Mme Catherine Génisson. Ce sont des citoyens !
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. Effectivement ! Ce sont des élus locaux, mais aussi des commerçants, des médecins, des citoyens porteurs d’un handicap, bref toutes sortes de personnes concernées par la question de l’accessibilité. Elles se sont mises autour d’une table et ont discuté pendant 140 heures, ce qui est considérable, pour arriver aux conclusions que nous avons évoquées.
Alors, rien n’oblige bien évidemment les parlementaires que vous êtes à voter ces conclusions. Vous avez le droit de ne pas être d’accord. Personnellement, je crois en l’expertise des acteurs de terrain. Puisque nous sommes tous d’accord sur l’objectif à atteindre, faisons maintenant confiance aux professionnels qui, en discutant, sont parvenus à des compromis et respectons leurs conclusions.
Mesdames, messieurs les sénateurs, en tant que membre du Gouvernement, mon rôle est de m’engager à ce que la rédaction des ordonnances respecte ces conclusions. C’est le minimum que je vous dois, et c’est pour cela que je suis là. Dans l’ordonnance, vous trouverez les conclusions du travail de concertation mené par Claire-Lise Campion. Il n’y aura pas de surprise. Mes propos devraient contribuer à vous rassurer.
Cela étant dit, sur l’amendement n° 18 rectifié, je suis parfaitement d’accord avec Mme la rapporteur : si l’amendement n’est pas retiré, le Gouvernement y sera défavorable.
M. le président. Madame Procaccia, l'amendement n° 18 rectifié est-il maintenu ?
Mme Catherine Procaccia. Monsieur le président, je vais retirer mon amendement, car j’avais indiqué que je souhaitais obtenir des explications, et Mme la rapporteur a été très concrète, ce que j’attendais. Notre collègue a précisé qu’en cas de refus de la copropriété il ne faudrait pas recourir au juge, qu’il y aurait des possibilités de dérogation.
Voilà un message simple, comme ceux qui ont été évoqués par Mme la secrétaire d’État, qu’il faut faire passer aux professions médicales !
Si la copropriété refuse de financer les travaux, notamment pour les ascenseurs, ce sera un motif d’exemption pour les médecins exerçant dans les étages, qui pourront continuer à exercer leur activité. Je souhaitais que cela figure au compte rendu de nos débats, pour que cela soit opposable.
Monsieur le président, je retire l’amendement n° 18 rectifié.
M. le président. L'amendement n° 18 rectifié est retiré.
Mes chers collègues, il est dix-neuf heures trente. Je vous propose que nous poursuivions nos travaux. Si chacun y met du sien, nous pouvons terminer l’examen du présent texte avant vingt et une heures. (Assentiment.)
L'amendement n° 8 rectifié, présenté par M. Vial, Mme Gourault, MM. Bizet et Jarlier, Mmes Lamure, Cayeux et Bruguière, MM. Cambon, Karoutchi et Cointat, Mme Boog, MM. Hyest et Grignon, Mme Deroche, MM. Hérisson, Reichardt et Saugey, Mme Masson-Maret et MM. Beaumont, Paul et Laménie, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 8
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
...° Disposer que l’application des sanctions administratives et pénales prévues en cas de non-exécution des obligations d’accessibilité est suspendue pendant le délai du recours gracieux et celui du recours contentieux jusqu’à l’obtention d’une décision dans le cas où un projet d’agenda présenté dans les conditions prévues aux alinéas précédents est rejeté ;
La parole est à M. Jean-Pierre Vial.
M. Jean-Pierre Vial. Cet amendement, extrêmement simple, concerne la suspension des sanctions, administratives et, surtout, pénales, lorsqu’un projet d’Ad’AP a été déposé et rejeté.
Si, au début du processus, le simple dépôt d’un Ad’AP; ou l’engagement en ce sens, suspend l’application de la loi, notamment sur le plan pénal, le pétitionnaire se retrouve en revanche sans aucune protection dès qu’une décision de rejet est rendue.
Cet amendement vise précisément à permettre au pétitionnaire de se retourner, en suspendant l’application des sanctions administratives et pénales prévues en cas de non-exécution des obligations d’accessibilité pendant les délais de recours gracieux et de recours contentieux.
