaucoup d’efforts et il ne serait pas compréhensible que l’on puisse importer des animaux dont la production ne répond pas aux mêmes exigences. Tel était l’objet de ma question.
entrée en vigueur des mesures en faveur des établissements de santé situés dans des zones à faible densité de population
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Bertrand, auteur de la question n° 772, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.
M. Alain Bertrand. Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 prévoit, en son article 41, que « lorsqu’elles répondent à des critères d’isolement géographique, les activités mentionnées à l’article L. 162-22 exercées par des établissements de santé » - le plus souvent des hôpitaux - « situés dans des zones à faible densité de population, peuvent être financées selon des modalités dérogatoires aux articles L. 162-22-6 et L. 162-22-10, sous réserve que les prestations d’hospitalisation assurées par ces établissements et la situation financière de ceux-ci le justifient ».
En d’autres termes, il s’agit d’extraire ces établissements, au moins en partie, du dispositif de la tarification à l’activité, ou T2A. Ces établissements hospitaliers, anciennement appelés « centres hospitaliers généraux », c'est-à-dire des hôpitaux de territoire, se caractérisent par l’éloignement des métropoles, des agglomérations et des grandes villes, ainsi que par une offre généraliste et des missions nombreuses, étendues et indispensables aux territoires, aux citoyens et à la politique de santé publique.
Or le dispositif de la T2A, certes vertueux, est, par essence, inadapté aux hôpitaux situés en zone à faible densité de population, qui répondent par nature à un besoin de santé publique – les Français y sont très attachés –,…
M. Jacques Mézard. C’est vrai !
M. Alain Bertrand. … pour un faible nombre d’habitants et donc génèrent moins de recettes d’activité représentatives d’un faible nombre d’actes. Il s’agit ainsi de centres hospitaliers qui, couvrant tout un territoire mais peu de patients, et réalisant peu d’actes, se trouvent dans l’impossibilité d’équilibrer leurs comptes.
L’article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 permet donc de corriger ce déséquilibre.
Afin, toutefois, que cette disposition soit mise en œuvre, le texte précise qu’un « décret en Conseil d’État » doit être pris pour déterminer les « modalités dérogatoires de financement, les critères permettant de caractériser l’isolement géographique des activités concernées ainsi que les critères d’éligibilité des établissements de santé tenant, d’une part, à la densité de population des zones dans lesquelles ils sont situés » – ce devrait être assez est simple à déterminer – « et, d’autre part, aux prestations qu’ils assurent et à leur situation financière ».
Ce décret est d’une importance cruciale pour les hôpitaux de territoire en Lozère, comme dans d’autres territoires hyper-ruraux.
Aussi ma question est simple, madame la secrétaire d’État : quand ce décret si important sera-t-il publié ?
M. Jacques Mézard. Excellent ! Judicieux ! (Sourires.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Mme Marisol Touraine. Je vais répondre à la question précise que vous posez sur le système de tarification des hôpitaux ruraux.
Vous l’avez dit, l’article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 a introduit une excellente disposition prenant en compte la spécificité de ces établissements de santé pour lesquels la tarification à l’activité ne convient absolument pas, dans la mesure où elle requiert l’augmentation du nombre d’actes réalisés, ce qui est impossible quand il n’y a pas assez de patients, à moins d’imaginer d’augmenter le nombre d’actes par patient, ce qui irait à l’encontre d’une bonne prise en charge médicale.
Il était donc logique d’imaginer un autre système de financement pour ces établissements de santé, et c’est tout l’esprit de cet article 41.
L’article prévoit une fixation par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, sur proposition de chaque directeur général d’agence régionale de santé, de la liste des établissements éligibles à ce financement spécifique. C’est bien ici que réside la difficulté : établir la liste des établissements qui pourront disposer de ce financement, ceux qui sont situés dans des zones très rurales et qui présentent un risque de désertification médicale. Il me semble que la Lozère pourrait, en effet, être concernée.
Vous l’avez évoqué, un décret en Conseil d’État est nécessaire pour permettre la bonne application de cette disposition. Il a vocation à encadrer strictement les critères d’éligibilité au financement. Il précisera, notamment, les critères d’isolement géographique et de faible densité démographique, ainsi que les autres critères d’éligibilité sur la base desquels la ministre fixera la liste des établissements retenus ; il encadrera également strictement le ou les modèles de financement adaptés.
