Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, si je prends la parole, ce n’est évidemment pas pour défendre ces retraites chapeaux d’un montant excessif, surtout dans le cas d’espèce, mais parce que je constate que notre collègue Marie-France Beaufils fait vraiment tout pour compliquer la vie du Gouvernement ! (Mme Catherine Procaccia s’esclaffe.)
Mme Marie-France Beaufils. Mais non ! (Sourires.)
M. Philippe Dallier. Il faut se souvenir des difficultés que le Gouvernement a rencontrées pour mettre en œuvre la fameuse taxe de 75 %, qui devait d’abord être acquittée par les bénéficiaires de ces hauts revenus, mais qui, finalement, et c’est tout de même un comble, devra être assumée par les entreprises elles-mêmes. Dans ces conditions, revenir à la charge avec une taxe à 95 %, même pour la part excédant le SMIC, ne participe pas d’une attitude très sympathique entre partenaires d’une même majorité !
Mme la présidente. L'amendement n° 141, présenté par M. Delattre et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Après l'article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Au premier alinéa du 2 du I de l’article 197 du code général des impôts, le montant : « 2 000 € » est remplacé par le montant : « 2 336 € ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Francis Delattre.
M. Francis Delattre. Un large consensus, à l’exception du groupe socialiste, s’est déjà manifesté au Sénat au moment de la discussion du budget 2014 pour voter une disposition revenant sur la baisse du plafonnement de l’avantage procuré par le quotient familial pour chaque part, lequel avait déjà été réduit en 2013.
Nous regrettons cette mesure, et ce pour deux raisons.
Tout d’abord, elle va poser un problème en termes de démographie, qui est pourtant l’un des rares avantages qu’il nous reste aujourd’hui en Europe. Il faut bien se rendre compte que la retraite par répartition a des exigences. Le fait de mettre un frein à la politique familiale, alors que notre système connaît déjà des difficultés, est très discutable à cet égard.
Ensuite, cette disposition pose question en termes de pouvoir d’achat, car ce sont bien les familles avec enfants qui consomment le plus, notamment pour le financement des études. Tout le monde le sait très bien, il ne s’agit pas d’un problème d’égalité entre les contribuables, mais c’est bien un problème d’égalité entre les familles.
J’espère donc que nous allons retrouver une large majorité pour porter le plafond de 2 000 euros prévu actuellement, à 2 336 euros, somme qui permettrait au quotient familial de retrouver un sens économique pour de nombreuses familles de notre pays.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. L’avis est bien sûr défavorable. Les auteurs de cet amendement reprennent en totalité l’argumentation déjà développée lors de la discussion du projet de loi de finances initiale pour 2014.
L’adoption d’une telle mesure irait à l’encontre de la politique familiale aujourd’hui préconisée par le Gouvernement et aurait par ailleurs un impact non négligeable sur les finances publiques.
M. Francis Delattre. Un milliard d’euros !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur Delattre, vous semblez dire qu’un milliard d’euros, ce n’est rien !
M. Philippe Dallier. Il n’a pas dit cela !
M. Francis Delattre. C’est une somme importante pour les familles !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Sans doute n’êtes-vous pas à un milliard près, vous qui ne cessez de formuler des propositions toutes de nature à dégrader le solde budgétaire de 10, 12, 15 milliards d’euros ! (Protestations sur les travées de l'UMP.)
Libre à vous, mais, heureusement, le Gouvernement résiste à cette gourmandise que vous manifestez ici à longueur de temps.
L’avis est donc le même que celui que j’avais émis lors de la discussion du PLF.
M. Francis Delattre. Vous vous étiez pourtant fait battre par une large majorité !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée. Le Gouvernement n’est pas davantage favorable à cette proposition, et ce pour plusieurs raisons.
Premier point : l’abaissement du plafond de l’avantage procuré par le quotient familial est indispensable pour assurer la pérennité du financement de la politique familiale tout en préservant l’universalité des allocations familiales. Je rappelle que le déficit de la branche famille s’était élevé à 2,5 milliards d’euros en 2012 et qu’il était donc urgent d’agir en la matière.
C’est pourquoi nous avons demandé, au travers de l’abaissement de l’avantage maximal en impôt résultant de l’application du quotient familial de 2 000 euros à 1 500 euros, un effort de solidarité aux foyers fiscaux les plus aisés. Cette mesure permet ainsi d’améliorer de près de 1 milliard d’euros la situation de la branche famille dès 2014, tout en préservant l’universalité des allocations familiales.