Cela dit, si la concertation ou vous-même, madame le secrétaire d’État, pouvez me rassurer sur ce point, je serais très heureux de pouvoir retirer mon amendement ! (Sourires.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Claire-Lise Campion, rapporteur. Suspendre les sanctions administratives et pénales prévues par la loi de 2005 pendant les délais de recours gracieux ou contentieux reviendrait à créer un régime d’exception pour les Ad’AP.
Une telle évolution ne nous semble pas souhaitable : nous pensons que le droit commun, à savoir le maintien des sanctions, doit s’appliquer, y compris pendant lesdits délais.
La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d’État. Monsieur le sénateur, votre amendement vise à prévoir la suspension des sanctions administratives et pénales en cas de recours formé contre le rejet d’un projet d’Ad’AP par le préfet.
Or le 2° de l’article 1er du projet de loi habilite déjà le Gouvernement à définir précisément les conditions dans lesquelles les sanctions pénales relatives aux obligations de mise en accessibilité peuvent être écartées pour un Ad’AP.
Je vous confirme que l’intention du Gouvernement est bien, dans le projet d’ordonnance, sur la base de cette habilitation, d’écarter les sanctions pénales dès le dépôt d’un Ad’AP soumis pour validation au préfet.
En cas de non-validation de l’Ad’AP par le préfet, il conviendra de préciser comment ce dernier peut assortir l’avis qu’il rend sur un projet d’Ad’AP de prescriptions simples à respecter ou dans quels délais un Ad’AP conforme aux attentes doit être redéposé après un avis défavorable.
Pour ce qui concerne les sanctions administratives, un recours pourra être formé contre les sanctions prononcées, comme pour toute autre décision administrative, notamment contre celles qui consistent à annuler la décision du préfet validant l’Ad’AP. Comme pour toute autre décision de l’administration, il sera possible de recourir au référé-suspension pour obtenir la suspension de la décision – en l’occurrence, la transmission au procureur de la République –, en attendant le jugement en vertu duquel la décision administrative sera ou non annulée.
Je vous rappelle que l’article 111-5 du code pénal dispose également que les juridictions pénales « sont compétentes pour interpréter les actes administratifs, réglementaires ou individuels et pour en apprécier la légalité lorsque, de cet examen, dépend la solution du procès pénal qui leur est soumis ».
Au vu de ces différents éléments, je considère, d’une part, que le projet de loi comprend déjà l’habilitation nécessaire pour traiter les cas relatifs au dépôt du projet d’Ad’AP évoqués dans l’amendement, et, d’autre part, que le droit commun offre des solutions pour suspendre l’application des sanctions administratives et pénales pour un Ad’AP qui aurait été élaboré et dont une décision administrative aurait annulé la validation.
Pour ces raisons, je ne peux être favorable à cet amendement.
M. le président. Monsieur Vial, l'amendement n° 8 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Vial. Si toutes mes questions n’ont pas obtenu de réponse, Mme le secrétaire d’État m’a tout de même apporté un certain nombre de précisions.
Je suis surtout satisfait, car les solutions qu’elle a évoquées se rapprochent du droit commun, qu’avait écarté Mme le rapporteur.
Dans ces conditions, je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 8 rectifié est retiré.
