Article 22 bis
I A (nouveau). – La division et l’intitulé du chapitre III bis du titre III du code de la consommation sont supprimés. L’article L. 333–7 devient l’article L. 333–23 au sein d’une section 3 du même chapitre III telle qu’elle résulte du I du présent article.
I. – Le chapitre III du titre III du livre III du code de la consommation est ainsi modifié :
1° Est insérée une section 1 intitulée : « Dispositions communes relatives au traitement des situations de surendettement des particuliers », qui comprend les articles L. 333–1 à L. 333–3–1 ;
2° Est insérée une section 2 intitulée : « Fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers », qui comprend les articles L. 333–4 et L. 333–5 ;
3° (Supprimé)
4° Est ajoutée une section 3 ainsi rédigée :
« Section 3
« Registre national des crédits aux particuliers
« Art. L. 333–6. – Il est institué un registre national recensant les crédits à la consommation accordés aux personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels. Ce registre, dénommé “registre national des crédits aux particuliers”, est placé sous la responsabilité de la Banque de France. Il est soumis à la loi n° 78–17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.
« Ce registre recense également les informations relatives aux incidents de paiement caractérisés liés aux crédits accordés aux consommateurs, ainsi que les informations relatives aux situations de surendettement traitées en application du présent titre III et aux liquidations judiciaires prononcées en application du titre VII du livre VI du code de commerce.
« La Banque de France est seule habilitée à centraliser ces informations.
« Un comité de suivi du registre national des crédits aux particuliers est placé auprès de la Banque de France. Il comprend deux députés et deux sénateurs. Un décret en Conseil d’État précise la composition et les missions de ce comité.
« Art. L. 333–7. – Le registre national des crédits aux particuliers a pour finalité de prévenir les situations de surendettement des personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels, en fournissant aux établissements de crédit mentionnés au titre Ier du livre V du code monétaire et financier, aux établissements de monnaie électronique et aux établissements de paiement mentionnés au titre II du même livre et aux organismes mentionnés au 5 de l’article L. 511–6 du même code un élément d’appréciation de la solvabilité des personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels qui sollicitent un crédit, et, le cas échéant, des personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels qui se portent caution.
« Art. L. 333–8. – En application de l’article L. 311–9, les établissements et organismes mentionnés à l’article L. 333–7 consultent le registre national des crédits aux particuliers avant toute décision effective d’octroyer un crédit à la consommation.
« Les établissements et organismes mentionnés au premier alinéa du présent article peuvent également consulter les informations contenues dans le registre national des crédits aux particuliers concernant les personnes qui se portent caution avant toute décision effective d’octroyer un crédit à la consommation.
« Les caisses de crédit municipal mentionnées à l’article L. 514–1 du code monétaire et financier ne sont pas tenues de consulter le registre national des crédits aux particuliers avant l’octroi de prêts sur gage corporel.
« En application du quatrième alinéa de l’article L. 311–16 du présent code, les établissements et organismes mentionnés au premier alinéa du présent article consultent également le registre national des crédits aux particuliers avant de proposer à l’emprunteur de reconduire un contrat de crédit renouvelable et dans le cadre de la vérification triennale de solvabilité de l’emprunteur.
« Les informations mentionnées au deuxième alinéa de l’article L. 333–6 peuvent également être consultées par les établissements et organismes mentionnés au premier alinéa du présent article avant qu’ils ne formulent une offre en application des articles L. 312–7 et L. 314–6 et être prises en compte par ces mêmes établissements et organismes dans leurs décisions d’attribution des moyens de paiement, ainsi que pour la gestion des risques liés aux crédits souscrits par leurs clients.
« La consultation du registre national des crédits aux particuliers par les établissements et organismes mentionnés au premier alinéa fait l’objet d’une tarification dont le produit finance les charges liées à la mise en place et à la gestion du registre. Les frais afférents à cette consultation ne peuvent être facturés par ces établissements et organismes aux personnes physiques concernées.
« Les informations contenues dans le registre ne peuvent pas être consultées ni utilisées à d’autres fins que celle mentionnée à l’article L. 333–7 et pour d’autres motifs que ceux mentionnés au présent article, en particulier à des fins de prospection commerciale, sous peine des sanctions prévues à l’article 226–21 du code pénal.
« Les modalités d’application du présent article sont précisées par décret en Conseil d’État.
« Art. L. 333–9. – (Non modifié) Les commissions de surendettement prévues à l’article L. 331–1 peuvent consulter le registre national des crédits aux particuliers dans le cadre de l’exercice de leur mission de traitement des situations de surendettement, afin de dresser l’état d’endettement du débiteur.
« Les greffes des tribunaux compétents peuvent également consulter le registre national des crédits aux particuliers dans le cadre de la procédure de traitement des situations de surendettement.
« Art. L. 333–10. – I. – (Non modifié) Les établissements et organismes mentionnés à l’article L. 333–7 sont tenus de déclarer à la Banque de France les informations relatives aux crédits souscrits par des consommateurs.