Ce décret d’application est en cours de finalisation. Pourquoi un tel délai ? Tout simplement parce que Marisol Touraine a souhaité recueillir l’avis des représentants des fédérations hospitalières sur les conditions de mise en œuvre de la mesure. Cette concertation est en cours et devrait encore se poursuivre durant quelques jours, voire quelques semaines.
Vous posez une question précise et je vous réponds non moins précisément : l’objectif de la ministre est d’adresser le projet de décret au Conseil d’État avant l’été, en vue d’une sélection définitive des établissements concernés par le dispositif.
J’ajoute que cette disposition s’inscrit dans le cadre plus global de la réforme d’ensemble du modèle de financement des établissements de santé que Marisol Touraine a engagée dès sa nomination en qualité de ministre des affaires sociales et de la santé, et qui constitue l’une de ses priorités.
Pour terminer, monsieur le sénateur, je m’associe à Marisol Touraine pour saluer votre implication en faveur de votre territoire, la Lozère, dont vous savez porter avec beaucoup de conviction les dossiers !
M. Yvon Collin. Voilà un bel hommage ! (Sourires.)
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Bertrand.
M. Alain Bertrand. Je remercie Mme la secrétaire d’État pour sa réponse, ainsi que Mme Marisol Touraine, qui va prochainement adresser ce projet de décret au Conseil d’État après propositions des agences régionales de santé. Cela me satisfait pleinement.
reconstruction de la maternité des lilas
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, auteur de la question n° 785, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.
Mme Laurence Cohen. Madame la secrétaire d’État, depuis plus de quatre années, la maternité des Lilas est menacée de fermeture. Il s’agit d’un établissement symbolique et emblématique pour nombre de couples, qui font le choix de cette structure réputée pour ces méthodes innovantes et humaines depuis cinquante ans. J’espère que cet anniversaire sera l’occasion pour le Gouvernement d’écouter les personnels, les patients et les élus afin de déboucher sur une issue positive.
Rappelons rapidement les faits.
En 2007, toutes les autorités reconnaissent la vétusté des locaux et leur inadéquation. Un projet de reconstruction du bâtiment est acté. L’intervention de la municipalité des Lilas permet de trouver un terrain, et une somme de 1,5 million d’euros est alors investie dans ce projet.
En juillet 2011, tout est prêt pour une réouverture en 2013, quand M. Evin, directeur général de l’agence régionale de santé d’Ile-de-France, décide de suspendre le projet.
En septembre 2012, au lendemain de la signature de la convention d’adossement institutionnel de la maternité des Lilas avec le groupe hospitalier « Diaconesses Croix Saint-Simon », l’ARS annonce la reconstruction de la maternité et le déblocage de 6 millions d’euros. Cette annonce ne se concrétisera jamais.
Dans une lettre de juin 2013, l’ARS annonce l’arrêt définitif du projet de reconstruction et propose une solution alternative : le transfert au centre hospitalier intercommunal de Montreuil. L’argument avancé est le déficit de 2 millions d’euros de la maternité des Lilas. L’ARS refuse pourtant d’admettre que ce déficit est le résultat de mesures nouvelles qui ont été imposées à ce CHI.
Tout le monde sait alors que le projet médical de la maternité des Lilas ne peut être respecté dans les locaux du CHI de Montreuil. Les différentes instances représentatives, la commission médicale d'établissement, l’assemblée générale du personnel, ou bien encore le conseil d’administration de l’association Naissance, regroupant la maternité des Lilas et les hôpitaux des Diaconesses et de la Croix Saint-Simon, viennent alors de voter à l’unanimité contre le projet de transfert à Montreuil.
De nombreux élus se mobilisent pour que la maternité des Lilas reste aux Lilas. J’ai moi-même été à l’initiative d’un appel adressé au Président de la République, en décembre dernier, signé par plus de cent trente élus, toutes tendances politiques confondues.
Le personnel de l’établissement et les couples sont, eux aussi, très mobilisés et mènent régulièrement des actions pour sensibiliser Marisol Touraine, ministre de la santé.
Hélas, le 6 mai dernier, le groupe hospitalier « Diaconesses Croix Saint-Simon » a annoncé qu’il se retirerait de l’association Naissance à partir de la fin du mois d’août.