L'amendement n° 7 rectifié, présenté par M. Vial, Mme Gourault, MM. Bizet et Jarlier, Mmes Lamure, Cayeux et Bruguière, MM. Cambon, Karoutchi et Cointat, Mme Boog, MM. Hyest et Grignon, Mme Deroche, MM. Hérisson, Reichardt et Saugey, Mme Masson-Maret et MM. Beaumont, Paul et Laménie, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Remplacer cet alinéa par sept alinéas ainsi rédigés :
3° Modifier les règles d'accessibilité et les règles d’octroi de dérogations s'appliquant aux établissements recevant du public dans un cadre bâti existant et les modalités de leur mise en œuvre, notamment :
- appliquer aux établissements recevant du public neufs les assouplissements prévus en matière de largeur minimale des allées pour les établissements recevant du public existants ;
- définir les critères d’appréciation de la dérogation pour disproportion manifeste prévue à l’article L. 111-7-3 du code de la construction et de l’habitation, préciser ces critères afin de faciliter l’utilisation de la dérogation par les collectivités territoriales ;
- permettre au préfet d’accepter une demande de dérogation relative à la mise en accessibilité d’un établissement recevant du public ou d’une installation ouverte au public par décision motivée en l’absence d’avis favorable de la commission consultative départementale de sécurité et d’accessibilité ;
- attribuer au silence gardé trois mois par le préfet sur une demande de dérogation valeur de décision d’acceptation sauf à ce que le préfet institue un délai supplémentaire de trois mois pour les besoins de l’instruction du dossier ;
- pour les travaux soumis à permis de construire, attribuer à l’équipe de maîtrise d’œuvre la responsabilité d’attester la conformité aux règles d’accessibilité ;
- adapter la mise en œuvre de l’obligation de mise en accessibilité au cas des établissements recevant du public situés dans des immeubles en copropriété ;
La parole est à M. Jean-Pierre Vial.
M. Jean-Pierre Vial. Cet amendement rassemble un certain nombre de dispositions très différentes.
Premièrement, je rappelle qu’un consensus – vous voyez que je sais, moi aussi, revenir à la concertation… (Sourires.) – s’est établi sur la possibilité de réaliser l’accessibilité des ERP existants via des allées structurantes – donnant accès depuis l’entrée aux prestations essentielles – de 1,40 mètre de large, les autres allées pouvant, dans le cas des restaurants existants, avoir une largeur de 60 centimètres.
Ces dispositions, acceptées pour les bâtiments existants, ont été écartées pour les bâtiments neufs. Or, dans la pratique, ces mesures sont très contraignantes et risquent d’entraver la création de nouveaux établissements, notamment de restaurants.
L’amendement tend donc à élargir aux établissements neufs les dispositions acceptées par la concertation s’agissant des ERP existants.
Deuxièmement, l’amendement revient sur le critère de dérogation pour disproportion manifeste, que Mme le secrétaire d’État a évoqué. Ce dispositif doit permettre des adaptations sous forme de dérogation pour certains dossiers de collectivités territoriales. J’espère que Mme le secrétaire d’État ira plus loin dans ses explications.
Troisièmement, l’amendement vise à réaffirmer le principe que la commission consultative départementale de sécurité et d’accessibilité émet un avis simple et qu’il revient au représentant de l’État de décider, quel que soit l’avis rendu.
Quatrièmement, sur le défaut de réponse, l’adoption de l’amendement permettrait de considérer que le silence vaut acceptation, contrairement à ce qui a pu être laissé entendre dans certains documents.
Cinquièmement, enfin, l’amendement tend à modifier la procédure d’octroi du permis de construire.
Depuis le début de nos échanges, il a beaucoup été fait référence au droit commun. Excusez-moi, mes chers collègues, mais la concertation ne cesse de déroger au droit commun !
En l’espèce, j’attends votre avis avec impatience. En effet, on a compliqué la procédure en obligeant que la conformité du permis de construire aux règles d’accessibilité soit attestée par un expert. L’ordre des architectes m’a permis de suivre certains contentieux : je puis vous indiquer qu’une telle solution ne donne aucune garantie !
Je pense qu’il convient, là aussi, d’appliquer le droit commun et de choisir la simplicité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Claire-Lise Campion, rapporteur. L’amendement de notre collègue vise à introduire un certain nombre d’assouplissements à la réglementation applicable aux ERP existants.
Je ne vous étonnerai pas en vous disant que, ces assouplissements n’ayant pas été actés par notre concertation, notre commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d’État. Monsieur le sénateur, votre amendement vise à ajouter d’autres possibilités de modification des règles d’accessibilité dans un cadre bâti existant à celles qui sont déjà listées dans le projet de loi d’habilitation, comme celles qui portent sur les critères d’appréciation des dérogations possibles.
Vous proposez ainsi d’appliquer aux établissements recevant du public neufs les assouplissements relatifs aux allées prévus pour les ERP existants.
Sur la forme, cette modification est de nature réglementaire et non législative. Pour cette raison, le Gouvernement ne peut pas être favorable à son introduction dans le projet de loi d’habilitation.