« Les crédits concernés par ces obligations de déclaration sont :
« 1° Les prêts personnels amortissables ;
« 2° Les crédits renouvelables définis à l’article L. 311–16, lorsqu’ils sont utilisés ;
« 3° Les crédits affectés ou liés définis au 9° de l’article L. 311–1 ;
« 4° Les autorisations de découvert définies au 10° du même article L. 311-1, lorsqu’elles sont remboursables dans un délai supérieur à trois mois ;
« 5° Les opérations de location-vente et de location avec option d’achat, qui sont assimilées à des crédits pour l’application de la présente section.
« Les opérations de crédit dont le montant total du crédit est inférieur à 200 € sont exclues de ces obligations de déclaration.
« Sont également exclues de ces obligations de déclaration :
« a) Les opérations mentionnées aux 4° à 10° de l’article L. 311-3 ;
« b) Les opérations mentionnées aux 1 et 2 de l’article L. 511-6 du code monétaire et financier et au 1 du I de l’article L. 511-7 du même code ;
« c) Les opérations de prêt sur gage corporel souscrits auprès des caisses de crédit municipal en application de l’article L. 514-1 dudit code.
« II. – (Non modifié) Les établissements et organismes mentionnés au I sont également tenus de déclarer à la Banque de France les informations relatives aux incidents de paiement caractérisés liés aux crédits souscrits par des consommateurs.
« Les crédits concernés par ces obligations de déclaration sont :
« 1° Les crédits mentionnés aux 1° à 3° et 5° du I, y compris les opérations dont le montant total du crédit est inférieur à 200 € ;
« 2° Les autorisations de découvert définies au 10° de l’article L. 311-1, lorsqu’elles sont remboursables dans un délai supérieur à un mois, y compris les opérations dont le montant total du crédit est inférieur à 200 € ;
« 3° Les crédits immobiliers définis à l’article L. 312–2.
« II bis (nouveau). – Les commissions de surendettement et les greffes des tribunaux compétents sont tenus de déclarer à la Banque de France les informations relatives aux situations de surendettement ainsi qu’aux liquidations judiciaires prononcées en application du titre VII du livre VI du code de commerce.
« III. – Un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, détermine les informations contenues dans le registre, ainsi que celles qui sont restituées aux établissements et organismes mentionnés à l’article L. 333–7 du présent code lors de la consultation du registre.
« Le registre contient notamment des informations relatives à :
« 1° L’état civil de la personne qui a souscrit le crédit ;
« 2° L’identification de l’établissement ou de l’organisme à l’origine de la déclaration ;
« 3° L’identification, la catégorie et les caractéristiques du crédit, en particulier l’indication du solde restant dû et de la date de la dernière échéance ;
« 4° Les incidents de paiement caractérisés ;
« 5° Les situations de surendettement et les liquidations judiciaires prononcées en application du titre VII du livre VI du code de commerce ;
« 6° La date de mise à jour des données ;
« 7° Le motif et la date des consultations effectuées.
« Le registre indique, le cas échéant, que le crédit a été souscrit par plusieurs emprunteurs. Dans ce cas, il contient l’intégralité des informations correspondantes pour chacun des emprunteurs individuellement.
« Les informations restituées lors de la consultation du registre par les établissements et organismes mentionnés à l’article L. 333–7 du présent code excluent notamment celles relatives à l’identification des établissements et organismes à l’origine des déclarations.
« Le décret prévu au premier alinéa du présent III fixe également les délais et les modalités de collecte, d’enregistrement, de conservation, de consultation et de restitution des informations contenues dans le registre.
« IV. – Les informations mentionnées aux I, II et II bis sont déclarées à la Banque de France sous la responsabilité des établissements et organismes à l’origine de la déclaration.
« Art. L. 333–11. – (Non modifié) Les informations sont conservées dans le registre national des crédits aux particuliers pendant la durée d’exécution du contrat de crédit, sous réserve des dispositions ci-dessous.
« Les informations relatives aux crédits renouvelables mentionnés au 2° du I de l’article L. 333–10, à l’exception des informations relatives aux incidents de paiement caractérisées, sont conservées pendant la durée de remboursement du montant du crédit utilisé.
« Les informations relatives aux incidents de paiement caractérisés sont radiées immédiatement à la réception de la déclaration de paiement intégral des sommes dues effectuée, sous sa responsabilité, par l’établissement ou l’organisme à l’origine de l’inscription au registre. Elles ne peuvent, en tout état de cause, être conservées dans le registre pendant plus de cinq ans à compter de la date d’enregistrement par la Banque de France de l’incident ayant entraîné la déclaration.
« Les informations relatives aux situations de surendettement sont conservées pendant toute la durée de l’exécution du plan conventionnel ou des mesures prises en vertu des articles L. 331–7, L. 331–7–1 et L. 331–7–2 ou pendant la durée globale d’exécution du plan et des mesures lorsqu’ils sont prescrits successivement dans le cadre d’une révision ou d’un renouvellement. Cette durée ne peut excéder huit ans.
« Toutefois, ces informations sont radiées à l’issue d’une période de cinq ans à compter de la date à laquelle le plan conventionnel ou les mesures sont devenus effectifs, si aucun incident de remboursement au titre de ce plan ou de ces mesures n’est enregistré à la date d’expiration de cette période.
