M. le président. La parole est à M. le président de la commission du développement durable.
M. Raymond Vall, président de la commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, j’aimerais féliciter à mon tour Mmes Claire-Lise Campion et Isabelle Debré pour le travail accompli et remercier le rapporteur de la commission du développement durable, M. Jean-Jacques Filleul, qui a œuvré en un temps très restreint. Son rapport a su convaincre l’ensemble des membres de la commission, qui ont voté ce texte à l’unanimité.
Nous avons entendu quelques propos un peu en décalage avec ce climat d’unanimité. Le présent projet de loi était très attendu. Nous avons tous été interpellés par des élus, notamment ruraux, sur l’impossibilité d’appliquer la loi de 2005. C’était une loi ambitieuse, et nous l’avons, certes, tous soutenue, mais elle s’est heurtée à deux obstacles : d’une part, une abondance de normes et de règles, parfois à la limite de l’absurde, nous pourrions tous en citer des exemples ; d’autre part, et c’est l’élément principal, le manque de moyens des communes.
Certains opposaient tout à l’heure les « bons élèves » aux « mauvais élèves ». Mais ce n’est pas par manque de volonté que certaines communes se sont retrouvées dans le second groupe : elles ont fait ce qu’elles pouvaient, mais elles n’avaient pas les moyens d’investir davantage ! Et, quand elles ont investi, elles l’ont fait en respectant les règles.
Je tiens ici à insister sur la ruralité, qui subit, encore une fois, une double peine. Dans ces territoires, nous ne pouvons pas nous retourner vers les intercommunalités, qui n’ont pas de compétence en matière d’accessibilité.
Pourquoi le Sénat se diviserait-il aujourd’hui sur un tel projet de loi ? Ce serait extrêmement grave, d’autant que les commissions et les groupes qui comptent des sensibilités très diverses, comme le mien, vont voter à l’unanimité ce texte.
Pourquoi y aurait-il deux sortes de sénateurs, d’un côté, ceux qui estiment que la loi était applicable et qu’il faut en quelque sorte récompenser les « bons élèves », et, de l’autre, les pragmatiques ? Le nouveau délai ne vise évidemment pas à permettre que l’on se soustraie aux objectifs fixés. Il s’agit simplement de regarder la réalité en face.
Les 12 millions de Français handicapés qu’évoquait Mme Debré n’attendent pas que nous nous querellions pour des problèmes de forme. Ne laissons pas la forme prendre le pas sur le fond !
Je vous confirme par ailleurs que le groupe du RDSE votera ce texte à l’unanimité, et j’espère que l’ensemble du Sénat adoptera une position raisonnable sur un sujet qui ne peut pas le diviser ! (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jacky Le Menn. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, j’aimerais apporter quelques précisions avant que nous abordions la discussion des articles.
J’évoquerai d’abord l’agenda qui a précédé l’examen du présent projet de loi d’habilitation. Soyons réalistes : personne n’a, me semble-t-il, été pris par surprise. Chacun dans cet hémicycle a suivi toute la chronologie des événements depuis 2005. Le hasard fait même très bien les choses, puisque celui qui était alors Premier ministre préside aujourd'hui notre séance. (Sourires.)
Reconnaissons-le, il a fallu attendre 2012 pour qu’il soit procédé aux premières évaluations et que les premières inquiétudes soient officiellement formulées. Une mission parlementaire a ensuite été confiée à la sénatrice Claire-Lise Campion ; elle a duré plusieurs mois. Puis, une concertation a été menée avec l’ensemble des acteurs, toujours sous la présidence de Mme Campion, là encore pendant plusieurs mois.
Dès le comité interministériel du handicap du mois de septembre 2013, Jean-Marc Ayrault, Premier ministre, avait annoncé la méthode, évoquant notamment le projet de loi d’habilitation et les ordonnances, et la date de dépôt du projet de loi en conseil des ministres avait été annoncée dès le mois de décembre.
En réalité, la seule personne à avoir été prise par surprise, c’est moi : voilà encore un mois, j’ignorais qu’il m’appartiendrait de défendre devant le Parlement le présent projet de loi d’habilitation ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
Sur les deux seuils démographiques qui permettent à certaines communes de s’exonérer du PAVE ou de voir leurs obligations simplifiées, je reviendrai lors de l’examen des amendements qui ont été déposés sur le sujet.