Deuxième point : la disposition proposée dans le projet de loi de finances pour 2014, tout comme celle qui a été adoptée l’an dernier, est une mesure de justice fiscale puisqu’elle concerne uniquement les foyers fiscaux les plus aisés. Elle ne touchera en effet que 13 % des foyers fiscaux ayant des enfants à charge.
Les ménages concernés font partie des 30 % les plus favorisés. Par exemple, pour un couple marié avec deux enfants, le plafonnement s’appliquera uniquement à ceux dont le revenu déclaré est supérieur à 5 850 euros par mois. La réforme proposée n’aura donc pas d’incidence sur les autres familles, qui sont non imposables ou pour lesquelles l’avantage en impôt procuré par la demi-part pour enfant à charge est inférieur ou égal à 1 500 euros.
Troisième point : cette mesure ne remet pas en cause la politique familiale, à laquelle le Gouvernement est très attaché, comme il le prouve à travers plusieurs décisions qui permettent de réduire la pauvreté des familles. Il en est ainsi de la majoration de 50 % du complément familial pour les familles nombreuses vivant sous le seuil de pauvreté, ou de l’augmentation de 25 % de l’allocation de soutien familial allouée aux familles monoparentales.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Nous sommes heureux, madame la ministre, de vous entendre réaffirmer votre attachement à la politique familiale, et donc à la « familiarisation » de l’impôt sur le revenu.
Mais cette semaine, me semble-t-il, la porte-parole du Gouvernement a évoqué une nouvelle idée mise récemment sur la table : la « déconjugalisation » de l’impôt sur le revenu. (M. le président de la commission des finances opine.) Selon l’argument avancé, le fait de prendre en compte en un même ensemble les revenus du couple pénaliserait les femmes et les inciterait à ne pas travailler.
On a du mal à s’y retrouver ! En effet, lorsque vous touchez au quotient familial, cette mesure pourrait ne concerner que les hauts revenus. Pour autant, puisque la « déconjugalisation » est désormais envisagée, on ne sait plus vraiment où veut aller le Gouvernement. Nous aimerions obtenir des éclaircissements sur vos intentions réelles en la matière.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. On peut les suspecter...
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Les auteurs du présent amendement rejoignent un positionnement que nous avions adopté lors de l’examen du projet de loi de finances, puisque nous avions présenté alors une proposition similaire relative au quotient familial. Nous pensons en effet qu’il ne faut pas faire supporter les mesures de justice fiscale – du moins la justice fiscale telle que nous l’appelons de nos vœux -, par la politique familiale.
Nous ne soutenons pas le choix qui a été fait de modifier le quotient familial. Selon nous, la réforme de l’impôt sur le revenu doit prendre la forme d’une amélioration de la progressivité. La création de nombreuses tranches supplémentaires permettrait ainsi de mener une politique fiscale plus efficace et plus juste.
Mme la présidente. La parole est à M. Richard Yung, pour explication de vote.
M. Richard Yung. Je ne peux que reprendre à mon compte l’argumentation du rapporteur général.
Vous nous dites à longueur de débats, chers collègues de l’opposition, qu’il faut baisser les dépenses publiques. Vous en faites même une sorte de veau d’or que l’on doit adorer à genoux.
M. Francis Delattre. De votre côté, c’est plutôt la vache à lait !
M. Richard Yung. Or, en l’occurrence, vous voulez financer la perte de recettes qu’entraînerait votre proposition par cette vieille lune de l’article 575 du code général des impôts. Cela ne contribue pas à crédibiliser votre amendement !
On pourrait discuter de cette mesure dans le cadre de la réforme de la fiscalité en général, mais, telle qu’elle est ici formulée, elle n’est pas acceptable.
Il y a une autre raison pour laquelle je ne voterai pas cet amendement : même si telle n’est pas réellement votre intention, vous semblez désigner comme adversaire l’Allemagne.
M. Francis Delattre. Non !
M. Philippe Dallier. Pas du tout !
M. Richard Yung. C’est pourtant ce qui est écrit dans l’objet de votre amendement !
Or les Allemands sont nos alliés, nos partenaires.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Nous ne sommes pas en 14-18 !
M. Richard Yung. Et il y a bien d’autres pays en Europe où la natalité flanche... Ce n’est donc pas une allusion judicieuse.
M. Francis Delattre. Autrement dit, il y a, d’un côté, le bien, de l’autre, le mal…
Mme Catherine Procaccia. Bravo !
M. Francis Delattre. Vous êtes battus : nous sommes le bien, vous êtes le mal ! (Sourires.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 25 est présenté par Mmes Lienemann, Espagnac et Rossignol.