« Pour les personnes ayant bénéficié d’une procédure de rétablissement personnel, les informations concernant cette procédure sont radiées à l’expiration d’une période de cinq ans à compter de la date d’homologation ou de clôture de la procédure. La même durée est applicable aux personnes physiques ayant fait l’objet d’une liquidation judiciaire en application de l’article L. 670–6 du code de commerce, ainsi qu’à celles ayant bénéficié d’un effacement partiel de dettes dans le cadre d’un plan conventionnel ou d’une mesure d’une durée inférieure à cinq ans.
« Art. L. 333–12. – Un identifiant spécifique est utilisé pour la collecte, l’enregistrement, la conservation, la consultation et la restitution des informations figurant dans le registre national des crédits aux particuliers. Cet identifiant est créé à partir, notamment, de l’état civil des personnes concernées.
« Un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés et de la Banque de France, précise les conditions et modalités d’application du présent article.
« Art. L. 333–13. – Les établissements et organismes mentionnés à l’article L. 333–7 informent les personnes qui sollicitent un crédit à la consommation ainsi que, le cas échéant, celles qui se portent caution, qu’ils doivent, dans le cadre de la procédure d’octroi de crédit, consulter le registre national des crédits aux particuliers et qu’ils sont tenus, en cas d’octroi, de déclarer les informations concernant les emprunteurs dans ce registre.
« Un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, précise les conditions de cette information. Ce décret fixe également les conditions dans lesquelles les personnes sont informées de leur inscription dans le registre, ainsi que de leurs droits d’accès et de rectification et des modalités d’exercice de ces droits.
« Art. L. 333–14. – (Non modifié) Toute personne qui participe à la gestion du registre national des crédits aux particuliers est tenue au secret professionnel, sous peine des sanctions prévues à l’article 226–13 du code pénal.
« La Banque de France est déliée du secret professionnel pour la diffusion aux établissements et organismes mentionnés à l’article L. 333–7 du présent code, aux commissions de surendettement et aux greffes des tribunaux compétents, ainsi qu’aux agents de l’Autorité de contrôle prudentiel et de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, des informations nominatives contenues dans le registre national des crédits aux particuliers.
« Elle est également déliée du secret professionnel en cas de demandes présentées par les organismes gestionnaires des bases de données utilisées sur le territoire des États membres de l’Union européenne autres que la France pour l’évaluation de la solvabilité des consommateurs, lorsqu’ils sont sollicités par un établissement de crédit ou un établissement financier ayant son siège social dans un État membre de l’Union européenne pour l’octroi d’un crédit à une personne physique résidant en France.
« Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent article.
« Art. L. 333–15. – (Non modifié) Il est interdit à toute personne ou organisme habilité à accéder aux informations contenues dans le registre national des crédits aux particuliers d’en remettre copie à quiconque sous peine des sanctions prévues aux articles 226–21 et 226–22 du code pénal. Toutefois, cette interdiction ne s’applique pas pour la remise aux intéressés, à leur demande, d’une copie des informations contenues dans le registre les concernant, lorsqu’ils exercent leurs droits d’accès et de rectification aux informations les concernant contenues dans le registre, en application de l’article 39 de la loi n° 78–17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.
« Un décret en Conseil d’État précise les conditions et modalités d’exercice des droits d’accès et de rectification par les intéressés aux informations contenues dans le registre les concernant.
« Art. L. 333–16. – (Non modifié) La collecte des informations contenues dans le registre par des personnes autres que la Banque de France, les établissements et organismes mentionnés à l’article L. 333–7, les commissions de surendettement et les greffes des tribunaux compétents, l’Autorité de contrôle prudentiel et la Commission nationale de l’informatique et des libertés ainsi que les organismes gestionnaires mentionnés au troisième alinéa de l’article L. 333–14 du présent code, est punie des peines prévues à l’article 226–18 du code pénal.
« Art. L. 333–17. – Le fait, pour tout établissement ou organisme mentionné à l’article L. 333–7, de ne pas satisfaire aux obligations de consultation fixées à l’article L. 333–8 ou aux obligations de déclaration fixées à l’article L. 333–10 est puni dans les conditions prévues aux articles L. 612–39 et L. 612–42 du code monétaire et financier.
« Art. L. 333–18. – (Non modifié) L’établissement ou l’organisme qui n’a pas respecté les obligations de consultation fixées à l’article L. 333–8 ou les obligations de déclaration fixées à l’article L. 333–10 est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge. L’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n’a pas été déchu. Les sommes perçues au titre des intérêts, qui sont productives d’intérêts au taux de l’intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.
« Art. L. 333–19. – (Non modifié) Afin de justifier qu’ils ont consulté le registre national des crédits aux particuliers et, le cas échéant, prouver leurs prétentions devant le juge, les établissements et organismes mentionnés à l’article L. 333–7 conservent des preuves de la consultation du registre et de son motif sur un support durable. Ils doivent être en mesure de démontrer que les modalités de consultation du registre et de conservation des preuves garantissent l’intégrité des informations ainsi collectées.
« Les éléments relatifs à la consultation du registre national des crédits aux particuliers, dès lors qu’ils ont été conservés par les établissements et organismes mentionnés à l’article L. 333–7 dans des conditions garantissant leur intégrité, peuvent être invoqués à titre de preuve du respect de l’obligation de consultation du registre national des crédits aux particuliers.
« Les informations collectées lors de la consultation du registre national des crédits aux particuliers ne peuvent être utilisées par les établissements et organismes mentionnés à l’article L. 333-7 dans des systèmes de traitement automatisé de données que lorsque ces derniers sont opérés dans le respect de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.