S’agissant des délais de mise aux normes des transports retenus par le Gouvernement pour l’ordonnance, je précise que c’est ceux qui avaient été actés pendant la concertation, c'est-à-dire trois ans pour les transports urbains, six ans pour les transports interurbains et neuf ans pour les transports ferroviaires.
C’est donc de manière exagérée, voire spécieuse que les médias ont fait leurs gros titres sur un prétendu report de dix ans. En fait, les neuf ans constitueront l’exception, uniquement pour certaines gares et certains matériels. Le renouvellement du matériel suppose évidemment du temps : il faut lancer un marché public en demandant du matériel accessible pour tous, mais le rachat ne s’effectue pas dans l’urgence, surtout qu’il y aura désormais les Ad’AP.
J’ai entendu les remarques formulées par le groupe écologiste ; nous en discuterons lors de l’examen des amendements. Je tiens cependant à vous rassurer dès à présent, mesdames, messieurs les sénateurs, les universités pourront utiliser les agendas d’accessibilité programmée.
Des inquiétudes relatives aux collectivités territoriales se sont également exprimées. Là aussi, je souhaite vous rassurer. Les représentants des élus locaux, ainsi que des commerçants, des artisans et des professions libérales ont participé à la concertation. Les normes seront simplifiées. Toute une série d’obstacles seront levés, pour les collectivités comme pour les entreprises privées, commerces et professions libérales.
Certains ont également fait part d’appréhensions concernant le financement de l’accessibilité, en particulier s’agissant des collectivités locales. Comme je l’ai indiqué dans mon propos liminaire, il y aura des prêts de la Caisse des dépôts et consignations ; je signerai dans ce sens une convention sous peu. Il s’agira de prêts bonifiés. Il y aura donc des facilités pour pouvoir financer les travaux concernés.
Certains ont instruit un procès en complexité contre les agendas d’accessibilité programmée, et ce avant même leur mise en place et leur mise en œuvre. Pourquoi le formulaire serait-il compliqué ? Notre rôle, c’est aussi de concevoir un formulaire simple. Je rappelle que les élus locaux ont participé à la concertation.
Au fond, d’après ce que j’ai pu entendre sur l’ensemble de ces travées, nos objectifs sont les mêmes : pragmatisme et simplification. Et ce choix que nous faisons du pragmatisme et de la simplification ne répond en rien à une option idéologique ; c’est simplement la seule méthode qui permet d’obtenir des résultats tangibles. Or c’est précisément cela que nous voulons.
Je vous le rappelle, en 2005, il n’y a pas eu d’obligation de suivi. Certains d’entre vous trouvent qu’il est compliqué d’en instaurer une. Mais, quand il n’y en a pas, il n’y a pas de résultat. Nous venons d’en faire l’expérience ! Ne reproduisons pas les mêmes erreurs. Le suivi est extrêmement important.
M. Jacky Le Menn. Très bien !
Mme Catherine Génisson. Bravo !
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. L’emploi des personnes en situation de handicap, dont le taux de chômage est extrêmement inquiétant, a aussi été abordé.
Il s’agit, je le crois, d’une préoccupation qui nous rassemble. Ce sera l’un des sujets majeurs de la conférence nationale du handicap qui se tiendra en fin d’année, l’emploi, a fortiori celui des personnes handicapées, étant une priorité gouvernementale. Nous avons déjà obtenu des avancées sur la formation professionnelle dans le texte, mais il reste encore beaucoup de chemin à parcourir. Nous en reparlerons à cette occasion.
Certains ont prétendu que la mise en place des agendas d’accessibilité programmée aboutirait à une « double peine ». Je rappelle – cela a déjà été précisé, mais n’a visiblement pas toujours été entendu – que l’entrée dans le dispositif des Ad’AP est exclusive des sanctions pénales prévues par la loi de 2005. Ceux qui ne tiendraient pas les engagements pris dans le cadre d’un agenda d’accessibilité programmée s’exposeraient à des sanctions uniquement administratives. Seuls resteraient passibles des sanctions pénales de la loi de 2005 ceux qui ne déposeraient pas d’agenda d’accessibilité programmée. Vous le voyez, c’est soit l’un, soit l’autre. Il ne saurait donc être question de « double peine » !