Cette décision est lourde de conséquences : elle conduit soit à la disparition pure et simple de la maternité des Lilas soit à son rattachement au groupe hospitalier « Diaconesses Croix Saint Simon », mais amputée de son centre d’interruption volontaire de grossesse, qui réalise plus de mille IVG par an. Quel recours sera proposé à toutes ces femmes ? Aller à l’étranger ? Au vu des remises en cause de ce droit partout en Europe, il y a de quoi s’insurger !
Madame la secrétaire d’État, avec un personnel aussi compétent et motivé, et une municipalité très investie, il est encore temps d’éviter un gâchis humain, médical et financier.
Aussi, ma question est simple : conformément à l’engagement pris le 8 mars 2012 par le candidat François Hollande, Mme la ministre prendra-t-elle la décision politique de faire en sorte que cette maternité soit reconstruite et maintenue aux Lilas ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Mme Marisol Touraine.
Je souhaite vous répondre point par point.
La maternité des Lilas, vous l’avez dit, est une structure pionnière et emblématique, même si, aujourd’hui, les pratiques qu’elle a contribué à mettre en place se retrouvent dans de nombreuses autres maternités.
Personne ne conteste la nécessité de revoir ses locaux. Le soutien des pouvoirs publics n’a jamais été remis en question sur ce dossier, bien au contraire. Une aide à l’investissement de l’État avait d’ailleurs été accordée en 2009 pour la reconstruction de la maternité, à hauteur de 6,6 millions d’euros.
Face à une situation financière très dégradée, ce sont bien les aides exceptionnelles de l’agence régionale de santé d’Île-de-France qui ont permis à cet établissement de fonctionner. Laissez-moi vous donner les chiffres : ces aides auront représenté 2 millions d’euros pour 2012, 2,5 millions d’euros pour 2013, et au moins 2 millions d’euros pour 2014 !
S’agissant du projet de reconstruction sur le site Gütermann, aux Lilas, un important autofinancement était prévu, mais, sans capital et sans capacité d’emprunt, la maternité des Lilas, qui plus est simple locataire des murs, s’est trouvée dans l’impossibilité de financer les 24 millions d’euros nécessaires à cette opération, malgré les 6,6 millions d’euros d’aides publiques.
De plus, le groupement hospitalier « Diaconesses Croix Saint-Simon » a indiqué que les comptes de la maternité faisaient apparaître des déficits beaucoup plus importants que ceux qui avaient été initialement annoncés. Cette nouvelle situation a conduit le groupement hospitalier à remettre en question son soutien.
L’agence régionale de santé d’Île-de-France, avec la volonté de préserver la maternité des Lilas, je tiens à le souligner, a alors examiné la faisabilité d’un scénario alternatif : l’implantation de la maternité des Lilas dans des locaux vacants à proximité, sur le site du CHI de Montreuil.
Les études de l’ARS d’Île-de-France ont montré que, pour un investissement de 8 à 10 millions d’euros, il était possible d’installer la maternité dans ces locaux, tout en garantissant le respect de son autonomie, de ses spécificités et de son projet médical.
L’expertise indépendante menée à la demande de Mme la ministre par le professeur René Frydman à l’automne 2013 a ainsi montré qu’une implantation à Montreuil était tout à fait compatible avec le projet médical des Lilas.
Nous sommes donc face à deux projets : la reconstruction sur le site Gütermann, aux Lilas, pour un coût de 23 millions d’euros ; l’implantation sur le site du centre hospitalier intercommunal de Montreuil, pour un investissement de 10 millions d’euros.
Marisol Touraine s’est engagée à plusieurs reprises à ce que l’aide dévolue à la maternité des Lilas s’élève à 10 millions d’euros. La ministre ne s’oppose pas au projet initial de reconstruction de la maternité sur place, aux Lilas, dès lors qu’il ne coûte pas plus cher et que les collectivités locales ou d’autres financeurs peuvent apporter des crédits complémentaires.
J’ajoute que Marisol Touraine a fait du droit à l’interruption volontaire de grossesse et de son remboursement, chacun le reconnaîtra ici, l’une de ses priorités.
Pour répondre tout à fait à votre question précise, des solutions seront trouvées concernant le centre d’interruption volontaire de grossesse, quelle que soit la localisation de la nouvelle maternité.