« Art. L. 333–20. – (Non modifié) Seuls les personnels des établissements et organismes mentionnés à l’article L. 333–7 individuellement désignés et habilités à cet effet, selon des procédures spécifiques internes à ces établissements et organismes, sont autorisés à consulter le registre national des crédits aux particuliers.
« Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article.
« Art. L. 333–21. – La présente section s’applique aux crédits sollicités et souscrits par les personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels domiciliées en France, ainsi qu’à celles domiciliées hors de France qui bénéficient d’une mesure de traitement de leur situation de surendettement en application du présent titre.
« Art. L. 333–22. – (Non modifié) Dans les départements d’outre-mer, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon, l’institut d’émission des départements d’outre-mer exerce, en liaison avec la Banque de France, les attributions dévolues à celle-ci par le présent chapitre. »
II. – (Supprimé)
III. – À la seconde phrase de l’article L. 311–9 et au quatrième alinéa de l’article L. 311-16 du même code, après la référence : « L. 333–5 », sont insérés les mots : « , et le registre national des crédits aux particuliers prévu à l’article L. 333–6, dans les conditions prévues par le décret mentionné à l’article L. 333–13 ».
IV. – (Non modifié) La première phrase de l’article L. 313–9 du même code est complétée par les mots : « et au registre national des crédits aux particuliers prévu à l’article L. 333–6 ».
V. – (Non modifié) À la seconde phrase du second alinéa de l’article L. 331–11 du même code, la référence : « à l’article L. 333–4 » est remplacée par les références : « aux articles L. 333–4, L. 333–10 et L. 333-11 ».
VI (nouveau). – À l’article L. 670–6 du code de commerce, après la référence : « à l’article 333–4 », sont insérés les mots : « et au registre prévu à l’article L. 333–6.
VII (nouveau). – Au a) du 2. du III de l’article 80 de la loi n° 2005–32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale, après la référence : « à l’article L. 333–4 » sont ajoutés les mots : « et au registre national des crédits aux particuliers prévu à l’article L. 333–6 ».
VIII (nouveau). – L’ordonnance n° 2013–421 du 23 mai 2013 relative à l’inscription au fichier national des incidents de remboursements des crédits aux particuliers des décisions relatives au traitement du surendettement en Polynésie française, est ratifiée.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 136 rectifié est présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand, Collin, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.
L'amendement n° 485 est présenté par M. Le Cam, Mmes Schurch, Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
L’amendement n° 136 rectifié n’est pas soutenu.
La parole est à M. Gérard Le Cam, pour présenter l’amendement n° 485.
M. Gérard Le Cam. Nous demandons la suppression de l’article 22 bis et des articles suivants, relatifs au registre national des crédits aux particuliers. Introduit par un amendement du Gouvernement, donc dispensé d’étude d’impact, cet article présente le double inconvénient d’être inefficace et de porter atteinte aux libertés individuelles.
Afin de tenir compte de l’avis du Conseil d’État, qui ne nous a pas été transmis, et d’assurer la proportionnalité du registre, le Gouvernement a réduit le champ du fichier.
Comme le rappelle la commission des finances dans son rapport pour avis, on espère que, dans cette version allégée, la proportionnalité « entre le coût et la lourdeur technique du fichier, d’une part, et les effets bénéfiques attendus, d’autre part » et surtout « entre, d’une part, les atteintes à la protection de la vie privée pour une partie importante de la population et, d’autre part, l’utilité réelle du fichier en termes de prévention du surendettement pour une partie, nécessairement plus réduite, de cette même population » sera respectée. Nous en doutons, et nous désapprouvons cette manie de ficher les personnes pour assurer leur protection.
Un tel fichage systématique de plus de 10 millions à 12 millions de personnes fait peser un risque dangereux et difficilement acceptable au regard des libertés publiques sur la protection des données personnelles. On sait qu’aucun fichier n’est hermétique. Même si ce n’est pas la volonté du projet de loi, l’expérience montre que les fichiers évoluent. Aux États-Unis et en Allemagne par exemple, le fichier est consultable par bien trop de personnes : opérateurs de téléphonie, distributeurs d’énergie, bailleurs, voire tout professionnel, y compris parfois employeur. La conséquence directe pour les consommateurs est l’exclusion de certains services vitaux comme l’eau, le logement ou l’énergie.
Ensuite, dans sa version plus réduite, le registre ne prend pas en compte les crédits immobiliers, ni même les loyers, qui sont pourtant des entrées très lourdes dans le budget des ménages. Quel intérêt peut-il donc avoir si la situation mise à disposition ne traduit qu’une partie de la réalité de l’endettement ? Un autre facteur d’inefficacité tient au fait que si une personne se voit refuser un crédit, il n’est pas dit qu’elle ne trouve pas d’autres prêteurs.
Selon plusieurs associations de consommateurs, comme la Confédération nationale du logement, la CNL, ou la Confédération syndicale des familles, les expériences étrangères, notamment celle de la Belgique, démontrent clairement que le fichier positif ne permet pas de lutter contre le surendettement. En effet, la Banque nationale de Belgique constate que le nombre de ménages surendettés a augmenté depuis 2008, et ce malgré l’instauration de la centrale des crédits. Considérer que le fichier positif permettra de lutter contre le surendettement, c’est ne pas prendre en considération la réalité du phénomène. Il est trop facile de considérer que le candidat au crédit serait systématiquement responsable de son surendettement, car étant de mauvaise foi lors de l’évaluation de sa situation financière avec le vendeur de crédit.