L’amendement n° 182 est présenté par MM. Dantec, Placé et les membres du groupe écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 1 du I de l’article 885-0 V bis du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la seconde phrase du b), après le mot : « immobilière », sont insérés les mots : « , ainsi que les activités de production d’énergie par l’exploitation de sources d’énergie renouvelables procurant des revenus garantis en raison de l’existence d’un contrat mentionné aux articles L. 314-1 et L. 446-2 du code de l’énergie » ;
2° Le 0 b bis) est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Cette exclusion n’est pas applicable aux entreprises solidaires mentionnées à l’article L. 3332-17-1 du code du travail. »
II. – Le présent article entre en vigueur au 1er janvier 2014.
III – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L’amendement n° 25 n’est pas soutenu.
La parole est à M. André Gattolin, pour présenter l’amendement n° 182.
M. André Gattolin. La transition énergétique nécessite de favoriser les initiatives de citoyens dans le secteur des projets locaux en matière d’énergie renouvelable.
D’ores et déjà, ces initiatives se multiplient et créent des emplois dans nos territoires. Elles s’inscrivent dans le champ de l’économie sociale et solidaire, et répondent à une logique de circuit court de l’énergie. Toutefois, la réalisation du montage juridique et financier d’un tel investissement participatif des particuliers – une démarche dont je sais qu’elle vous tient à cœur, madame la ministre –, qui associe notamment les riverains au projet, est en l’état très complexe.
Afin de faciliter l’essor de tels projets locaux portés par des citoyens, cet amendement vise à étendre les réductions d’impôt de solidarité sur la fortune prévues au titre de l’investissement dans les PME aux structures de production d’énergie renouvelable, dès lors que celles-ci bénéficient de l’agrément « entreprise solidaire ».
Cela permettra de renforcer la nécessaire dynamique en faveur des énergies renouvelables et d’accroître l’acceptation de la participation active des riverains dans de tels projets.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. L’avantage ISF-PME n’est pas le bon dispositif pour soutenir les entreprises, même solidaires, de production d’énergie par l’exploitation de sources d’énergie renouvelables dont les revenus sont garantis. Des amendements similaires avaient été déposés sur le projet de loi de finances pour 2014. J’avais émis un avis défavorable, et ces amendements avaient été retirés.
Le présent amendement n’a pas plus sa place dans le projet de loi de finances rectificative, lequel a vocation à procéder à des ajustements budgétaires sur l’exercice 2013.
Encore une fois, nous en avons largement discuté lors de l’examen du PLF pour 2014, et chacun avait alors pu s’exprimer. Il n’est sans doute pas opportun de rouvrir ce débat.
Je suggère donc aux auteurs de cet amendement de le retirer.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Gattolin, l’amendement n° 182 est-il maintenu ?
M. André Gattolin. N’ayant pas participé aux précédents débats sur ce sujet, je ne peux que m’en rapporter aux propos du rapporteur général, qui me répond qu’il existe d’autres moyens de soutenir les entreprises de production d’énergie renouvelable. Qu’à cela ne tienne ! La transition énergétique étant l’une des priorités du Gouvernement, nous aimerions que ces moyens et ces nouvelles procédures soient mis en œuvre concrètement, sans attendre encore des années, afin que nos concitoyens puissent s’impliquer dans ces projets.
Je retire donc cet amendement, mais nous reviendrons à la charge et attendons vos suggestions, monsieur le rapporteur général.
Mme la présidente. L’amendement n° 182 est retiré.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 26 est présenté par Mmes Lienemann, Espagnac et Rossignol.
L’amendement n° 181 est présenté par MM. Dantec, Placé et les membres du groupe écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le d) du 2° du I de l’article 199 terdecies-0 A du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la seconde phrase du premier alinéa, après le mot : « immobilière », sont insérés les mots : « , ainsi que les activités de production d’énergie par l’exploitation de sources d’énergie renouvelables procurant des revenus garantis en raison de l’existence d’un contrat mentionné aux articles L. 314-1 et L. 446-2 du code de l’énergie » ;
2° Le second alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Cette exclusion n’est pas applicable aux entreprises solidaires mentionnées à l’article L. 3332-17-1 du code du travail ».
II. – Le présent article entre en vigueur au 1er janvier 2014.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L’amendement n° 26 n’est pas soutenu.
La parole est à M. André Gattolin, pour présenter l’amendement n° 181.