Sur le fond, décider que des établissements existants pourront construire des allées un peu moins larges ne signifie pas que des allées plus larges sont inutiles ! Cela signifie simplement que construire des allées plus larges dans du bâti existant serait trop compliqué.
Mais, si un établissement neuf – par exemple, un restaurant – construit volontairement des allées moins larges, il faut s’interroger : veut-il restreindre le nombre de ses clients potentiels ?
On peut parfaitement comprendre que certains lieux, difficiles d’accès, ne puissent être modifiés comme on le souhaiterait. Il en va d'ailleurs ainsi du Sénat ! Pour de tels bâtiments, les normes doivent être assouplies.
Mais, quand il s'agit d’établissements neufs, l’accessibilité n’est pas une charge : c’est une chance, non seulement pour les citoyens qui pourront accéder aux établissements, mais aussi pour les établissements qui deviennent accessibles et, par là même, peuvent accueillir un public plus nombreux, ce qui peut être intéressant, pour une collectivité comme pour un établissement privé qui fait du commerce. Il faut garder cela à l’esprit.
J’en viens aux autres dispositions de votre amendement.
La possibilité pour le préfet de passer outre à un avis défavorable de la commission consultative départementale de sécurité et d’accessibilité est déjà comprise dans l’habilitation à modifier les modalités de mise en œuvre des règles d’accessibilité.
De la même manière, je vous indique que, pour faciliter la validation des dérogations qui ne soulèvent pas de difficultés, le Gouvernement entend mettre en œuvre le nouveau principe prévu par la loi du 12 novembre 2013 habilitant le Gouvernement à simplifier les relations entre l’administration et les citoyens, aux termes duquel le silence de l’administration vaut accord dans certains cas. Mesdames, messieurs les sénateurs, certains d’entre vous se plaignaient de la complexité de l’administration : on ne saurait faire plus simple !
M. Vincent Capo-Canellas. Très bien !
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d’État. En revanche, nous n’entendons pas autoriser l’auto-attestation d’achèvement des travaux soumis à permis de construire, les associations de personnes handicapées étant très attachées au dispositif de contrôle actuel.
En conclusion, monsieur le sénateur, une partie des dispositions de votre amendement sont d'ores et déjà satisfaites par la rédaction actuelle du projet de loi d’habilitation, et je ne puis malheureusement accepter ses autres dispositions.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
M. le président. L'amendement n° 11 rectifié, présenté par Mme Archimbaud, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
...° Déterminer les modalités du suivi de l’avancement de la mise en accessibilité de tous les établissements recevant du public, au moins biennal, par l’ensemble des parties prenantes au dossier de l’accessibilité auquel s’ajoutent des représentants du Parlement.
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Ainsi que beaucoup d’entre nous l’ont souligné, l’absence, jusqu’en 2012, de suivi de la loi de 2005 a entraîné une incompréhension des difficultés concrètes rencontrées sur le terrain pour appliquer les mesures prévues et donc des retards dans les travaux.
Notre amendement vise à mettre en place des concertations régulières, sur le modèle de celles qui se sont tenues à l’automne dernier.
Ces concertations doivent réunir des représentants de l’ensemble des parties : associations de personnes handicapées, représentants des collectivités territoriales, maîtres d’ouvrage, maîtres d’œuvre, professionnels de l’accessibilité, représentants de l’économie du commerce, de l’hôtellerie, de la restauration, responsables du transport, représentants de l’État et parlementaires.
Un tel cadre nous permettrait de réfléchir régulièrement aux problèmes qui se posent, de trouver des solutions satisfaisantes, constructives et équilibrées et, dans la mesure du possible, de réunir le consensus.
Tel est le sens de notre amendement, qui tend à organiser un système de concertation au moins biennal, pour aboutir à un suivi de l’application de la loi efficace et mettre en œuvre l’objectif d’accessibilité universelle.