Lutter contre le surendettement, c’est lutter contre la pauvreté et l’exclusion. Recentrons les priorités sur les services publics, arrêtons le démantèlement du réseau de succursales de la Banque de France, si importante en matière de surendettement et donnons à nos concitoyens les moyens de consommer correctement !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer le dispositif du projet de loi créant un registre national des crédits aux particuliers.
Dans l’objet de l’amendement est déplorée l’absence d’étude d’impact, mais je rappelle que de nombreux débats et travaux de configuration ont été conduits depuis plus de trente ans sur ce sujet. Au début de cette année, le rapport sénatorial du groupe de travail intercommissions s’est efforcé de mesurer tous les tenants et aboutissants d’une telle initiative. Avec nos collègues, nous avons auditionné une multitude d’associations ou de banques pendant près de six mois. Le rapport, qui est à votre disposition, illustre la finesse du travail qui a été mené. Le groupe dont je parlais a d’ailleurs essayé de trouver des pistes, qui étaient intéressantes, et dont certaines ont été reprises dans le texte.
L’amendement met en avant les préoccupations relatives aux libertés individuelles. J’aimerais formuler plusieurs observations à cet égard.
D’abord, ces préoccupations sont très attentivement prises en compte dans le projet de loi, qui écarte l’enregistrement positif des crédits immobiliers.
Ensuite, de nombreux fichiers privés existent déjà.
Enfin, l’impératif de la lutte contre le surendettement et le mal-endettement nous paraît justifier la création d’un tel registre national.
M. Le Cam a fait mention de l’hostilité des associations de consommateurs au dispositif envisagé. Pour notre part, nous avons auditionné les représentants d’organismes qui sont au contact quotidien des miséreux et des plus endettés – je pense au Secours populaire, au Secours catholique ou à CRESUS –, et nos interlocuteurs nous ont indiqué être favorables au fichier.
Nous savons tous que le sujet suscite des positions diverses, mais le Gouvernement a pris la décision de le mettre en débat. Personnellement, je m’en réjouis, car je pense que nous allons avoir des échanges fructueux dans l’hémicycle.
La commission émet bien sûr un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je profite de l’occasion qui m’est offerte pour indiquer à la Haute Assemblée quels sont les éléments de conviction qui guideront mon attitude au cours de notre débat sur le registre national des crédits aux particuliers, ou RNCP.
Je rappelle d’abord que la création du registre est la traduction d’un engagement du Président de la République faisant lui-même suite à une promesse de campagne électorale. D’ailleurs, Nicolas Sarkozy, l’autre candidat présent au second tour de l’élection présidentielle de 2012, avait également manifesté son intention d’instituer un tel dispositif dans l’émission Face aux Français, sur TF1.
Il s’agissait également d’une volonté forte de plusieurs groupes politiques. Certes, le débat traverse les groupes politiques et a même pu faire apparaître des différences d’approche au sein de chacun d’entre eux ; j’en ai moi-même été témoin. Mais plusieurs groupes se sont fortement exprimés en faveur d’un tel mécanisme.
En outre, et M. le rapporteur l’a indiqué, il s’agit également d’une demande récurrente des associations de lutte contre le surendettement. Si l’idée d’un tel registre ne fait pas forcément l’unanimité au sein du mouvement consumériste, elle rassemble tous les acteurs de la lutte contre le surendettement. C’est à l’aune de leur expertise que nous avons travaillé.
Lors de la Conférence nationale contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale des 10 et 11 décembre 2012, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault a également pris l’engagement de mettre en place un registre national des crédits aux particuliers, afin de contribuer à la lutte contre le surendettement. Car, je le répète, la mise en place du registre ne fera pas disparaître le surendettement. Il s’agit d’un instrument de détection de l’exposition au surendettement, donc de lutte contre le surendettement et de facilitation du désendettement des personnes touchées par ce problème.
En clôture du 31e Congrès de l’Union nationale et interfédérale des œuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux, l’UNIOPSS, le Président de la République a rappelé cet engagement et son attachement personnel à la création d’un registre national des crédits aux particuliers.
Ce que nous créons, ce n’est pas, tant s’en faut, un outil miracle. Mais c’est un dispositif équilibré et proportionné à l’objectif qui est le nôtre : lutter contre le surendettement, qui se caractérise souvent – nous le constatons dans l’examen des dossiers – par l’accumulation de plusieurs crédits à la consommation.
Nous avons consulté la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL, et la Commission nationale consultative des droits de l’homme, la CNCDH.
Surtout, nous avons travaillé avec le Conseil d’État, qui a rendu, à la demande du Gouvernement, un avis sur le registre national des crédits aux particuliers. La haute juridiction a effectué ce que l’on appelle un « contrôle de proportionnalité ». Sur ce type de sujets, le Conseil d’État comme le Conseil Constitutionnel examinent si le traitement envisagé ne porte pas une atteinte disproportionnée à la liberté proclamée à l’article II de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, qui implique le droit à la vie privée.