J’en viens enfin à vos inquiétudes concernant l’accès aux soins et les cabinets médicaux. L’obligation d’accessibilité des cabinets médicaux existe depuis la loi de 2005, nous ne la créons pas aujourd'hui. Par ailleurs, le guide rédigé avec le concours, notamment, de l’Union nationale des professionnels de santé, que vous avez découvert récemment, madame la sénatrice, remonte en réalité à deux ans et est disponible sur le site de l’ordre des médecins ; chaque professionnel concerné a donc pu le consulter.
Je rappelle également que les médecins, et l’ensemble des professions libérales, ont participé à la concertation et, donc, à l’élaboration de ce qui fait aujourd'hui l’objet de notre discussion. Bien évidemment, chacun comprend les difficultés que vous évoquez s’agissant des immeubles anciens, notamment dans les copropriétés. En cas de refus de mise aux normes d’une copropriété, le recours au juge est toujours possible. Vous avez également vous-même évoqué les possibilités de dérogations en cas d’impossibilité technique, d’ancienneté du bâtiment ou de disproportion.
Telles sont les précisions que je souhaitais vous apporter à ce stade, mesdames, messieurs les sénateurs. Bien entendu, je serai amenée à les compléter au cours de l’examen des amendements. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
projet de loi habilitant le gouvernement à adopter des mesures législatives pour la mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d'habitation et de la voirie pour les personnes handicapées
Article 1er
(Non modifié)
Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnances toute mesure relevant du domaine de la loi afin de :
1° Définir les conditions dans lesquelles le délai fixé pour que les établissements recevant du public et les installations ouvertes au public soient, en application des articles L. 111-7 et suivants du code de la construction et de l’habitation, rendus accessibles à tous et notamment aux personnes handicapées, quel que soit le type de handicap, peut être prorogé lorsque le propriétaire ou l’exploitant de l’établissement ou de l’installation soumet ou s’engage à soumettre un agenda d’accessibilité programmée recevant l’accord de l’autorité administrative et qu’il respecte cet agenda. À cette fin, l’ordonnance précise notamment :
a) Le contenu des agendas d’accessibilité programmée, relatif aux actions nécessaires à la mise en accessibilité et à leur programmation ainsi que, le cas échéant, aux dérogations sollicitées ;
b) Les modalités et délais de présentation de l’agenda à l’autorité administrative ainsi que les cas de suspension ou de prorogation de ces délais et les modalités et délais d’accord de cette autorité ;
c) Les délais de réalisation des actions nécessaires à l’accessibilité de l’établissement ou de l’installation, en prévoyant les cas dans lesquels ces délais pourront être suspendus ou prorogés ;
d) Les obligations du propriétaire ou de l’exploitant en matière d’information de l’autorité administrative et de la commission prévue à l’article L. 2143-3 du code général des collectivités territoriales sur le déroulement de la mise en œuvre de l’agenda et les modalités d’attestation de l’achèvement des actions prévues à l’agenda d’accessibilité programmée ;
e) Les sanctions administratives encourues par le propriétaire ou l’exploitant de l’établissement ou de l’installation en cas de non-respect des obligations qui leur incombent en application des dispositions prévues aux b à d.
Les dispositions prévues aux a à e peuvent être différentes selon le nombre d’établissements faisant l’objet d’un agenda d’accessibilité programmée appartenant à un même propriétaire ou gérés par un même exploitant, selon les caractéristiques de ces établissements et selon la nature des aménagements à y apporter ou pour tenir compte de motifs d’intérêt général ;
2° Définir les conditions dans lesquelles le propriétaire ou l’exploitant d’un établissement recevant du public ou d’une installation ouverte au public est soumis aux sanctions pénales prévues à l’article L. 152-4 du code de la construction et de l’habitation au titre de l’obligation de mise en accessibilité de ces établissements et installations ;
3° Modifier les règles d’accessibilité s’appliquant aux établissements recevant du public dans un cadre bâti existant et les modalités de leur mise en œuvre, définir les critères d’appréciation de la dérogation pour disproportion manifeste prévue à l’article L. 111-7-3 du code de la construction et de l’habitation et adapter la mise en œuvre de l’obligation de mise en accessibilité au cas des établissements recevant du public situés dans des immeubles en copropriété ;
4° Déterminer les règles particulières applicables aux travaux modificatifs demandés ou effectués par les acquéreurs de maisons individuelles ou de logements situés dans des bâtiments d’habitation collectifs, vendus en état futur d’achèvement ;
5° Prévoir l’obligation d’inclure dans les parties communes des nouveaux immeubles d’habitation tout ou partie des places de stationnement adaptées aux véhicules des personnes handicapées et définir les modalités de gestion de ces places.
M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, sur l'article.
M. Yves Pozzo di Borgo. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la loi du 11 février 2005 avait prévu la date butoir du 1er janvier 2015 pour l’élaboration, dans chaque commune, d’un plan de mise en accessibilité de la voirie et des aménagements des espaces publics.
En juillet 2012, seulement 13 % de ces plans, qui ne couvrent que 30 % de la population, ont été adoptés. Qui est responsable ?
Je prendrai l’exemple de Paris, dont je suis l’un des élus. Alors qu’elle compte 2 000 établissements recevant du public et 1 700 kilomètres de voirie, la collectivité parisienne n’est pas parvenue à respecter le principe d’accessibilité universelle. Pourtant, plus de 330 000 Parisiens sont dans une situation de handicap.
Je ne rappellerai pas tout ce qui n’a pas été fait, me contentant de lire le témoignage de Mme Françoise Rudetzki, fondatrice de SOS Attentats.
« Invalide moteur depuis trente ans, je refuse de vivre enfermée. Je peux conduire ma voiture. J’ai un périmètre de marche de 100 mètres ; au-delà, j’utilise ma chaise roulante.
« Le métro, bien entendu, n’est pas praticable – 20 stations sur 309 sont accessibles – et les bus ne vous déposent pas devant chez vous. […] Les places handicapées sont souvent occupées de manière illicite, les faux macarons fleurissent. […] Les fréquentes pannes d’ascenseur sont un cauchemar.
« Pour trouver des cafés et des restaurants avec des toilettes accessibles, bonne chance ! Impossible de faire ses courses dans un supermarché. […] La Poste, dont je dépends, est dépourvue de pente d’accès et de barre d’appui. Et je ne parle pas des services des mairies d’arrondissement non accessibles comme le sont le palais de justice, les grands magasins, les cinémas, la Cité de la Musique, l’Opéra Bastille, ainsi que la plupart des musées.
« PAM, société de transports pour handicapés dont la Ville est si fière, fonctionne en sous-effectifs, il faut prévoir ses sorties quatre à cinq jours à l’avance. »
En septembre 2012, l’IGAS reconnaissait l’impossibilité de respecter la date butoir légale de 2015, en raison du contexte économique et budgétaire, mais aussi de l’ampleur des travaux à réaliser.
Comment en sommes-nous arrivés là ? Conservons l’exemple de la Ville de Paris, qui dispose d’un budget annuel de plus de 8 milliards d’euros, dont 4 % sont dévolus au handicap. Ce serait bien s’il ne me fallait ajouter, toutefois, que seuls 20 millions d’euros sont consacrés à l’accessibilité proprement dite : 20 millions sur huit milliards !
Pourtant, la Ville dépense 800 millions d’euros pour la « Canopée » des Halles, les « Nuits blanches » et « Paris Plage », et 35 millions d’euros pour transformer les berges en lieux festifs…
Il est évident que, dans cet échec de la loi de 2005, la responsabilité des communes est importante.
J’ai tendance à penser, madame la rapporteur, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur pour avis, que le moratoire est hypocrite et moralement inacceptable.
Malheureusement, il est nécessaire. En effet, à la décharge des communes, il faut noter que, dès le vote de la loi de 2005, les délais fixés étaient, aux yeux de tous, intenables. Il suffit de relire les débats qui se sont tenus à l’époque dans ce même hémicycle pour s’en convaincre.
Aujourd'hui, soyons vraiment pragmatiques et garantissons une accessibilité intelligente, c'est-à-dire une accessibilité souple du service plutôt que du bâtiment. Lorsque la personne ne peut pas aller au service public, le service public doit pouvoir aller à elle.