M. André Gattolin. Afin de faciliter l’essor des projets locaux de production d’énergie renouvelable, cet amendement vise, cette fois-ci, à étendre les réductions d’impôt sur le revenu prévues au titre de l’investissement dans les PME aux structures de production d’énergie renouvelable, dès lors qu’elles bénéficient de l’agrément « entreprise solidaire ».
Le coût de cette mesure a été évalué par le réseau des coopératives Enercoop à 450 000 euros en 2014 et, au maximum, à 1 million d’euros en 2016, avec un effet de levier permettant de lever jusqu’à 6 millions d’euros d’investissement dans les énergies renouvelables.
Comme vous le voyez, il s’agit d’une proposition dynamique, et j’attends avec impatience l’avis du rapporteur général !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Je partage votre objectif, mon cher collègue,...
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Cela commence bien...
M. Francis Delattre. Mais…
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. ... mais, comme pour l’ISF-PME, je considère que l’avantage fiscal Madelin, qui permet au contribuable de réduire son impôt sur le revenu en investissant dans le capital de PME, n’est pas le bon outil : il est en effet destiné à favoriser la prise de risque et ne doit donc pas se cumuler avec une garantie tarifaire.
Je rappelle que les entreprises solidaires, tout comme celles du secteur des énergies renouvelables, bénéficient déjà de divers avantages fiscaux spécifiques.
Je demande donc le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Gattolin, l’amendement n° 181 est-il maintenu ?
M. André Gattolin. Non, je vais également le retirer, madame la présidente.
Il faudra cependant que l’on sorte à un moment donné, monsieur le rapporteur général, la « boîte à outils » alternative !
Mme la présidente. L’amendement n° 181 est retiré.
L'amendement n° 171 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Fortassin, Barbier, Collombat, Requier et Tropeano, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 3° du I de l’article 199 sexvicies du code général des impôts est abrogé.
Cet amendement n’est pas soutenu.
L’amendement n° 85 rectifié bis, présenté par MM. Dassault, Portelli et P. Dominati, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 200 sexies du code général des impôts est abrogé.
La parole est à M. Serge Dassault.
M. Serge Dassault. La prime pour l’emploi, instaurée voilà plus de douze ans par vos prédécesseurs, madame la ministre, est une dépense qui a été prévue pour inciter les chômeurs, indemnisés pendant vingt-quatre mois à taux plein, à bien vouloir accepter un emploi dont le salaire leur semble insuffisant par rapport à ce qu’ils touchent en ne travaillant pas…
Dans leurs rapports, la Cour des comptes et l’Inspection générale des finances se sont montrées critiques quant au bilan de la PPE, dont l’impact sur l’emploi est insuffisant.
D’après le projet de loi de finances pour 2014, le coût de cette prime pour le budget de l’État devait s’élever à 2,21 milliards d’euros. Pour le budget de 2013, il atteignait 2,3 milliards d’euros. C’est une somme considérable pour une mesure qui ne crée aucun emploi nouveau et s’apparente plutôt à de l’aide sociale.
Un exemple, donné par la Cour des comptes, montre qu’un célibataire reprenant un emploi rémunéré au SMIC perçoit, sans la PPE, 67 euros de revenu supplémentaire par rapport à ce qu’il perçoit en ne travaillant pas, et 180 euros en plus avec cette prime. C’est la preuve que l’inactivité est trop payée par rapport à l’activité.
Pour inciter les chômeurs à reprendre un travail, il serait plus utile de réduire la durée de financement du chômage que de leur donner une prime pour qu’ils acceptent de travailler !
Madame la ministre, je vous propose de supprimer cette dépense, et de disposer ainsi de 2 milliards d’euros supplémentaires, somme que vous pourrez utiliser pour d’autres activités, pour vous éviter de créer de nouveaux impôts ou pour réduire votre déficit budgétaire.
Il y va de notre équilibre budgétaire : avec cette mesure, vous ferez des économies !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Très bien !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Un amendement identique a déjà recueilli un avis défavorable lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2014.
Vous préconisez en fait, mon cher collègue, une baisse de pouvoir d’achat de 2,2 milliards d’euros pour les ménages les plus modestes.
Certains membres de votre groupe ne cessent de répéter, depuis le début de cette discussion, que le Gouvernement tend à introduire, par les dispositifs qu’il met en place, un processus récessif dans notre pays. Or diminuer le pouvoir d’achat des ménages les moins aisés, comme vous le proposez, irait dans le sens de ce prétendu mouvement de récession dénoncé par la droite !
M. Francis Delattre. Vos choix sont contestables !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Les contradictions sont de votre côté !