Le contrôle est très rigoureux – c’est bien le moins en matière de libertés publiques – et exigeant. Nos prédécesseurs s’en souviennent : dans une décision du 22 mars 2012, le Conseil constitutionnel avait censuré des dispositions de la loi relative à la protection de l’identité, comme la fameuse carte d’identité biométrique.
Le Gouvernement a souhaité s’engager avec le Conseil d’État dans ses travaux préalables sur le chemin de la rigueur et de la précision. Comme je l’ai précisé tout à l’heure, l’objectif était de construire un objet utile et juridiquement solide, et non d’adopter une mesure toute symbolique sans portée opérante.
Pour prendre une image, le contrôle de proportionnalité mené par le juge constitutionnel est un peu comparable aux plateaux d’une balance dont le fléau viendrait in fine déterminer une triple exigence d’adéquation, de nécessité et de proportionnalité, au regard des finalités poursuivies.
Cela implique de mesurer l’ampleur de l’atteinte à la vie privée en déterminant le nombre des personnes enregistrées, la nature des données requises, mais également les garanties en termes de consultation des données, de durée de conservation de ces données et de protection contre les détournements possibles du traitement. Bien évidemment, tout cela est mesuré à l’aune de finalités d’intérêt général.
En l’espèce, le Conseil d’État a considéré que cette finalité d’intérêt général était établie. Le RNCP répond, pour le Conseil d’État, à un intérêt général économique et social certain – la prévention de l’exclusion – qui est susceptible de se rattacher au préambule de la Constitution de 1946 lui-même, intégré à notre bloc de constitutionnalité.
De même, l’équilibre proposé est conforme, tel qu’il est, à ces exigences : un fichier centré sur les seuls crédits à la consommation, les plus pertinents à traiter dans la lutte contre le surendettement ; une limitation du nombre de personnes enregistrées adaptée à la finalité poursuivie ; des délais d’enregistrement proportionnés que les personnes peuvent interrompre avec un droit de radiation automatique, à leur demande, au bout de sept ans ; des précautions quant à l’utilisation du traitement.
Pour toutes ces raisons, je ne pourrai émettre que des avis défavorables sur des amendements qui seraient de nature à porter atteinte à un équilibre encore fragile, et qui a fait l’objet de consultations intenses.
Nous souhaitons préserver cet équilibre, car nous voulons maintenir la création du RNCP. Nous sommes avant tout préoccupés par la constitution de ce registre, certains de ses effets sur la détection plus précoce des familles surendettées, ce qui nous permettra de lutter plus rapidement en faveur de leur désendettement.
J’espère que nous parviendrons à conserver cet équilibre au Sénat et à voter la création, historique, ai-je envie de dire, de ce registre national des crédits aux particuliers. (Mme Bernadette Bourzai applaudit.)
J’émets un avis défavorable sur l’amendement présenté par M. Le Cam.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. C’est la deuxième fois que l’on discute de l’opportunité de créer ce « registre » ou « fichier », peu importe la terminologie adoptée lors de la discussion de la loi Lefebvre.
On n’était pas mûrs, le travail n’avait pas été suffisamment réalisé en amont. Je sais que le gouvernement de l’époque avait éprouvé des réticences, comme certains collègues dans cet hémicycle.
À la suite de cet épisode, j’ai considéré qu’il était urgent de mettre en place un groupe de travail intercommissions, associant à la fois la commission des affaires économiques, représentée par Alain Fauconnier, la commission des lois, représentée par Nicole Bonnefoy, la commission des affaires sociales, qui a été glorieusement absente, mais c’est son choix, et la commission des finances. Ce groupe de travail a organisé durant plusieurs mois des auditions remarquables pour bien peser les avantages et les inconvénients de la création du RNCP, ou fichier positif.
Je dois dire qu’Alain Fauconnier et Nicole Bonnefoy, qui ont été les plus présents au sein de cette structure, ont effectué un travail remarquable. Vous avez permis, chère collègue Nicole Bonnefoy, de faire évoluer la réflexion. Au vu des réticences initiales légitimes de certains – Gérard Le Cam a évoqué certains arguments tout à l’heure –, on peut dire que le message a été bien reçu et intégré. C’est à la suite de cela que le groupe de travail a opté pour la création du RNCP.
Je ne reviendrai pas sur les associations qui sont au plus près des surendettés et qu’Alain Fauconnier a évoquées : le Secours populaire, le Secours catholique, CRESUS. Il faut également évoquer les banques, aussi surprenant que cela puisse paraître, et en particulier les banques mutualistes. Je pense notamment au Crédit Mutuel, sans faire de publicité. Je pense aussi à la Caisse d’épargne.
M. Alain Fauconnier, rapporteur. La Banque postale !
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Autrement dit, toutes les banques qui n’ont pas une filiale de crédit spécifique. Vous comprendrez ainsi les intérêts qui se cachent derrière certaines positions.
En tout cas, la solution à laquelle nous sommes parvenus me paraît intéressante. Effectivement, monsieur le ministre, toutes les précautions nécessaires ont été prises à l’égard de la CNIL – cet argument nous a aussi été opposé – et vous avez également consulté la Commission nationale consultatives des droits de l’homme. Pour sa part, le Conseil d’État a fait un véritable travail de dentelle sur le texte que vous lui avez présenté. (M. le ministre s’exclame.) Vous l’avez spécifiquement demandé sur cet aspect des choses.