D’ailleurs, si cela vous paraît possible, madame la secrétaire d’État, on pourrait ajouter, dans le texte de l’amendement, après le mot « accessibilité », l’expression « représentées dans les six collèges de l’Observatoire interministériel de l’accessibilité et de la conception universelle ». Je ne l’ai pas fait lors du dépôt de l’amendement, parce que je n’étais pas sûre que l’Observatoire existerait toujours.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Claire-Lise Campion, rapporteur. L’auteur de l'amendement vient de répondre à la question que je m'apprêtais à lui poser : je souhaitais en effet savoir si les parties prenantes évoquées dans l’amendement n° 11 rectifié comprenaient bien l’ensemble des collèges des membres de l’Observatoire interministériel de l’accessibilité et de la conception universelle.
La commission peut donner un avis favorable, sous réserve, monsieur le président, de la rectification proposée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. Madame la sénatrice, je comprends parfaitement l’intention qui est la vôtre d’améliorer le suivi de cette réforme – nous en avons déjà longuement parlé. Je m'en remets, pour cet amendement, à la sagesse du Sénat, qui a la réputation d'être la plus sage de toutes les assemblées ! (Sourires.)
M. le président. Merci pour cet hommage, madame la secrétaire d'État ! (Nouveaux sourires.)
Je suis donc saisi d’un amendement n° 11 rectifié bis, présenté par Mme Archimbaud et ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
...° Déterminer les modalités du suivi de l’avancement de la mise en accessibilité de tous les établissements recevant du public, au moins biennal, par l’ensemble des parties prenantes au dossier de l’accessibilité représentées dans les six collèges de l'observatoire interministériel de l'accessibilité et de la conception universelle auxquelles s’ajoutent des représentants du Parlement.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 5 rectifié, présenté par M. Vial, Mme Gourault, MM. Bizet et Jarlier, Mmes Lamure, Cayeux et Bruguière, MM. Cambon, Karoutchi et Cointat, Mme Boog, MM. Hyest et Grignon, Mme Deroche, MM. Hérisson, Reichardt et Saugey, Mme Masson-Maret et MM. Beaumont, Paul et Laménie, est ainsi libellé :
Compléter cet article par six alinéas ainsi rédigés :
6° Rendre possible pendant une période de quatre ans, par dérogation aux dispositions du chapitre III de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, la mutualisation à l’intérieur d’un territoire des obligations d’accessibilité entre l’ensemble des établissements recevant du public ou installations ouvertes au public situés sur ce territoire et offrant une catégorie identique de prestations. Dans ce cadre, l’ordonnance précise que :
a) sur le territoire considéré, une offre significative et cohérente doit être constituée conformément à un référentiel national identifiant la qualité globale d’accessibilité exigée et distribuant les obligations correspondantes entre plusieurs catégories d’établissements ou d’installations ouvertes au public distinguées en fonction de leur degré d’accessibilité ;
b) la demande d’expérimentation est présentée au préfet par les maîtres d’ouvrage ou les gestionnaires concernés ou par leurs représentants dûment autorisés dans le délai prévu pour l’élaboration des diagnostics d’accessibilité. Elle précise le périmètre géographique retenu et le secteur professionnel ou la catégorie de services impliqués ;
c) l’expérimentation demandée est autorisée par le préfet sur avis de la commission consultative départementale de sécurité et d’accessibilité ;
d) les maîtres d’ouvrage ou gestionnaires engagés dans une expérimentation sont exonérés pendant la durée de celle-ci des sanctions prévues à l’article L. 152-4 du code de la construction et de l’habitation ;
e) après évaluation des résultats de l’expérimentation, les établissements recevant du public ou installations ouvertes au public concernés sont, par décision préfectorale prise après avis de la commission consultative départementale de sécurité et d’accessibilité, réputés satisfaire aux obligations légales d’accessibilité. En cas de décision défavorable, ces établissements ou installations ont à se mettre en conformité avec les obligations légales dans des délais identiques à ceux dont ont bénéficié les établissements n’ayant pas participé à l’expérimentation.
La parole est à M. Jean-Pierre Vial.
M. Jean-Pierre Vial. Je crains qu’il ne me faille douter de l’estime que je susciterai avec cet amendement... En effet, il tend à permettre d’expérimenter l’offre de services sur certains territoires.
Je me permets de souligner que cette demande avait été formulée dès la loi de 2005 par la profession et le syndicat des hôteliers, considérant que, dans certains secteurs difficiles, dans des territoires particuliers, il serait impossible de satisfaire aux exigences d’aménagement, alors qu’il serait parallèlement regrettable de ne pas essayer de créer localement une offre d’accueil et d’accessibilité pour les personnes handicapées.
À l'époque, cette expérimentation a été refusée. C’est fort regrettable : on aurait aujourd'hui le recul permettant de la juger…
À plusieurs reprises, Mme la secrétaire d’État et Mme la rapporteur ont évoqué la concertation pour montrer que tout y avait été soumis, qu’une discussion valant consensus avait ainsi été engagée entre toutes les parties… Vous avez ici la démonstration du contraire : je n’ai pas manqué, aujourd'hui même, de réinterroger le président de la FAGITH pour lui demander si cet amendement était conforme à la démarche qu’ils avaient engagée dans la loi de 2005 et s'il correspondait toujours bien à leur volonté de défendre des établissements sur certains territoires.
Par ailleurs, vous observerez qu’il ne s'agit pas d’échapper à tout cadre, puisque l’accompagnement pourrait se faire au titre d’un dispositif AFNOR.
J’insiste donc sur l’intérêt de cette démarche expérimentale. Elle aurait le mérite de montrer que, dans certains secteurs difficiles, plutôt que d’interdire l’accessibilité à des établissements au titre de dérogations ou bien de leur faire encourir un risque de fermeture, une organisation de services adaptée mériterait d'être examinée.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Claire-Lise Campion, rapporteur. Nous pensons que cette expérimentation de mutualisation est contraire à l’esprit de la loi de 2005, et notre commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. Je voudrais apporter quelques précisions.
L’approche proposée, celle de l’expérimentation, à l’intérieur d’un territoire, d’une mutualisation des obligations d’accessibilité avait déjà fait, en 2009, l’objet d’u travail avec les associations de personnes handicapées, les acteurs du tourisme et les collectivités territoriales ; c’était le label « Destination pour tous », qui avait vocation à valoriser un territoire doté d’équipements accessibles, touristiques et de la vie quotidienne, permettant aux touristes handicapés de vivre pleinement leur séjour sur ce territoire.
Ces premières expérimentation et concertation n’ont pas permis de construire le référentiel national précisant les critères d’équipement sur un territoire.
Certes, une expérimentation du label a été engagée pour tenter d’identifier les seuils pertinents – en effet, la question est de savoir combien il faut de lieux accessibles pour tel type de handicap. Mais, l’échéance du 1er janvier 2015 approchant, les associations de personnes handicapées ont considéré que cette expérimentation perdait de son intérêt, et cette position a été réaffirmée lors de la concertation nationale sur les Ad'AP et sur l’ajustement normatif – je suis désolée, monsieur Vial, de devoir vous parler encore de concertation.
Comme l’a souligné Claire-Lise Campion, la proposition de mutualisation sur un territoire est jugée contraire au principe même d’universalité introduit par la loi de 2005, et elle s'oppose à la liberté de choix des citoyens handicapés.
Ce principe de mutualisation territoriale a tout de même été retenu, mais seulement pour guider l’identification des établissements recevant du public à mettre prioritairement en accessibilité sur un territoire durant un Ad'AP de patrimoine.
Le Gouvernement ne souhaite donc pas retenir une démarche qui risque de se révéler décevante, tant pour les usagers que pour les maîtres d’ouvrage.
Mais, encore une fois, je répète qu’il ne faut pas vivre l’accessibilité comme une charge supplémentaire. Les établissements qui s'ouvriront à une clientèle différente auront plus de clients !
M. Jean-Pierre Vial. Il faut pouvoir payer, madame la secrétaire d’État !
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. C'est un investissement d’avenir ! Et les Ad'AP sont faits pour étaler les travaux.
M. Jean-Pierre Vial. Cela ne donne pas d’argent, madame la secrétaire d’État !
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. C'est un investissement, comme le sont des équipements tels qu’une piscine ou une salle de sport. Vous élargissez votre clientèle… Prenez conscience de l’énorme potentiel que représentent ces clients étrangers qui ne souhaitent pas venir dans des établissements situés en France, car ils ne sont pas accessibles !
Comme celui de la commission, notre avis est défavorable.