Autrement dit, même s’il est trop difficile, techniquement, d’adapter un bâtiment, tous nos concitoyens doivent pourtant avoir accès, d’une manière ou d’une autre, à la prestation publique. Cela, les textes le permettent. Encore faut-il que l’État s’en fasse le relais. Alors seulement notre société sera accessible et n’aura plus à courir de moratoire en moratoire.
Ce débat est celui d’un choix de société, que les propos de mon parent, Philippe Pozzo di Borgo, dont la vie a été retracée dans le film Intouchables, permettent de dévoiler.
Voici ce qu’il écrivait, et qu’il m’a demandé de lire ici, pour les Trophées 2014 de l’accessibilité : « Une société inaccessible est une société de parias, d’intouchables. Une société qui promeut l’accessibilité en se laissant toucher par l’autre différent est enfin réconciliée avec elle-même.
« Nous nous sentons tous fragiles, à des degrés divers, et inquiets du refus de la société de considérer notre nature fondamentalement vulnérable et multiple. La tyrannie de la norme et de la force est une impasse. L’accessibilité est une solution aux maux de notre société. »
Sachons nous inspirer de ces paroles ! Cependant, parce que les communes, l’État et les différents acteurs n’ont pas encore conscience que le handicap est un problème majeur d’équilibre de notre pays, à titre personnel, je m’abstiendrai sur ce texte.
M. le président. L'amendement n° 2 rectifié, présenté par M. Vial, Mme Gourault, MM. Bizet et Jarlier, Mmes Lamure, Cayeux et Bruguière, MM. Cambon, Karoutchi et Cointat, Mme Boog, MM. Hyest et Grignon, Mme Deroche, MM. Hérisson, Reichardt et Saugey, Mme Masson-Maret et MM. Beaumont, Paul et Laménie, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par trois phrases ainsi rédigées :
Dans ce cadre, l’engagement d’entrer dans un agenda doit être accompagné de celui de réaliser un diagnostic dans les six mois suivant le dépôt de cet engagement. Le préfet doit notamment disposer de la faculté de prolonger, après avis de la commission consultative départementale de sécurité et d’accessibilité, le délai de réalisation d’un diagnostic ou de l’ensemble de ceux-ci jusqu’au 31 décembre 2015 au plus tard s’il constate l’existence une difficulté objective. Dans cette hypothèse, le préfet doit disposer de la faculté de prolonger jusqu’au 31 juillet 2016 le délai de dépôt de l’agenda ;
La parole est à M. Jean-Pierre Vial.
M. Jean-Pierre Vial. Cet amendement concerne les délais nécessaires à la mise en place des Ad’AP.
Madame la secrétaire d’État, j’ai bien entendu vos propos. Je prends acte des assurances que vous avez essayé de nous donner, en laissant entendre que les délais étaient largement suffisants. Au demeurant, m’étant déjà exprimé assez longuement sur ce point, je ne rouvrirai pas le débat.
Je vous le dis très sincèrement, l’une de vos difficultés majeures tient aux délais et au calendrier.
Quel est donc l’objet de cet amendement ? Il s’agit de donner aux préfets, dans chaque département – c’est bien évidemment département par département que la situation pourra être appréciée –, la possibilité de disposer d’un délai supplémentaire s’ils s’aperçoivent que la procédure est trop contrainte. Par ailleurs, l’amendement vise à introduire l’idée d’un diagnostic, laquelle, je le sais, pose question à certains.
Lorsque l’on est effectivement engagé dans une procédure d’Ad’AP – à condition de pouvoir y entrer - il convient, en cas de difficultés d’instruction, et il y en aura, de pouvoir bénéficier d’un délai accordé par le préfet.
Pourquoi prévoir également un diagnostic ? Dans bien des cas, les dossiers relèveront non pas d’une démarche d’Ad’AP, mais éventuellement d’une demande de dérogation. Il serait ainsi préférable que, par le biais d’une procédure légère de diagnostic, on puisse neutraliser les conséquences de la loi si la procédure n’était pas engagée, sans se retrouver dans une procédure lourde d’Ad’AP. En effet, le diagnostic permettra aux pétitionnaires d’élaborer, le cas échéant, un dossier de dérogation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Claire-Lise Campion, rapporteur. La concertation menée a retenu, pour la date limite de dépôt des dossiers d’Ad’AP ou d’engagement à entrer dans cette démarche, le 31 décembre 2014.
Par ailleurs, en cas de simple engagement à cette date, les dossiers devront être déposés dans un délai de douze mois après la publication de l’ordonnance, ce qui nous conduit à juillet 2015.
Nous avons débattu, dans la concertation, de ce calendrier, que nous estimons équilibré et pragmatique. Il vise à ne pas retarder la mise en œuvre des agendas d’accessibilité programmée et à prendre en compte les contraintes de la totalité des opérateurs, qu’ils soient publics ou privés.
Il n’est pas possible de revenir sur les termes de la concertation. Dans ces conditions, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. Vincent Capo-Canellas. Autrement dit, la concertation fait la loi !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. À vrai dire, monsieur le sénateur, j’ai un peu de mal à suivre votre raisonnement. En effet, redoutant que le délai ne soit trop court pour la majorité des établissements, vous préconisez pourtant un alourdissement de la procédure.
Cet amendement vise à préciser les modalités et les délais de présentation au préfet de l’Ad’AP. Il prévoit que l’engagement à déposer un Ad’AP doit être accompagné de celui de réaliser un diagnostic et que le préfet peut prolonger les délais de dépôt de réalisation de ce diagnostic jusqu’au 31 décembre 2015 en cas de difficulté. Ainsi, les délais de dépôt de l’Ad’AP pourraient être prolongés jusqu’au 31 juillet 2016.
Or, en réalité, l’obligation du diagnostic d’accessibilité existe déjà. Les participants à la concertation l’ont souligné, la norme juridique actuelle impose aux exploitants d’établissements recevant du public de la première à la quatrième catégorie de réaliser un diagnostic d’accessibilité, qui a dû être réalisé avant le 1er janvier 2011 au plus tard.
Ces mêmes participants ont également demandé que le projet d’ordonnance prévoie des modalités de présentation simplifiées pour les Ad’AP d’un ERP de cinquième catégorie.
Ils n’ont pas envisagé d’instaurer l’obligation d’un diagnostic pour ceux qui s’engageraient à élaborer un Ad’AP d’ici à l’été 2015. En effet, pour ceux qui l’ont déjà réalisé, ce diagnostic serait inutile, et, pour ceux qui pourraient disposer d’un contenu de dossier allégé, il introduirait une nouvelle obligation.
Le délai supplémentaire que vous proposez, monsieur le sénateur, pour déposer un Ad’AP en cas de difficulté concernant le diagnostic de mise en accessibilité n’a donc pas été jugé nécessaire.
L’intention du Gouvernement étant, je l’ai dit à plusieurs reprises, de suivre les conclusions de la concertation pour l’élaboration des dispositions du projet d’ordonnance, je ne peux être favorable aux modalités que vous proposez d’introduire dans le projet de loi d’habilitation, modalités qui conduiraient à adopter des dispositions plus contraignantes.
Par ailleurs, sur la forme, je souhaite attirer votre attention sur le fait que cet amendement fait référence à des dispositions précises relatives à l’engagement de déposer un Ad’AP. Il s’agit d’un concept issu de la concertation nationale dont il n’est pas fait mention en tant que tel dans le projet de loi d’habilitation, lequel évoque simplement les « modalités et délais de présentation de l’agenda à l’autorité administrative ainsi que les cas de suspension ou de prorogation de ces délais ». Pour cette seule raison, la rédaction que vous proposez ne pourrait pas être retenue.
M. le président. L'amendement n° 12, présenté par Mme Archimbaud, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
...) Les modalités de contrôle, par l’autorité administrative compétente, des établissements et installations recevant du public qui n’ont pas déposé d’agenda d’accessibilité programmée afin de s’assurer qu’ils n’encourent pas les sanctions prévues à l’article L. 152-4 du code de la construction et de l’habitation au titre de l’obligation de mise en accessibilité de ces établissements et installations et de les appliquer le cas échéant ;
La parole est à Mme Aline Archimbaud.