Nous avons abouti à un outil qui servira. Certes, ce ne sera pas la panacée contre le surendettement, mais il aura toute son utilité eu égard au grand nombre de dossiers que nous voyons arriver dans les CCAS, les centres communaux d’action sociale, ces derniers temps.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Mazars, pour explication de vote.
M. Stéphane Mazars. Mon collègue Alain Bertrand l’a précisé lors de la discussion générale, les membres du groupe RDSE ne sont pas fondamentalement hostiles à l’établissement d’un registre national des crédits aux particuliers, ou encore « fichier positif ».
L’ensemble des membres du RDSE partagent, bien évidemment, l’objectif visé par ce registre, qui est de lutter contre le surendettement. Nous sommes favorables à toute mesure allant dans ce sens.
Toutefois, si certains de mes collègues ont déposé un amendement de suppression, c’est parce qu’ils s’interrogent sur l’efficacité du dispositif proposé par le Gouvernement. L’exemple belge, semble-t-il, n’est pas pour les rassurer, puisque depuis la mise en place du fichier positif dans ce pays on assisterait à un effet contraire à celui qui est recherché.
Si certains sénateurs de mon groupe soutiennent la suppression de l’article, c’est surtout parce qu’ils souhaitent disposer d’une étude d’impact sur un sujet aussi important. Or le fichier positif proposé ayant été introduit par voie d’amendement à l’Assemblée nationale, nous ne disposons pas d’une telle étude, qui aurait permis de s’assurer de la réelle efficacité du dispositif et de la proportionnalité de celui-ci.
En outre, avant la présentation de ce projet de loi, le Conseil d’État ou encore la CNIL avaient émis des réserves sur la création d’un tel fichier, notamment au regard du respect des libertés fondamentales, sujet auquel les membres du RDSE sont particulièrement et traditionnellement attachés.
Aussi, plusieurs de mes collègues ont souhaité soutenir les amendements de suppression de l’article.
Pour ma part, fort notamment de mon expérience professionnelle ayant été confronté à de nombreuses reprises à des dossiers de surendettement et, derrière ceux-ci, à des gens surendettés et des familles en détresse, je considère qu’il est urgent de mettre en place un tel registre des crédits, aussi imparfait et perfectible soit-il.
Je tiens à saluer ici le travail important, sérieux et objectif qui a été accompli, notamment par les rapporteurs.
M. le président. La parole est à M. Alain Néri, pour explication de vote.
M. Alain Néri. Je comprends que certains de nos collègues éprouvent des réticences et considèrent que, dès lors qu’un fichier existe, quelques dérives peuvent se produire ; il est vrai que, dans un passé récent, on en a connues.
Cependant, la situation est tellement grave que nous avons aujourd’hui non pas un fichier positif, mais plutôt un fichier négatif, qui ne rend service ni au prêteur ni à l’emprunteur.
À travers la mise en place d’un fichier positif, que l’on peut qualifier de registre, si vous le souhaitez, s’exprime la volonté de protéger ceux qui sont le plus en difficulté. Il s’agit, en quelque sorte, d’un principe de précaution. En effet, beaucoup de nos concitoyens, vous devez comme moi les recevoir dans vos permanences, viennent nous dire qu’ils sont à bout, dans la détresse, qu’ils ne savent plus comment s’en sortir, qu’ils n’arrivent plus à joindre les deux bouts. Je leur demande – je ne veux pas faire de publicité pour les organismes de crédit, ils en font assez tout seuls – : Cofidis, Cofinoga, Finaref, Cetelem ?
En réalité, certains de nos concitoyens sont multicartes. Voilà pourquoi ils sont dans la difficulté. Nous devons protéger nos concitoyens – c’est le rôle de la loi –, en particulier les plus faibles d’entre eux.
Monsieur le ministre, vous avez raison : il faut absolument maintenir le fichier positif, appelé aujourd'hui registre national des crédits aux particuliers.
À ceux qui ont encore quelques doutes – je me tourne du côté de nos collègues du groupe CRC –, je veux dire qu’il faut répondre à la douleur et à la détresse de nos concitoyens par un signal fort. Plus qu’un signal, le fichier positif est une bouée de sauvetage pour les personnes les plus en difficulté dans notre pays.
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier, pour explication de vote.
Mme Évelyne Didier. Je vois bien que notre position dérange. Ce ne fut pas le cas pour toutes les autres positions que nous avons prises tout au long de cette soirée !
Oui, nous avons un positionnement différent. Vous évoquez, cher collègue Néri, nos concitoyens multicartes. Pour notre part, nous préférerions agir au niveau des véritables fautifs, c'est-à-dire de ceux qui proposent les cartes de crédit. Voilà pourquoi nous nous sommes empressés de prévoir des solutions pour contraindre ces organismes plutôt que leurs victimes.
Effectivement, nous craignons le fichage. Nous craignons un jugement d’opportunité sur la dépense des pauvres.