J’émets donc, bien sûr, un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée. Monsieur le sénateur, il va de soi que le Gouvernement ne peut pas non plus vous suivre dans cette voie, pour les raisons qui viennent d’être exposées par le rapporteur général et qui tiennent à la préservation du pouvoir d’achat des ménages les plus modestes.
Dans le rapport qu’il a remis au Premier ministre le 15 juillet dernier, Christophe Sirugue propose une réforme du couple « prime pour l’emploi–RSA ». À ce titre, il examine différents scénarios et formule plusieurs propositions en faveur des travailleurs modestes, qui constituent autant de pistes de travail pour le Gouvernement, notamment pour la ministre chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion.
La prime pour l’emploi est bien l’un des sujets qui ont vocation à être abordés dans le cadre du débat sur la fiscalité annoncé par le Premier ministre.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Marini, pour explication de vote.
M. Philippe Marini. Je souhaite expliquer pourquoi je voterai cet amendement.
La prime pour l’emploi est un dispositif déjà relativement ancien, puisqu’il remonte à la fin du gouvernement Jospin. En raison du décalage qui intervient nécessairement entre son versement et la période de référence, de nombreuses questions se sont posées sur son effectivité et sur son caractère incitatif.
En effet, la prime pour l’emploi ne peut être versée qu’au cours de l’année N+1, ce qui n’a guère de chance d’inciter ses bénéficiaires à faire le rapprochement avec la situation dans laquelle ils se trouvaient au moment où elle a été calculée. Ce phénomène a été mis en exergue par de nombreux observateurs, économistes ou auteurs de rapports administratifs.
Madame la ministre, le gouvernement auquel vous appartenez a déjà réduit très sensiblement la prime pour l’emploi. La non-indexation des barèmes de l’impôt sur le revenu pendant deux années a entraîné, sauf erreur de ma part, une diminution de son coût global, celui-ci passant de 2,9 milliards d’euros à 2,2 milliards d’euros. Le Gouvernement a donc d’ores et déjà réduit de 700 millions d’euros cette distribution de pouvoir d’achat.
À mon sens, si l’on suivait les préconisations de Serge Dassault, même dans des proportions plus modestes, par exemple en réduisant encore de 500 millions d’euros la prime pour l’emploi, on prendrait certainement une décision raisonnable et rien de particulier ne se passerait dans notre économie. En ces temps où il faut veiller à l’efficacité de la dépense publique, ce serait à mon avis une bonne voie à suivre.
J’ajoute, en réponse à notre excellent rapporteur général, que la logique des membres qui siègent de ce côté (M. Philippe Marini désigne les travées de la droite de l’hémicycle.) n’est pas tout à fait analogue à celle qui prévaut en face, où d’ailleurs les travées sont en ce moment très clairsemées. (Sourires sur les travées de l'UMP.) Je rappelle que, ce matin, nous avons voté en faveur de l’exonération des heures supplémentaires. Voilà du pouvoir d’achat ! Par conséquent, que l’on ne nous reproche pas de négliger le pouvoir d’achat de nos concitoyens.
Mme la présidente. La parole est à M. Serge Dassault, pour explication de vote.
M. Serge Dassault. Je trouve dommage, alors que le Premier ministre cherche à réduire les dépenses de l’État, qu’il ne saisisse pas cette occasion d’augmenter le budget de 2 milliards d’euros, en renonçant à cette mesure qui n’existe nulle part ailleurs et qui est tout de même assez amorale, puisqu’il s’agit de donner de l’argent à des gens qui ne veulent pas travailler, parce qu’ils trouvent qu’ils ne gagnent pas assez.
M. Thierry Foucaud. Il n’y a pas de travail !
Mme Marie-France Beaufils. C’est inacceptable !
M. Serge Dassault. Madame la ministre, pour vous, pour le budget, pour la France, je persiste à recommander l’adoption de cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 85 rectifié bis.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin n° 101 :
Nombre de votants | 347 |
Nombre de suffrages exprimés | 316 |
Pour l’adoption | 139 |
Contre | 177 |
Le Sénat n'a pas adopté.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Très bien !
Mme la présidente. L'amendement n° 176, présenté par MM. Mézard, Collin, Fortassin et Alfonsi, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au b du 2 de l’article 200-0 A du code général des impôts, après la référence : « 199 vicies A, », est insérée la référence : « 199 sexdecies, » et après la référence « 200 quater A, », est insérée la référence : « 200 quater B, ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Nicolas Alfonsi.