Mme Évelyne Didier. C’est cet aspect de la question qui nous dérange. Certes, certains de nos concitoyens rencontrent de grosses difficultés, mais ils doivent rester malgré tout, bien que pauvres, des personnes libres, libres de leurs dépenses, libres de leurs actes. Ce qu’il faut, c’est les protéger. Or j’ai un peu l’impression qu’on demande ici aux victimes de faire les efforts, et non à ceux qui les plongent dans de telles situations.
Mme Évelyne Didier. Telle est notre appréciation. Si vous avez raison, tant mieux ! Nous verrons ce que donnera cet outil, qui, comme l’a dit M. le ministre, est un outil parmi d’autres. Jusqu’à présent, – nous citions le cas de la Belgique – un tel instrument n’a pas été la panacée.
Nous avons des doutes, nous les exprimons de cette manière. Nous verrons bien. Si nous avons tort, nous le reconnaîtrons.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je rebondis sur ce qui vient d’être dit et je réagirai ensuite à l’intervention de M. Mazars.
La particularité du registre, c’est que, pour la première fois, le prêteur est responsabilisé. Souvent, dans une commission de surendettement, ce dernier s’abrite derrière le mensonge de celui à qui il a prêté de l’argent et qui n’était pas solvable : nous avons eu un entretien d’une demi-heure ; la personne m’a dit qu’elle était solvable ; je lui ai accordé un prêt.
Le prêteur ne pourra dorénavant plus s’abriter derrière cet argument ! (M. le président de la commission des affaires économiques opine.)
Certes, parfois nos compatriotes mentent pour obtenir un crédit de 1 000 ou de 1 500 euros afin de payer leurs factures. Ils plongent alors de plus en plus, sans que rien ne les arrête. Faites l’expérience dans n’importe quel grand centre commercial : en une après-midi, si vous le souhaitez, vous pouvez obtenir dix crédits à la consommation !
M. Alain Néri. Absolument !
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Jusqu’à présent, le banquier n’était pas responsable. Il le devient dès lors qu’il a l’obligation de consulter un registre afin de s’assurer de la solvabilité de son client.
Le prêteur reste ainsi libre de distribuer un crédit et de le vendre, s’il le souhaite, mais cette fois il en prend toute la responsabilité si la personne est surendettée. C’est en ce sens que le registre national des crédits aux particuliers sera plus protecteur que la législation actuelle.
Je retire mon argument de départ, monsieur Le Cam, car ce n’était pas un bon argument : après tout, les associations peuvent se tromper et les banques avoir raison, même si les banques, en l’occurrence celles que j’ai citées, sont défavorables au registre et les associations l’approuvent.
Oublions cet argument. L’impact de ce registre est qu’il permettra de détecter plus tôt le risque de surendettement et donc d’abaisser le niveau moyen des dossiers. En Belgique, le dossier moyen de surendettement est grosso modo de 20 000 euros, contre 40 000 euros en France. Pourquoi ? Parce qu’il existe dans ce pays des mécanismes de détection plus précoce. Or il est plus facile de désendetter une famille à 20 000 euros qu’une famille à 40 000 euros. Ce sera donc moins de casse sociale, moins de gens cabossés, moins de douleurs, moins de blessures ! Déjà 20 000 euros, c’est énorme, mais 40 000 euros, c’est considérable, surtout pour des personnes dans le besoin. Tel est l’objectif visé.
Je veux insister sur un dernier point.
Tout à l'heure, dans un moment qualifié de « mystique » par le président Raffarin, nous avons trouvé un compromis, qui, comme je l’avais dit au départ, repose sur le fait qu’il est important d’avoir un registre. Le registre est en effet un des moyens de lutter contre les fameuses cartes « confuses » : on ne pourra plus distribuer à une personne qui est dans le besoin une carte de fidélité masquant une carte de crédit puisqu’il faudra vérifier sa solvabilité, ce qui responsabilisera le prêteur.
On a donc là un des blocs de ce compromis. Il n’est pas simple de bâtir de tels édifices, morceau après morceau, en devant en appeler au compromis. Mais ce que nous avons voulu faire, ce soir, au Sénat, et que nous sommes sur le point de réussir – à condition, évidemment, que ce registre soit adopté, même si sa création n’est pas un petit miracle qui effacerait le surendettement –, c’est nous doter d’un instrument qui, objectivement, va nous permettre de responsabiliser le prêteur et, ce faisant, de moraliser le marché du crédit à la consommation.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Amen ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Je comprends la position de nos collègues du groupe CRC, et il est légitime qu’ils s’expriment. Pour ma part, je vais voter cet amendement n° 485 car, après les démonstrations qui ont été faites, les arguments, les réflexions qui ont été formulées, et malgré l’aspect éthique, je considère que nous n’avons pas d’autre choix.
Notre collègue Alain Néri évoquait tout à l’heure la publicité qui s’étale partout, qui pousse les gens à consommer, à souscrire des crédits. On a essayé de mettre un terme à la publicité pendant les émissions de télévision réservées aux enfants, de réglementer les grands écrans publicitaires, extrêmement agressifs, mis en place dans les rues. Tout cela, monsieur le ministre, on le laisse passer quand même. Il va falloir que notre pays, que la société occidentale, évolue vers autre chose que la surconsommation de biens matériels qui entraîne une partie de la population dans une situation dramatique.
Je voterai cet amendement, mais avec beaucoup de réserve, parce qu’il est tout de même difficilement acceptable d’aboutir à un fichage.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote.